ami-amant
Je baisse les yeux en évitant précisément ceux de mon ami. Ce serait très humiliant de lui avouer ce qui s'est vraiment passé, comment j'ai réellement eu mes bleus.
— Ne me dis pas que... Liv, il te frappe !?
— non !, M'empressé-je de répondre. Pas souvent.
— pas souvent !? Mais alors c'est bien ce qui s'est passé... Il t'a frappée !?
— non, je mens de façon pittoresque.
Stéphane me montre bien qu'il n'est pas dupe à travers la colère qui commence à se faire sentir sur ses traits repliés.
— Tu sais que c'est grave, Liv.
Je ne réponds rien. De peur d'empirer les choses. Mais en plus je n'ai plus rien à dire face à cette situation absolument humiliante.
— Tu dois porter plainte.
— non c'est bon, n'exagère rien, hein. C'était juste un poing. En plus je te l'ai déjà dit, il n'a pas l'habitude d'être violent avec moi. Ça n'a même jamais été le cas. Hier, il s'est juste laissé emporter. Et puis... Je l'ai bien cherché aussi, il faut l'avouer.
— j'hallucine, là. Tu t'entends parler, Olivia ? Mais qu'est-ce qui t'arrive ? S'il l'a fait une fois ça ne lui coûtera rien de recommencer.
— il ne recommencera pas.
— comment tu peux le savoir ?
— il me l'a promis.
— argh!, S'énerve-t-il en passant une main rageuse dans ses cheveux. J'espérais tout juste que tu ne répondes pas une connerie pareille. Liv, t'es plus maligne que ça bon sang !
Mon égo se dégrade net au moment où il met un point sur sa phrase. J'en ai assez.
— Arrête maintenant, Steph. Tu ne m'aides pas avec tes sermons... Au contraire. Alors je pense qu'il vaudrait mieux qu'on change de sujet.
— mais tu...
— mais rien, le coupé-je. C'est mon corps, ma relation et c'est à moi et moi seule de savoir comment j'en gère les conséquences.
Stéphane soupire en secouant doucement la tête.
— Désolé je... Je ne voulais pas te mettre mal à l'aise. Tu as raison, je ne devrais pas en parler avec autant d'implication, ça ne me concerne pas.
Tout à coup je me sens coupable. Je fais la peste alors qu'il essaye simplement de m'aider et qu'il montre son inquiétude. Je suis vraiment nulle.
— C'est bon... T'excuse pas, c'est à moi de le faire. Tu veux seulement m'aider et... Moi j'en fais des tonnes juste parce que j'ai honte.
Le coin de ses lèvres se soulève en un sourire rassurant.
— Tu n'as pas à avoir honte, voyons. Rien de tout ça n'est ta faute, c'est cet idiot de... Comment il s'appelle déjà ? Connard ?
Je ris.
— Je te l'accorde. Une belle enflure.
Steph émet un rire bref.
— Tu as mis quoi dessus ?
— rien.
Il fronce les sourcils.
— Comment ça, rien ? Tu aurais au moins pu mettre des glaçons.
Il approche sa main et pose quelques doigts sur mon visage. Je fais une grimace.
— C'est encore douloureux ?
— oui, un peu.
— "un peu" ce n'est pas le mot exact je crois. Si tu veux mon avis, la grimace que tu viens de faire signifie beaucoup plus que ça.
Je me pince les lèvres.
— N'empêche, tu es vraiment imprudente, Liv, reprend-t-il.
— mais tu m'aimes quand-même, dis-je avant de lui faire mon sourire le plus niais possible.
Le visage de mon ami devient subitement sérieux et ses yeux se perdent dans les miens.
— Ne me dis pas des choses comme ça, articule t-il d'une voix posée.
Ce n'est qu'à ce moment que je réalise que nous sommes étonnament proches l'un de l'autre et que mon sourire commence à se dissiper au ralenti.
