Chapitre 2 - Grosse frayeur
*réécrit le 30.03.22*
Entendant ma rame arriver au loin je me mis à courir dans le couloir carrelé et l'attrapais de justesse. Légèrement essoufflée j'allais m'assoir sur l'un des sièges libres côté fenêtre, même si tout ce que l'on apercevait n'était que des lueurs rouges sur fond de ténèbres. J'avais toujours trouvé que vingt-trois heures était la meilleure heure pour prendre le métro. Encore suffisamment de monde pour se sentir en sécurité mais plus assez pour se sentir étouffé.
Pourtant, ce soir, je me sentais étrangement nerveuse tandis que le wagon m'entraînait en bringuebalant dans les tunnels obscurs. Même si je ne l'avais pas avoué à Bianca, l'approche du tirage au sort m'inquiétais presque autant qu'elle. Aurais-je la chance d'en faire partie ? Ou, au contraire, serais-je au nombre des laissés pour compte, pas assez jeunes ou exceptionnels pour avoir une chance de faire partie du voyage ? On savait déjà que toutes les personnes de plus de quarante ans, celles ayant des maladies génétiques ou chroniques, ou des problèmes avérés de fertilités, ne feraient pas partie de la sélection. Pour tous les autres, âgés de douze à quarante ans, nous avions dû nous soumettre à un check-up complet obligatoire, dont les résultats étaient demeurés parfaitement confidentiels et connus des seuls sélectionneurs. J'étais jeune et me sentais en parfaite santé, mais rien ne disait que je ne souffrais pas d'une tare génétique inconnue ?
Pourtant, l'idée de dépendre des compétences et des choix d'une personne que je ne connaissais pas et avec laquelle je serais liée par le hasard, n'était pas beaucoup plus tentant que d'être oubliée sur cette planète polluée. Ma vie n'avait jamais été très simple, comme pour tous ceux qui vivotaient sur ce cailloux en perdition, et pourtant je ne faisais pas partie des plus à plaindre.
C'était plutôt cette crainte, cette tension constante, ce sentiment d'inéluctabilité qui pesait sur les âmes, sans doute encore plus que les catastrophes, les pénuries et l'air pollué. Comment se projeter dans un avenir qui n'existerait peut-être jamais ? pensai-je dans un accès de déprime alors que la rame ralentissait à l'approche de mon arrêt dans un grincement d'essieux martyrisés. Je descendis, le cœur lourd, accompagnée de deux personnes au teint gris et au regard éteint qui se pressèrent vers la sortie nord, tandis que je me dirigeais vers la sud. Mes pas résonnaient dans le tunnel carrelé exhalant les habituelles odeurs d'urine et de renfermé, rythmant mon avancée rapide.
Perdue dans mes pensées moroses, j'oubliai d'éviter les carreaux descellés au détour d'un tournant et trébuchai en me tordant la cheville. Dans un juron je m'arrêtai, me mettant à masser le point douloureux et c'est alors que je les entendis... des bruits de pas. Son furtif et ténu qui cessa presque aussitôt, mais j'étais pourtant certaine de ne pas avoir rêvé
Mon cœur se mit à accélérer brusquement. Est-ce qu'on me suivait ? me demandai-je en jetant des coups d'œil anxieux autour de moi. Le tunnel désert me parut tout à coup plus angoissant et mal éclairé que quelques secondes auparavant. Un vieux papier voleta, soulevé par un filet d'air vicié et je sursautai, le cœur au bord des lèvres. Soudain tremblante, je m'appuyai avec précaution sur ma cheville meurtrie et avançai de quelques pas. Durant une fraction de seconde je cru avoir rêvé, mais les pas fantômes résonnèrent de nouveau dans le boyau assombri ruinant tous mes espoirs. Sans réfléchir je me mis à courir. Ma cheville me faisait mal et je n'avançais pas très vite mais c'était plus fort que moi. La sortie était proche et à cette heure, il y aurait encore du monde dans les rues. Plus que quelques mètres et je serais à l'abri me répétai-je comme un mantra en accélérant encore l'allure.
Les pas de l'inconnu se calquèrent sur les miens lorsqu'il se mit à courir à son tour sans plus aucun soucis de discrétion. Mon sac tressautait sur mon épaule et ma respiration était hachée par l'effort et le stress lorsque j'arrivai au dernier coude du tunnel. Après celui-ci, plus qu'une ligne droite avant la sortie, me répétai-je en luttant contre la douleur. Aiguillonnée par la peur je négociai le virage un peu trop vite et ma cheville meurtrie lâcha me projetant contre le mur. Je me rattrapai comme je pus, m'égratignant la main au passage sur un carreau cassé. Les larmes aux yeux, je repris néanmoins ma course, sentant presque le souffle de l'homme sur ma nuque.
