Chapitre 6 - Le client
La voiture crapahuta et manqua de caler quand Frédéric s'arrêta devant l'hôtel auquel notre client nous avait donné rendez-vous. J'échangeai un regard atterré avec Nika, mais quand je vis le voiturier considérer mon chef avec une moue incrédule, j'eus tout simplement envie de disparaître dans mon siège. Si mon père était le Fernando Alonso du quartier, Frédéric me donnait envie de faire mes prières chaque fois que je montais à bord avec lui. Feux orange bien mûrs et queues de poisson se succédaient à un rythme effréné, et le cas pathologique ne s'arrangeait pas en pleine heure de pointe. En somme, c'était toujours un miracle lorsqu'on arrivait à destination.
Je sortis de la voiture et fus accueillie par le vrombissement des moteurs et quelques coups de klaxon agressifs, qui éclatèrent dans le lointain. L'air frais du début de soirée fit voler mes cheveux attachés en queue de cheval.
L'hôtel se tenait sur un coin de l'avenue la plus empruntée de la ville. Je levai la tête pour observer la façade. Le soleil enflammait encore le ciel de longues traînées rouges, mais des dizaines de spots lumineux éclairaient déjà la pierre blanche de la bâtisse et les balcons chargés de pivoines. Deux lanternes noires encadraient l'imposante porte-tambour cintrée de métal doré, et une petite plaque indiquait : Royal Hotel. Le client ne connaissait visiblement pas les fins de mois difficiles : il avait choisi l'établissement le plus coté de la ville.
Un claquement de portière me fit tourner la tête. Jack, l'Éclaireur-adjoint de notre maison, s'était garé derrière nous, et le reste de l'équipe sortait de son coupé : Sandy, Cathy et... Laurine.
La blonde, mission privée oblige, avait revêtu une tenue réglementaire d'un noir si profond que ses cheveux en paraissaient blancs. Elle arborait l'air sérieux qu'elle prenait toujours en présence de Frédéric – yeux plissés et bouche froncée façon James Bond girl – et qui me donnait envie de crier à la publicité mensongère. D'ailleurs, lorsqu'elle passa à côté de moi pour rejoindre notre chef, elle ne put s'empêcher de me glisser :
— Avec toi dans l'équipe, le client ne va pas faire long feu.
Chassez le naturel... pensai-je.
Je lui emboitai le pas. Son parfum capiteux me donnait déjà mal à la tête.
— Je ne me fais pas de souci, contrai-je avec un sourire mielleux. Je sais qu'en cas de problème, tu seras toute disposée à montrer tes nibards au démon pour faire diversion, le temps qu'on évacue.
— Effectivement, ce n'est pas toi qui risques de montrer quoi que ce soit.
Elle pénétra alors dans une aile de la porte tourniquet et m'adressa une expression éloquente de l'autre côté de la vitre, les yeux rivés sur ma poitrine. Je pris quelques inspirations pour calmer mes nerfs avant d'entrer à mon tour.
Le luxe du hall immaculé me laissa bouche bée, et je fus éblouie par le sol en marbre clair qui renvoyait l'éclat des lustres chatoyants. Un homme en costume, qui lisait un journal sur une banquette de velours vert, releva la tête à notre entrée. Il ne put s'empêcher de fixer nos cinq silhouettes noires alors que nous nous dirigions vers l'accueil. Nous donnions effectivement l'impression que des anges de l'enfer avaient décidé de faire un tour au paradis.
J'observai avidement les alentours. Un escalier, dont la rambarde en fer forgé formait des entrelacs, menait au premier étage ainsi qu'à une boutique au sous-sol, et des bouquets de fleurs exotiques juchés sur des piliers formaient une allée jusqu'à l'accueil. Mais je m'attardai sur un autre détail : les deux hommes taillés comme des boxeurs, vêtus d'un costard noir et d'une chemise blanche, qui surveillaient d'un œil peu amène les allées et venues des clients.
