CHAPITRE 11
Je n'étais pas du matin, je ne l'avais jamais été et ça depuis toujours. Il était neuf heures quand une boule de vie chaude se serra contre moi dans le fauteuil et se glissa sous la couette pour venir me faire un câlin. Je ne grognai pas lorsque je vis le plus adorable des bambins, les cheveux en bataille et la marque de l'oreiller sur le visage se coller contre moi. Un autre qui n'était pas du matin. Mon cœur se serra autant que je l'attirai contre moi pour prendre son amour d'enfant. Bizarrement ce matin même si le chaos était là, c'était son amour qui remportait la bataille. D'instinct, j'embrassai ses cheveux.
— Bonjour, Dylan, lança-t-il d'une toute petite voix. Même que Krokmou, il te dit bonjour lui aussi.
Il frotta contre ma joue la peluche d'un dragon noir. J'embrassai la petite bête en lui adressant mes salutations ce qui fit rire Kyle. Il s'installa tranquillement et posa sa tête contre ma poitrine. Mon cœur se mit à battre plus fortement.
— Tu vas bien ? Tu as bien dormi ? demandai-je.
— Oui. T'as pas dormi dans le lit à papa ? Si tu avais peur, j'aurais dormi avec toi.
Je souris tandis que ses mots laissaient se répandre en moi une douceur agréable.
— Non, j'étais trop fatigué, je me suis endormie ici.
— Papa aussi il s'endort là parfois, même que c'est quand il travaille, alors dès fois, il a oublié d'enlever ses lunettes et c'est moi qui le réveille.
Papa ? Zut, il avait peut-être appelé... je me redressai un peu et j'attrapai mon téléphone sur la table. Pas d'appels ni de textos. Cependant, il était peut-être temps que j'aille me laver et qu'on s'occupe.
— Et si j'allais me laver avant qu'on déjeune et qu'on aille ensuite dire bonjour à Domino. Ça te va ?
— Oh ouais, trop cool !
Bon, la phase réveil avait l'air de bien se passer. Espérons que pour la suite ça aille tout aussi bien.
— Tape là, bonhomme.
Il frappa aussi fort que possible sa petite main dans la mienne. Je me redressai, attrapai mon sac au sol et j'allumais la télé avant de laisser une chaine de dessins animés.
— Tu regardes sagement la télé, je me dépêche, d'accord ?
Il acquiesça et serra contre lui sa peluche avant de se caler confortablement sous la couette. C'était possible de tomber amoureuse d'un garçon de quinze ans de moins que soit ? Bon sang, ça avait l'air encore plus mal parti que je ne le pensais. Il n'y avait pas seulement Nate d'horriblement mauvais pour mon cœur, son fils l'était tout autant.
Je m'enfermai dans la salle de bain sans toutefois activer le verrou, au cas où il y aurait une urgence et qu'il ait besoin de moi. J'allais entrer dans la douche quand mon téléphone sonna. Pas besoin de jouer aux devinettes. Nate...
— Oui ? décrochai-je.
— Salut, Ruby ! lança-t-il d'une voix très grave. Tu vas bien ?
— Oui et toi ?
— Impec. C'est le fait d'attendre qui est le plus stressant tout compte fait. Et Kyle ? demanda-t-il.
— Il va bien, tu veux lui parler ?
— Non, s'il va bien et qu'il ne me demande pas, je ne préfère pas lui parler. Je rentre dès que j'ai fini de toute manière.
— Il va bien, il est venu me faire un câlin tout à l'heure. (J'entendis un souffle rauque et un semblant de grognement ce qui entortilla mes entrailles.) Et là, je l'ai laissé devant la télé pendant que je suis partie me laver.
Autre grognement.
— Super ! Mon fils te fait des câlins pour se réveiller et tu es toute nue dans ma salle de bain et moi je suis définitivement un crétin d'être à des kilomètres de là...
— Ton fils est encore petit alors les câlins sont autorisés, quant au fait d'être nue dans ta salle de bain, c'est précisément parce que tu es loin de moi que j'y suis.
Il ricana et quelque part, j'étais heureuse qu'il ne soit pas là, car s'il avait ricané comme ça en plantant la menthe de ses yeux dans les miens, j'aurais eu du mal à rester de marbre.
— Tu pourrais y être avec ta culotte à tête de dinosaure, je ne m'en plaindrais absolument pas. Je ne suis pas difficile, comme mec !
— Tu n'étais pas censé prendre des nouvelles de ton fils ? demandai-je en soupirant.
