Chapitre 11 - Toute la vérité
Le lendemain matin, Lyse se réveilla avec le sourire et la grâce d'une princesse de conte de fées.
Je n'oublierais jamais la façon dont ses deux bras minces avaient dessiné un soleil dans les airs tandis qu'un bruyant borborygme enflait dans sa gorge, le grondement satisfait de ceux qui ont passé une bonne, très bonne nuit.
— Il est quelle heure ? grommela-t-elle, paupières encore closes, ses cils blonds frôlant ses pommettes roses de plaisir.
— Onze heures, lui appris-je d'un ton précautionneux.
Un bruit étranglé me répondit.
— Onze heures ? brailla-t-elle, pleinement éveillée désormais. Impossible ! Je ne dors jamais aussi tard, d'habitude, qu'est-ce que... Attends un peu.
Elle appuya ses paumes sur ses yeux et les frotta si fort que je crus qu'elle allait les déloger de leurs orbites. Puis, elle examina ma chambre, mon lit dans lequel je l'avais déposée, et je voyais à son expression qu'elle se demandait bien comment elle avait atterri là.
— Pourquoi... je ne me souviens pas être rentrée chez toi, hier ?
Je contemplai quelques secondes mon amie, son incompréhension un peu comique, sa bouche retroussée en une concentration telle qu'elle donnait l'impression de vouloir résoudre une équation insoluble.
C'était un tel contraste par rapport à la veille, lorsque le sommeil de Calyo la retenait encore dans ses affres, que je cédai. Je lui sautai dessus et l'écrasai contre moi. Fort, fort, fort. Si fort, de fait, que j'entendis sa colonne vertébrale craquer, ce qui la fit pousser un cri qui était en même temps un éclat de rire.
Sa joie eut l'effet calmant d'un bon chocolat chaud. J'avais eu si peur que Chris et elle ne s'en sortent pas...
— Que me vaut cet accès d'amour ? se méfia-t-elle, me donnant quelques tapes réconfortantes dans le dos.
— On-s'est-fait-attaquer-hier.
J'avais tellement marmonné dans la masse de ses cheveux qu'elle ne saisit pas un traitre mot de ce que je lui avais dit.
— Qu'est-ce que c'est ? chevrota-t-elle.
Je reconnus son imitation de sa grand-mère maternelle, qu'elle adorait singer, surtout quand la vieille dame se lançait dans des plaidoyers contre les maillots de bains « qui vraiment ne laissent aucune place à l'imagination ».
Je consentis à m'écarter d'elle et à articuler façon Miss France pendant les redoutables présentations.
— On s'est fait attaquer hier, juste avant de rentrer.
Elle ferma à demi les yeux, et je devinai qu'elle passait en revue la base de données qu'était sa mémoire.
— Je ne me souviens de rien.
— Tant mieux, soufflai-je de soulagement. Chris non plus. Il s'est réveillé un peu avant toi, et il était tout aussi déboussolé. L'élixir de Gregory a fait des merveilles.
— Elsa d'Arendelle est venue ? Et je ne l'ai même pas vue ? geignit-elle.
— Tu sais, je ne pense pas qu'il apprécierait que tu l'appelles comme ça, pouffai-je.
— Ce n'est pas comme s'il savait qui c'était, fit-elle valoir avec un grand sérieux.
— Non, mais il se douterait que ce n'est pas flatteur.
— Quoi ? J'adore la Reine des...
— Bref ! la coupai-je, saisissant ses mains pour les entrechoquer et ainsi la rappeler à l'ordre. Le plus important, c'est que vous alliez bien, tous les deux.
Même si Chris, après que je lui eus raconté toute l'histoire, était devenu aussi gris qu'un torchon fatigué. Cette virée à GhostValley l'avait vacciné pour un temps, sauf si son faible pour Cathy se révélait plus fort que la peur.
— Est-ce que c'est vraiment ça, le plus important ? rebondit Lyse, songeuse. Il faut être sacrément culotté pour attaquer une Chasseuse devant son QG. Vous savez qui c'était ?
— Par Shawn, oui. Il s'agit d'une sorcière, mais pas n'importe laquelle. Elle serait le second d'Araña, avouai-je, et un petit rire ahuri m'échappa tant la coïncidence était terrible.
— Celui pour qui les vampires t'avaient enlevée ? glapit Lyse.
J'opinai du bonnet.
