Chapitre 60

_ On est pas obligé de faire ça, assure Liam.

Je serre les dents. Comme s'il m'avait laissé le choix. Il suffit qu'il parle pour refaire sortir tout la colère et la rancoeur que j'ai à son égard.

_ Je n'avais pas le choix Adelia, plaide-t-il, c'était la seule chose à faire...
_ À cause de toi Lucas est mort, craché-je.
_ Je ne l'ai jamais voulu...
_ Voulu ou pas, ce que tu as fait a causé sa mort et ça tu ne pourras pas l'effacer, fais-je froidement.

Je vais exploser, comme de l'eau contre un barrage, prête à céder sous la pression, et je laisserais des mots sortir, des mots que je ne veux pas révéler.

_ Laisse moi passer, ordonné-je.
_ Il y a un autre moyen, suggère Liam.
_ Tu es sourd ?! hurlé-je, laisse moi passer !
_ Non.

Un rire mauvais s'échappe de mes lèvres.

_ Oh que si, sinon je tire une balle entre tes deux yeux, le menacé-je.
_ Je te ferais remarquer que j'ai moi aussi une arme contre toi.

Une impasse. Je suis dans une impasse, il y a sûrement un moyen d'en sortir mais actuellement je n'en vois aucun.

_ Et si nous réglions ça d'une autre manière ? propose t-il. Sans les armes.

Ça ne me plaît pas, mais c'est malheureusement ma seule option. Je hoche alors la tête.

Simultanément, nous déchargeons notre arme avant de la jeter plusieurs mètres plus loin derrière nous.
Mes yeux dans les siens, méfiants, la tension se tend.

Liam court tout de suite vers moi. Il lève son poing pour me frapper, je me baisse pour esquiver et tape dans son abdomen. Il se tord durant un bref instant avant de frapper mes côtes, je serre les dents pour faire abstraction de la douleur et abats mon poing sur son visage. Liam cogne à son tour mon visage, et contrairement à lui, je m'écroule au sol.
Je roule par terre et me relève rapidement, en ignorant la douleur et les vertiges. Celui que j'appelais autrefois mon meilleur ami lève sa jambe pour essayer de me donner un coup sur le flan, je l'attrape de justesse et frappe dans son estomac avec mon pied puis mon poing. Il serre les dents, retenant une plainte de douleur, et se dégage de ma prise avant d'enrouler ses bras autour de moi. Liam me balance comme une vulgaire poupée de chiffon.

Mon corps s'écrase brutalement sur le sol, et la douleur se propage rapidement dans tout mon corps. Il va finir par me briser les os. C'est une longue agonie, j'en ai le souffle coupé. Mon cri raisonne dans tout le couloir, et je sens le sang couler à nouveau de mon nez, cet horrible arrière goût métallique envahissant ma gorge. Tous mes membres se crispent, et je sais que c'est parce qu'à la douleur physique s'ajoute la douleur psychologique, l'horreur qui me broie le cœur. Je suis en train de me battre à mort avec celui que je considérais comme mon frère depuis toujours. Un sanglot se coince dans ma gorge, et je tremble violemment.

_ J'ai pas envie de tuer Adelia, déclare Lia d'une voix étranglée. Ne m'oblige pas à le faire...

Difficilement, je reprends mon souffle, chaque parcelle de mon corps me fait mal, et les mots de Liam rendent ce calvaire interminable. Il faut que j'en finisse au plus vite, même si c'est dur. Mon cœur bat si vite, témoin de mon angoisse et des souvenirs de mon passé commun avec lui qui remontent en moi et brouillent mon esprit, m'empêchant de réfléchir clairement. Le dilemme qui me déchire est insoutenable.

_ Je ne compte pas abandonner Liam, tranché-je.