Jack rejoignit Frédéric au comptoir, où une réceptionniste coiffée d'un chignon stricte leur parla aussitôt à voix basse. Le jeune homme de vingt-six ans recoiffa avec flegme ses cheveux blonds. Son visage aux traits saillants, qu'un sourire venait rarement illuminer, ne passait pas inaperçu, et si plusieurs filles de la maison le trouvaient follement sexy, ce n'était pas mon cas.
Pour être honnête, je ne portais pas vraiment Jack dans mon cœur. Depuis qu'il avait été muté de NewHeaven à GhostValley il y avait plus d'un an, il n'avait pas vraiment fait d'efforts pour se rendre sympathique, comme le prouvait le ton cassant qu'il employait parfois avec nous. Peut-être regrettait-il l'agitation de la capitale et les réceptions mondaines pendant lesquelles il avait sans doute côtoyé du beau monde en dégustant des soufflés au fromage ? Quoi qu'il en soit, le sérieux que le jeune Éclaireur affichait en permanence confinait à l'ennui, et j'avais du mal à ne pas interpréter son air froid comme de la hauteur.
Sandy tenait négligemment une arbalète le long de sa jambe. L'une de ses armes préférées. Quant à moi, j'avais attaché à ma ceinture un étui contenant plusieurs couteaux de lancer, en plus de ma dague, maintenue par une sangle contre mon mollet. Frédéric nous avait demandé de nous armer plus que d'habitude pour que M. Wright se sente en confiance, mais notre dégaine n'était pas pour rassurer certains couples âgés, qui se hâtaient nerveusement vers le restaurant de l'hôtel. Après un temps qui me parut interminable, Frédéric nous fit signe de le suivre. Un des agents de sécurité que j'avais repérés vint à notre rencontre et nous précéda dans les escaliers.
Il était loin, le babillage auquel nous nous laissions aller au cours de certaines rondes. Un silence presque solennel pesait sur notre groupe. L'épaisse moquette rouge absorbait le bruit de nos chaussures en cuir alors que nous évoluions dans le couloir du troisième étage. Nous arrivâmes bientôt à une chambre, gardée par un autre agent. Je commençais à me demander si le client ne souffrait pas de paranoïa. Aucun démon ne prendrait le risque de s'aventurer dans un hôtel cinq étoiles pour régler un différend de quelque nature que ce soit. Ou alors, certains détails de l'affaire avaient bel et bien été omis, comme le pensait Michael.
Quand il nous vit arriver, le gorille au crâne rasé qui surveillait la porte passa une carte magnétique sur la serrure pour nous laisser entrer. Les deux Éclaireurs passèrent en premier, suivis des filles, et je fermai la marche. Une suite spacieuse s'étala sous mes yeux, avec un lit gigantesque aux draps de soie, une immense baie vitrée donnant sur la rive du fleuve et un sofa molletonné bleu, installé face au balcon. Une bouteille de champagne presque vide et sa coupe occupaient la table basse en verre. Mon inspection des lieux faite, je tournai la tête vers le client.
Debout à côté du sofa, il nous réserva un accueil assez peu chaleureux.
— Enfin, nous lança-t-il en guise de salutation.
Je le pris aussitôt en grippe.
M. Wright avait tout du chef d'entreprise arrogant dont les dents rayaient le parquet. Sauf qu'il s'était mis dans la mouise et qu'il était contraint de faire appel à nous, ce dont il ne semblait pas enchanté. Il ne semblait pas très sobre non plus, au vu des rougeurs qui s'étalaient sur ses joues mal rasées. Avec son costume dispendieux débraillé et ses cheveux poivre et sel qui pointaient dans tous les sens, il avait l'air d'un banquier revenant d'une nuit bien arrosée au Macumba. Sa cravate défaite pendait mollement autour de son cou, et un pan de sa chemise sortait presque entièrement de son pantalon. J'étais prête à parier que, si je m'approchais de lui, il sentirait un mélange d'eau de Cologne et de lendemain de soirée. Derrière lui se tenait, bras croisés, un homme d'une trentaine d'années aux cheveux courts et à la veste trop étroite pour son torse de taureau. Son garde-du-corps, sans doute. Je ne doutais pas qu'il dissimulait une arme sous sa veste.
