Chapitre 43
Mon corps est emporté par le courant, sans que je puisse l'empêcher. Je devrais me débattre, essayer de lutter contre sa force, mais la douleur causée par ma chute est paralysante. Le froid glacial de l'eau rend chacun de mes membres plus douloureux. Tout ce à quoi j'arrive à penser c'est de retenir ma respiration, je n'arrive pas à penser à autre chose, c'est l'instinct de survie.
Je ne cesse de faire des tourbillons, agitant mes mains dans l'eau espérant trouver une surface pour pouvoir m'échapper de cette eau agitée. Mes poumons me brûlent, j'ai une folle envie d'ouvrir la bouche. On dit que lors d'une noyade la douleur vient de notre lutte pour ne pas avaler l'eau, mais lorsque qu'on lâche prise tout disparaît.
Mais même en sachant ça, je veux encore lutter. Le temps semble interminable, comme si j'étais condamnée à vivre cette torture pendant un temps indéterminé. Je ne le supporte plus, et pour en rajouter la seule chose à laquelle j'arrive à penser, c'est Caleb.
Comme si mon cerveau me renvoyait sans cesse des images du Particulier, avec ses magnifiques yeux vairons, des bras musclés autour de moi, et ses douces lèvres se posant sur les miennes. Mes dernières pensées vont vers lui.
Mes doigts frôlent une surface dur et froide, me sortant d'un seul coup de mon état de transe. C'est mon seul moyen de survivre. Je m'accroche immédiatement, et avec le peu de force qui me reste je ramène mon corps contre la paroi.
Je sors enfin la tête de l'eau, l'air essaie de rentrer dans mes poumons, mais je tousse fort pour en faire sortir l'eau. J'ai le cœur qui bat tellement vite, je viens même à me demander comment il fait pour continuer à battre ces derniers temps.
J'ai tellement froid, les vagues continuent de s'écraser contre moi, mais je ne lâcherai pas. C'est hors de question.
Je tourne la tête, essayant de repérer la falaise de laquelle j'ai sauté. Elle est à plusieurs mètres de moi maintenant, mais je peux distinguer les soldats guetter l'eau. Je déplace mes mains pour pouvoir me cacher derrière la roche.
Il y a l'entrée de la falaise de l'autre côté, il faut que j'y aille avant de mourir d'hypothermie, mais vêtue simplement d'un débardeur, c'est ce qui risque d'arriver.
C'est horrible, être plongée dans cet eau, le froid infiltrant tous mes pores, je ne sais même pas si je suis capable encore de faire un effort pour arriver jusqu'au rivage. Tout mon corps tremble, et à chaque tremblement j'ai le sentiment de perdre un peu plus de ma force vitale. Pour une fois, je n'ai pas mon muscle cardiaque qui menace de sortir de ma poitrine, je ne le sens plus. Si je reste ici encore trop longtemps, mon cœur va s'arrêter.
_ Tu peux le faire, me dis-je.
Comme si ça allait m'aider... mais au point où j'en suis, le semblant d'espoir qui me reste est crucial.
Je fais le tour de la pierre pour me retrouver face au rivage, j'inspire un bon coup en regardant mon objectif. Je peux le faire, je dois le faire.
Je prends appui avec mes jambes, et je pousse de toutes mes forces.
De nouveau immergée sous l'eau, je sens déjà le courant m'emporter de nouveau. Mon cœur qui semble enfin réagir, bat plus vite. Il faut que j'attrape le rebord.
Dans un élan de force, dont je ne saurais déterminer l'origine tellement mon corps me fait mal, je me demande comment je peux encore avoir de la force en moi. Mais l'instinct de survie est plus fort que tout.
Mes mains agrippent fermement le rebord, je sors de l'eau rapidement, laissant mon corps tomber lourdement sur le sol. De l'eau jaillit encore de ma bouche. Mon corps ne cesse de trembler, je vais pas tenir longtemps dans cet état, je donnerai une estimation de à peine quelques heures. Je soupire. Il y a peu de chance qu'on mon groupe me retrouve, que Caleb me retrouve.
Mon dos contre le sol, mes yeux se perdent dans le bleu du ciel; mais en réalité la seule chose que je vois, ce sont les yeux vairons de Caleb. J'ai l'impression de perdre la tête, pourtant mon cœur ralentit, comme apaisé.