Son regard s'assombrit et les traits de son visage se durcissent, ne laissant aucune places à la moindre émotion. Il sait ce qu'il à faire et je sais que Liam sera en mesure d'aller jusqu'au bout, contrairement à moi. Car sa fidélité au gouvernement et ses convictions sont si fortes qu'elles pourraient venir à bout de son humanité.
Je ne sais pas réellement si j'en ai la force, mes sentiments guident totalement mes décisions, et ça ne devrai pas être le cas, surtout dans une telle situation. Mais je suis comme ça, du moins je l'étais. Mon frère aurait hésité, mais il aurait fait le nécessaire si c'est moi qui étais morte aujourd'hui. Mon cœur se serre douloureusement, et mon expression faciale est de marbre, traduisant mes deux états contradictoires. Je souffre affreusement, la perte d'un être cher et les quelques jours ici m'ont épuisée moralement, mais je ne peux pas me permettre de le laisser voir ma faiblesse émotionnelle, sinon c'est perdu d'avance.

_ Comme tu voudras, débite-t-il avec haine.

Cette fois-ci, c'est moi qui lance l'assaut. Je me précipite vers lui, mon corps tremblant de rage, poussé par l'adrénaline qui m'aveugle de toute douleur. Il esquive ma première attaque, mais il ne voit pas venir la deuxième. Du sang s'écoule de sa bouche, nos respirations saccadées se mélangent tandis que nous échangeons des attaques de plus en plus violentes. Nous avons vraiment l'air fous. Nos cris ne font qu'accentuer cet aspect, on pourrait même faire peur si on ne connaissait pas vraiment l'enjeu de tout ça. Des amis de toujours, ligués l'un contre l'autre parce que l'un a provoqué la mort de leur frère et se bat contre la liberté des autres.

Liam tente de me frapper, mais j'esquive, et ma jambe frappe brutalement ses côtes. Il se tord en deux, gémissant de douleur, je fais tour sur moi-même sur une seule jambe, et l'autre s'écrase durement sur son visage. Liam tombe au sol. Il secoue vivement la tête, sonné, puis se relève. Un hurlement presque bestial s'échappe de ses lèvres alors qu'il se jette sur moi. Je tombe durement sur le sol, sentant ma tête vibrer sous le choc.

Il se place en califourchon sur moi, son poing frappe une nouvelle fois ma mâchoire, je serre les dents et empêche mes larmes de couler. Je devrais être terrifiée, mais tout ce qu'il réussit à faire c'est attiser ma haine.
Ses grandes mains encerclent alors mon cou, m'interdisant l'accès à l'air. J'accroche alors mon regard à celui de Liam, et l'horreur que j'y lis me terrasse. Je ne pourrais même pas décrire l'émotion qui s'exprime à cet instant entre nous.
L'incapacité à respirer brûle petit à petit mes poumons, et je lutte pour ne serait-ce qu'un peu d'air, en vain. La pression sur mon larynx est trop forte, je bats des jambes et attaque son visage avec mes mains, mais il ne sourcille pas. Il va me broyer le cou. L'eau salée coule le long de mes joues, je peux pas mourir comme ça, pas maintenant. Pas par sa faute.
Mon cœur s'emballe, et l'approche d'une mort imminente me terrifie. Mes yeux ancrés dans ceux de Liam, il me semble percevoir dans regard froid une nuance de tristesse. Et la douleur en moi s'intensifie, les larmes inondant mon visage. Il sait qu'il est sur le point de tuer sa meilleure amie, et il en souffre, mais ne s'arrête pas. Il a décidé de tout abandonner, d'abandonner son humanité au profit d'une cause qui l'aveugle. Il ne voit plus rien, il ne peut plus être sauvé. Je l'ai perdu, lui aussi, depuis bien longtemps.
Ma souffrance est insupportable, mais je lutte encore, alors que lâcher prise serait probablement plus simple. Mais je ne peux pas me résoudre à mourir ainsi, pas si près du but, pas comme ça. Je ne peux pas laisser ce qu'il reste d'une personne que j'ai aimée venir à bout de moi. Je ne peux pas laisser triompher l'horreur qui a brisé ma vie, pas encore.
Mais malgré tout ce que j'essaie de me hurler intérieurement, je sens ma vue se troubler.

_ Adelia !

