Chapitre 51

Je suis pétrifiée, encore une fois impuissante. Rien ne se passe comme prévu et l'intervention de Mr. Williams rend les choses plus compliquées. Ma chance de sortir Caleb d'ici semble peu à peu disparaître.

Le bras de Caleb se resserrent autour de mes épaules, faisant dévier mon regard vers lui. Ses yeux vairons fixent Mr.Williams, et je ne peux distinguer aucune once de gentillesse. S'il avait pus le tuer d'un simple regard, il l'aurait fait.

_ Tu pensais vraiment avoir une quelconque chance de le sortir d'ici ? Se moque le soldat.

Je tourne les yeux vers lui, il pointe son arme à feu sur nous, un rictus moqueur sur les lèvres, comme si nous rappeler qu'on est dans la merde lui faisait plaisir.

_ Pour être honnête, oui.

Il ricane. Il nous regarde à tour de rôle, je sens le Particulier se crisper à mes côtés.

_ Je leur avais dit, au Gouvernement, qu'il fallait prendre plus de précautions, que les jeunes qu'on amenait au Cort n'étaient qu'une bande d'adolescents incontrôlables, crache t-il. Mais ils ne m'ont pas écouté...

Il soupire, alors que je retiens mon souffle.

_ Tu vois Adelia, j'ai tout de suite su que tu serais un problème. Comme tes parents.

Je serre les dents et mon corps entier se crispe. Mon cœur accélère, poussé par la colère. Comment peut-il dire ça ?

Respire Adelia, il ne fait que te manipuler, il attend une réaction de ta part.
Il va falloir que je me montre plus maligne, alors je relève la tête et lui offre un faux sourire en haussant les épaules.

_ Quel gâchis, tu étais excellente, mais le Cort est d'accord avec moi, on ne peut pas te laisser la vie après ce que tu as fait aux tiens.

_ Je n'adhère pas ce que vous faites, je ne veux pas faire partie de ce génocide.

Il rit encore.

_ Adelia, crois moi quand je te dis que tu vas vite regretter de nous avoir trahis, dit-il froidement.

Il avance un peu plus dans la pièce, instinctivement, je recule avec Caleb. Mr. Williams prend un air faussement déçu et pointe son arme sur moi.

_ C'est encore à moi de faire le sale travail...

Caleb passe son bras devant moi, poussant mon corps derrière le sien. Mr. Williams appuie sur la gâchette, laissant le bruit de l'arme résonner dans toute la pièce.
La balle siffle dans les airs avant de percer l'épaule de Caleb. Étant déjà bien affaibli, son corps s'écrase sur le sol.

_ Caleb !

Je tombe à genoux à côté de lui, mes yeux examinent sa blessure d'où le sang s'écoule, et mon Particulier qui lutte pour ne pas fermer les yeux. La mâchoire contractée, il pose ses yeux sur moi, mes deux mains se plaquent sur ses joues.
Je suis une nouvelle fois terrifiée, impuissante, je ne suis pas assez forte pour le protéger et c'est ce qui m'effraie le plus. Parce que lui ne cesse de le faire pour moi au péril de sa vie et moi j'en suis incapable. Il souffre, j'ai mal, tellement mal de le voir comme ça.

_ Vous êtes pathétique.

Mon corps tremble de colère, si je pouvais faire la même chose à Mr. Williams que ce qu'il a fait...
Je lève les yeux vers ce monstre, soutenant son regard. Il pointe de nouveau son arme sur moi.

_ Ne faites pas ça... articule difficilement Caleb.

Je baisse les yeux vers lui, la gorge nouée. Qu'est-ce qu'il va devenir ? Qu'est-ce qu'ils vont lui faire ?

_ Je suis désolée...articulé-je d'une voix presque inaudible.

_ Non Ad'...

Je relève les yeux vers Mr.Williams, et me redresse doucement.

_ Adelia qu'est-ce que tu fais ?! Crie presque Caleb.

Celui-ci tente de se relever mais il est trop faible. Il continue de m'appeler, mais je ne lui réponds pas. Je vais mourir et le regarder serait encore pire. Rien que l'entendre répéter mon prénom ainsi me fait mal, mon cœur se comprime un peu plus.
Mr. Williams garde son arme pointée vers moi.

_ Finissons en.

Il sourit presque sadiquement. Je m'éloigne un peu plus de Caleb. Si je dois mourir pour lui éviter de succomber, je le ferais, mais je dois tenter le tout pour le tout.

Mon couteau est sur ma jambe droite, si j'arrive à l'attraper assez rapidement pour lui lancer sur l'épaule et attraper mon arme qui est dans cette pièce j'ai peut-être une chance.

