CHAPITRE 14
« Trois ans plus tôt...
Trois mois c'est le temps qu'il m'a fallu pour sortir de la maison. Papa été tellement fier et content de voir que je reprenais du poil de la bête. Je l'étais aussi, un peu. J'étais moins enthousiaste que lui, mais il fallait dire que ça l'avait fait galérer tout ça. J'avais repris deux kilos et j'avais rattrapé un peu mes cours grâce à la bienveillance de mes professeurs qui étaient venus me rendre visite. J'avais encore des nausées, des sautes d'humeur, mais ça allait mieux, je faisais en sorte de sortir la tête de l'eau pour ne pas les laisser gagner. Ma copine Mandy était venue plusieurs fois me voir, pour parler me soutenir, m'aider. Contrairement à beaucoup d'autres, elle ne m'avait pas laissé tomber. C'est elle qui est venue me chercher et papa était très content, il m'a dit que je pouvais rentrer à l'heure que je voulais et que s'il y avait quelque chose il serait à la maison et que je pouvais l'appeler pour quoi que ce soit.
Je suis sortie. Sur la route le stress est monté, mais j'ai pris sur moi pour ne pas être lourde vis-à-vis de Mandy pourtant, j'ai senti un truc bizarre. J'ai compris en entrant chez Mandy que quelque chose n'allait pas. Elle avait une voix bizarre, un air faussement gentil, une allure étrange. Elle m'a invitée à monter dans sa chambre. J'ai refusé alors les filles qui m'attendaient en haut pour me faire une "surprise" sont descendues. Elles étaient nombreuses. 6 ou 7... je n'ai pas vraiment fait attention, déjà à 3 contre 1 il y a un problème, alors plus de 7, inutile de compter pour savoir que la note allait être salée et que j'allais passer un sale quart d'heure.
Ces "salopes", je les connaissais toutes, elles étaient de mon lycée, dans ma classe pour certaines, d'autres dans des cours en commun. Je n'ai pas réagi à temps. J'avais un peu de mal avec mes réflexes. Et puis, je n'ai pas compris pourquoi j'étais devenue un paria de cette manière. Normalement les gens étaient gentils, avaient pitié, ici ils me détestaient et me haïssaient pour une chose que j'avais subie et que je ne souhaitais à personne. Elles m'ont défoncé la tête en me traitant de tous les noms, en me disant que je méritais ce qui m'était arrivé et elles m'ont montré la vidéo que je connaissais si bien en riant fort. La self-défense que j'avais apprise au boulot de mon père ne m'a pas aidé, elles étaient trop nombreuses pour moi et même si j'arrivais à me débattre de temps en temps, j'ai fini par me faire acculer. Je n'aurais souhaité à personne ni à mon pire ennemi de vivre le calvaire qui m'attirait chaque jour vers le fond, mais je leur ai souhaité, car je ne méritais pas mon sort ni l'acharnement qu'il y avait autour de moi pour un type qui... des types qui... peu importe, pour ces putains d'enfoirés de merde.
Quand elles ont décidé que je n'étais plus qu'un vieux jouet qui avait assez subi, elles m'ont jeté dans le jardin, ont allumé l'arrosage automatique et m'ont promis de me faire le "baiser de l'ange" si je racontais ce qui m'était arrivé, puis elles sont rentrées en ricanant comme des hyènes. Je me suis redressé et j'ai avancé vers la ville avant de rentrer à la maison.
Je n'ai plus pensé qu'à une série de choses aussi morbides les unes que les autres. Le vide et le silence qui entraînaient le calme qui lui amenait la paix... je n'avais qu'une seule option en tête pour ne plus subir, pour ne plus entendre ni voir tout ça. Une solution radicale qui m'est apparue comme une solution divine qui m'empêcherait de souffrir. J'allais mourir, je voulais mourir. J'en avais marre, j'étais épuisée, vidée, malheureuse. Je ne savais plus quoi faire pour être en paix, pour ne plus côtoyer ce monde horrible. Cette solution était la seule option.
