Chapitre 12 Partie 20

Enri courait, à s'en rompre les jambes. Il ne voyait plus les corps morts autour de lui, les victimes éparpillés dans les rues ne lui donnaient plus envie de déglutir. Même le sort de sa mère lui importait peu, il savait qu'elle aussi avait dû connaître un décès atroce, et cela l'enrageait davantage.

La seule chose qui effleurait son esprit consumé par la rage, c'était Martin. Cet homme qui avait tout détruit, qui avait mis à feu et à sang son monde, devait payer.

Cette seule pensée était entourée d'une tempête de haine aveugle, une haine puissante qui ne saurait durer. Néanmoins, le temps de ce moment de colère noire, qui sait ce qu'Enri pouvait commettre ?

Lui-même n'en savait rien, et cela importait peu. Il était si confus, si faible au fond de lui que sans la force que lui conférait son état de folie, il savait qu'il n'aurait pu que tomber à genoux et s'effondrer pour de bon.

Sa course effrénée le mena alors jusqu'à la bibliothèque, l'antre où il espérait trouver l'instigateur de cette apocalypse.

Enri pénétra le bâtiment complètement vide, qu'il traversa d'une traite. Il n'y avait pas le moindre signe de vie, mais pas non plus le moindre dégât sur le mobilier. Tout était intact, mais dégageait un côté spectral.

Une fois devant, la porte du bureau de Martin, Enri la défonça d'un coup de pied et entra en trombe. Il n'avait pas envie de s'égarer en explications ni rien une fois l'écrivain entre ses mains. Il voulait le massacrer, purement et simplement.

Le grand frère voulait se défouler plus que tout. Il n'avait personne d'autre que lui-même à venger. Martin devait payer pour lui avoir fait connaître un tel cauchemar.

Une fois le bureau ouvert, Enri découvrit enfin celui qu'il cherchait.

Martin était installé à son bureau comme à son accoutumée, un livre en main. Cependant, autour de lui, tout était différent de la première fois qu'Enri l'avait vu. La pièce était impeccable, sans la moindre feuille négligemment laissée au sol. Tous les livres originalement rangés dans les étagères étaient empilés autour de l'écrivain, formant des tours d'ouvrages d'encres et de papiers.

Si sa cible était seule, alors Enri aurait bel et bien chargé droit sur lui, sans prendre garde au décor, mais Martin avait de la compagnie cette fois-ci.

Luc, le réceptionniste de la bibliothèque et Edmond, une connaissance d'Enri qu'il avait cependant perdu de vue avec la naissance de Lula, se tenait devant le bureau, assis par terre tels des enfants.

Ils avaient les yeux rivés sur le narrateur, écoutant avec attention ses douces paroles alors qu'il leur lisait le livre qu'il avait en main. Eux aussi, avaient des marques sur le visage. Des lumières orangées parcouraient celles de Luc tandis que celles d'Edmond étaient rouges.

L'arrivée fracassante d'Enri ne parut même pas les surprendre. Et c'est d'un mouvement de tête désintéressé que tous portèrent leur attention sur lui.

Surpris de primes abord, Enri secoua vivement la tête, décidé à ne se focaliser que sur sa cible. Il expulsa littéralement de sa gorge ce nom qui ne lui inspirait plus que dégoût.

– Martin !!

Ce dernier lui tendit un large sourire en réponse.

– Oh ! Monsieur Enri ! Vous êtes venus tôt ! Asseyez-vous donc !

L'insolente sincérité de l'écrivain fit bouillir le sang d'Enri. Il était si innocent dans sa manière d'être qu'on pourrait croire que tous ces événements n'étaient pas de son fait. Mais Enri n'en avait que faire. Il n'avait plus la patience de distinguer le coupable de celui qui ne l'était pas.

Les dents serrées, il se rua sur lui et plongea vers le bureau. Martin écarquilla les yeux de surprise alors que son interlocuteur venait vers lui avec rage.

Les deux finirent au sol, et Enri commença à matraquer sauvagement son opposant. Ses poings martelaient la figure de Martin avec une rage terrifiante. Il sentait ses propres os protester sous la violence des coups. Seulement voilà, dès le moment où il lui avait mit la main dessus, Enri avait perdu le contrôle de ses émotions.