C'est de la folie.

Mes doigts frôlent le manche de mon couteau. Je l'empoigne rapidement et le lance de toutes mes forces. Mr. Williams se baisse et parvient à l'esquiver en lâchant son arme.
Je me tourne vers mon arme, alors que Mr. Williams jure derrière moi, et je l'entends récupérer son arme.

Il va tirer.

Je roule sur le sol, j'attrape enfin mon arme, il tire.

Je me relève face à lui, mon arme pointée vers lui.

_ J'aurai du te tuer tout de suite, dès mes premiers soupçons, peste-t-il.

_ Oui vous auriez dû.

_ Tu sais que tu as aucune chance Adelia, soupire t-il.

_ J'aurai essayé.

Il secoue la tête et baisse son arme vers Caleb. Je fronce les sourcils, mon cœur rate un battement.

_ Qu'est-ce que vous faites ? Tremblé-je.

_ Tu ne me laisses pas le choix. Lâche ton arme ou je lui fais exploser la cervelle.

J'avale difficilement ma salive. Non il ne peut pas faire ça. J'ai été stupide, c'était évident qu'il ferait ça. Je suis trop bête, et maintenant je ne contrôle plus rien.

_ Adelia...

Mes yeux se plongent dans ses magnifiques yeux vairons.

_ Tire, t'inquiète pas pour moi...

Mes yeux laissent quelques larmes s'échapper, je ne peux pas faire ça. Il ne sait pas, il ne sait pas à quel point je l'aime.
Je me souviens exactement comme si c'était hier de la fois où je l'ai vu pour la première fois. À cette époque, je ne me doutais pas qu'il allait complètement chambouler ma vie.
Au-delà de parler d'amour, il m'a montré, il m'a donné la vérité, et delà est venu s'installer ce nouveau sentiment.

Je ne peux pas. C'est au dessus de mes forces.

Mon cœur cogne contre ma poitrine, mon corps entier tremble. Je baisse la tête et lâche mon arme.

J'ai perdu.

Mr. Williams rit.

_ C'est tellement facile.

Je soupire, il m'a eu oui. Mais je ne pouvais pas tirer et risquer la vie de Caleb.

_ Il faut vraiment que tu apprenne à fermer ta grande gueule, résonne alors derrière moi.

Zack.

Je relève vivement la tête, Zack apparaît d'un coup. Il empoigne Mr. Williams par le cou et le propulse contre un mur. Son corps tombe au sol sans jamais se relever.

_ Tu en a mis du temps !

Il sourit. Je m'empresse de rejoindre Caleb qui est toujours au sol, je me baisse à sa hauteur et attrape son bras valide pour le passer autour de les épaules.

_ Tu es complètement cinglée, souffle-t-il.

Non, je suis juste capable de n'importe quoi pour protéger les personnes auxquelles je tiens.

Je passe mon bras autour de sa taille, Zack avance vers nous pour m'aider à remettre Caleb sur ses jambes peu stables.

_ Content de te revoir, dit Zack à Caleb.

Ce dernier hoche la tête.

_ C'est réciproque...

Thomas arrive soudainement à l'embrasure de la porte.

_ Il faut vite y aller, ils arrivent.

Mon ami semble assez paniqué, mais au moins il a récupéré suffisamment de forces pour tenir debout.
Je peux sentir la chaleur du corps de Caleb contre le mien, ma peau frissonne lorsque ma main froide entre en contact avec sa peau. Mais les détails qui me frappent le plus, c'est le sang sec sur son corps, les marques supplémentaires sur son torse musclé, ainsi que quelques unes dans le creux de ses bras, indiquant différentes injections. Et je n'ai pas eu le courage encore de regarder son dos.

Nous sortons alors de la pièce, je suis forcée de tirer sur Caleb pour qu'il avance plus vite. Le couloir est vide, aucun bruit, excepté nous. Pourtant je suis en totale panique, comme si une horde de soldats nous courrait après, mais ce n'est pas le cas. Je sais que le danger n'est pas loin, mais où ?

Nous repassons par les mêmes portes, sans croiser personne, ce que je trouve suspect.

Pourquoi il y a personne ? Je n'aime pas ça. Ils préparent quelque chose.

Caleb à côté de moi, a du mal suivre le rythme, je peux entendre sa respiration saccadée près de mon oreille, la difficulté qu'il a à respirer me fait mal. Mais ce n'est pas pour cela qu'il abandonne. Au contraire, il fait tout pour tenter de rester à bon niveau, ce n'est pas sans difficulté.

Nous arrivons rapidement dans la cage d'escalier.