J'étais décidée, résignée... autant qu'on peut l'être à dix-sept ans après avoir été bafouée, violée, tabassée. J'étais seule, infiniment seule. J'ai voulu me mettre à pleurer, mais je me suis rendu compte que j'étais haineuse et vide. Tellement vide que mes larmes ne coulaient pas alors que j'avais soif de le faire, alors que j'en avais besoin. Lorsque j'ai décidé de le faire, je n'ai pas choisi la manière la plus courageuse ni la plus rapide ni la plus expéditive. Non, j'ai choisi la manière la plus lâche, la plus facile pour une fille de mon âge.
Le pharmacien n'a même pas calculé que j'avais l'air d'une morte, que j'étais trempée, que j'avais été tabassée par une horde de chiennes frustrées et que j'avais la lèvre ouverte et l'arcade en sang. Il m'a vendu des anxiolytiques sans prendre le temps de me regarder dans les yeux, il a juste accepté mon billet tout en continuant de parler au téléphone. Je suis ensuite passée par la supérette ouverte toute la nuit et j'ai pris une bouteille d'alcool. La vendeuse aussi paumée que fatiguée n'a rien vu non plus ou si, mais elle a décidé que ce n'était pas ses affaires. Quelque part, c'était normal. Papa dormait dans sa chambre, il se faisait tellement de soucis que me voir sortir lui avait fait du bien et l'avait mis K.O, je l'ai embrassé doucement et je me suis enfermé dans la mienne. Je n'ai pas écris pour expliquer le pourquoi du comment, ma tête voulait tout dire, je n'avais pas envie d'expliquer les raisons de mon acte, elles étaient nombreuses et merde. J'ai éparpillé les médicaments sur mon lit et je les aie fixés un long moment avant de commencer à les gober en buvant une affreuse vodka a moins de 5 $ qui m'arrachait la gorge.
Je n'ai pas arrêté, je n'ai pas eu de prise de conscience, je n'ai pas réussi, j'ai continué jusqu'à ce que je me sente faible, jusqu'à ce que je me sente pleine. Alors je me suis couché sur le lit en fixant les petites étoiles au plafond que j'avais accroché avec papa et maman quand j'étais petite. Et, je me suis sentie partir, mes paupières m'ont paru tellement lourdes que j'ai fermé les yeux, mon ventre m'a fait mal, mais mon corps lourd a engourdi la douleur. Alors, je me suis laissé mourir. »
Oh, putain ! Je me redressai en sursaut, je posai mon ordinateur qui par miracle durant mon sommeil n'était pas tombé, sur la table basse puis j'attrapai mon téléphone pour regarder l'heure.
Merde ! J'étais en retard. Merde, merde, merde... j'étais même carrément en retard pour mon cours.
Je m'étais endormi en fin d'après-midi en bossant sur mon dossier à rendre. Et merde, j'étais gravement en retard. J'enfilai mes chaussures à l'arrache, attachai mes cheveux en un chignon à la limite du dégueulasse puis j'attrapai une petite bouteille d'eau que je collais contre mon front puis mes joues pour faire partir le coup de chaud et la sueur qui ruisselait sur mon visage. Mauvais rêve... très mauvais rêve. Un cauchemar. Putain, j'allais arriver en cours avec une gueule à faire peur, ce rêve merdique ne voulait pas partir, et ce malgré le fait que j'étais bel et bien réveillé. Mon père disait que la peur était résiduelle, il disait aussi qu'à ne pas y faire face elle surgissait comme bon lui semblait. J'ignorais de quoi j'avais peur réellement. De la vie peut-être et de moi-même, car j'étais consciente et je n'arrivais pas à oublier. La vie me faisait plus peur que la mort. La mort était un mot de quatre lettres, qui faisait pourtant réagir à tous les coups... Parce que la « mort » était associée à la « fin » et que l'être humain n'aimait pas ce qui se terminait, ce qui lui était inconnu et qui impliquait le « vide ». Nous étions dotés de plusieurs capacités intellectuelles dont celles de l'analyse, du raisonnement et de la résolution de problèmes... mais, la fin de vie demeurait « sans solution intellectuelle ni physique »... nous n'y pouvions rien et elle demeurait une certitude... je n'avais pas eu peur de me faire du mal ni de me suicider, j'avais eu peur de continuer à vivre et quand j'avais ouvert les yeux, mon calvaire ne s'était pas apaisé.