— Génial, se dégonfla-t-elle, disparaissant presque dans le vieux pull d'entrainement que je lui avais enfilé hier.
— Les ennuis m'adorent, que veux-tu...
Je me levai du lit et fis un tour dans la pièce, étirant mes muscles endoloris par la tension qui ne me quittait plus désormais, fidèle compagne de galère. J'avais à peine dormi : le sort de mon frère et de Lyse m'avait bien trop préoccupée, et j'avais guetté leur réveil avec angoisse. La journée promettait d'être longue, tout comme le réveillon de Noël, ce soir.
Et pourtant, malgré la fatigue qui m'alourdissait la tête, mes yeux qui me piquaient et la migraine qui tambourinait déjà à mes tempes, je me sentais la force de gravir des montagnes.
Pourquoi ?
Parce qu'aujourd'hui, enfin, mes parents redeviendraient eux-mêmes.
Qui aurait cru que c'était Hyppolyte Constantin, sorcier en exil dans ma petite ville d'Ardoirie, qui me ferait le plus cadeau de Noël cette année ?
— Qu'est-ce que vous allez faire, alors ? s'inquiéta Lyse, toujours à moitié enfouie sous ma couette.
— Eh bien, Gregory a protégé le manoir pour que Calyo, la sorcière en question, ne puisse plus nous tomber dessus sans prévenir. Elle peut toujours envoyer quelqu'un à sa place, par contre.
— Mais qu'est-ce qu'elle veut ?
— Cet œil dégoûtant que j'ai trouvé dans la rivière la semaine dernière. Figure-toi que c'est le sien.
— Et pourquoi ne pas lui rendre ? suggéra-t-elle. Qui a envie de garder l'œil vivant d'un autre...
— Pas avant d'en savoir plus. C'est pour ça qu'on va aller interroger Agathe cette après-midi.
À cette annonce, Lyse envoya la couette sur la moquette et bondit sur ses pieds, yeux ronds comme des boules de billard.
— Vous avez retrouvé sa trace ?
— Vicky fait des portraits aussi ressemblants que ceux de Jack Dawson, souris-je. Agathe travaillerait au musée des beaux-arts de HillVille, en tout cas, d'après Mme Miller, l'infirmière de la Moon House. J'y vais avec les filles tout à l'heure. Et après...
— Après tu profites de Noël, m'imposa Lyse en me chopant par les épaules pour me regarder bien en face. Tu oublies Araña, cette Calyo et tous ceux qui veulent te pourrir la vie, et tu t'amuses. Avec tes parents, Chris, Monica...
— Avec Monica aussi ? éclatai-je de rire. Ne sois pas aussi optimiste !
— Pas de ça avec moi, me disputa-t-elle avec un petit claquement de langue réprobateur. Je sais que vous vous êtes rapprochées quand tu as rompu avec Michael. C'est très bien. Tu as la chance d'avoir une sœur, chéris-la.
— Oui, Madame, énonçai-je docilement.
— Très bien. Maintenant que tu es entrée en raison, je vais aller me doucher, puis j'appellerai mon père. Je ne vais pas rester dans tes pattes alors que tu as beaucoup à faire.
Elle récupéra son sac à dos, balancé dans un coin de la pièce la veille, et se dirigea vers la porte d'un pas empreint de solennité qu'elle devait user sur scène. Je savais qu'elle en rajoutait des caisses pour me changer les idées. C'était réussi, même si une angoisse de dernière minute me fit la rappeler avant qu'elle ne franchisse le pas de la porte.
— Lyse !
Elle leva ses yeux bleus vers moi, aussi pimpante qu'à son habitude, ce qui était remarquable compte tenu de ce qu'elle avait vécu.
— Même si notre soirée a tourné vinaigre, tu... reviendras quand même à GhostValley ?
— Bêta ! me lança-t-elle dans un éclat de rire. Je n'attends que ça. La prochaine fois, tu m'emmènes au magasin de Vicky. Je veux une démonstration de magie, pour rattraper celle que j'ai manquée hier.
Elle m'envoya un baiser de la main et s'éclipsa.
À midi, son père était venu la récupérer, et j'avais déjà envoyé un message à Hyppolyte pour m'assurer qu'il pourrait lever le sortilège qui pesait encore sur mes parents en début de soirée. Je venais d'enfiler ma tenue de travail que, déjà, il me répondait ; même à travers le texte, son caractère d'ours mal léché ressortait :
« D'accord, mais j'espère que le comité d'accueil sera meilleur que la dernière fois. »
« Bien sûr, j'y ferai attention. C'est Noël, après tout ! », pianotai-je en réponse.
