Chapitre 32 : Les jeux d'rôle ne sont pas toujours des jeux drôles.
(L'Or Du Commun - Jeu)
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La vieille dame me tend une main assurée à laquelle je réponds avec de moins en moins d'envergure quand elle m'explique enfin :
— Je suis la grand mère d'Hakim.
C'était évident mais j'avais toujours espoir d'échapper à ce moment...gênant.
En tout cas, l'air de famille est immanquable. Ils ont les mêmes yeux sombres qui leur donnent ce côté méfiant et dur.
Je ne sais pas ce que je dois dire, ni ce que je dois faire. Pour une fois dans ma vie, je ne prends aucune initiative.
Je me contente d'énoncer un fait :
— Enchantée. Kamilah.
Parce que c'est la seule information qui ne nous mettra pas en danger dans l'immédiat.
— Et bien Hakim ? Depuis quand es-tu le genre de garçon à faire des cachoteries ?
Si la situation n'était pas aussi dramatique, j'aurais pu éclater de rire.
La vieille dame n'est pas plus haute que Lana et pourtant, elle se place devant son petit fils comme si elle le dominait que cela soit par sa taille ou par sa force. Les mains sur les hanches, elle attend une réponse du principal concerné.
— Je t'expliquerai plus tard. Ici, on a pas vraiment le temps.
Bonne idée. Au moins, on pourra réfléchir à un scénario qui tient, un tant soit peu, la route.
— Très bien. J'attends ton appel.
C'est au tour de maman de la saluer et je ne cesse de me répéter intérieurement : Putain, On est vraiment dans la merde.
Mais si on veut s'en sortir, il faut gérer une chose à la fois.
Et la première chose à faire, c'est apprivoisé Lana et Idriss.
— Dis maman, tu peux regarder s'ils ont reçu ma crème Avène ? S'il te plait.
Pour mon plus grand soulagement, elle accepte et s'éloigne vers la longue file menant au comptoir. Je me tourne alors vers Lana, attendant qu'elle ait un éclair de génie qui suffirait à nous débarasser de cette dame qui est déjà en train de cuisiner Hakim :
— Tu vois, j'avais un pressentiment, je devais accompagner cette pauvre Lana à la pharmacie. Et j'ai bien fait. Depuis quand ça dure votre amourette ? Tu peux au moins répondre à ça ?
Son monologue est entrecoupé par quelques mots en arabe dont je ne connais pas la signification mais j'ai très peur qu'Hakim finisse par se retrouver à court d'argument et qu'il doive se justifier sur-le-champ.
Heureusement pour moi, la petite blonde reçoit mon signal :
— Id ? Tu peux raccompagner ta grand-mère jusqu'à la voiture ? J'arrive.. Et c'est indiscutable ! , ajoute-t-elle en le voyant d'humeur à négocier quelques minutes de torture supplémentaires.
Lorsque nous nous retrouvons, enfin, seuls tous les trois, Lana s'exclame :
— C'est quoi ce bordel ? Vous sortez vraiment ensemble ?
— Non !, nous nous exclamons en coeur.
Le couple de personnes âgées continue à nous dévisager. Je les fusille du regard avant de m'adresser directement à Lana :
— Ecoute, on va en discuter mais pas ici.
Lana acquiesce :
— Très bien. On se retrouve chez moi vers 21h. J'apporterai de quoi bouffer.
Et sur ce, elle se dirige vers la caisse.
Hakim a juste le temps de s'exclamer :
— Tu dis rien aux autres Minus !
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Tu parles.
Quand nous débarquons chez Lana, le soir même, nous avons l'"agréable" surprise de tomber non pas sur la blonde ou sur son idiot de mec.
Mais sur les deux membres restants du S-Crew.
— Et bien alors, le Mekra est amoureux ? ose murmurer Ken quand son pote passe devant lui.
Théo pouffe de rire comme un adolescent lorsque Hakim hausse un sourcil :
— Mon poing dans ta gueule ça t'intéresse ?
Il se précipite ensuite dans l'appartement et parle un peu plus fort que d'habitude :
— Fram, petit connard, montre toi.
Ce dernier sort comme une fleur de sa cachette, la chambre je crois, un t-shirt moulant sur le dos et un short de sport.
— Oh Haks, je suis content de te voir. J'ai parlé avec notre mif tout à l'heure...
Il s'approche et maintient sa phrase en suspend le temps de me saluer. Il s'approche ensuite de son frère qui a les poings serrés.
Je sais pas à quoi il joue mais il ne tient vraiment pas à sa vie.
— Accouche.
— Je leur ai dit que tu sortais avec la jolie Kami. Je suis pas le seul à le penser d'ailleurs. J'ai montré des photos à tout le monde. Ils ont hââââte de la rencontrer.
Ken et Théo checkent leur pote et tous trois partent dans un fou rire incontrôlable.
Moi, je me dis surtout qu'on n'a jamais été autant dans la merde.
Car sa famille est, maintenant, autant impliquée que la mienne, sans aucune raison valable.
Hakim a son regard qui s'assombrit. Il doit me détester.
Je peux le comprendre. Si c'est vraiment sérieux avec Roxanne, il voudra la leur présenter... Et moi, je viens de tout gâcher.
Je suis sortie de mes pensées quand Hakim se jette sur son frère et le plaque au sol. Idriss est couché à plat ventre, son frère sur le dos. Il lui tire les cheveux d'une main et lui bloque ses bras de l'autre.
— Petit frère, t'as toujours tendance à oublier que je suis plus fort que toi. Dis adieu à tes cheveux longs, je vais te les arracher balec.