Je bus une gorgée d'eau. Penser à autre chose ! Penser à autre chose ! Penser à autre chose... trop tard, comme à chaque fois. Domino se frotta contre mes jambes comme s'il avait ressenti mon stress. J'avais envie et besoin de cogner dans quelque chose pour me soulager de ce flot de pensées morbides qui m'assaillaient et je ne pouvais pas. Je ne pouvais rien faire à cause de mon putain de bras qui me faisait encore un mal de chien.
J'arrivais à l'heure. Je me dirigeai vers le fond en saluant la salle. Nate était déjà là, assis à sa place. Affalé sur sa chaise pour être plus précise. Ses jambes étaient étendues devant lui, il se laissait aller en arrière avec un bras entourant l'arrière du dossier. C'était dingue comme à première vue, il avait l'air de ne pas avoir sa place ici. Il se replaça un peu plus convenablement et rapprocha discrètement sa table de la mienne une fois que je m'y installai. Je rougis comme une gamine. Il avait l'air particulièrement en forme et heureux.
— Salut, me lança-t-il en souriant.
Il portait un tee-shirt noir qui laissait voir ses bras. Il ne m'en fallut pas davantage pour me souvenir de la sensation que j'avais éprouvée à y être. Avant-hier soir, comment oublier ? Nous avions couchés ensemble et le premier constat était que j'en avais encore envie et que je voulais recommencer, car ça avait anesthésié toutes mes pensées le lendemain et que ç'avait été parfait. De long en large, j'avais passé une des plus belles soirées depuis un très long moment. Rien que d'y repenser et j'en avais des palpitations. Son regard rencontra le mien lorsque je m'assis, je vis alors que des pensées communes animaient encore l'alchimie entre nous. Son regard glissa sur moi pour m'étudier. Je n'étais pas très sexy, en plus je devais aller bosser après le cours.
— Salut.
— Tu es en retard, chuchota-t-il.
— Sache qu'une femme n'est jamais en retard, elle arrive précisément à point nommé et quand elle s'est faite assez désiré.
Il ricana.
— Tu m'étonnes. J'étais à deux doigts de t'envoyer un message pour te traiter de sadique.
— Impatient !
Il rit, j'en profitais pour sortir mes affaires de mon sac. Je posai Sophie ma trousse girafe, presque aussi vieille que moi.
— Sympa la trousse ! se moqua-t-il.
— Ne parle pas mal de Sophie, elle me suit depuis le collègue !
— T'as des crayons à paillettes ? Du scotch licorne ? Et des gommes magiques aussi ?
— Ne soit pas jaloux, je te prie. Je te prêterais un rose brillant, si tu veux.
Il gloussa. J'adorais ce son harmonieux. Mais mieux valait-il ne pas y penser et ne pas aimer. J'avais sur moi ma clef USB afin de pouvoir donner mon dossier au prof pour qu'il y jette un coup d'œil. Durant tout le cours, le prof nous parla de merchandising, et des sous-parties, car il y avait plusieurs types de merchandising. Il bifurqua ensuite sur les études de marché que nous pouvions mettre dans notre dossier d'étude. Nate ne notait pas grand-chose tandis que je griffonnais autant de choses que possible. Lorsque je me redressai pour aller voir le prof, je sentis son regard sur moi. Un frisson me dévala l'échine et j'eus l'impression qu'il le capta.