L'œil un peu vitreux, notre client nous considéra les unes après les autres.
— Elles m'ont l'air un peu jeunes, commenta-t-il, acerbe.
— Je peux vous assurer que leurs états de service sont exemplaires, objecta Frédéric en nous désignant de la main.
— Laquelle est la sorcière ?
L'intonation grossière me fit grincer des dents, mais quand Frédéric hocha la tête à mon intention, je levai docilement la main.
— C'est moi.
Les yeux de Wright s'agrandirent de manière presque imperceptible.
— Votre âge ?
Il avait la voix éraillée par l'alcool.
— J'ai seize ans.
Et il éclata d'un rire cynique qui me hérissa le poil.
— Votre sorcière est seulement une Expérimentée ? Vous vous foutez de moi ?
Ses yeux lançaient des éclairs, mais Frédéric ne se démonta pas, bien au contraire : il se redressa de toute sa hauteur et releva fièrement le menton.
— M. Wright, avec tout le respect que je vous dois, savez-vous combien de Chasseuses également sorcières nous avons dans ce pays ?
Comme Wright ne répondait rien, il enchaîna d'un ton qui avait un peu perdu de sa courtoisie :
— Quatre, dont deux se trouvent à NewHeaven. Compte tenu des renseignements que vous nous avez fournis, votre escorte a été classée verte par les services du Conseil. Une Chasseuse Expérimentée est donc parfaitement à même d'y participer, à moins que vous ne souhaitiez modifier votre version des faits. Auquel cas, le mandat passera en catégorie orange ou rouge, et le Conseil vous attribuera une nouvelle équipe. Si c'est ce que vous souhaitez, votre transfert ne pourra avoir lieu que demain soir. À vous de voir.
La tirade de Frédéric avait fait son petit effet : l'ami de la bouteille tituba en arrière avant de reprendre contenance. Il braqua alors un regard accusateur sur moi, comme si j'étais la responsable de ce malentendu :
— Et quel type de magie vous pratiquez ?
— Les quatre éléments. J'ai une affinité avec le feu, expliquai-je du bout des lèvres.
— Alicia a aussi la capacité de se téléporter, compléta Jack. Elle pourra vous évacuer en cas d'urgence.
La précision eut l'air de faire plaisir à l'homme d'affaires, qui me considéra d'un autre œil.
— La transposition, hein, fit Wright. Enfin une bonne nouvelle.
Je pris une longue inspiration par le nez pour ne pas lui dévoiler l'étendue de mon langage fleuri.
C'est alors qu'une sonnerie stridente de téléphone perça le silence. Wright jeta un regard presque apeuré en direction de l'appareil qui s'agitait sur la table basse, puis il intima au colosse qui l'accompagnait :
— Anton, prenez l'appel.
Le jeune homme s'approcha d'un pas vif de la table et répondit à voix basse. Wright reprit aussitôt la parole, sans doute pour détourner l'attention de l'appel, mais je me concentrai sur la voix d'Anton, qui chuchotait dans l'appareil :
— Je suis navré, M. Wright est dans l'incapacité de répondre à ses appels pour le moment. Oui, M. Bellamy, il a bien reçu vos mails et compte vous informer de l'évolution du projet très prochainement. Je lui dirai que vous avez appelé. Au revoir.
Je fronçai les sourcils. En plus de vouloir fuir le pays, j'avais comme l'impression que Wright cherchait également à fuir ses responsabilités.
— Tu viens, Alicia ?
Nika me désignait la porte du menton. Du coin de l'œil, je vis comment Wright finissait la bouteille de champagne au goulot façon poivrot de PMU avant de saisir une petite valise à roulettes. Visiblement, il préférait ne pas attendre un jour de plus. Je suivis mon amie dans le couloir.
Notre petit groupe descendit prestement les escaliers, même si le client se tenait à la rambarde pour garder l'équilibre ainsi qu'un semblant de dignité. Arrivée à l'extérieur, je m'aperçus qu'une courte limousine noire n'attendait plus que nous. Je retins un sifflement désapprobateur : préférait-il sauver sa vie ou les apparences ? À GhostValley, personne ne roulait dans ce genre de véhicules. Nous aurions sans doute été plus discrets avec une coccinelle rose bonbon.