Liam sursaute et relâche la pression.
L'air entre enfin dans mes poumons, je frappe son visage avec ma tête, il gémit de douleur et ramène ses mains à son nez cassé. Avec la force de mes jambes, je le repousse le plus loin possible. Mais celui-ci revient presque immédiatement vers moi, deux mains l'empoignent et me libèrent de sa prise. Des bras passent en dessous mes aisselles pour m'aider à me relever, un son rauque sort de la gorge encore douloureuse. Petit à petit ma vue devient plus nette, et je peux voir Thomas frapper violemment la tête de Liam contre le mur, il tombe au sol inconscient.

_ Tu n'as rien ? s'empresse de me demander une voix féminine paniquée.

Maélis me tient toujours fermement, ses yeux inquiets me scrutent dans l'attente d'une réponse.

_ Ça va... peiné-je à dire.

Elle hoche simplement la tête avant de me lâcher doucement. Je vacille légèrement, la tête lourde, mes yeux se posent sur Liam. Mon chagrin revient instantanément, comme une flèche qu'on viendrait de décocher dans mon muscle cardiaque. Je ne devrais ressentir que de la haine pour lui, mais le voir ainsi m'attriste, il me fait presque pitié. Il a été manipulé par ses parents, par la société dans laquelle nous vivons, et j'espère sincèrement qu'un jour il comprendra, mais je ne serai plus là pour le voir.
Maintenant nous devons arrêtez le Gouvernement.

_ Vous êtes prêts ?

Thomas et Maélis se jettent un coup d'œil avant de hocher la tête, mes yeux se posent sur notre objectif. La porte.
Sans m'en rendre compte, je me suis déjà mise en marche vers celle-ci. Tout ce temps pour arriver à ce moment, je devrais être paniquée ou alors éprise d'une rage folle, mais au lieu de ça, ce sont des questions insignifiantes qui me tourmentent. Les informations sur le Gouvernement sont minimes, on ne sait quasiment rien d'eux, seulement que c'est un groupe d'une dizaine de personnes, ils sont riches, dangereux et savent se faire obéir. Mais à quoi ressemblent ils ? Sont-ils aussi terrifiants que l'on dit ?

Je me stoppe devant la porte, et mon cœur s'emballe. Je suis horriblement curieuse de savoir qui se cache derrière cette porte, tout ça sera bientôt fini, j'espère.
Un coup d'œil vers mes amis, ils me fixent en attendant que j'ouvre la porte, un sourire d'encouragement étire leurs lèvres.

_ On est avec toi Adelia, promet Thomas.

Je pose ma main tremblante sur la poignée, déterminée et terrifiée. Ma salive passe difficilement dans ma gorge nouée, la sueur perle mon front. Après avoir ouvert cette porte, aucun retour en arrière ne sera possible.
J'ouvre finalement la porte.

Des armes sont tout de suite braquées sur nous, je resserre ma poigne sur la lame, une dizaine de soldats nous font face. Ils entourent une grande table où siège un homme, assis dos a nous, les yeux rivés vers les grandes vitres.

_ Lâchez vos armes ! nous ordonne un soldat.

Je ne suis pas venue jusqu'ici pour laisser tomber aussi facilement, il est hors de question que je me rende. Maélis et Thomas semblent de cet avis, ils tiennent fermement leurs armes, le visage dur.

_ Vous ne gagnerez pas, se moque l'homme assis.

Cette voix, je la reconnais. Mon cœur s'arrête lorsqu'il se lève de sa chaise pour nous faire face. M. William. Mon sang se glace, je l'avais complètement oublié, mais maintenant qu'il est en face de moi, la seule chose que je vois, c'est ce qu'il a fait subir à Caleb.

_ Le bâtiment est pris par les nôtres, on a déjà gagné ! braille Thomas.
_ Peut-être cette fois-ci, mais vous n'arriverez jamais à nous reverser, brocarde notre ennemi.
_ Où sont les autres ? les coupé-je.

M. William pose ses yeux sur moi et glousse, comme si ce que je venais de demander était ridicule. C'est peut-être le cas, mais je m'attendais à tous les voir, pas seulement lui.