— Mademoiselle Dylan, en quoi puis-je vous être utile ?
— J'ai bien avancé dans mon dossier, dis-je. J'ai remarqué en essayant de le compléter que c'est à la fois très dur de retranscrire une passion avec des mots et que plus j'essaye et plus je me rends compte que j'aime vraiment ce projet.
Il sourit et enfonça ma clef USB dans le port de son ordinateur portable.
— Ça, vous voyez, mademoiselle Dylan, c'est ce que j'appelle une victoire personnelle. Le but premier est de vous montrer à quel point vous aimez votre projet. Si ce n'est pas le cas, alors peut-être qu'il faut changer quelque chose.
— Vous pourriez y jeter un coup d'œil et me dire ce que je dois rajouter ou pas et si tout est correct.
Je retournai à la place quelques minutes plus tard quand sonna la fin du cours avec les pensées de Lilas en tête. Elle avait peut-être raison, la passion primait sans doute plus que l'enseignement dans ce métier. Je devais juste me perfectionner pour rendre mon futur magasin le plus parfait possible grâce à mes cours. J'allais y arriver à commencer à réaliser mon futur pour dire merde à tous ces connards qui m'avaient cassé.
— Donne-moi ça ! lança Nate en attrapant mon sac de cours et mes bouquins alors que nous allions nous mettre en route.
— Tu fais quoi ? pouffai-je.
Il enlaça mes épaules et m'attira près de lui. Je grognai en essayant d'ignorer le vacarme incessant de mon stupide cœur qui battait la chamade. Malgré mes résolutions et mon envie de m'éloigner des hommes, j'avais envie de lui. Énormément.
— Tu es blessée, alors je porte tes livres et je t'accompagne jusqu'à destination. Vu que tu n'as plus tous tes bras pour une période indéterminée, c'est donc à moi de m'occuper de toi et t'escorter en fait partie.
Passé outre l'agacement de me sentir de nouveau frêle et faible, mon côté midinette apprécia d'être choyé de cette manière. Mon rêve m'avait rappelé à quel point je n'avais pas côtoyé la gentillesse très souvent après mon viol.
— J'aurais peut-être voulu quelqu'un d'autre que toi.
Il se rembruni puis il ricana et m'attira plus près encore comme s'il voulait m'amenait à lui, en lui. Mon souffle se coupa quand il posa sa bouche sur mon front.
— Je ne crois pas, non.
— Et pourquoi ça ? raillai-je.
— Parce que je suis moi et que je suis parfait.
— Parfait ? C'est vrai qu'il me semble avoir vu ta photo dans le dico à côté de la description du mot.
— Moque-toi ! Des tas de filles rêveraient que je porte leur sac et leurs livres, elles n'en feraient pas toute une histoire, elles. Elles accepteraient avec grand plaisir.
— Mais ne te gêne pas. Moi, je ne suis pas les autres filles.
— Effectivement, tu es bien plus chiante et difficile à apprivoiser.
J'écarquillai les yeux puis je lui enfonçais mon coude dans les côtes. Il grommela un :
— Tu vois, ça confirme mes dires.
J'éclatais de rire et il m'imita de bon cœur. Que ça faisait du bien de rire et de ne plus penser à rien.
— Donc, tu es dix fois plus intéressante que les autres filles.
Je souris.
— Tu sais que tu as de faux airs de Dylan dans « Beverly Hills » quand on y regarde de plus près.
Cette fois-ci, il grimaça. Je ne rajoutais pas que par conséquent, il était trop sexy et qu'il me donnait des coups au ventre tellement intense que mon désir s'étendait jusqu'à mon intimité.
— Ça va ton bras ? me demanda-t-il en m'ouvrant la portière de la voiture.
— Oui.
— Et en vrai ? Je t'ai vu grimacer en cours sans rien dire.
