Chapitre 35 : L'homme Fonk', toujours dans les papelards.

(Nekfeu feat. Framal & Jazzy Bazz - Besoin de sens)

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Non. 

C'est hors de question. 

Personne n'ira parler à Antoine de tout ce qu'on a pu entreprendre depuis plusieurs mois. 

Je refuse qu'il mette en jeu son intégrité, surtout pour moi, je ne le mérite pas. 

Tu te fous de notre gueule ? Je pensais que c'était ton super pote. 

Je lève les yeux au ciel avant de planter mon regard dans celui du garçon qui vient de prononcer ces mots.  

Justement. Laissez-le tranquille. On peut engager quelqu'un d'autre. 

Hakim ricane. Ken tente d'intervenir avec plus de tact que son pote : 

Si on engage quelqu'un comme tu dis, cette personne doit, déjà, accepter de faire quelque chose de pas très légale. En plus, il faudra payer une fortune sans savoir si on peut lui faire confiance.... Alors que j'ai une confiance aveugle en Flav. 

Et puis, ce sera plus rapide... souffle Lana qui a, enfin, cessé les tests foireux de mots de passe. 

Je payerai le prix nécessaire. 

Mais Antoine doit rester en dehors de tout ça. 

J'ai dit non. 

Ken passe une main maladroite dans ses cheveux indisciplinés : 

Kami, s'il te plait... 

Mais il n'a pas le temps d'argumenter davantage. 

Car Hakim s'empare de son portable. 

Quand il approche le téléphone de son oreille, je comprends immédiatement ce qu'il convoite de faire. 

Arrête ça !  je m'exclame. 

Je me précipite jusqu'au canapé mais Ken et Théo sont plus rapides que moi et font barrage. 

Lana nous rejoint elle aussi. Ses petites mains viennent se poser sur mes épaules quand elle murmure :

C'est pour ton bien qu'on fait ça. 

Et alors ? Je m'en fiche. 

C'est le bien d'Antoine qui compte, pas le mien. 

Allô mec ? C'est Haks. Tu peux venir chez oim ? C'est important. 

Je vais l'étriper, le torturer, le tuer dans d'atroces souffrances. 

Je me concentre sur ma rage et me répète ces mots inlassablement, c'est la seule façon, pour moi, de ne pas fondre sur place quand Hakim raccroche et déclare : 

Il arrive dans vingt minutes. 

****

Wow. C'est quoi ce comité d'accueil ? 

Antoine sourit. Il ne porte plus les mêmes vêtements que tout à l'heure. Il a du se rhabiller en vitesse avant de venir ici. Ses yeux sont rouges à cause de la fatigue. Il porte un vieux sweat bleu marine "1995", usé avec l'âge.

Nous sommes tous là à le fixer. Moi, je suis au fond de la pièce, assise par terre, les jambes repliées contre mon buste. 

Le garçon a d'ailleurs le réflexe de venir s'accroupir en face de moi avant  de saluer les autres : 

Qu'est-ce qu'il se passe ? 

Il n'a même pas idée. 

Rentre chez toi s'il te plait. Je suis désolée pour le dérangement. 

Antoine ouvre la bouche pour me répondre. Cependant,  Hakim le coupe dans sa lancée. Lui aussi s'est rapproché mais reste debout, les bras croisés : 

Arrête ton cinéma Kami. On a besoin de lui. 

Je ne peux pas faire ça. Alors, je me recroqueville davantage et n'ouvre plus la bouche de toute la soirée. C'est Lana et Ken qui lui expliquent les événements. 

A plusieurs reprises, ses yeux bleus tentent d'entrer en contact avec les miens. Je ne sais pas trop ce qu'il pense. Il semble parfois surpris, à d'autres moments inquiets. 

Vous êtes des malades... Si jamais vous vous faites prendre avec vos conneries, ça va mal finir. Kami, pourquoi tu m'as pas dit que t'allais à l'hôpital pour rentrer par effraction dans une pièce interdite au public ? 

Ca sonne comme des reproches et pourtant il n'y a aucune once de colère dans sa voix. 

Ce n'était pas une effraction. J'avais le code. réponds-je en haussant les épaules. 

Le blondinet esquive un sourire avant de me tendre sa main que je saisie. J'ose enfin le regarder quand il déclare : 

Je suis pas un pro alors je sais pas combien de temps ça va me prendre. Je reviendrai vers vous quand ce sera fait. 

Tout le monde le remercie sauf Hakim qui se contente d'un mouvement de tête. Moi, je serre sa main un peu plus fort. 

Putain, je ne mérite pas un ami pareil. 