Il se rapproche de plus en plus et noie ses iris dans mes yeux en panique; puis après une fraction de seconde d'hésitation, Stéphane laisse ses lèvres venir s'écraser sur les miennes. Paniquée, je me braque et ouvre grand les yeux. Et alors que mon inconscient commence à trouver le baiser agréable, je me souviens que je ne devrais pas être là. Alors je m'éloigne brusquement en le repoussant.
— Je... je suis vraiment désolé, balbutie-t-il.
— tu n'aurais pas dû, le coupé-je en baissant le regard.
— je sais, je... je ne sais pas ce qui m'a pris...
En feignant la colère, pourtant gênée, je me dirige précipitamment vers la sortie.
Seulement, sur le point de franchir le seuil de la porte, un sentiment indescriptible s'installe en moi - vous savez, ce truc que l'on ressent quand on a peur de regretter quelque chose plus tard ? Exactement. Celui-là.
J'ignore donc comment et à quel moment cette force extérieure s'empare de moi et me ramène en arrière comme si j'étais téléguidée, mais je me retrouve entrain de balancer mon sac à l'ouest, ma veste à l'est, et je me jette follement sur mon ami qui semble encore surpris de me voir faire demi-tour.
Je me mets machinalement à l'embrasser sauvagement et celui-ci ne se fait pas prier pour me recevoir comme il faut dans ses bras; il m'attrape par la taille, me fait basculer en arrière et je finis par me retrouver allongée sur le sofa.
Dans un vicieux désir de mener la cadence, je me redresse de façon à switcher nos places et me mets à califourchon sur lui.
Vous imaginez bien ce qui s'en est suivi, ou vous avez besoin de plus de détails ?
Quelques longues minutes plus tard, notre petite escapade au septième ciel terminée, je me rends compte de tout ce que je viens de remettre en question en couchant avec Stéphane.
Wait, pause! J'ai couché avec Stéphane !?
Oh, bordel !
Faut que je file d'ici illico presto. Et cette fois, plus de retour en arrière, petite idiote.
Je me lève comme une lycéenne le jour de l'examen qui a oublié de programmer son alarme la veille, referme mon pantalon, enfile ma ceinture et ramasse mon sac.
Mais j'ai oublié quelque chose...
Ma veste.
— Où est-ce qu'elle est ? Putain !
— qu'est-ce que tu cherches ?
— ma veste, merde, je ne la trouve plus, grogné-je.
— c'est pas la peine de t'énerver, tu vas forcément la retrouver. Elle n'a pas pu sortir de l'appart' toute seule.
— mais je suis pas énervée, hurlé-je. Je suis juste stressée.
— si tu le dis. Mais alors tu l'es vraiment au plus haut niveau, et je ne comprends pas pourquoi.
— on voit bien que ce n'est pas toi qui vient de tromper ton petit copain agressif.
Un silence gênant succède ma déclaration. Mais pile au moment où je songe à m'excuser, je remarque quelque chose de rose qui dépasse du dessous de la table. Ah, enfin ! Je tire la manche de ma veste pour récupérer cette dernière et l'enfile avant de décamper sans regarder en arrière.
J'arrive à l'appartement, une boule au ventre et les jambes tremblantes. Je file à la douche sans même avoir le temps de me rendre compte de la présence ou non de Yoahn.
Je frotte mon corps avec autant de force que si j'étais tombée dans les égouts. Je lave minutieusement chaque partie, comme si j'essayais de camoufler un crime.
J'ai peur que Yoahn découvre ce qui s'est passé.
Mais il ne le saura pas. Jamais.
Je me frotte une deuxième fois. Plus doucement cette fois, pour ne pas finir par me blesser.
Je mélange les vêtements que je portais dans le linge sale et mets directement le tout à la machine.
Je ne veux pas prendre le risque que Yoahn tombe sur eux par hasard et y sente un parfum autre que le sien; surtout que celui de Stéphane est très fort.
Je finis par sortir de la salle de bain, ma serviette encore attachée autour de ma poitrine et gagne la chambre.
Je déglutis lorsque j'y trouve mon petit ami allongé de tout son long sur le lit, un livre en main, l'air serein – carrément flippant.
Putain, la culpabilité c'est vraiment un sentiment de merde.
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