Edna erre dans l'eau. Elle a froid. Elle a toujours froid...

François est coincé sous un débris de navire. Il pourrait presque trouver cette situation comique. Il est un fantôme, il est évanescent, mais il est tout de même coincé sous quelque chose ! Il ne peut pas bouger !

Edna déambule sans but. Elle pleure des larmes de sang.

Ou est sa mère ? Pourquoi son père n'est pas là ? Et son frère ?

François grogne. Il n'en peut plus !

Edna se retrouve devant un morceau de coque de bateau, qui est traversé par une brume blanche qui gesticule et ronchonne.

Elle ouvre la bouche, veut parler, mais les mots s'emmêlent, s'entortillent et se mêlent dans sa gorge. Elle se tait.

Il fait si froid...

Une chaleur inhabituelle la traverse ; elle se fige. Une extension de la brume blanche du rocher vient de la toucher ; elle a eu enfin de la chaleur !

Elle se rapproche, hésitante. Qu'est ce ?

François, lui aussi, a ressentit quelque chose. Il demande :

- Heummm... bonjour ?

Surprise, Edna rétorque cependant :

- Ou plutôt mauvais, monsieur. Nous sommes coincés sous l'eau et j'ai si froid...

- Pourriez vous m'aider ? Lui demande Francois, sans tenir compte de sa remarque.

- Comment ?

- Je vous avoue que je ne sais pas vraiment... soupire François.

- Puis-je me rapprocher de vous ? J'ai si froid...

Francois se tourne dans tous les sens pour finir nez à nez avec une... fillette. Elle a dix ans, grand maximum. Il éprouve un soudain élan de pitié envers elle. Elle était si jeune pour mourir...

- Oui, bien sur... lui répond-il. Je vous en prie...

Cette jeune fille ne sembla même pas avoir conscience qu'elle est morte, songe-t-il soudain. Elle marche au fond de l'eau, frissonne dans un courant froid... elle devrait flotter et ne rien ressentir. D'ailleurs, lui aussi est un "faux " fantôme. Il était déjà mort quand il fut abandonné dans l'eau. Il a donc une constitution... particulière.

Les autres fantôme se sont empressés de partir de ce lieux maudits ; certains sont restés, obligé selon eux. D'autres n'ont toujours pas pris conscience de leur trépas ; ils restent là, à se lamenter sur leur sort et à ressasser toujours la même chose. La fillette en fait sûrement partie.

François soupire. Essaie, du moins. Il est difficile de perdre quelques habitudes humaines, meme après des mois fantomatiques. Elle aurait l'âge d'être la fille qu'il n'a jamais eu, mais aurait pu avoir, si Cynthia n'était pas morte dans ce tragique accident de calèche.

Dans les yeux des fantômes se reflets la douleur, douleur d'être mort, douleur de la perte des proches, douleur.

Enfin, François comprend. Et il sort doucement du débris de bateau. Il flotte vers elle, puis, prudemment, lui passe un bras autour de ses épaules. Une agréable sensation de chaleur les envahit tous les deux ; et dans un élan, Edna murmure...

- Merci, papa...

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