Hors d'haleine, je sautai par-dessus le tourniquet presque sans réfléchir et dérapai une fois de plus sur le sol humide en direction de la sortie. En vue des marches menant vers l'extérieur, mon espoir renaquit, me redonnant la force qui commençait à me manquer. Je n'étais plus qu'à trois mètres de la première marche lorsque deux hommes sortirent d'un tunnel adjacent et vinrent se poster devant la sortie, m'en interdisant l'accés. Désespérée je me retournai, prête à retenter ma chance dans l'autre sens mais deux autres silhouettes déboulèrent du boyau que je venais de quitter, me prenant en tenaille et me coupant toute retraite.
— Mademoiselle Richard ? me demanda soudain l'un des hommes, me forçant de nouveau à me retourner.
De plus en plus mal à l'aise, je déglutis, ne sachant si je devais répondre ou non. Que me voulait ces types et comment connaissent-ils mon nom ? L'homme de gauche, celui qui avait parlé, me fixait tranquillement, son attitude calme et son ton poli ne cadrant pas du tout avec ses vêtements noirs et l'arme menaçante qu'il portait à la ceinture.
— Cléophée Richard ? insista-t-il au bout de quelques secondes, voyant que je ne répondais pas.
— Il y a un problème ? finis-je par coasser d'une voix flageolante et tendue.
— Nous allons juste vous demander de nous suivre.
— Pourquoi ?
La question fusa si vite que je n'eus même pas le temps de la retenir.
— Parce qu'on vous l'ordonne, me répondit l'homme de droite d'un ton beaucoup moins aimable en posant sa main sur la crosse de son arme.
Mes battements de cœur accélèrent encore tandis que la panique tentait de me submerger. Je devais réfléchir, me calmer, essayer de les raisonner, me dis-je en pivotant vers mes deux poursuivants. Souffles encore court, regards de tueurs et mains sur la crosse de leurs armes, il n'y avait aucune aide à attendre de ce côté-là.
— Qui êtes-vous ? leur criai-je en désespoir de cause. La police ? Si c'est le cas, je n'ai rien fait de mal et si non, je n'ai pas à vous suivre ! lançai-je avec le peu de courage qu'il me restait.
— Les explications viendront ultérieurement, me répondit de nouveau le premier homme d'un ton plus sec. Vous pouvez nous suivre de votre plein gré... ou non, c'est à vous de voir.
Ces trois compères, dans un mouvement fluide et simultané que j'aurais sans doute trouvé beau dans d'autres circonstances, dégainèrent me mettant en joue sans un mot. Les mots que j'allais prononcer restèrent coincés dans ma gorge. Ils n'avaient pas l'air de plaisanter, compris-je en croisant leurs regards froids et déterminés. Le plus intelligent était encore de les suivre, me résignai-je en avalant difficilement ma salive. Qui sait, une fois à l'extérieur j'aurais peut-être la possibilité de leur fausser compagnie ?
Me raccrochant à cet espoir, je finis par approuver d'un mouvement de tête raide en m'avançant d'un pas. Les quatre hommes m'encadrèrent aussitôt et m'entraînèrent vers l'escalier d'une démarche saccadée typique des militaires. En haut des marches, nous fumes accueillit par une bruine collante et six autres hommes qui attendaient, ruinant mes maigres espoirs de tentative d'évasion. La rue, d'ordinaire animée même à cette heure de la nuit, était étrangement déserte et une grosse voiture noire attendait devant la sortie du métro. D'un geste vif, l'un des hommes en noir ouvrit la portière arrière tandis qu'un autre me poussait en avant. N'ayant d'autre choix, je grimpai dans l'habitacle, la gorge de plus en plus noué et le cœur battant la chamade.
À l'intérieur cela sentait le cuir et le désodorisant de luxe. Du cuir blanc, du bois précieux et deux banquettes blanche se faisant face. Je me glissai sur celle de gauche, l'autre étant déjà occupé par un homme qui m'accueillit d'un sourire maniéré. J'eu à peine le temps de le regarder ni même de m'assoir que la portière claquait et que la voiture démarrait aussitôt, me plaquant contre la portière.
— Bonjour Mademoiselle Richard et bienvenue dans les « douze ».
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Coucou !
Comme les chapitres ne sont plus raccord, du coup, je vais supprimer les suivants le temps de les réécrire. Je posterai certainement les deux prochains demain :-) Très bonne soirée ^.^ Kissss <3 <3 <3
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