****

Flav voulait se refaire une bonne dose de caféine avant de reprendre la route. Alors il a bu quelques tasses, beaucoup trop mêmes. On s'est fumé une cigarette sur le balcon, laissant Hakim seul avec sa Playstation et FIFA 18, les autres étant partis depuis un bon moment. 

Avant de prendre la direction de la porte, Antoine me lance un clin d'oeil tout en m'ordonnant : 

T'en fais pas meuf, j'aurai jamais le FBI à mes trousses. 

Sa blague ne me fait pas rire. Je sais pas ce qu'il y a là-dedans. Et si c'était grave ? Et si ça le liait à jamais à cette affaire ? Je ne préfère pas y penser. 

Le garçon disparait de mon champs de vision lorsque la porte se referme. Je commence alors à trembloter.  Je passe devant Hakim pour m'appuyer contre le plan de travail. Je fixe le marbre avec attention comme si cela allait suffire à me calmer. 

On a fait ce qu'il fallait, je m'excuserai pas de l'avoir appelé. 

Non mais je rêve ? 

Tu n'avais pas le droit. C'est mon histoire. 

Je l'entends qu'il se rapproche. Il est juste derrière moi mais il est hors de question que je me retourne pour le regarder. 

C'est quoi ton problème Kami ? Je pensais que tu voulais découvrir la vérité une bonne fois pour toute ?

Je sais. C'est juste que.... en réalité... 

Les mots se perdent dans ma gorge et les larmes tombent contre le marbre. 

Que quoi  ? Parle bon sang, t'as quel âge ? Cinq ans ? 

Je veux plus perde qui que ce soit  ! Tu peux comprendre ça ? 

Je me redresse et me retourne violemment pour lui faire face. Durant une fraction de seconde, il semble surpris par mon comportement mais, très vite, il redevient l'homme sérieux que j'ai toujours connu et qui fronce bien trop souvent les sourcils. 

J'ai perdu mon père le jour où j'ai refusé d'épouser un indien et de reprendre le flambeau comme Danna. Mais c'était pas si grave à l'époque, parce que j'avais des amis formidables pour qui j'aurais pu déplacer des montagnes si on me le demandait ! Sauf qu'ils sont morts, pour de vrai ! En ce qui concerne les seuls survivants, ils agissent comme si je n'existais pas. Tu crois peut-être que c'est mieux ? Tu crois que c'est facile pour moi ? Alors Hakim, ne viens pas me reprocher d'apprécier suffisamment Antoine pour avoir peur de le perdre lui-aussi ! 

Le rappeur me dévisage toujours. Il se rapproche encore un peu plus et vient déposer l'une de ses mains le long de ma joue. 

Qu'est-ce que tu fous Hakim ?  je chuchote comme si nous étions surveillés. 

Il est bien trop près. Je peux sentir son parfum ainsi que son souffle qui vient s'écraser contre ma peau. Mon coeur bat à tout rompre alors que sa main me parait brulante. 

Hakim ne me répond pas. Il attend. 

Quoi exactement ? Je ne sais pas. Mais cette proximité me gène. 

Parce que les larmes continuent de couler et je ne supporte pas qu'il puisse me voir aussi  vulnérable. 

Et aussi parce qu'il ne reste qu'une infime distance entre lui et moi. 

Si j'avance d'un millimètre, nos lèvres se touchent. 

Or, c'est une très mauvaise idée. 

Hakim, bouge s'il te plait. 

Mais il ne m'écoute pas. 

Et moi, je suis beaucoup trop faible quand  je fais à jamais disparaitre l'écart qui pouvait exister entre nous. 

Mon coeur bat beaucoup trop vite, j'ai l'impression qu'il va s'échapper de ma poitrine pour venir s'écraser contre le sol. 

Ses lèvres sont douces et agréables. Je savoure cet échange alors que ses mains viennent se poser sur mes hanches. Ainsi, il peut me soulever et me déposer sur le plan de travail. 

Ses ongles s'enfoncent presque dans ma peau à travers le tissus alors que nos baisers deviennent plus intenses. 

C'est quand mes mains viennent entourer son visage qu'il s'écarte subitement. 

Je comprends à son regard qu'il regrette déjà ce qui vient de se passer. 

Quelle idiote putain. Comment ai-je pu oublier ce détail ? 

Il faut que tu rentres chez toi. m'ordonne-t-il lorsqu'il rejoint sa chambre et claque la porte derrière lui. 

Honteuse, je récupère mon sac et me précipite à l'extérieur du bâtiment. Mes larmes, quant à elles, continuent de se déverser le long de mes joues. 

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