Chapitre 37 : J'tente l'aventure quand ça me semble imprudent.
(Jazzy Bazz - Adrénaline)
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Je sais pas trop ce qui m'a pris de venir ici. Après tout, c'est une très mauvaise idée.
Ma tête me dit de faire demi-tour mais mon coeur a besoin de comprendre d'où vient le mal. Comment des personnes comme Hakim et Idriss et des personnes fondamentalement mauvaises comme Medhi ont-pu grandir au sein d'une même famille ?
Je monte les marches quatre à quatre en regardant par terre. Je manque, un instant, de finir tête la première contre le buste d'un policier qui sortait au même moment, un café dans chaque main.
Je m'engouffre à l'intérieur et reconnais aussitôt cette étrange odeur de produits nettoyants. Dans le hall, de nombreuses personnes attendent leur tour et transpirent le désespoir. Une fille joue par terre avec son camion alors que sa maman tente de cacher son visage avec ses mains. De toute évidence, elle pleure mais refuse d'inquiéter sa fille. C'est tout à son honneur.
Quand j'arrive à l'accueil, je me place dans la file prête à subir les contrôles standards de sécurité. C'est pourquoi je prépare mon plus beau sourire. Plus je m'approche du moment fatidique et plus la boule qui s'est formée au fond de ma gorge prend de la place. Je vais mourir étouffer d'ici quelques minutes.
C'est à mon tour. Je dépose mon sac à main sur un tapis roulant et me prépare à être fouillée de la tête aux pieds. Quand l'agent effleure mon dos, je suis à deux doigts de péter un câble. Je donne ensuite mon identité et la raison de ma visite à l'un des employés.
Ce denier vérifie les informations sur son ordinateur et m'invite à passer dans la pièce à côté. Là-bas, je dépose mon sac dans un casier puis je me fais escorter jusqu'à la salle de visites.
Il y a encore plus de monde que dans le hall, c'est déconcertant. Au plafond, des caméras de surveillance épient nos faits et gestes alors que des policiers sont positionnés à chaque sortie.
On me fait assoir à une table vide. C'est là que je l'aperçois.
Il s'avance, un gigantesque sourire au coin des lèvres. Je sais que c'est lui avant même qu'il vienne se positionner en face de moi.
A l'exception de ses yeux, qui sont plus clairs, Medhi est un parfait mélange entre Idriss et Hakim.
Ses cheveux noirs sont ébouriffés et coupés courts. Il a le même nez que le plus jeune des Akrour ainsi qu'un teint halé semblable à celui de ses cousins. Quand il commence à parler, je crois entendre Hakim. Ils ont le même timbre de voix :
— Vous êtes journalistes, c'est bien ça ?
Je sais, c'est une excuse bidon...
Mais quand j'ai arrangé ce rendez-vous, j'ai pensé à Lana et à toutes ses combines et c'est venu tout seul.
J'ai pris exemple sur le maitre.
—Oui. Je voulais vous poser quelques questions, si vous l'acceptez.
Je lui tends une main qui se veut assurée. Le garçon se mordille la lèvre :
— Pas de contact physique ma belle. Mais c'est d'accord.
C'est fou. S'il n'avait pas sa tenue de prisonnier, il ressemblerait à un homme bien élevé, un poil trop dragueur.
—Merci.
Je cherche mes mots alors qu'il me scrute dans les moindres détails.
—Première question, étiez-vous heureux avant de faire ce que vous avez fait ? Je veux dire, pensez-vous que votre cadre de vie ait influencé vos actions ?
Il rit avant de déposer ses poings sur la table :
— Non je l'étais pas. Je n'ai jamais eu la reconnaissance que je méritais. Depuis toujours, il n'y en a eu que pour mes cousins.
Jassim n'avait pas ce genre de problème.
Medhi marque une courte de pause avant de continuer sur sa lancée :
—Je voulais me venger. Mais j'ai échoué.
J'acquiesce tout en faisant semblant de prendre des notes.
—Vous vouliez donc vous venger de votre cousin parce que vous n'aviez pas une belle vie à cause de lui. C'était votre seule motivation ?
—Oui.
Sa réponse est brève, ce qui m'étonne. Je pensais qu'il allait argumenter davantage, qu'il allait tenter de se défendre.
—Alors pourquoi s'en prendre à cette jeune femme ?
Mais pourquoi suis-je ici ? Il est évident que Jassim n'aurait jamais pu faire exploser une partie de l'hôpital à cause d'une jalousie excessive. Il n'a aucun mobile, aucun lien avec le personnel ou avec l'entreprise.