— Je sais qu'il va bien et j'ai besoin de me détendre.
— Mmh, soit ! Tu pourrais te détendre en arrêtant de te comporter comme un pervers aussi, non ?
Le pire en disant cela, c'était que je me sentais hypocrite.
— À vrai dire, je ne pense pas qu'à toi dans ma salle de bain, j'y suis aussi.
Je m'appuyais contre la paroi de la douche en soufflant.
— Nate... il ne se passera jamais rien entre nous. Ni dans ta salle de bain ni ailleurs.
— Qui cherches-tu à convaincre, Dylan ? Toi ou moi ? Même au téléphone dans une autre ville, je le ressens, je sais que toi aussi. Merde, je suis papa, mon fils passe avant tout, avant mon bien-être, ce qui ne m'empêche pas d'être un mec avec des besoins. Ces choses-là, celles qui naissent sans que l'on fasse rien, ce sentiment que le monde aurait beau s'effriter, on voudrait profiter de cette alchimie sans nous soucier de ce qui se passera après, c'est unique, je trouve. Sans bon sens, tu crois qu'il se serait passé quoi à la laverie ? (Mon ventre se contracta tellement fort que ce sentiment s'étendit plus loin.) Je prends tout de toi, même sans t'embrasser. (Il soupira ou grogna me donnant encore plus chaud.) Je prends tout de toi, dans ma salle de bain, dans n'importe quelle pièce de ma maison, de la tienne, car depuis Kyle, tu es la seule avec qui j'ai envie de passer du temps.
— Pourquoi est-ce que tu... t'embrouilles l'esprit avec ça ce matin ? bafouillai-je.
Il ricana nerveusement.
— Je n'en sais rien. Le stress sans doute. Je dois y aller de toute manière, les entretiens commencent dans dix minutes.
— Tu... tu m'appelles pour me tenir au courant ? demandai-je.
— Bien sûr. Allez, j'y go.
— Bonne chance !
Il raccrocha et mon idiot de cœur qui battait déjà la chamade ne se calma pas. Je savais pour cette alchimie, jusque-là, j'ignorais qu'il ressentait les choses exactement comme moi et ça me perturbait tellement que le calme qu'avait instauré Kyle dans ma poitrine fut noyé par un flot intense de chaos. Je fis alors un truc surréaliste, je pris en photo la culotte dino et je l'envoyais à Nate avec un petit message : Merde pour tes tests ! Et si avec ça tu ne casses pas la baraque, c'est que tu es vraiment stupide, Nathaniel.
Je ne vis la réponse à son message qu'après ma douche. Le message disait : Ruby, comment te dire que tu viens de détruire tous mes concurrents avec ta photo ?! Les pauvres, ils n'ont plus aucune chance !! Ceci dit, la stupidité revient trop souvent à mon goût... va falloir que je remédie à ça...
Plus tard dans la journée, après un petit déjeuné avec mon petit amoureux, un peu de ménage et un passage à la salle de bain, nous avions rejoint Domino qui ne se faisait pas prier de toutes les attentions dont Kyle le couvrait. Entre les papouilles sur le ventre, celle sur les oreilles et sous le menton, il ronronnait et pas qu'un peu. Pire qu'un moteur de mobylette. J'ignorais si je savais m'y prendre, si Kyle était un gamin facile à vivre ou autre, mais en tout cas, tout se passait super bien. Le midi, je l'emmenai manger au Mac Do, puis au parc avant de rentrer tranquillement à la maison en dégustant une glace. Il était sage, s'intéressait à beaucoup de choses, peut-être même trop pour son âge même, mais il était agréable. Mine de rien, il était déjà plus de seize heures. La journée était passée super vite. Je m'arrêtais à mon palier quand il me demanda s'il était possible de revoir Domino. Je le laissai dans le salon pour aller dans la cuisine. Je retirais quelques plats pour attraper une bouteille d'eau.
— Beurk, qu'est-ce que c'est ? demanda Kyle en désignant avec une grimace mon assiette.
— Beurk ? Est-ce que tu y as goûté avant de dire « beurk » ?
Mon Dieu, je venais de prendre dix ans d'un coup. J'avais l'impression d'être une vielle avec mon expression. C'était Granny et maman qui me disaient ça quand j'étais gamine.
— Non, mais ce n'est pas beau...
