Chapitre 4 : Tout est devenu flou et j'en ai peur.
(Angèle - Flou)
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Je ne sais pas exactement comment ni pourquoi je me suis retrouvée là.
Tout ce que je sais, c'est que la petite blonde des toilettes est parvenue à m'emmener à l'extérieur du tribunal, dans un petit café paumé qui n'a pas été nettoyé depuis au moins plusieurs semaines mais qui a le mérite d'être le plus proche du parking et surtout le seul avec une terrasse.
Il est à peine midi lorsque nos consommations sont déposées sur la table : un Martini rouge pour elle et un verre de vin blanc pour moi.
— Vous êtes certaines ? Vous ne voulez pas déjeuner ? insiste une dernière fois le serveur.
— Pas la peine, merci. lui répond la jeune femme, toujours un sourire aux lèvres.
Elle a beaucoup de patience. Moi, je l'aurais envoyé balader depuis un bon moment, et ce, sans le moindre ménagement.
D'ailleurs, son aptitude est mis à rude épreuve quand elle attend de longues minutes avant de toucher à son verre, comme si elle voulait que je fasse le premier pas, que je discute avec elle.
Mais ce n'est pas dans mes attentions, alors la blonde finit par baisser les armes : elle me sourit, à moi aussi, avant de m'expliquer d'une voix toujours aussi douce :
— Je suis désolée. Je me suis servie de toi.
Elle soupire tout en passant une main dans ses cheveux blonds.
Cette femme est jolie, ça ne fait aucun doute. Ses yeux sont très sombres et uniquement maquillés par une petite touche de mascara. Quant à sa peau, elle est plutôt blanche alors que ses lèvres sont pulpeuses et son nez légèrement retroussé.
— Pourquoi tu dis ça ? finis-je par répondre.
Elle prend une première gorgée de son Martini.
— Il me fallait une excuse pour sortir de là. Alors merci à toi.
Elle n'en rajoute pas plus.
Cependant, je constate, rapidement, que cette nana n'est pas du genre à cacher ses émotions lorsqu'elle baisse la tête et termine son verre d'une seule gorgée.
Je tente d'utiliser l'humour, il est hors de question que cette rencontre devienne plus bizarre qu'elle ne l'est déjà :
— Et moi, j'avais besoin d'un verre offert par une inconnue. Donc on est quitte, hum ?
— Lana. Tu peux m'appeler Lana.
La blonde intercepte à nouveau le serveur et lui demande de nous resservir la même chose.
Je n'ai même pas encore touché à mon premier verre.
— Et toi, c'est comment ? me questionne-t-elle à son tour.
— Kamilah.
— C'est jolie.
Durant de longues minutes, nous ne parlons plus, nous contentent de boire nos verres en silence tout en profitant du soleil.
Après tout, nous ne nous connaissons pas et je n'ai pas l'habitude de discuter avec des inconnus (du moins, des inconnus qui ne finissent pas la soirée en ma compagnie).
C'est alors, qu'après avoir fini son cinquième verre, Lana se lance dans un drôle de récit, comme si l'alcool commençait à prendre le contrôle de son organisme :
— Je suis au tribunal pour mon copain. Son cousin a été accusé pour une affaire de drogue. Ça va bientôt faire deux ans que nous attendons son procès. Maintenant qu'on y est... Je ne sais pas, je déteste être coincée dans cette salle. Dès que j'ai pu, j'ai fui.
Je ne sais pas trop quoi faire ni quoi dire. Je ne connais même pas l'histoire de son copain.
Mais, soudainement, je remarque qu'elle jette un rapide coup d'œil à son ventre.
Elle ne me dit pas tout.
— Et qu'est ce qu'il t'a fait ce fameux cousin ?
Elle sursaute. Son regard me fait comprendre qu'elle ne s'attendait pas à ce que je pose une question aussi personnelle. A vrai dire, moi aussi je suis surprise de ma curiosité malsaine.
A croire que l'alcool est aussi en train de faire effet sur moi.
Boire sur le temps midi sans avoir pris un petit déjeuner ? Très mauvaise idée.
— Je te demande pardon ?
— T'as regardé ton ventre. Il t'a mis enceinte avant de finir en taule et tu as dû avorter ?
Elle rit. Au moins, c'est pas le genre de meuf à s'offusquer pour rien.
— Ho non, pas du tout. C'est rien de grave, ne t'inquiète pas.
Je ne lui pose pas plus de questions. Cela ne me regarde pas et je déteste emmerder les autres avec un quelconque interrogatoire.
Par contre, Lana, elle ne semble pas de cet avis :
— Et toi, tu étais là pourquoi ?
En tant normal, je ne lui aurais pas répondu. Mais, une partie de moi ne résiste pas à l'envie de le faire :
— Il y a deux ans, une explosion a eu lieu dans un hôpital. Tu te souviens ?
Ses yeux s'écarquillent :
— Oui j'en ai entendu parlé.
— J'étais là. Je vais devoir témoigner, le procès débute dans quelques mois.
Lana siffle, puis, tapote énergiquement avec son pieds sur le sol.
— Wow. Ca ne doit pas être facile pour toi.
Elle n'a même pas idée.
— Oui... Surtout que je suis la seule à croire en leur innocence.
Pourquoi est-ce que je me confie comme ça moi ?
Je tente à nouveau de me contrôler, mais, les mots sortent tout seul, comme s'ils attendaient depuis des années d'être libérés de leur petite cage :
— Jassim était mon meilleur ami. Il est mort dans l'explosion. Ils sont tous persuadés qu'il est coupable ainsi que son frère, Sofyan. Soit disant, on aurait retrouvé des plans dans leur sac. Alors, So est maintenant trainé en justice et le nom de son frère salit. Mais c'est ridicule, crois moi... Jass était beaucoup trop intelligent, il n'aurait jamais laissé trainer ses plans. Et ce qui m'énerve, c'est que j'ai absolument aucun souvenir des événements, je me sens inutile.
