Chapitre 13 - Réveil difficile


Se furent les néons réglés à pleine puissance, accompagnés d'une horrible sonnerie stridente, qui nous réveillèrent en sursaut quelques heures plus tard. Surprise, je me cognai la tête sur la couchette du haut en me redressant brusquement. Le front douloureux, les yeux fermés et la tête bourdonnante, c'est à tâtons que je m'extirpai du lit avec la sensation d'être plus fatiguée que lorsque je m'étais couchée. Le cœur battant la chamade et les yeux larmoyants, je finis par m'assoir au bord du matelas, complétement désorientée par ce réveil brutal.

— Non mais ils sont malades, gémit Ichi d'une voix étouffée par la couverture qu'elle avait rabattu sur sa tête.

— Messages ou pas, on ne pouvait pas le rater, leur réveil, marmonnai-je en me dirigeant d'un pas chancelant vers la salle de bain.

Une fois mes dents brossées et mon visage aspergé d'eau fraiche, je me sentais déjà mieux. Voir même assez alerte pour m'attaquer à la broussaille qu'étaient devenus mes cheveux. Ça m'apprendrait à me coucher sans les sécher, me dis-je en essayant d'introduire les dents du peigne dans la masse emmêlée.

— Tu auras peut-être moins de mal avec ça, me dit Ichi d'une voix encore endormie en me tendant sa brosse.

J'eus beau m'acharner, le résultat était encore plus pathétique après qu'avant. En désespoir de cause, j'allais repêcher un élastique dans le fond de mon sac et improvisai un chignon lâche qui ferait l'affaire. Nous nous changeâmes à tour de rôle et à 6H25 pile, nous étions prêtes. Comme deux bons petits soldats, ne pus-je m'empêcher de grimacer intérieurement.

— Tu crois qu'on peut y aller ? me demanda Ichi en lissant nerveusement ses cheveux parfaits de ses mains tremblantes.

Pour toute réponse, je m'approchai de la porte qui s'ouvrit dans un chuintement devenu très vite familier. Dans le couloir nous croisâmes Karim qui sortait seul de la chambre d'en face. Il ne nous adressa ni un regard ni un bonjour, nous passant devant comme si nous n'existions pas. Aucune trace de Jayden, ni de personne d'autre d'ailleurs, tandis que nous rejoignions l'oasis.

Le bruit de l'eau m'apaisa instantanément et je m'arrêtai même quelques secondes pour contempler les poissons indolents dans l'eau cristalline.

— Cléo, dépêche-toi ! On va être en retard, me souffla Ichi quelques mètres plus loin, d'une voix stressée.

C'était peut-être idiot mais ce matin, je me sentais l'âme d'une rebelle. Je crois qu'inconsciemment j'essayai d'arriver en retard pour voir leur réaction. C'est alors que le souvenir du regard affolé du jeune homme suivit de la détonation, me percuta brusquement. J'avais déjà eu un aperçu de leurs méthodes, réalisai-je en rejoignant la jeune femme et même si je ne les voyais pas utiliser des manières aussi expéditives ici, ce rappel fut assez efficace pour me faire accélérer le pas.

— Qu'est-ce que tu faisais ? On va être en retard !

— Ne stress pas tant Ichi, c'est mauvais pour le teint ! lui balança Lucia en nous doublant.

Ichi lui répondit par une grimace qu'elle ne vit pas tandis que nous la suivions dans le hall. La plupart des participants était là mais bien qu'il soit six heure tapante, personne n'était encore entré dans la salle. Un peu à l'écart, nonchalamment assis sur l'accoudoir d'un fauteuil, Jayden nous fit signe dès qu'il nous aperçut. Nous arrivions à sa hauteur lorsque Kate nous invita à entrer d'une voix agacée.

— Pas besoin d'attendre dans le hall, disait-elle en nous précédant à l'intérieur.

— Il fallait peut-être être un peu plus clair... comme sur tout le reste ! répondit quelqu'un d'un ton moqueur.

Kate, visiblement piqué au vif, se retourna brusquement cherchant à déterminer qui venait de parler. C'est cet instant que choisirent Arthur et son binôme pour entrer dans la salle au pas de course.

— Si demain matin, il y a encore des retardataires, ils seront sanctionnés et se passeront de petit déjeuner ! J'espère que c'est assez clair pour tout le monde !

— Qu'est-ce qu'elle a ce matin ? maugréa quelqu'un alors que nous allions nous installer à la même table que la vielle au soir.

Arborant un pantalon de yoga noir et un tee-shirt blanc, elle semblait avoir perdu toute sa bonne humeur dans la nuit. Aujourd'hui plus de sourire jusqu'aux oreilles et de messages enjoués de bienvenue. Elle attendit que tout le monde soit installé, puis nous invita à aller nous servir d'un ton réfrigérant, nous indiquant qu'il ne nous restait plus que dix minutes.

Le buffet, tout comme le sourire de Kate, avait fondu comme neige au soleil durant la nuit. Au menu, une seule sorte de céréale, des toasts racornis et des œufs durs. Comme je n'avais pas très faim et que rien ne me tentait vraiment, je me servis un mug de café et me résolu à prendre un toast accompagné de confiture de fraise, la seule disponible.

— C'est tout de suite moins royal, ce matin ! ironisa Jay en contemplant son assiette d'un air morne.