Rapidement, Zack devant et Thomas derrière nous, nous descendons les escaliers aussi vite que possible. Mais mon Particulier manque plusieurs fois de tomber, heureusement que Tommy est là pour le rattraper.

_ On y est bientôt Caleb, l'encouragé-je.

Nous sommes à la porte qui mène au couloir de sortie.
Zack devant se stoppe brusquement devant nous.

_ Quoi ? Demandé-je.

Il reste un instant immobile.

_ Ils sont là, lâche Caleb.

_ Les soldats sont derrière la porte, ils nous ont attendus, complète Zack.

Merde. Qu'est-ce qu'on va faire maintenant ?

_ T'inquiète pas Adelia, on va sortir de là, me rassure Zack.

_ Comment ? S'empresse de demander Thomas.

_ Faites moi confiance.

Je jette un coup d'œil à Tommy qui semble septique. Pour l'instant c'est notre meilleure chance, et j'ai confiance en lui.

_ Thomas, tu devrais remplacer Adelia pour supporter Caleb, il faut qu'on traverse ce couloir aussi vite que possible.

Je laisse alors la place à Thomas à contre cœur, mais il a raison. Thomas est de base plus fort et plus rapide, il ira toujours plus vite, même avec Caleb, contrairement à moi. Les yeux vairons du Particulier ne m'ont pas lâchée, je lui souris doucement en espérant qui se laisse duper par ce geste et qu'il croit que je vais bien. Physiquement, je n'ai aucun problème, mais en réalité mon corps tremble d'angoisse, ne sachant pas si réellement nous allons pouvoir sortir d'ici.

_ Je passe devant. Adelia, tu me suis puis vous deux derrière, dicte Zack.

Je hoche la tête.

_ Ad'...

Je me tourne vers Caleb, même dans sa voix on distingue son état d'épuisement physique et probablement moral. Ses cheveux noirs tombent légèrement sur son front couvert de sueur, son torse se lève et s'abaisse à une vitesse irrégulière, ses lèvres presque sèches sont entrouvertes pour y laisser l'air passer.
Je me rapproche de lui, réduisant à quelques centimètres l'espace entre nous deux. Son souffle chaud s'abat contre ma joue.

_ Reste dans mon champ de vision, d'accord ? Ordonne t-il. S'il te plaît Adelia.

Ses yeux me supplient, il est inquiet, je pense que c'est surtout parce qu'il n'est pas en état de faire quoi que se soit.

_ Tu sais que je suis capable de me défendre ? Souligné-je.

_ Adelia... soupire Caleb.

Je hoche doucement la tête, et amène ma main dans ses cheveux pour dégager un minimum son front.

_ Je resterai dans ton champ de vision.

Il souffle doucement, le Particulier continue de me regarder, tandis que ma main glisse sur sa joue, il appuie un peu plus sa joue contre ma paume. Caleb laisse un baiser sur ma main, provoquant il léger rictus tremblant sur mes lèvres.

Je retire doucement ma main de sa joue et me retourne vers Zack. Celui-ci sourit, je fronce les sourcils.

_ Donc vous deux ? Taquine t-il.

Heureusement que la lampe torche n'éclaire pas suffisamment, mais je pourrais jurer que mes joues sont actuellement écarlates.

_ Ferme la, gronde Caleb.

Il glousse. Un vrai gosse. Puis, il se reconcentre pour regarder Thomas afin de s'assurer qu'il est prêt.

_ C'est parti.

Zack me donne une arme à feu avant d'ouvrir la porte. Je le suis de très près, Thomas et Caleb me suivent à leur tour. Je peux presque ressentir la chaleur corporelle de mon Particulier tellement il est proche.

Dans le couloir, une vingtaine de gardes nous attendent, nous sommes encerclés. L'un d'eux avance, nous menaçant avec son arme, comme les autres.

_ Lâchez vos armes et rendez-vous !

Zack ne sourcille pas. La main de Caleb accroche mon avant bras, comme s'il avait peur que je fonce dans le tas.

_ Lâchez vos armes ! Hurle le soldat.

Zack s'avance doucement vers lui, l'air détendu. Mais qu'est-ce qu'il fait ? Il est complètement fou.
Je vais pour le suivre, mais Caleb me retient. Je tourne la tête vers lui.

_ Il sait ce qu'il fait.

J'aimerais justement savoir ce qu'il fait. Je pose de nouveaux les yeux vers Zack.

_ N'avancez pas !

Zack s'immobilise complètement, il met les mains en l'air, les doigts bien écartés.

Je jette un coup d'œil à Caleb et qui me fait un signe de tête l'air de dire de laisser faire.

La luminosité augmente progressivement. Les soldats, perplexes, se mettent à regarder le plafond, alors qu'en réalité, c'est Zack qui provoque ça.