Idriss pousse alors un cri de loup enragé :
— Non pas mes veuchs Haks ! T'es pas cool, c'est bon.
Hakim a toujours l'air en colère mais je le soupçonne d'adorer ce petit moment fraternel.
— A une seule condition.
Fram ne répond pas. Hakim fronce les sourcils et tire davantage sur sa tignasse.
— Aie ! Ouais, bon, je t'écoute.
Secrètement, je rêve qu'il aille jusqu'au bout de ses menaces...Qu'on lui coupe les cheveux bon sang !
— Tu dois dire que je suis le plus fort.
Deux gamins. Deux gros gamins attardés.
Hakim resserre une nouvelle fois son étreinte ce qui fait abdiquer Idriss bien trop facilement :
— C'est bon, t'es le plus fort.
— T'es le plus fort qui ?
— T'es le plus fort Haks.
Le grand frère n'a pas le temps de savourer sa victoire car Lana fait à son tour son apparition dans l'appartement, des sacs remplis de Sushis dans les mains.
Elle les dépose sur la table du salon et observe, presque ennuyée, son copain qui se redresse avec la dégaine d'un enfant de deux ans.
— Je t'avais dit de pas le sous-estimer. souffle-t-elle avant de m'offrir son plus beau sourire.
Les quatre garçons se jettent sur les différentes boites. Lana prépare une petite assiette qu'elle me tend puis s'installe sur une chaise pour nous observer déguster ce plat qui a du lui couter très cher.
Car oui, les sushis, c'est du vol (si vous voulez mon avis).
— Bon, maintenant que vous êtes repus, j'ai le droit de savoir pourquoi vous faites semblants de sortir ensemble ?
Tout le monde cesse immédiatement de parler quand Lana pose cette question. Ils me regardent tous avec insistance, même le grand Akrour.
Alors, je décide de leur relater les événements de ces derniers mois. Comment ce petit mensonge a été créé dans le but de faire taire mon père et comment Hakim a accepté de m'aider.
Bien évidemment, j'omets certains détails. Notamment, celui qui leur indiquerait que j'ai couché, un soir, avec leur pote.
— Vous êtes des inconscients..., conclue-t-elle, Comment vous allez faire maintenant que les Akrour sont impliqués, eux-aussi, à cause de cet imbécile ?
Lana pointe Idriss du doigt qui est trop occupé à livrer un combat sans merci avec ses baguettes pour nous écouter attentivement.
La petite prof n'a pas tord.
On est des inconscients et Fram est un con de première.
— On arrête tout, tranche Hakim dans la seconde, Elle dira à ses parents que c'est fini et moi pareil avec la mif.
Ouais, il est temps pour moi de le libérer de ce drôle de job...
La soirée suit son cours calmement. Je me contente d'écouter les histoires de Ken et de Théo qui semblent avoir toujours quelque chose à raconter.
Ils finissent par rentrer chez eux aux alentours de minuit. Quelques minutes plus tard, c'est au tour d'Hakim de dire au revoir.
Lorsqu'il s'apprête à franchir la porte, Lana lui demande :
— Tu veux pas rester regarder un film ?
— Non.
Il ne lui laisse même pas le temps d'argumenter. La porte claque derrière lui. Lana soupire et s'effondre dans le canapé. Idriss dépose un baiser sur sa tempe avant de prendre la direction de la salle de bain.
Il est temps pour nous d'avoir une petite discussion. Il faut qu'elle comprenne pourquoi Hakim est aussi distant avec elle.
****
Un peu plus tard cette nuit là, je suis couchée dans mon lit et je regarde par la fenêtre la pluie s'abattre contre la vitre.
J'ai encore rêvé.
Il faut que je me rende à l'évidence... Quand Hakim n'est pas là, les souvenirs reviennent au galop.
Et j'en peux plus de les revivre.
Car à chaque fois cela ravive la douleur.
Une douleur qui, en principe, n'existe plus.
Je tente à nouveau de fermer les yeux quand mon téléphone vibre sur la table de nuit :
" Tu l'as convaincue de le faire."
Le numéro n'est pas enregistré mais je n'ai aucun doute sur l'identité de ce messager.
Lana a du lui dire qu'elle acceptait, enfin, de se faire opérer.
Durant une heure, j'ai expliqué à la petite blonde à quel point il tenait à elle et à quel point il avait l'impression qu'elle les abandonnait en refusant la mastectomie.
Elle a pleuré, c'est normal. Ce n'est pas un choix facile et je lui ai dit que ça restait avant tout son choix, que jamais elle ne récupèrera cette poitrine parfaite qui la caractérise tant, même si on lui donne la possibilité de choisir une chirurgie mammaire conservatrice.
Je lui ai fait part de mes connaissances. Elle a écouté, elle a parlé et elle m'a dit qu'elle allait y réfléchir.
On dirait qu'elle a enfin pris sa décision.
Un deuxième message s'ajoute à la suite du premier :
" On peut encore emmerder ton daron si tu veux. Je te dois bien ça."
Je devrais lui dire que non, que c'est stupide et que c'est l'occasion pour nous de réparer cette erreur.
Mais je me contente de répondre :
"Ok."
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Chapitre très difficile pour moi à écrire.
J'espère qu'il vous aura plu, malgré tout.
Sinon, je suis totalement en manque de concert là.
J'assiste à celui de l'Or Du Commun le 12 avril et ça me semble encore si loiiiin.
Et vous, il est prévu pour quand votre prochain concert ?
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