Je le regardais dans les yeux comme son bras était posé sur la vitre et qu'il me bloquait le passage. Il sourit apparemment fier de lui.
— En vrai, ça fait un mal de chien. Mais ça va, je me suis réveillé à la hâte tout à l'heure et je n'ai pas pris le temps de prendre mes antidouleurs. Avec les cachets, c'est plus que supportable.
Il attrapa alors ma main et noua ses doigts aux miens. Il caressa ma paume et comme s'il avait lancé un envoutement, mon bras s'engourdit me faisant oublier un peu la douleur.
— Tu bosses quand même ?
— Oui, je ne serais qu'au bar et Celia m'a dit que je n'aurais pas grand-chose à faire.
— Si tu penses que ça va aller.
— Mmh, oui, approuvai-je en souriant. Comment va Kyle, d'ailleurs ?
— Mon petit idiot va bien. Merci de t'en inquiéter.
— Tu as le bambin le plus adorable de la terre.
— Je sais, il est comme moi.
— Non, toi tu n'es pas adorable.
Un sourire s'étira sur ses joues.
— Et je suis quoi ?
— Intensément adorable...
Il grogna et se pressa doucement contre moi. Je posai ma tête contre sa poitrine et je respirai son odeur qui m'enivra de suite. Niveau résolution je ne savais absolument pas ou j'en étais, mais je n'avais pas l'impression d'être tout à fait sur le bon chemin.
— Pourquoi c'est encore là, alors qu'on l'a fait ? demandai-je.
— On l'a sûrement mal fait, soupira-t-il.
— Non.
— Tu m'étonnes...
Je soupirai à mon tour, tout en serrant de mon bras en compote son tee-shirt. J'étais tellement fébrile, je le fus encore plus quand Nate grogna et qu'il avança doucement, jusqu'à me coincer contre la voiture.
— Dis-moi une chose d'absolument ignoble sur toi, un truc dégoûtant qui me force à ne pas t'empêcher d'aller bosser. Un truc qui me coupe toute envie de toi.
— Nate...
— Dis-moi !
Je réfléchis. Difficile avec cette proximité entre nous. Un truc immonde et improbable ? Il y en avait bien quelques-uns qui me venaient en tête comme mon viol, ma tentative de suicide ou d'autres choses encore. Mais il était hors de question que je lui parle de ça. Il captura mon regard et m'éloigna de mes pensées sordides.
— Je me suis déjà rongé les ongles des pieds. Plusieurs fois...
Il sourit tout en posant son front sur le mien. Ça n'avait pas l'air de marcher tant que ça l'histoire des pieds, pourtant en y repensant c'était absolument horrible.
— Ça me fait juste penser que du coup, tu es plutôt du genre souple, Ruby. Autre chose.
— L'autre fois, je me suis curé le nez et je n'avais pas de mouchoir, alors j'ai étalé ma crotte de nez sur une connasse qui parlait très mal à une caissière, car elle était d'origine africaine.
— Vraiment ? s'étonna-t-il.
— Oui, répondis-je honteuse. Je n'aime pas les blancs racistes qui pètent plus haut que leur cul. Lorsque la caissière m'a vu, elle a ri.
— Pas étonnant que tu t'entendes si bien avec Kyle, l'année dernière c'était son activité préférée, il adorait en foutre partout sur ses tee-shirts, probablement pour les rendre plus attrayants. Autre chose ?
Je fermai les yeux, rien ne me venait.
— Je ne me suis pas rasé les jambes, parce que merde, c'est ultra chiant de faire ça tous les jours et qu'avec un jean on ne voit rien. C'est franchement gavant d'être une femme.
— J'adore les cactus. C'est super mignon.
Je pouffai en laissant ma tête partir en arrière. J'avais chaud, mon ventre était barbouillé. J'avais mal au bras aussi.
— T'es chiant ! Je joue ton jeu, j'essaye de me rendre dégueulasse, essaye d'être arrangeant de ton côté.