Bon, je ne pouvais pas lui donner tort. Les tempuras n'étaient pas très reluisantes visuellement parlant, mais c'était trop délicieux. C'était Rynne qui m'avait fait découvrir ça comme bon nombre de plats japonais et je devais bien admettre que j'adorais ça et que sa cuisine me manquait, comme elle un peu. Beaucoup, même ! Un repas de temps en temps ne remplaçait pas les soirs où on dormait à deux, où on discutait et qu'on se matait des trucs clichés. Je savais bien que je pourrais l'appeler n'importe quand, débarquer chez elle ou lui proposer une sortie, mais depuis qu'elle avait emménagé ici avec Zack, ils avaient l'air d'être sur le point de se fiancer ou d'annoncer qu'ils attendaient un bébé. J'aurais pu pourtant, je ne le faisais pas, j'avais l'impression de les déranger et de les priver de leur bonheur en les écartant l'un de l'autre ne serait-ce qu'une journée. J'étais heureuse, ils avaient tellement galéré à enfin se trouver, mais elle me manquait un peu.
— C'est moche oui, mais c'est délicieux. C'est comme les pieds, c'est moche, ça pue, mais c'est pratique.
Il éclata de rire en secouant la tête.
— Papa, il dit que j'ai des petits pieds à croquer.
— Tu me fais voir ? J'adore manger les petits pieds, moi !
— Non, s'écria-t-il en gloussant. Ce sont les miens !
Je grognai comme un zombie et j'avançai vers lui lentement, lui laissant le temps de s'enfuir. Il cria, mais courageux il attrapa Domino en lui disant qu'il le protégerait des monstres. Je l'attrapai au vol et le chatouillai, provoquant des éclats de rire adorables.
— Ne me mange pas, ne me mange pas, mes pieds ne sont pas bons !
Je ris et je le posai sur le plan de travail. Nous n'avions pas encore de nouvelles de Nate et vu l'heure, ça devait prendre plus de temps que prévu. J'allais probablement devoir rater mon cours, j'espérais qu'il serait là avant le boulot, mais j'en doutais aussi. Ça m'embêtait, mais j'allais attendre un peu avant d'appeler Celia pour lui dire.
— Ça s'appelle comment ? demanda Kyle.
— Des tempuras.
— C'est quoi ?
— C'est de la nourriture japonaise.
— Je n'aime pas la nourriture japonaise.
Je le fixais dans les yeux.
— Tu es sûr, bonhomme ?
Il bouda puis haussa les épaules.
— Je vais t'en faire à manger et je suis certaine que tu vas trouver ça très bon.
— Et si je n'aime pas ? me défia-t-il.
— Alors j'aurais un gage. Ça vous va, jeune homme ?
Je pris tous les ingrédients qu'il fallait chez Nate pour leur faire à manger pour ce soir, tant qu'à nourrir « MiniLui » autant nourrir « Lui » aussi. Tandis que je sortais tout ce dont j'avais besoin et que l'huile était presque à bonne température, Kyle me rejoignit.
— Tu peux me servir un verre de lait, s'il te plaît ?
J'acquiesçai me rendant compte de la complicité évidente et des sentiments que je nourrissais pour ce bonhomme pas plus haut que trois pommes. Je me dirigeai au frigo pour sortir le lait quand il poussa une chaise contre l'armoire près de la gazinière. Il grimpa dessus et se mit sur la pointe des pieds pour attraper une grosse boîte métallique.
— Attends, je vais te la donner, dis-je.
— Non, je l'ai presque, je...
Il persévéra, mais il trébucha et la chaise tomba en arrière l'emmenant avec elle dans sa chute. Le dossier se cogna contre ma cuisse et la gazinière. L'huile sauta sur mon pantalon. Ce ne fut pas ça qui m'inquiéta, c'était la grille du gaz et la casserole pleine d'huile qui était en train de tomber vers lui. Je repoussai le tout avec mes mains avant que Kyle ne se prenne quelque chose. Quand il pleura, je m'accroupis pour attraper son visage, la peur au ventre. J'essuyai ses petites larmes.
— Tu n'as rien, mon trésor ? demandai-je.
Il sanglota en secouant la tête. J'inspectai tout de même son visage, ses mains et ses vêtements pour être certaine qu'il ne s'était pas ébouillanté. Le soulagement me galvanisa et je l'embrassai sur le front et les joues pour le réconforter.
— Dylan, tu...
— Le principal, c'est que tu ailles bien. Mais il faut faire attention, surtout dans une cuisine. Le gaz, le four, le feu, ce sont des choses très dangereuses. Autant pour les petits que pour les grands.
— Dylan, ton bras ; il est tout rouge et brillant.