Le sorcier, à qui je n'avais jamais adressé d'amabilités, dut se demander quelle araignée radioactive m'avait bien piquée, enfin, s'il était fan de Spider-Man.
« ... je serai là à 17 heures. »
Je tâchai d'ignorer la profonde perplexité qui se dissimulait derrière les points de suspension ; qu'importe s'il me jugeait folle ou lunatique, je me raccrochai aux retrouvailles qui m'attendaient tout à l'heure.
Je plaçai ma dague dans l'étui accroché à ma ceinture, enfilai mon blouson noir et filai à toute vitesse vers la chambre de Chris. Des tirs de mortier me parvinrent, ponctués de grossièretés qui feraient faire des bonds olympiques à ma mère. Je frappai trois coups secs, à quoi mon frère répondit :
— C'est pas le moment ! Oh non, merde !
Probablement une balle virtuelle qui avait entamé sa jauge de vie.
Exaspérée, j'entrai sans permission pour découvrir Chris, qui tressautait sur son fauteuil de gamer avec son casque qui avait presque glissé de sa tête. Une image peu glorieuse, s'il en était. L'idée saugrenue de l'immortaliser avec mon téléphone pour la montrer à Cathy me fit rire sous cape, mais je me contentai d'arracher la manette des mains de mon frère pour mettre son jeu sur pause, sourde aux cris d'orfraie qu'il poussait.
— J'étais sous les feux ennemis, là !
— Alors, je peux bien retarder ta cuisante défaite de quelques minutes.
Je déposai la manette à côté de son écran d'ordinateur et fis volte-face vers lui, bras croisés devant la poitrine.
— Comment tu te sens ?
Chris dérangea ses mèches, du même châtain clair que le mien, et poussa un soupir nerveux – décidément, les jeux de guerre ne l'aidaient pas à relâcher la tension.
— Ça va... à peu près.
Il eut un geste impuissant de la main, son regard me fuyant pour s'échapper par le bleu de la fenêtre :
— Je ne me souviens de rien, et d'après ce que tu m'as dit, ce n'est peut-être pas plus mal.
— Oui, crois-moi, c'est pour le mieux.
J'arpentai la pièce, détaillant d'un œil distrait les posters d'obscurs groupes de rap et de métal qui se côtoyaient sur ses murs dans un surprenant embrouillamini, miroir de son éclectisme.
— Je dois retourner à GhostValley pour interroger quelqu'un, me lançai-je enfin. Avant de partir, j'aurais voulu qu'on parle de ce qu'il s'est passé hier soir.
— De l'attaque ?
— Non, de Shawn.
Le prénom suscita une réaction immédiate : Chris s'extirpa de son siège pour se planter face à moi, crispé comme un rugbyman avant une mêlée.
— Je suis désolée de t'avoir menti, encore une fois, grommelai-je.
— À propos de quoi ? répliqua-t-il sans complaisance. De ton enlèvement ou du retour de ce psychopathe ?
— Les deux, admis-je, conciliante. Et ce n'est pas un psychopathe.
— Je souffre peut-être d'une amnésie concernant cette sorcière dont tu m'as parlé, mais je peux t'assurer que j'ai toute ma tête pour ce qui est de la scène qui s'était jouée au lycée. Il allait assassiner ton collègue, martela-t-il. Je l'ai vu, de mes propres yeux, et tu le défends quand même ?
— Il n'avait pas d'âme, avouai-je dans un chuchotis.
De stupeur, mon frère marqua un recul. Je soupirai, yeux fermés, et complétai une vérité que j'aurais dû lui avouer depuis longtemps :
— Si Shawn a été capable de telles erreurs, c'est parce qu'il n'avait pas d'âme, à ce moment-là. J'ignore encore comment, mais il l'a offerte pendant un rituel de magie noire contre une force qui n'a plus rien d'humain. À ce propos, un petit conseil...
Chris, dont le regard abasourdi s'était baissé vers les lattes du parquet, reporta son attention sur moi.
— Tu sais ce qu'on dit des ours ? Qu'ils peuvent t'arracher la tête d'un simple coup de patte ?
