17 octobre

TW : suicide, protégez-vous.

Un seul lys, une falaise, trois heures.

Ma meilleure amie adorait lui lancer des défis à longueur de temps, souvent avec trois données. Du genre : des cookies, une poêle, une heure. Noélia devait alors se charger de le réaliser : faire des cookies avec une poêle en moins d'une heure.

Ces défis tombaient n'importe quand, n'importe où. Noélia n'avait qu'à lire la notification de Laly et elle savait à quelle sauce on la mangerait. A l'université parfois, elle recevait un message pour lui dire d'aller trouver une bouée gonflable en moins de deux heures avec moins de deux euros de départ. C'était alors la course contre la montre pour le porte à porte à essayer de trouver quelqu'un qui voudrait bien échanger un bonbon contre quelque chose d'un peu plus de valeur, puis de l'échanger aussi jusqu'à atteindre l'objectif en question.

Lorsque Noélia échouait à réussir le défi, Laly devait à son tour le réaliser pour prouver qu'elle y arrivait et qu'elle ne l'avait pas lancé en sachant qu'il était impossible. Jusqu'à présent, elle n'avait jamais failli et la jeune femme brune jouait donc le jeu à fond, provoquant d'innombrables fous rires entre les deux filles.

Cependant, Noélia n'avait jamais reçu de défi accroché à la porte d'entrée de son appartement, sur un post it qui donnait non seulement les consignes, mais aussi un détail : "Dernier défi :" suivi de la phrase "Un seul lys, une falaise, trois heures".

La jeune femme fronça les sourcils et relut le papier, craignant de comprendre. Elle entendait son cœur battre dans ses tempes à mesure qu'elle déchiffrait à nouveau les caractères. Laly, la lys, c'était son surnom depuis la maternelle. Que signifiait la falaise ? Devait-elle l'y emmener ? La rejoindre ? Et pourquoi ?

En études de lettres, la brunette ne put s'empêcher de constater l'emprunt de l'article indéfini "un". Il avait beau être distingué de la masse ensuite, il pouvait exprimer le sentiment d'insignifiance...

Ne pas analyser ta vie comme tes bouquins lui répétait souvent Laly. Mais justement, ne comptait-elle pas sur cette capacité cette fois-ci ? Et depuis quand le post it était-il accroché ? Quel temps lui restait-il des trois heures annoncées ? Et quelle falaise ? Laly adorait les mises en scène, les blagues. La mer n'était qu'à quelques kilomètres. En voiture, elle y serait en peu de temps, bien moins que trois heures... alors ? Et une falaise ? Pourquoi une falaise ?

Son téléphone sonna. Elle décrocha machinalement.

— Allô ?

— Noé, l'arche m'attend.

Noélia faillit lâcher l'appareil.

— Laly, où est-ce que tu es ?

— La falaise de l'enfance, je vais visiter l'arche.

Celle où elles avaient construit leur bateau enfant, à quelques minutes de là.

— Laly, j'ai combien de temps ? suffoqua Noélia en saisissant ses clés.

La voix de son amie n'était pas normale. Quelque chose clochait.

— Quinze secondes.

Les clés touchèrent le sol à grand bruit. Les mains tremblantes, Noélia se baissa.

— La lys, c'est trop court.

— Je sais, fit la voix hachée de sanglots au téléphone. Je sais, je veux que ce soit trop court. Ce n'est pas de ta faute, c'est à moi de réussir le défi maintenant, mais je voulais quand même que tu saches que ce n'était pas de ta faute.

— La lys ! Arrête ça tout de suite ! Si c'est une blague, ce n'est pas drôle.

— Compte avec moi s'il-te-plaît. Sinon, je n'aurai pas le courage. Cinq.

— La lys ! Non ! Arrête ! ARRÊTE !

— Deux. Un. Zéro.

Il y eut un grand silence, un son de surface qu'un corps crève. Le téléphone grésilla. Le silence.



Thème : Un seul lys, une falaise, trois heures.

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