Je n'ai pas repris ma respiration une seule seconde.
Lana ne m'a pas non plus interrompue . Ses yeux sont grands ouverts. C'est comme si elle était, en réalité, très intéressée par ce que je viens de lui apprendre.
Sa réaction me fait penser à une citation, celle que j'ai pu lire dans l'oeuvre de Camus il y a deux semaines :
"Nous nous confions rarement à ceux qui sont meilleurs que nous. Nous fuirions plutôt leur société. Le plus souvent, au contraire, nous nous confessons à ceux qui nous ressemblent et qui partagent nos faiblesses."
Et la petite blonde devant moi semble, étrangement, me comprendre.
Il faut que je change de sujet avant qu'elle ne m'assomme de questions.
Et puis, avec un peu de chance, vu son état, elle n'aura bientôt plus aucun souvenir de notre conversation :
— T'es une prof toi, non ?
Ses sourcils se redressent :
— Oui, je suis maîtresse d'école. Comment tu sais ça ?
Bien joué Kami.
— Facile. Tout d'abord, tu t'exprimes distinctement et tu as eu beaucoup de patience avec le serveur. Ensuite, tu écoutes tout ce que je dis avec intention et tu fais beaucoup de gestes avec tes mains quand tu me racontes tes histoires. Enfin, je te ferai remarquer que tu m'as tendue un mouchoir. Il y a que les profs et les psychologues qui font ça. Or, tu parles beaucoup trop pour être une psy.
Mon analyse a le mérite de la faire rire.
— Et toi, c'est quoi ton job ? Mentaliste ?
Vraiment curieuse cette nana.
— Pour l'instant, je travaille à la librairie "Chapitre", je sais pas si tu connais. On ne vend que des livres d'occasion.
Sa tête se balance de droite à gauche :
— Non, mais, je vais en parler à un ami. Il va adorer.
C'est alors qu'elle commence à faire un drôle de signe avec sa main.
Voyant que je l'interroge du regard, elle m'explique :
— Il y a mon copain et toute sa famille. Je leur ai dit de me rejoindre ici .
Je me retourne pour observer ce qui se passe de l'autre côté du trottoir. Un petit troupeau de mecs et de nanas observe Lana avec intention. Une grande majorité de ces personnes porte des lunettes de soleil ainsi qu'une casquette sur le haut du crâne.
On dirait une secte.
Je m'exclame avec ironie :
— Elle est vraiment minuscule sa famille.
— Je sais.
Son regard s'adoucit davantage quand un garçon s'éloigne du groupe et se dirige vers notre table.
Je suppose qu'il doit s'agir de son mec.
Mon hypothèse se confirme quand elle l'embrasse furtivement sur les lèvres avant de se coller contre lui.
A première vue je dirais qu'ils n'ont rien en commun. Lana semble assez classique avec sa petite robe noire et ses talons hauts. Alors que son mec a des cheveux bruns et bouclés qui lui tombent sur les épaules ainsi qu'une casquette sur la tête et des baskets aux pieds.
Il revient vraiment du tribunal ?
Le garçon lui murmure quelques mots à l'oreille avant de l'embrasser sur le front.
Au moins, ils sont mignons.
— Ça va ?
Sa voix est plutôt basse. Il enlève ses lunettes ce qui me permet de découvrir des yeux sombres et expressifs. Il ne semble pas de très bonne humeur.
— Oui. Je suis venue boire un verre, j'en avais besoin.
Un verre ? Plutôt cinq ou six.
A cet instant, Lana semble, subitement, se rappeler de ma présence :
— Je dois encore payer nos verres. dit-elle en pointant nos consommations d'une main.
Quand elle se rapproche à nouveau de la table, elle trébuche et doit se retenir à la table pour ne pas tomber.
— Lana, quelle idée de boire quand t'as rien avalé depuis plusieurs jours. grogne son mec avant de regarder derrière mon épaule.
Je peux lire sur ses lèvres qu'il demande à son groupe de venir l'aider avec la petite prof.
— Vous en faites pas, je vais payer. finis-je par déclarer en me levant à mon tour.
Le garçon me remercie, il n'aura pas à se taper la note finale.
Son teint hâlé et ses mimiques me disent vaguement quelque chose. Je ne sais pas pourquoi, mais, je pense l'avoir déjà croisé quelque part.
Lana se défait de son étreinte pour me serrer la main :
— Merci. J'ai pu me changer les idées grâce à toi. T'as vu ? Ca, c'est Idriss, mon super copain !
Le garçon passe une main dans sa barbe, des fossettes apparaissant sur son visage :
— Jolie Lana, il faut qu'on y aille maintenant, puis en parlant un peu plus fort, Mek, bordel, viens m'aider.
Une voix s'élève alors dans mon dos :
— Balek, t'as voulu sortir avec elle, t'assumes.
Je connais cette voix... J'en suis persuadée.
Idriss lève les yeux au ciel avant de pousser quelques jurons destinés à son interlocuteur.
Il est temps pour moi de partir.
Je me retourne, prête à franchir les portes du bar lorsque mon regard croise celui de la personne dont la voix m'était étrangement familière.
Génial.
Il ne manquait plus que ça.
Qu'est-ce qu'il fout ici celui là ?
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Hey,
Juste pour vous dire que le premier bonus du Tome 1 arrivera dans le courant de la semaine ♥
Voilà, c'est tout pour moi.
Merci pour votre lecture et à bientôt !
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