Il acquiesça lentement et, à ses joues qui se vidèrent de leur sang, je compris qu'il devinait où je voulais en venir.
— Shawn peut faire de même. Fragile comme tu es, je ne doute pas qu'un simple coup de poing de sa part ferait sauter ta tête comme le bouchon du champagne qu'on va boire ce soir.
Je l'entendis déglutir, alors je lui tapotai gentiment le haut de la tête.
— Donc, la prochaine fois, ne tente pas le diable et ne joue pas à Rocky Balboa face à lui. Tu n'es pas de taille.
— Ça n'empêche...
Il se racla vite la gorge, sa voix étant sortie bien trop aigüe sous le coup de l'émotion.
— Ça n'empêche que ce n'est pas quelqu'un de bien, argumenta-t-il, reprenant du poil de la bête.
— Tu as raison, il a fait des choses...
Je tâchai de garder à distance les images de cette nuit funeste où ma vie avait pour toujours basculé.
Le bruit mat du corps de Nika qui heurtait le sol.
Ses longs cheveux noirs étalés comme un éventail de ténèbres autour de son visage, figé pour l'éternité.
— Il a fait des choses terribles, articulai-je d'une voix blanche.
Je battis des cils pour chasser la vision pénible qui s'attardait ma rétine. Un goût de mort, de regret, s'attardait sur ma langue.
— Mais c'est terminé. Il n'est plus le même qu'avant, et s'il pouvait revenir en arrière...
— C'est lui qui te l'a dit ? m'interrogea-t-il, implacable.
— Il n'a pas besoin de me le dire, je le sais.
Je m'écartai de lui pour m'approcher de la fenêtre, cherchant dans le spectacle de la nature le réconfort dont j'avais besoin pour poursuivre.
— C'est moi qui lui ai rendu son âme.
Un silence atterré me répondit, alors j'en profitai, continuai de vider mon sac de ces révélations qui n'avaient que trop tardé.
— Je l'ai fait contre son gré, et il est parti. Pendant des mois. Tu trouvais que j'étais souvent absente, souvent distraite ? C'est parce que je l'ai recherché pendant tout ce temps.
Je trouvai enfin le courage d'affronter Chris, qui se tenait debout, les bras ballants. Peu à peu, il recollait les morceaux, comprenait l'origine de tant de détails inexpliqués – mon humeur morose, ma fatigue excessive, mes missions qui se multipliaient au détriment de l'équilibre que j'étais parvenue à établir auparavant.
— J'ai finalement retrouvé sa trace cette semaine, repartis-je. Ça s'est mal passé, on s'est quittés en mauvais termes. Et puis, comme il te l'a dit, j'ai été... kidnappée.
J'avais exhalé le mot comme on se défaisait d'un poids trop lourd pour ses épaules.
— Par qui ? réussit-il à me demander, la voix presque inaudible.
— Des vampires qui voulaient se faire bien voir d'une crapule.
— Une crapule qui en a après toi ? sonda-t-il, ses yeux marrons arrimés aux miens.
Doucement, je fis oui de la tête. J'avais encore l'espoir de ne pas l'inquiéter outre mesure, mais c'était peine perdue. Chris avait compris que sous ces quelques mots lancés à la légère, derrière cette attitude désinvolte que je m'efforçais d'afficher pour donner le change, c'était mon destin, ma vie qui se jouaient.
Et là, sa carapace de grand frère moqueur et indifférent se craquela. Elle se détacha en morceaux, se désagrégea tout à fait pour révéler des sentiments que ni lui, ni moi, n'étions doués pour exprimer.
Mon frère était terrifié, dévoré par une inquiétude qui le laissait sans défense.
Il avait peur pour moi, sa petite sœur. Et le pire dans tout cela, c'était qu'il ne pouvait rien faire pour m'aider. Il en avait pleinement conscience, et ça le détruisait.
Quand il porta ses mains à ses yeux et que des sanglots étouffés agitèrent ses épaules, mon cœur se rabougrit dans ma poitrine. Je courus au-devant de lui pour le serrer dans mes bras.
C'était la première fois que je voyais Chris pleurer ainsi.
Ses larmes ne ressemblaient en rien à celles qu'il avait pu verser enfant, comme la fois où il était tombé du cerisier en voulant récupérer notre ballon, coincé dans les branches de l'arbre. Où ce jour où nous avions enterré notre grand-père paternel, un chagrin d'enfant qui pleurait le vieux monsieur qui plus jamais ne lirait le journal en fumant sa pipe.