Ce ne fut qu'à cet instant, une fois passée la peur qu'il ne se fasse mal et qu'il ne m'en informe qu'une violente douleur me lança sur le bras. Je baissai les yeux pour voir. Effectivement, ma peau était rougie et boursouflée. Je poussai un cri et me redressai pour passer ma main et mon avant-bras sous l'eau froide.
— Dylan...
Il s'accrocha à mes jambes en sanglotant, certainement conscient que je venais me faire très mal, et croyant que c'était de sa faute. Merde, en repoussant la plaque et la casserole pour ne pas que ça le touche, l'huile avait sauté sur tout mon avant-bras. La douleur mordante était horrible.
— Ce n'est rien qu'un petit bobo, mon ange. Avec un bandage, je ne sentirais plus rien.
J'allais dans la salle de bain ou je trouvais bien sûr mon bonheur. Nate avait tout ce qu'il fallait dans sa pharmacie. Je nouais mon bras avant de le passer sous l'eau et de remettre autre chose par au-dessus. Ça me lançait comme jamais. Je ne savais pas comment décrire la douleur, elle était lancinante et profonde. J'espérai que ce n'était pas très grave et que j'allais pouvoir reprendre la boxe et le sport rapidement. Je rejoignis Kyle qui dans le salon était recroquevillé dans le fauteuil.
— Je suis désolée de t'avoir fait mal, Dylan, sanglota-t-il.
Je souris et l'embrassai encore sur le front. Il me faisait mal au cœur de réagir aussi fort.
— Ne t'en fais pas, je suis super forte. Je vais nettoyer la cuisine avant que ton père ne rentre et ensuite, on regardera ce que tu veux, d'accord ?
Il acquiesça. Je repartis à la cuisine et je nettoyais le gaz à fond et je remis la chaise comme il le fallait avant d'attraper la boîte en métal qui avait foutu un sacré bordel pour en sortir des gâteaux que je lui apportais avec un verre de lait.
— Ça te fait mal, le bobo ?
— Mmh, non ! mentis-je en souriant.
Il sembla s'apaiser un peu. Je préférai largement voir ses sourires que de la tristesse sur son visage d'enfant. Je repartis en cuisine quand mon téléphone sonna dans ma poche. Je le sortis en grimaçant.
— Allô !
— Dylan, je suis désolée... (Au moins, les hommes Mine s'excusaient...) Ça a duré plus longtemps que prévu au final.
— Est-ce que ça s'est bien passé ? demandai-je en essayant de trouver quelque chose qui ferait passer la douleur.
— Oui, oui, je pense que oui. Je suis sorti depuis un moment, mais je me suis dépêché d'aller à l'aéroport et maintenant que j'attends, je peux enfin t'appeler.
— Ils ne t'ont pas donné de réponses ?
— Non, ils m'ont dit qu'ils appelleraient très prochainement pour prévenir les gens. Le truc c'est que prochainement c'est quand même assez vague comme réponse...
— Il y avait du monde ?
— Ouais, une trentaine de personnes. Mais plus des trois quarts sont partis en début d'après-midi, pas moi, ni quelques autres personnes alors, j'ai de bonnes chances.
En dépit de la douleur, je me rendis compte que je souriais et que j'étais heureuse pour lui. Même que j'espérais infiniment qu'il s'en sorte et qu'il décroche ce job.
— Je sais que je te le dois, Dylan.
Je frémis.
— Ton avion décolle dans combien de temps ? demandai-je.
— Dans une heure, répondit-il. Je suis désolé, je n'arriverais pas à rentrer à l'heure pour te permettre d'aller au boulot. J'ai honte de moi. Tu peux y emmenait Kyle si tu veux et je viendrais le chercher de suite en rentrant.
Je n'aimais pas tellement l'idée d'emmener Kyle dans un bar, surtout un vendredi.
— Non, je vais appeler Celia. Elle devrait comprendre.
— Merci, Ruby, souffla-t-il comme s'il était heureux de ma réponse. J'irais la voir pour m'excuser et lui dire que c'est de ma faute. (Je souris tout en fixant mon bras bandé qui clairement était en train d'avoir raison de mon esprit, c'était ultra douloureux.) Et sinon, à la maison, comment ça se passe ?
— Bien. Ton fils est adorable. (Il ricana.) Mais il m'a lancé un défi, du coup, je lui fais à manger pour ce soir, j'espère gagner sinon j'ai un gage. J'espère que ça ne t'ennuie pas ?
— Je ne vois pas où j'irais me plaindre.
Je souris sans qu'il puisse le voir.
— Tu veux lui parler ?
— Non, je veux surtout le retrouver.