Il n'a rien en commun avec ce mec qui parle aussi ouvertement de ses pêchers.
— Parce qu'elle lui appartenait. Je voulais la posséder.
Depuis que je suis entrée dans cette pièce, je tente de masquer chacune de mes émotions. Mais là, s'en est trop. Je repense à la cicatrice de Lana et je lève les yeux au ciel.
—Vous trouvez ça ridicule mademoiselle ? dit-il en remarquant mon air blasé.
Je ne peux plus me taire.
— Oui ! Bien sûr que oui ! Si vous voulez mon avis, vous êtes juste con. Tout le monde a des problèmes dans la vie. Moi-même j'ai une soeur dont les besoins ont été placés en priorité par ma famille. C'est pas pour autant que je veux la faire disparaitre de la surface de la terre ou lui piquer son mec. Vous êtes un bébé qui a fait un gros caprice et qui préfère rejeter la faute sur ses cousins plutôt que d'assumer qu'il est juste moins doué et moins attachant.
Je me relève, prête à partir :
—J'en ai fini avec vous.
— Attendez.
Medhi hausse un sourcil :
—Vous n'êtes pas journaliste. Vous saluerez Hakim de ma part.
Comment est-ce possible...
Le garçon rit aux éclats avant de répondre à ma question comme s'il avait lu dans mes pensées :
—Joli bracelet. Idriss a cassé le sien petit alors il le garde dans son portefeuille. Puis, je sais qu'il sort toujours avec l'autre allumeuse de Lana. Mais celle que vous portez à votre poignet, c'est la gourmette d'Hakim. S'il vous l'a donné, c'est qu'il tient à vous.
Mon premier réflexe est d'abaisser ma manche pour faire disparaitre le bracelet.
J'aurais dû l'enlever le jour même où Hakim me l'a donné.
—N'importe quoi. Il s'en est débarrassé parce qu'il ne supporte plus de penser à vous.
Le garçon balance la tête de droite à gauche :
—Vous lui direz que j'ai hâte de le revoir. Dites-lui que je souhaite discuter avec lui du canon qui est venu me rendre une petite visite aujourd'hui.
— Vous êtes dégoutants. réponds-je alors que tout ce que je souhaite, à cet instant, c'est de lui en foutre une en plein visage.
Il est temps de rentrer si je ne veux pas avoir d'ennuie. Je me précipite vers la sortie sans prendre la peine de lui dire au revoir.
Sa voix résonne dans mon dos lorsque je m'apprête à passer la porte :
—Organisons une rencontre conjugale. Si je peux pas avoir celle d'Idriss, je me contenterais de la pute d'Hakim.
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Medhi n'a rien avoir avec Jassim ou Sofyan.
Certes, il a su jouer avec son entourage et avec Lana...
Mais Jass n'avait pas de problèmes familiaux et encore moins de problèmes d'argent. Il était heureux, ses parents le traitaient comme il fallait...
Puis, il ne convoitait personne. A part moi, peut-être, lorsque nous étions seuls et que notre relation devenait étrange...
Je passe les portes de la librairie et m'installe sur la chaise de bureau tout en m'allumant une cigarette.
Cette visite ne m'a rien appris. Du moins, en ce qui concerne mon affaire. Je me suis juste confrontée au passé des frères Akrour et de Lana... Je comprends un peu plus leur histoire sans pour autant mesurer leur souffrance ou leurs regrets en ce qui concerne ce garçon...
La journée passe si lentement que j'ai l'impression de somnoler sur place. Je ne suis pas très attentive aux demandes et aux recommandations des clients. Je me contente de hocher la tête et de répondre par l'affirmatif à chacune de leurs questions.
Quand il est enfin l'heure de rentrer, je m'installe sur le perron et savoure, quelques instants, l'air frais qui fouette mon visage.
J'aurais pu rester là durant plusieurs heures...
— Kami.
Je sursaute quand Hakim déboule de nul part.
—C'est quoi ton putain de problème ?
J'aimerais rentrer chez moi et oublier cette journée.
Malheureusement, je n'ai plus le choix. Il va falloir parler.
Et je sais qu'après cette discussion, il y a très peu de chance qu'il me pardonne un jour d'être entré sans permission dans son passé et son intimité.
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Hey,
J'ai oublié de vous dire que le chapitre 1 de "Tout lâcher" ( petite histoire sur Nekfeu) est disponible sur "Bla Bla Bla" pour ceux qui veulent.
Voilà ! Passez une bonne fin de semaine.
Amy.
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