Nika et moi surveillâmes les alentours, tous les sens en alerte, cependant que Wright se dépêchait de monter à bord. Je scrutai les environs, mais difficile de se préparer lorsqu'on ne savait pas à quoi s'attendre. À ma droite, Frédéric et Jack prirent congé du client et donnèrent quelques recommandations de dernière minute à Sandy. C'était elle qui prenait le relais. Quand elle me fit un signe de tête, je contournai le véhicule rutilant et y entrai à mon tour. Wright se trouvait entre Nika et moi, et sur la banquette qui nous faisait face avaient pris place Sandy et Cathy. Quant à Laurine, elle s'installa devant, à côté d'Anton, prête à prendre le volant au moindre problème.
Frédéric nous adressa un dernier au revoir, et je fus surprise de voir l'inquiétude tendre ses traits. Enfin, la voiture s'engagea sur l'avenue.
Deux longues heures de route nous attendaient, et le chauffeur/garde-du-corps n'avait même pas la décence de mettre la radio pour réchauffer l'ambiance glaciale, digne du naufrage du Titanic, qui régnait dans l'habitacle. Je remuai sur la banquette en cuir beige, mal à l'aise. Face à moi, Sandy fixait un point invisible sur le plafonnier pour ne pas croiser le regard de Wright, et Cathy s'éclaircit discrètement la gorge.
Nous roulâmes pendant une bonne quinzaine de minutes sans que personne ne prononce une parole. J'essayais de me concentrer sur le paysage urbain qui défilait sous mes yeux, mais quand Wright sortit une flasque de la poche intérieure de sa veste, je ne pus retenir un mouvement d'épaules agacé. Avec tout l'alcool qu'il s'enfilait, la sécurité de l'aéroport devrait commencer à le considérer comme un produit inflammable.
Mon énervement ne passa pas inaperçu auprès du principal intéressé, qui tourna sa face rougeaude vers moi.
— Un commentaire à faire ?
Sandy me marcha sur le pied au moment même où j'entrouvrais la bouche, alors je me ravisai et, la mâchoire crispée, dirigeai mon attention vers la vitre... jusqu'à ce que Wright marmonne un « C'est bien ce qui me semblait » suffisant qui me fit sortir de mes gonds.
— Vous ne devriez pas boire autant d'alcool, le sermonnai-je.
J'essayais de ne pas penser au fait que ma voix prenait des accents ridicules de maîtresse d'école.
Wright renifla avec mépris.
— Mon taux d'alcoolémie ne regarde que moi.
— Pas vraiment, en fait, ripostai-je en pivotant vers lui. Votre sécurité nous regarde, et protéger quelqu'un qui est incapable de tenir debout n'est vraiment pas une mince affaire.
Les yeux de Wright s'écarquillèrent devant ma franchise, qui flirtait dangereusement avec l'impudence. Le pied de Sandy appuyait de plus en plus fort sur mes orteils, et je dégageai ma chaussure d'un geste si brusque qu'il la déséquilibra. Wright nous considéra l'une après l'autre, la lèvre supérieure relevée avec morgue.
— États de service exemplaires... mais bien sûr. Je pourrais me plaindre à votre hiérarchie pour mauvaise conduite, me menaça-t-il avant de boire une nouvelle gorgée de sa flasque.
— Vous pouvez parler. Aux dernières nouvelles, celui qui est en train de fuir le pays, c'est vous.
— Alicia, me morigéna Sandy.
Mais Wright leva sa flasque argentée dans sa direction pour la faire taire. Ses yeux ne quittaient pas les miens.
— Vous ne savez rien de moi. Ni de la situation dans laquelle je me trouve.
— On ne demande qu'à savoir, lui répondis-je, bras croisés sur la poitrine.
— Ça ne vous regarde pas, rétorqua-t-il d'un ton sec.