— Je t'ai dit que je n'étais pas compliqué comme mec.
— Je peux péter sur commande. Si tu veux, je te lâche une grosse bombe bien odorante, tu ne me désireras plus du tout.
— Ouais, mais non, même ça je pourrais passer outre.
— T'es malade...
Il sourit de toutes ses dents et son visage disparut dans mon cou ou il m'embrassa plusieurs fois. Mon Dieu...
— Deux de mes chansons préférées sont chantées par les Backstreet Boy et la troisième par le groupe Ozone...
— Je trouve ça bien d'assumer ses penchants pour de la musique de merde, mais c'est comme ça, si ça te rend heureuse...
Je fermai les yeux en soupirant puis je répondis la plus logique des réponses.
— J'ai besoin d'aller au boulot, Nathaniel et tu as vraiment intérêt de rentrer pour voir ton fils.
— Je me disais bien que tu allais me dire ça, souffla-t-il contre ma peau.
— C'est le cas, non ?
— Ouais.
Il remonta ses lèvres sur son oreille et quand la pointe de sa langue titilla mon lobe, je poussai un gémissement que j'étouffai contre son torse. Il grogna et son corps me pressa contre la taule en un geste incontrôlé. Mon Dieu, c'était encore, plus fort que l'autre fois. L'alchimie, le chaos et le trouble que ces deux choses avaient engendrés l'autre jour, c'était pareil. Merde ! Merde, merde, MERDE ! Je m'étais promis de toujours tout contrôler après m'être relevée, d'être toujours maîtresse de mon corps et de choisir en ayant la capacité de me défendre, mais avec lui ça devenait difficile. J'avais fauté en couchant avec lui, j'avais rompu mes beaux principes établis pour une nouvelle vie et j'étais encore en train de me laisser aller. Une erreur c'était pardonnable, mais deux erreurs...
— Arrête, Nate.
Lorsqu'il s'éloigna de moi et qu'il ouvrit la portière pour me faire monter sans un mot, je frissonnai. Pas à cause du froid, mais plutôt à cause du manque de lui. Je le regardai faire le tour de la voiture et pris sur moi pour ne pas le chevaucher là comme ça quand il s'installa derrière le volant. Il alluma le contact et m'amena au boulot dans un silence des plus pesants et des plus électriques. Il me laissa partir dans une tension des plus redoutables.
— Tu as l'air dans les vapes, remarqua Celia un peu plus tard tandis que je venais d'essuyer trois plateaux de verre propres d'affilés.
— Non, non, j'ai un peu mal au bras.
— Oui, je me doute, tu es sacrément arrangé quand même. Kyle a eu de la chance que tu sois là.
— C'est clair ! approuva Marlow. Tu es une sorte d'héroïne. Je te déteste d'ailleurs. Ce gosse était amoureux de moi avant. Quand Nate est venu avec lui à l'entrainement tout à l'heure, il ne parlait que de toi. Dylan elle se bat avec toi, Marlow ? Dylan elle à un chat et c'est moi qui est choisi son nom. Dylan par-ci, Dylan par-là...
— Je suis désolée, pouffai-je.
— Tu peux, c'était le seul mec convenable.
— Pas un peu trop jeune pour toi ? se moqua Celia.
— Vu le papa, je jouerais bien les cougars moi !
J'éclatais de rire quand mon téléphone vibra.
— Vu le monde, tu peux répondre !
— Merci !
C'était Rynne : « Je suis rentrée de week-end et c'était fou, je te jure, c'était génial de rencontrer ces personnes. Et toi ça va ? »
Je tenais énormément à Rynne, c'était ma plus proche amie et celle à qui j'avais dévoilé mes secrets. Dès notre rencontre, je l'avais adoré, mais j'étais vraiment chamboulé qu'elle me zappe comme ça, si facilement. D'accord, j'étais peut-être un peu jalouse de son bonheur ou du fait qu'elle m'est exclue comme ça. Pour autant, j'étais contente de tout ce qui lui arrivait de bon. Elle le méritait.