_ Tu as sérieusement penser que l'ensemble du Gouvernement serait ici ?
_ Donc vous en faites partie, réalise Maélis.
_ Évidemment, et vous ne trouverez jamais les autres.

Mes amis se lancent des regards incrédules. Les membres du Gouvernement doivent être bien cachés. Avons nous fais tout ça pour rien ? C'est comme chercher une aiguille dans une botte de foin, impossible, enfin presque. Il nous faudra donc probablement des années avant de pouvoir arrêter tout ça. Si on y parvient, et si les générations suivantes suivent nos traces, rien n'est certain.

M. William lève les yeux vers l'entrée, et un air ahuri peint son visage. Au moment où je me retourne pour voir la raison de ça détresse, Caleb arrive à côté de moi. Une vingtaine de Particuliers entrent alors immédiatement dans la pièce. Mon cœur bondit dans ma poitrine et je décroche un léger sourire au Particulier aux yeux vairons avant de reporter mon attention sur M. William. Je ne devrais pas douter. Malgré les efforts qu'il nous faudra faire, malgré le temps que tout cela prendra, nous n'abandonnerons jamais. Nous continuerons à nous battre, tous ensemble.

_ Vous feriez mieux de dire à vos hommes de lâcher leurs armes, suggère Mark d'un ton autoritaire en avançant.

M. William brûle de rage, la mâchoire serrée, ses yeux noirs fixés sur Mark. Un air abattu vient alors peindre ses traits, car il sait qu'il a perdu. Un groupe d'humains armés ne peut rien face à la puissance des Particuliers. Les soldats se regardent entre eux, perdus, et ils finissent par baisser leurs armes. Mes camarades s'avancent pour les récupérer et attraper les soldats tels des prisonniers. Thomas et Maélis s'avancent vers M. William, et le fusillent du regard avant de l'empoignent durement par les bras pour le forcer à avancer.

_  Vous ne devriez pas nous sous estimer, assuré-je, parce qu'on ne s'arrêtera que lorsque votre Gouvernement sera tombé.

Ils s'arrêtent devant moi, M. William me scrute avec rage. Je ne peux que réprimander un sourire fier.

_ C'est une promesse, Monsieur.

Mes amis le poussent à l'extérieur.

Je relâche ma respiration comme si tout ce temps je l'avais retenue, mes yeux détaillent chaque soldat qui quitte cette pièce. Tous le regard abattu, le dos courbé et la tête baissée dans un signe de soumission. La plupart n'ont rien demandé, ils n'ont fait que suivre des ordres, pour nourrir une famille, pour servir leur pays en pensant que c'est juste. Évidemment je ne doute pas que certains ont eu de véritables mauvaises intentions, mais je préfère leur laisser le bénéfice du doute.
Car nous avons gagné cette bataille.

Une main se pose sur mon épaule, et un regard vairon me fixe. Quelques blessures sont visibles sur la peau de mon Particulier, rien de sérieux à première vue, le plus important c'est qu'il soit vivant. J'avale difficilement ma salive et retiens mes larmes. Précipitamment, j'enlace son corps avec mes bras, il entoure instinctivement mes épaules avec les siens. Ma tête plaquée contre son torse, le bruit de sa fréquence cardiaque calme la mienne, alors je le serre un peu plus. Mon frère est mort, mon meilleur ami nous a trahi et je n'ai aucune idée d'où est mon petit frère, mais lui, il est là. Je n'ai aucune certitude sur demain, mais maintenant, on est vivant, Caleb, mes amis. Et c'est la seule chose à laquelle je veux penser maintenant.

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Je m'excuse du retard que j'ai pris, mais avec le nouvel an et la rentrée je n'ai pas trop de temps pour écrire !

Donc comme vous vous en doutez la fin est proche, même très proche, j'ai eu du mal à écrire ce chapitre qui est très important dans la fin, ça marque presque la fin du livre mais il restera un ou deux chapitres avant l'épilogue je ne sais pas encore 😭

N'hésitez pas à commenter, à me donner  votre avis, et je vous invite à aller voir ma deuxième fiction qui vient de commencer

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