Il lui fallait un bouc émissaire, une cible sur laquelle déverser tout ce qui lui consumait l'être.

Grâce à cette rage, Enri ne pleurait plus, il ne se sentait plus perdu comme auparavant, il se sentait plus puissant que jamais.
Ses poings pleuvaient comme des météores sur le visage de Martin qui était sans défense face à son opposant.

Cette séance de matraquage aurait durée encore longtemps si les spectateurs de Martin n'étaient pas intervenus.

Sans même qu'il ne comprenne comment, Enri fut projeté vers l'arrière. Il atterrit brutalement au sol et aperçut Luc et Edmond debout devant lui, faisant barrage.

– Merde…! rugit-il entre ses dents.

Il se releva péniblement, le dos endoloris. Cependant, sa colère agissait en inibiteur, et très vite, il se préparait déjà à massacrer tous ceux sur son chemin. Le duo en face de lui recula d'un pas, restant hors de portée de ses poings serrés.

Enri se rua sur eux tel un taureau enragé quand une étreinte douce mais puissante vint casser sa charge. Son visage déformé par la rancœur se radoucit alors à la vue de sa petite sœur qui lui tenait la taille.

Quand leurs regards s'étaient croisés, la petite crue un instant pouvoir le calmer, mais ce fut éphémère. À la vue des marques bleutées sur sa peau, Enri se souvint de l'atroce vérité. Lula n'était plus, seule une entité étrangère habitait ce corps désormais.

Il tenta de se dégager de sa prise, agitant son corps avec violence, en vain. Dans le même temps Luc et Edmond étaient allés aider Martin qui avait été bien amoché par la fureur d'Enri. Il saignait du nez comme de la bouche, et son nez avait même été tordu.

Soutenu par ses compères, il retourna à son siège sur lequel il se lâcha avec lourdeur. Ses mains palpaient son visage, essuyant les tâches de sang. Soudain, comme si quelque chose manquait chez lui, il se mit à regarder de tous les côtés avant de se baisser précipitamment.

– Ouf ! Il n'a pas trop été endommagé ! s'écria-t-il.

Martin réapparut un livre en mains. C'était celui qu'il lisait avant qu'Enri ne lui tombe dessus.

Il dépoussiéra l'ouvrage de quelques balayages de la main, et en soufflant dessus avant de se remettre en place. Comme si de rien n'était, il chercha la page où il avait été interrompu et se tint prêt à reprendre sa lecture.

De son côté, Enri luttait toujours contre Lula dont l'étreinte ne diminuait pas. Il avait beau fulminer, et bouger en tous sens, la petite ne le lâchait pas. Parallèlement, plus il faisait d'effort pour se libérer, plus sa colère augmentait.

Au même moment, Martin allait reprendre sa lecture quand Enri hurla :

– Enfoiré de merde !! Comment tu peux agir comme ça alors que par ta putain de faute tout le village à été détruit ?!

Les lèvres de Martin se fermèrent puis il posa le livre ouvert sur son bureau. Il rejoignit Enri et Lula puis se posta devant le garçon. Guidé par son unique haine, Enri saisit l'occasion pour décocher à son ennemi un coup de tête qui lui fracassa le nez.

Au même instant, Lula et les deux autres réagirent au quart de tour. Enri fut plaqué au sol, et le duo vint se placer devant Martin qui les écarta doucement.

– Laissez… je vais bien ne vous en faites pas.

Il retourna auprès d'Enri puis ferma les yeux, comme pour se concentrer.

Le sang sur ses lèvres et dégoulinant de son nez disparu. Son nez se remit lentement en place, et ses bleus s'effaçèrent progressivement. En une dizaine de secondes, il fut totalement guéri.

Enri, qui ne l'avait pas quitté des yeux, resta estomaqué, et Martin lui lança avec sérieux :

– Bien que je sois encore un simple apprentis, vous pouvez me voir comme étant un voyageur de mondes monsieur Enri.

– C'es-c'est pas possible…

– Vous m'avez demandé plus tôt pourquoi j'étais aussi calme, alors même que tout autour de nous n'était que mort et destruction… alors je vais tout vous expliquer monsieur Enri…

On est proche de la fin du flashback les gens ! Mais il y a encore des choses qu'on doit savoir !

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