Chapitre 16
Il avait été convenu que Daerôn rejoindrait Ingwé à minuit, pour parler a Hélisha. Ingwé avait l'impression que ce qu'elle lui avait confié était d'une importance capitale pour l'Héritier. Par rapport à cette mission qui pourrait lui permettre d'être libre un jour. Il avait rejoint Jared dans la tour en fin de matinée. Il ne pouvait pas fuir ses responsabilités indéfiniment. Mais il avait besoin de réfléchir à sa situation.
Son double emploi l'en empêchait. C'était ça, la solution qu'Aegnor avait trouver pour le faire entrer dans les rangs. Le Roi voulait l'épuiser pour qu'il arrête de réfléchir, de penser à ce qu'il faisait. Il voulait le transformer en soldat manipulable par la perte de concentration, par l'abus de pouvoir. Ingwé en avait plus qu'assez ! Il devait prendre le temps de réfléchir, de se poser, de s'interroger sur sa vie. C'était vital.
Il fallait qu'il choisisse. Il devait aider Daerôn ou abandonner maintenant. Parce que s'il continuait dans cette voie, il n'y aurait plus de retour possible. Ingwé devait jouer un double jeu franc et non dissimulé. Il savait que cela lui coûterait beaucoup, qu'il devrait faire des sacrifices. La question était de savoir s'il était prêt.
Et puis Ingwé devait aussi choisir quelle attitude adoptée envers Hélisha. Se contenterait-il de la garder comme une victime ? Ou de la sauver comme une jeune femme en détresse ? Dans son esprit, il savait déjà ce qu'il devait faire. Mais quand il la voyait, toutes ses certitudes s'envolaient et il faisait n'importe quoi. Sans le savoir, elle le manipulait. Sauf, que ce genre de manipulation ne le dérangeait pas.
Jared quitta enfin la Tour. Ingwé était désormais seul. Il avait toujours été solitaire. Refusant de se mêler aux autres, de prendre parti, d'assister aux évènements mondains... Il était satisfait de tout cela.
Il regarda les écrans de surveillance plus par automatisme que par sérieux quand, soudain, il vit l'ombre se détacher des roches.
Elle était revenue.
Il enfila sa combinaison d'extérieur pour se protéger des cendres volatiles. Il bascula les écrans sur la Tour Ouest sans leur demander leur avis. Et il descendit vers les rochers salis par le soufre et la poussière. Il devait faire vite. Elle ne venait jamais bien longtemps.
Le sol était glissant par endroits, son pied dérapait souvent comme ça avait été le cas lors de la première sortie. Il mit ses mains en visière pour garder une vision nette de son environnement. Il sentait déjà la chaleur le rendre moite, mais il avait l'habitude. L'atmosphère était toujours chaude et pesante sur Kalisto.
Ingwé arriva finalement à l'endroit où il avait vu l'intruse sur les écrans. Il était essoufflé et avait certainement inhalé du soufre. Il tourna sur lui-même plusieurs fois avant de se rendre compte qu'elle n'était pas là. Avançant encore, pour être sûr, il espérait qu'elle ne s'était pas enfuie. Il sentait une présence derrière lui, mais ne parvenait pas à la trouver. Soudain, une main lui couvrit la bouche et un objet pointu l'obligea à se cambrer en arrière. Un coup porté à sa tempe l'obligea à fermer les yeux.
*
Le sol était chaud, brûlant. Une lumière vive empêchait Ingwé d'ouvrir les yeux. Il y avait des choses durs qui venait lui piquer les pieds et les joues. Il avait beau se débattre, il n'arrivait pas à se réveiller. Il avait énormément mal au crâne. Comme si quelqu'un avait pris son cerveau pour le remettre à l'envers.
Et puis quelqu'un cria dans une sorte de hurlement animal et les pics désagréables s'arrêtèrent. Ingwé sentit immédiatement deux mains glaciales couvrirent ses oreilles. Et dans ce silence bienvenu, il put enfin ouvrir les yeux.
Devant lui, des dizaines d'oiseaux gris et noir l'observaient en penchant la tête d'un côté puis de l'autre. Des Valkos. Il recula de surprise. Comment s'était-il retrouvé ici ? Il ne se souvenait de rien, mais avait terriblement mal à la tête. Des mains prirent son visage à nouveau. La sœur de Daerôn...
- Qu'est-ce que...
- Chut ! Dit-elle en lui mettant un doigt sur les lèvres. Ne dis rien ! Tu vas les effrayer.
Il fronça les sourcils. Elle leva la tête vers les oiseaux et montra ses dents en faisant des bruits de caquètement. L'oiseau en face d'elle, sembla lui répondre.
- Je suis désolée. Reprit-elle. J'ai dû t'emmener avec moi. Il y avait une navette de surveillance qui venait vers nous.
- Une navette ? C'est à dire ?
- Ce sont ces gens qui disparaissent et réapparaissent à des endroits improbables. Ils sont tout le temps-là.
Elle voulait parler des Cendractiens ? Les habitants de Cendracte ? Ils peuvent se télé-porter. Ce sont leurs alliés, mais Ingwé n'avait jamais entendu parler de navettes ! Qu'est-ce que cela voulait dire ?