Ça, c'était trop mignon.
— Bon je vais te laisser, à tout de suite.
Lorsque Nate passa la porte, Kyle lui sauta amoureusement dans les bras. « Lui » attrapa son « MiniLui » et le serra contre son torse avant de le caler sur sa hanche. Ils étaient tout aussi déroutants l'un que l'autre. Séparément aussi, mais le pire c'était quand ils étaient à deux. Je souris lorsque Nate planta ses yeux dans les miens et qu'un sourire taquin s'étira sur son visage. Il reposa son fils au sol et rangea ses affaires.
— Alors c'était bien ton truc, papa ?
— Oui.
— T'as réussi ?
— Bien sûr, je suis un champion, mon lapin.
Je me redressai
— T'as vu, papa ? Dylan et moi on a fait à manger et c'est moi qui ai mis la table.
Le visage de Nate s'adoucit, mais devint plus sombre en même temps, comme s'il était touché et excité par ce que Kyle lui racontait. Je me redressai avant de fermer les yeux pour tenter de passer outre la douleur sur mon bras, ma brûlure me causait à présent d'horribles maux de tête.
— Tu as été sage ? demanda Nate.
— Oui.
J'acquiesçai quand il m'interrogea du regard.
— Bon, je meurs de faim, je n'ai rien mangé de la journée.
— Je vais vous laisser, alors, dis-je.
— Va te laver les mains Kyle. (Il obéit.) Non, reste. Tu as préparé à manger pour nous pas question que tu rentres chez toi et que tu n'en profites pas.
— J'ai un peu mal à la tête, dis-je. Je crains de ne pas être de bonne compagnie.
— Dylan...
En murmurant mon prénom sur un ton presque suppliant, il agrippa ma main et m'arracha un cri aigu.
— Merde ! jura-t-il confus. Merde, je...
Lorsqu'il s'aperçut du bandage, il ferma les yeux quelques secondes. Il rouvrit les paupières, il semblait encore plus sombre, plus intense. Kyle arriva, apeuré, courant jusque moi pour attraper mes jambes.
— Va jouer un peu dans ta chambre, Kyle, ordonna-t-il.
Il s'exécuta sans piper mot.
— Il s'est passé quoi ? demanda Nate lorsque nous nous retrouvâmes seuls dans son salon.
— Rien de grave, répondis-je.
Il grogna comme un ours mal léché et refusa de me lâcher.
— Rien de grave ? marmonna-t-il dans ses dents.
Il s'assit sur le fauteuil et m'attira entre ses jambes, me laissant debout. Il retira doucement mon bandage, je tentais de garder la face, mais c'était dur. J'avais été bien touché pour que ça me lance ainsi. Lorsqu'il arriva au tissu qui était tout contre ma peau, les douleurs se firent plus lancinantes encore. Ça devait être encore rouge comme tout à l'heure... Ses beaux yeux verts se voilèrent quand il découvrit, ce que je découvris en même temps que lui. Ma peau n'était plus seulement rouge, elle était humide, brillante couverte de cloques jaunes remplies d'eau. Il croisa mon regard.
— Bon sang, tu...
— Ça va, ne t'en fait pas. Demain ça ira déjà bien mieux.
— Non ! Putain, non ça ne va pas. Tu es au moins brûlée au deuxième degré si ce n'est pas au troisième. Tu...
Lorsqu'il vit mes yeux rougis par mes larmes, il grogna encore plus. Il colla son front au mien et son souffle enivra chaque bout de peau même celles à vif.
— Comment ?
Je souris sans tenir compte de la douleur. Nate était papa, un vrai interrogateur.
— J'ai fait ma gourde en faisant à manger.
— À cause de Kyle ? demanda-t-il.
— Non, en fait, c'est l'histoire d'une gourde qui fait à manger et qui se crame comme une grosse abrutie.
Il fronça les sourcils, je n'allais certainement pas lui dire. Kyle en avait assez sur le cœur comme ça pour qu'en plus il se fasse engueuler.
— Je t'emmène à l'hôpital.
— Non !
— Pas de non qui tienne. Je t'y emmène, et ça quoique tu dises pour faire soigner ton bras ! Il te faut à tout prix des soins et des cachets.
— J'ai mal à la tête, murmurai-je pour toute réponse avant de me laisser aller contre lui. J'ai l'impression que ça me ronge la peau et les os.
Il m'enlaça et sa bouche se perdit sur mon front, mes joues, mon cou.
— Tu as de la fièvre. Je vais mettre un manteau à Kyle et on y va...
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