Les ampoules éclatent.

Je sursaute, surprise, nous ne sommes éclairés qu'avec la lampe torche que Thomas tient.
Puis des bruits, comme un objet qui tombe au sol résonne, une arme qui tombe, encore et encore, suivis de plaintes de douleur.

Il y en a dans tous les sens, le bâtiment tremble presque. Les soldats se mettent à cracher du sang, qui se met ensuite à couler par le nez et les oreilles. De tout ce qui m'a été donné de voir, ceci est celle qu'il m'est le plus insupportable à regarder.
Tout objet présent finit par exploser comme les ampoules. C'est un carnage.

_ Courrez ! Nous hurle Zack.

Thomas me pousse à courir devant eux, forçant Caleb à me lâcher. Je me dirige en courant vers la porte, passant entre les soldats qui agonisent. Je jette un coup d'œil derrière, Zack ne suit pas. Qu'est-ce qu'il attend ? Il continue de faire subir d'horribles souffrance aux soldats, qui finissent par s'écrouler.

On est devant la porte, je l'ouvre précipitamment, la respiration et les battements de mon cœur saccadés.
Je pousse Thomas et Caleb à passer devant. Je me retourne pour apercevoir Zack à la même place.

_ Zack ! Crié-je.

Le Particulier se tourne vers moi, épuisé. Du sang s'écoule de son nez. Il commence à courir dans ma direction, en évitant les soldats presque morts.

Une détonation se fait entendre.

Zack tombe au sol, dans un bruit sourd à faire froid dans le dos.

Le sang jaillit cette fois ci de sa blessure par balle au milieu du front. Je suis glacée sur place, j'ai l'impression que mon cœur s'arrête. Je suis paralysée par l'horreur.

Ça ne peut pas être vrai.

Zack est mort. Non, c'est impossible, c'est forcément irréel, il ne peut pas être mort. Non.

Je manque de souffle, rendant ma respiration bruyante.

Il est là, au sol, les yeux encore ouverts mais sans aucune lueur de vie. Le sang s'accumule autour de lui et son teint est soudainement blanc. Il ne bouge plus.

Je lève les yeux.

Mr. Williams a une arme à la main, mon arme. Il est propulsé à plusieurs mètres plus loin.

_ Adelia ! entends-je.

Il est mort. Je n'arrive plus à bouger. Il est mort.

Un bras s'enroule autour de ma taille.

_ Non ! Lâche moi, on ne peut pas le laisser ici ! Hurlé-je.

_ Si, il le faut, on doit partir !

Caleb me plaque contre son torse.

_ Je t'en prie Ad' on doit partir, souffle t-il à mon oreille.

Il a raison. Nous allons tous mourir si nous restons ici.

Alors je me laisse traîner par le Particulier jusqu'à l'intérieur. Et nous reprenons le même passage.

Mes pas sont automatiques, je ne réfléchis pas à ce que je fais, Thomas et Caleb sont derrière moi et me suivent de près.

Zack est mort.

L'image de son corps sans vie tombant brutalement sur le sol se remet en boucle dans ma tête. Et tout ce sang autour de lui... On ne se rend compte à de la quantité de sang que possède un corps que lorsqu'on l'a vue.

Il n'y a même pas cinq minutes il était encore là, et maintenant il ne l'est plus, il est mort. La vie est une chose si fragile, une chose qu'on peut t'enlever à tout moment avec tant de facilité, c'est terrassant.

Je grimpe prestement à l'échelle de sortie, et je me retrouve rapidement au milieu de la forêt.

Je n'ai plus la force.

Mon corps est à genoux au sol, et les larmes inondent bientôt mes joues. J'ai de nouveau du mal à respirer. Des sanglots incontrôlés finissent par s'échapper de mes lèvres. Je ramène mes mains tremblante contre ma poitrine.

Il est mort, et c'est moi qui l'ai conduit là.

Quelqu'un s'abaisse à mon niveau, et enroule ses bras autour de moi. Caleb.

Je laisse ma tête tomber contre son torse, avant de me serrer à lui.

Tout se relâche, comme si la seule chose dont j'étais capable c'était pleurer. Tout mon énergie semble quitter mon corps un peu plus à chaque larme versée. Mes sanglots sont bruyants, et je frôle la détresse respiration.

Zack est mort.

Je me colle un peu plus contre Caleb en réfugiant ma tête dans son cou, comme si ça aillait me protéger de la vérité. Il caresse tendrement mes cheveux en embrassant mon front.
Bien que la présence de Caleb me rassure, elle ne suffit hélas pas à atténuer la douleur. Cette douleur qui rouvre des plaies au plus profond de moi.

Zack est mort.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top