Là, c'était un chagrin d'adulte, poignant, qui révélait une faille dans cette armure de grande personne censée faire face à la vie la tête haute.
En s'imaginant que je puisse disparaître, Chris redevenait un enfant. Cette soudaine vulnérabilité chez mon frère me chamboula au point que je l'étreignis plus fort, pour lui montrer que j'étais là, bien là, et que je ne comptais aller nulle part.
— Il ne m'arrivera rien, je te le promets.
— Tu me mens, encore.
Un rire désabusé le secoua, et il recula pour s'essuyer les yeux d'un revers de manche, avant de planter son regard incisif dans le mien.
— Non, je ne te mens pas, lui affirmai-je sans flancher. Il ne m'arrivera rien parce que je ne suis pas seule.
— C'est Shawn qui t'a retrouvée, pas vrai ? C'est pour ça qu'il a tenu à m'en parler.
— Oui, c'est bien lui. Il est de notre côté, maintenant, et il va tout faire pour nous aider. Il a accepté de m'entraîner, pour mettre toutes les chances de mon côté la prochaine fois que quelqu'un viendra pour moi.
— Mais pourquoi toi ? explosa-t-il soudain, la colère prenant le dessus sur la tristesse devant ce qu'il percevait comme une injustice. Pourquoi pas une autre Chasseuse ? Parce que tu es une sorcière ?
— Tu m'as dit tout à l'heure que tu te souvenais de ce jour de mai comme si c'était hier. Te rappelles-tu ce que Gregory a dit, quand il a tenté de se débarrasser de moi ?
Chris prit quelques secondes pour rembobiner le film de cette après-midi où il avait tout appris, ou presque.
— Il a dit que tu étais... je ne me rappelle plus le terme exact, j'ai cru que c'était lié à ta mission de Chasseuse.
— Adalid, articulai-je, la gorge nouée. C'est comme ça qu'il m'a appelée.
Je coinçai derrière mes oreilles les mèches de cheveux qui me chatouillaient les joues, déglutis pour défaire ce nœud dans ma gorge qui voulait m'empêcher de dévoiler la dernière vérité.
Chris se redressa. Un éclat averti brilla dans ses prunelles noisette, à la nuance si familière pour ce qu'elle était la mienne. Il savait. Il avait compris que sa vie n'allait plus être la même.
Oui, me dis-je, il était temps de tout déballer. Je m'étais préparée toute la matinée à franchir ce pas, mais c'était si dur. Si Shawn ne m'avait pas ainsi forcé la main, j'aurais préféré garder ce pénible secret pour moi, afin qu'il ne pèse pas sur la conscience de Chris en plus de la mienne.
Épargner mes proches. Combien de fois m'étais-je répété cette antienne, au point qu'elle en était devenue un principe sacré, inviolable ?
C'en était terminé, désormais, en tout cas pour Chris. C'en était fini, de son innocence. J'allais finir le travail que Gregory et Shawn avaient commencé en prenant d'assaut mon lycée.
Ce soir, Chris ne se coucherait pas en pensant que la mort n'était que cette figure abstraite qui nous cueillerait un jour dans notre vie, tard, le dernier invité de notre vieillesse heureuse et paisible.
Ce soir, il se coucherait en sachant que la mort courtisait sa sœur, et qu'elle attendait patiemment de voir si se présentait l'heure tant espérée, celle de leur dernière danse.
***
Hello ❤️
J'espère que vous allez bien!
Bon, ce chapitre n'était pas vraiment prévu au programme, mais je me suis rendu compte qu'il était temps qu'Alicia s'explique avec son frère. C'est chose faite 😅
Il y a un fort décalage entre la réaction de Lyse et celle de Chris, qui vous semble peut-être bizarre. En fait, pour moi, Lyse a ce côté fantasque qui s'accommode très bien de la double vie d'Alicia et la rend résiliente. Chris, pas du tout, il subit la situation, et c'est sa sœur qui est touchée... Je me suis imaginée à sa place, et ça a donné ça. J'espère que ca vous semble plausible en tout cas !
J'en suis à la moitié du chapitre suivant, mais je vais beaucoup travailler la semaine prochaine alors je verrai comment j'avance.
Je vous souhaite un bon weekend ❤️ bisous 😘
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top