Il ne viendra pas me chercher cette fois.
J'avale difficilement ma salive et ferme un instant les yeux. L'envie de me laisser aller me tente, pourquoi je devrais continuer ? Je peux tout simplement rester ici, et attendre la mort.
Les soldats vont me retrouver, ils vont me torturer et me tuer. Rien que de revoir leurs visages me donne la chair de poule.
J'ouvre les yeux, ma vue est brouillée, je ne distingue plus les détails des paysages. Je laisse ma tête tomber sur le côté, et vois alors une silhouette. Elle s'approche de plus en plus de moi, je n'ai pas peur, je ne ressens que le froid.
Soudain, ses yeux vairons apparaissent et me scrutent, ses cheveux noir tombent sur son front. Caleb. Je tends difficilement mon bras vers lui, il est là. Ma main tremble, il ne bouge plus.
_ Adelia...
Mes yeux s'ouvrent, je me redresse brusquement et regarde tout autour de moi. Personne. Ma respiration est saccadée et mon cœur bat tellement vite, j'ai réellement cru que c'était vrai, il était là.
Je passe mes mains sur mon visage, avant de repousser ma longue tignasse brune.
Il ne faut pas que je m'endorme.
Je donne pour mon énergie pour pouvoir me relever.
Et je cours.
Parce que c'est la seule chose à faire maintenant.
Je force sur mes jambes, je repousse les limite de mon corps, la respiration haletante et le cœur qui bat à tout rompre, le froid m'affaiblit.
Mes pieds s'emmêlent, je finis par trébucher, je tends les bras pour me rattraper à ce que je peux. Mon corps se cogne contre le tronc d'un arbre.
J'ai tellement envie de dormir.
Je glisse sur le sol, je suis si fatiguée, mon rythme cardiaque est devenu soudainement lent. Les paupières lourdes, je ne cède plus.
Et mes yeux se ferment.
***
_ Adelia réveille toi ! Adelia ?
La voix est d'abord lointaine, comme un écho dans ma tête. Puis chaque bruit qui m'entoure devient plus clair, ils sont de plus en plus distincts.
J'ouvre difficilement les yeux, mais la luminosité est trop forte, et ma tête me fait affreusement mal.
_ Adelia ça va ? Sonne la voix paniquée.
Mes yeux s'ouvrent pour de bon. C'est Harold qui est à genoux à côté de moi, toujours adossée à un arbre.
Il m'attrape par les épaules et me force à me lever, mes jambes tremblent sous le poids de mon corps. Le brun enlève sa veste et la pose sur mes épaules. La chaleur de son vêtements se fait vite ressentir.
Ma lucidité se remet peu à peu en place, tandis que je peux enfin voir chaque détail de cette forêt. Je pose mes yeux sur Harold.
_ Merci, soufflé-je.
Il soupire un instant en fermant les yeux avant de me regarder.
_ Tu es complètement tarée.
J'acquiesce un sourire.
_ Il faut qu'on retrouve les autres, et j'ai un bon moyen de transport, dit il avec un mouvement de tête.
Je pivote pour pouvoir ce qui se passe dans mon dos.
Un bel étalon noir.
Je souris de plus belle, je n'en avais encore jamais vu en vrai, ils sont devenus si rares, il est difficile de s'en procurer. Il est magnifique. Ma mère me disait à quel point c'était un être vivant des plus majestueux qu'elle ait jamais vu. J'ai toujours rêvé d'un voir un... et bien ma mère ne se trompait pas.
Je m'approche doucement de l'animal, ses oreilles sont redressées, il tourne la tête vers moi. Je tends prudemment ma main vers lui, il avance de lui même, ma main entre en contact avec son poil.
Un sourire se place sur mes lèvres lorsque je caresse l'animal. Il ravive mon espoir de revoir les autres, on va s'en sortir. La joie prend place dans mon cœur, me redonnant le courage de continuer.
Harold arrive à ma hauteur, il monte sur le dos du cheval, et tend sa main vers moi pour que je fasse de même. Je l'attrape et il m'aide à me hisser sur le dos du cheval derrière lui. J'entoure mes bras autour de sa taille.
_ C'est pas trop risqué ? Je veux dire, les soldats vont vite nous repérer...
_ Non t'inquiète pas, tous les soldats ont été rappelés, pour quelle raison, je sais pas. Mais on s'en occupera plus tard, explique Harold.