- Je voulais parler à Daerôn...
- Où suis-je exactement ? Demanda-t-il en se relevant, mais un oiseau posa sa lourde patte sur son buste.
- Tu n'as pas envie de le savoir. Dit-elle en le toisant du regard.
- Qu'est-ce que tu sais de ces navettes ? Demanda-t-il intrigué.
Elle sourit puis releva la tête pleine d'assurance. Ingwé pouvait clairement voir ses yeux oranges, et ses cheveux, aussi noirs que ceux de son frère.
- Une réponse contre une autre. Où est Daerôn ?
Cette fille aurait pu travailler pour le Roi tellement elle était maligne et sournoise. Elle savait ce qu'elle voulait.
- Marché conclu. Déclara-t-il en se frappant la poitrine comme on en avait la coutume parmi les soldats. Daerôn est au palais. Il étudie les possibilités pour te reloger toi et... tes amis.
Elle plissa les yeux comme pour sonder sa réponse. Pour déterminer si elle la jaugeait à son goût. Ingwé haussa les sourcils. Lui aussi, attendait une réponse.
- Les navettes, elles font des rondes. Elles apparaissent à l'aube dans une grande porte en forme d'arche et elle repartent deux jours plus tard. Et elles poursuivent le même manège sans arrêt. On dirait qu'elle surveille des choses ou des gens. Quelle est la piste de Daerôn ?
- Il y a peut-être une possibilité vers le berceau de Feu au sud Est du château, dans les collines rocheuses. Ces navettes, qu'est-ce qu'elle surveillent ? Tu as une idée, n'est-ce-pas ?
- J'ai toujours plein d'idées. Répondit-elle en croisant les bras.
Ingwé détourna le regard, gêné. Il avait remarqué qu'il lui manquait aussi les doigts aux extrémités de ses mains. Elle sourit puis reprit.
- On dirait qu'elles surveillent ces stupides soldats. Sans vouloir t'offenser. Comme si elles s'assuraient qu'ils font bien leur travail. Comme si elles voulaient que vous restiez bien sagement dans votre cage. Quand la voie sera-t-elle libre ?
La respiration d'Ingwé se stoppa et son cerveau se mit à tourner à plein régime. Liwya lui donna un coup dans les côtes pour qu'il puisse parler à son tour. La patience ne semblait pas être sa plus grande qualité.
- Daerôn est en train de se renseigner pour que vous vous déplaciez sans être vu.
Il devait trouver quelque chose de plus. Il savait qu'une fois qu'elle aurait tous les renseignements dont elle avait besoin, elle arrêterait de répondre à ses questions.
- Mais ça risque d'être compliqué. Reprit-il
-Pourquoi ? Grogna t-elle.
- Je suis responsable de la surveillance de la barrière. Si tu n'as pas envie d'être vue, il va falloir que tu répondes à une dernière question.
Elle soupira d'exaspération. Ingwé pouvait lire de la curiosité dans ses yeux. Lui aussi savait négocier.
- Marché conclu. Dit-elle en crachant au sol.
Certainement, sa façon à elle de sceller un pacte.
- Quand tu parles de cage, tu penses à quoi exactement ?
Il savait à quoi, elle pensait, en réalité. Mais il avait trop peur de mettre des mots sur ses doutes. Il avait besoin d'un avis vraiment extérieur. D'une personne qui s'était émancipée de la société cruelle d'Aegnor.
Elle se rapprocha tellement près qu'il put sentir son haleine gorgée de sang.
- A ton avis ? Tu n'as jamais pensé que la barrière n'était pas faite pour vous protéger, mais pour vous empêcher de sortir ?
Ingwé n'osa pas répondre pendant plusieurs secondes. En vérité, il y avait déjà songé. Mais il s'était stoppé à l'époque. C'était dangereux pour sa carrière d'avoir ce genre de réfléxion. Maintenant, il en était autant convaincu qu'elle.
- Ça te fait un choc, petit chou ? Dit-elle en riant. Je remercie tous les jours, ces oiseaux bienveillants de m'avoir arraché à l'emprise de mon père !
Ingwé ne répondit rien. En fait, il était plutôt d'accord avec elle. Il fallait absolument qu'il rentre à la tour pour réfléchir à ces révélations.
- Ecoute. Dès que Daerôn aura trouvé une solution, il reviendra vers toi. En attendant, je dois reprendre mon poste. Dis-moi où je me trouve !
- Certainement pas ! Tu vas rentrer comme tu es venu.
Il n'eut même pas le temps de répondre que déjà elle prit une roche entre ses mains. Il se doutait de comment ça allait se terminer. Il ne cria pas ; A quoi bon ? Les Valkos auraient pris un malin plaisir de lui crever les yeux pour se défendre. Ils étaient tellement terrifiés pendant sa conversation avec leur fille adoptive qu'ils avaient été constamment prêts à l'écraser sous leurs pattes.
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Hello les lecteurs--lectrices !
Voici un nouveau chapitre !
J'espère qu'il vous plaît !
Est ce que vous êtes bientôt en vacances ?
Moi oui ! Dès Samedi héhé
Passez une bonne fin de semaine !
Holly
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