« Oui, ça va. Je suis au boulot, je ne peux pas discuter. On se voit quand tu as le temps... »
D'accord, c'était peut-être un peu sec, mais c'était aussi pour lui faire comprendre que merde, j'en avais gros. Je rangeai mon téléphone dans ma poche et reportai mon attention sur mon boulot.
— Pour en revenir à toi, ton regard ce n'est pas celui d'une femme qui a mal.
— Ouais, on dirait que tu as bien !
— Ça se dit, ça ? demanda Celia en remplissant deux verres de bière.
Marlow haussa les épaules et but une gorgée de coca.
— Nathaniel, hein ?
— Comment ça, Nathaniel ? demandai-je.
— Rien, me lança-t-elle. Rien du tout. Juste que vous avez une belle complicité.
Je sentis mes joues rougirent, un peu.
— Il est très gentil et Kyle est adorable.
— Ouais, approuva Celia. Je veux le même ! Un petit homme, comme ça !
— Oooh, t'es trop mignonne, siffla Marlow. Vous pensez à avoir un bébé ?
Elle acquiesça et sourit en posant son index devant sa bouche pour nous faire comprendre de nous taire.
— N'empêche, je ne comprends pas comment, la mère de Kyle a pu les abandonner comme ça. Ces deux mecs sont des amours, je ne pige absolument pas pourquoi, on peut partir de cette manière.
— C'est clair, approuva Celia.
Je ne dis rien pourtant, j'étais tout ouïe. Je ne comprenais pas moi non plus et c'était la première fois que j'entendais quelque chose à ce sujet. Je ne demandais pas à Nate au même titre que je ne voulais pas qu'il me pose des questions personnelles sur moi.
— Tu en penses quoi, toi ? demanda Marlow.
— Je ne suis au courant de rien, j'ai juste compris qu'il était père célibataire, rien de plus.
— Ah... on pensait que justement, tu aurais deux ou trois informations que nous on ignore, vu que vous vous voyez souvent.
— Non, je n'ai jamais posé de question. J'ai cru qu'elle était morte, ce n'était pas le cas ?
Elle sourit. Celia partit nettoyer quelques tables alors que je rangeai les derniers verres propres derrière moi.
— Non, répondit Marlow. Enfin, je ne sais plus. C'est mignon que tu penses ça, d'ailleurs.
— Ah ? dis-je en grimaçant.
— Bah ouais « mignon » dans le sens où tu n'as pas du tout émis l'hypothèse qu'on est pu les abandonner tous les deux.
— Je ne sais pas, c'est la première chose à laquelle j'ai pensé, car la seule fois qu'il m'a parlé de ça, c'est en me disant que là où elle était, elle n'avait plus rien à dire.
Elle pencha sa tête sur le côté comme pour comprendre mon point de vue.
— Moi, je sais juste qu'elle est partie et qu'il s'est retrouvé seul avec ce petit ange.
— Et moi, ce que j'en pense, lança Celia en revenant. C'est que c'est bien fait pour elle et qu'elle aura de la chance celle qui obtiendra le cœur de ces deux-là et que l'autre elle peut bien se morfondre et que si lui y retourne je lui casse une bouteille sur la tête.
— Tu m'étonnes, rajouta Marlow en me fixant derrière son verre.
J'ignorais à quoi elle répondait en me fixant ainsi, mais je me sentais barbouillé d'un coup. En sortant après mon service, un taxi m'attendait. Je ris en remerciant mon chauffeur quand il m'ouvrit la portière. J'attrapai mon portable : Merci pour le taxi. Bonne nuit, Nathaniel. Je m'installai derrière le chauffeur quand Nate me répondit : De rien, Ruby. Bonne nuit aussi...
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