Je hoche la tête, il lance le cheval au galop.
***
Bien que j'ai apprécié cette balade au dos de ce magnifique animal, lorsque Harold m'a demandé de descendre, j'en fus plus heureuse.
Nous marchons entre les arbres, Harold tient l'étalon pour éviter qu'il ne s'échappe.
Je me sens beaucoup mieux, j'ai beaucoup moins froid, je me sens moins faible.
_ Merci Adelia, dit Harold en brisant le silence.
Je fronce les sourcils. Pourquoi me remercie t-il ? C'est lui qui m'a sauvé la vie et non l'inverse. Je ne comprends pas.
_ Pourquoi ?
_ Pour ce que tu as fait. Tu as dit la vérité à tout le monde, tu te rends compte du nombre de personnes qui attendaient ça ? Personnellement je ne pense pas que j'aurais eu le courage de le faire.
_ Tu n'as pas à me remercier, je t'assure.
Il n'a pas le temps de sortir un quelconque mot de ça bouche, des voix nous interrompent.
_ On va la chercher, entendis-je.
Je ne mets pas bien longtemps à reconnaître la voix rauque de Caleb.
Je m'avance de plus en plus rapidement vers sa voix, il n'y a plus rien qui compte.
_ Ça sert à rien, elle est déjà morte.
Lorsque j'arrive, personne ne remarque ma présence, pourtant je vois Caleb, qui lève le poing sur Zack.
Avec le peu de force qui me reste dans les jambes, je cours vers eux.
_ Non arrête !
Le Particulier aux yeux vairons se stoppe directement, avant de poser son regard sur moi. Des frissons parcourent mon corps entier. Cette fois ce n'est pas une hallucination.
Caleb semble perdu, ses yeux sont plongés dans les miens, il me détaille de haut en bas, je souffle. Je suis rentrée.
_ Je t'avais dit que je reviendrais, chuchoté-je.
Ses yeux rentrent de nouveau en contact avec les miens, il fais un pas vers moi.
_ Ad' !
Liam s'avance rapidement vers moi et me prend dans ses bras. Par dessus son épaule, je croise les yeux de Caleb, qui fait un pas en arrière, mon cœur se serre. A cet instant j'aimerais juste pouvoir me défaire de l'étreinte de mon meilleur ami pour aller vers lui. Mais Liam s'est simplement inquiété, en revanche Caleb, je ne le comprends plus.
Je le serre a mon tour. Mon meilleur ami se décolle de moi, il pose ses mains sur mes épaules.
_ Tu vas bien ? Demande t-il inquiet.
_ Je vais bien, assuré-je.
Je tourne la tête vers mon jumeau, je m'avance vers lui avant de le prendre dans mes bras. Il passe ses bras autour de moi, en me serrant contre lui.
_ Je savais que tu étais vivante, je l'ai senti, soufflé-t-il.
Je ferme les yeux en me serrant un peu plus. Une des particularités d'avoir un jumeau, je ne peux pas expliquer comment ni pourquoi nous ressentons ça, pourtant je peux assurer que si un jour Lucas venait à mourir je le saurai sans être avec lui, et inversement.
Je suis heureuse de les avoir retrouvés, je me sens beaucoup mieux d'un coup.
Je me détache de lui et me tourne vers Zack. Je m'avance vers lui.
_ Je suis quelque peu déçu de constater que tu doute encore de mes capacités, sourié-je malicieusement. J'ai battu des Particuliers seule il me semble. J'espère que après ça tu ne doutera plus.
Un rictus se place sur sa lèvres, il passe sa main dans ses cheveux roux en secouant la tête. Il était persuadé que j'étais morte, et j'ai cru que j'allais mourir. Mais je ne compte pas abandonner, si je dois mourir, ça sera en me battant.
_ Je ne ferai plus jamais cette erreur, assure t-il.
Je hoche la tête. Je regarde tout le groupe, Caroline, Thomas et Elliot me sourient, je les imite. Mes amis sont tous là.
_ Rentrons.
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Désolée pour cette absence, j'étais en période d'examen, et je me suis laissé le temps de profiter de ma famille durant ces vacances. J'espère que vous en avez aussi profité. 😊
En espérant que ce chapitre va vous plaire. Portez vous bien 💕
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