— Apparemment il y a eu un soucis en cuisine, souffla Arthur en revenant à leur table, un bol de céréale entre les mains.

— C'est sans doute pour ça que Kate est de mauvaise humeur, commenta Ichi en buvant son thé.

— Comment tu sais ça ? demanda Jay, surpris.

— J'ai entendu Kate qui se disputait avec quelqu'un au téléphone. L'avantage d'être moi, c'est qu'en général, personne ne me remarque, ajouta-t-il en rougissant, le nez dans son bol.

— Bien joué ! le félicita Jay avec un petit clin d'œil. En fait, tu es un ninja, c'est ça ? Tu caches simplement bien ton jeu.

Arthur pouffa et manqua s'étouffer lorsqu'il avala une céréale de travers, attirant tous les regards de la salle sur notre table.

— C'est tout ce que tu manges ? me demanda Jayden en avisant ma tasse presque pleine et ma tartine à peine entamée.

— Je n'ai pas très faim. Cela ira sans doute mieux quand nous saurons enfin pourquoi on est ici, maugréai-je la gorge presque aussi nouée que mon estomac.

— Justement, on ne sait pas ce qui nous attends, tu devrais manger.

Consciente qu'il avait raison, je pris une nouvelle gorgée de café que j'eus du mal à avaler. Le bracelet, qui semblait à présent pulser au rythme de mon cœur, accentuait mon malaise, me forçant à abandonner tout idée de nourriture. Je passai les minutes restantes à regarder les autres terminer leur repas spartiate sans beaucoup d'entrain. Lorsque tout le monde eu reposer ses couverts ou repousser son mug, Kate nous invita à la suivre une nouvelle fois dans le hall où deux gardes à la mine fermée et sinistre nous attendaient.

Sentant la pression monter à chaque pas, nous les suivîmes à travers l'oasis jusqu'à la porte située à gauche de la salle. L'accès, condamné par une serrure magnétique nécessitait un pass que Kate présenta devant le lecteur. De l'autre côté les couloirs étaient plus larges et l'éclairage plus prononcé. Nous nous laissâmes guider, toujours en silence, jusqu'à une double porte située au bout d'un couloir perpendiculaire. Ici ni code ou serrure d'aucune sorte, juste des portes battantes basique que l'un des gardes poussa d'un geste énergique.

La salle dans laquelle nous pénétrâmes ressemblait vaguement à un gymnase, les gradins en moins. A la place, douze chaises avaient été disposées au centre de la pièce, rangées en trois rangs de quatre, devant une estrade où se tenait trois personnes en uniformes bleus. Parmis elles se trouvaient Davis et Jessica mais je ne connaissais pas la femme sur la gauche. Les gardes nous firent signes de nous arrêter au niveau du dernier rang de chaises et le capitaine Davis s'avança.

— Ce matin, comme convenu, nous allons vous présenter le programme. Les spécificités vous seront expliquées par le docteur Jun, plus compétente que moi pour les considérations techniques, débita Davis d'un ton de robot avant de nous inviter à prendre place sur les chaises d'un geste de la main.

Après un court instant de flottement, tout le monde se précipita sur les sièges du fond. Jayden ayant anticipé la cohue digne d'un début de primaire, nous eûmes des places à l'avant dernier rang. Chacun dans notre rangée, en rang d'oignions, nous avions l'air vraiment ridicule, parqués au milieu de cette grande salle vide. Pourtant, les regards tournés vers la femme qui s'avançait étaient avides, concentrés et fébriles. Nous allions enfin savoir de quoi il retournait vraiment... du moins je l'espérais.

La femme s'éclaircie la gorge, lissa inutilement ses cheveux noirs déjà impeccable et après une grande inspiration, leva enfin son visage vers nous.

— Bonjour à toutes et à tous, commença-t-elle d'une voix bien timbrée, teintée d'un léger accent. Je m'appelle Emily Jun et je fais partie de l'équipe de recherche du projet Infinity. Comme j'ai conscience que tout cela doit être très mystérieux et stressant pour vous, je ne vais pas tourner autour du pot.

« Ce n'est pas trop tôt ! », « Il était temps ! », « Enfin ! », entendis-je marmonner de toute part alors que certains commençaient à s'agiter sur leur sièges.

— Vous savez tous que grâce à la découverte du concept de déplacement spatio-temporel, nous avons trouvé douze planètes, susceptibles d'abriter des colonies humaines, commença-t-elle sous les grommèlements agacés d'une partie de l'assistance. Ce que vous ne savez pas, en revanche, c'est que cette découverte n'a pas été faite il y a cinq ans comme les médias l'ont relayé mais date, en réalité, d'une bonne trentaine d'années.

— Pourquoi attendre aussi longtemps ?

La question de Lucia, presque accusatrice, résonna étrangement après le silence interloqué ayant suivit ses paroles.

— Parce que vous n'étiez pas nés. 

__________

Désolée pour cette longue attente mais nous finalisions les corrections du tome 1 de ma dystopie "Isolated System", qui sortira bientôt ^.^ L'écriture de Infinity devrait prendre un rythme plus régulier maintenant et l'écriture du tome 2 de "Elemental" ne devrait plus tarder à débuter ^.^ 

A très vite sur la suite :-)

 Kisssss <3 <3 <3 

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