— Vous avez raison, ce n'est pas comme si on risquait nos vies pour vous, ironisai-je.
Wright accusa le coup, la bouteille toujours levée devant sa bouche entrouverte, mais ses yeux fuyaient désormais les miens.
— La moindre des choses serait de nous dire pourquoi, vous n'êtes pas de cet avis ? insistai-je, un peu plus doucement.
Wright se rendit alors compte de toutes les paires d'yeux posées sur lui. Même Laurine se dévissait la tête pour l'observer depuis le siège passager. Quant à Anton, il assistait à toute la scène en silence. La route filait à côté de nous et, désormais, l'absence de musique ne me gênait plus. La curiosité était plus forte. Après un long moment, Wright se décida enfin. Il déboutonna le haut de sa chemise en poussant un soupir.
— Je pars... parce que je dois de l'argent. Beaucoup d'argent.
— Au démon qui vous poursuit ? devina Laurine.
— Ah, malheureusement, il n'est pas le seul, mais oui.
Il partit d'un rire sans joie.
— Combien vous lui devez ? s'enquit Sandy, presque avec compassion.
Il lui répondit d'une voix pâteuse ; l'alcool faisait définitivement son effet.
— 15 millions de livres.
Des exclamations effarées suivirent ce chiffre mirobolant.
— Comment est-ce même possible ? m'étranglai-je.
— C'est possible quand vous pêchez par excès d'arrogance, comme moi.
Au moins, il ne se mentait pas à lui-même.
— Vous n'avez pas besoin de connaître toute l'histoire, affirma-t-il avec un geste de la main maladroit. J'ai participé à un NLC, j'ai perdu, et maintenant je dois disparaître.
Un NLC ? Je lançai un regard interrogatif à Sandy.
— Un No Limit Contest, m'expliqua-t-elle. Ce sont des combats à mort clandestins organisés par des hommes d'influence. Ils font s'affronter leurs champions, souvent des démons qu'ils paient, et tout le monde mise sur l'issue du combat.
— Et on autorise ça ? demandai-je, sceptique.
— Oui et non, intervint Nika avec un haussement d'épaules. Il n'y a généralement pas de blessés humains. Si on commençait à s'occuper de ce genre d'affaires, on croulerait sous le boulot.
— Votre champion était un démon, alors ? lançai-je à Wright.
Je devinai à son air embêté qu'il ne nous avait pas encore tout avoué.
— Mon champion... était un prototype d'OGM développé par mon entreprise à des fins militaires. Ne dites rien, fit-il en levant la main quand Sandy parut sur le point de lui faire la morale. Oui, il est interdit de mener des expériences sur les gènes de démons, mais croyez-moi, j'avais des soutiens haut placés. Très haut placés, même. Et ils voulaient voir le résultat, c'est pour ça que j'ai participé à cette rencontre. Et c'était bien parti, hein, Anton ?
- Oui, monsieur, confirma ce dernier, presque avec dévotion.
- J'ai remporté trois duels d'affilée contre des démons qui n'étaient pas des enfants de chœur, reprit Wright. Il ne m'en restait plus qu'un, c'était pratiquement plié. Alors, pour le dernier combat, j'ai voulu faire un peu de com', et j'ai parié gros. Trop gros, ajouta-t-il sombrement.
Ses yeux fixaient d'un air absent les chaussures noires vernies qu'il avait aux pieds. Un sourire pénible plissa la commissure de ses lèvres.
— Quand j'ai vu le dernier concurrent, poursuivit-il à voix basse, un humanoïde tout ce qu'il y avait de plus banal, j'étais sûr... sûr que je n'allais faire qu'une bouchée de lui. Mais j'aurais dû repérer les signes avant-coureurs. J'entends encore le murmure qui a parcouru les spectateurs quand son nom a été annoncé.
Nous étions toutes suspendues à ses lèvres, et même Anton jetait des coups d'œil fréquents dans le rétroviseur pour regarder son patron.
— Shawn, souffla Wright avec un mélange de dégoût et de peur dans la voix. Les démons ont parié sur lui, sans l'ombre d'une hésitation. Et ils avaient raison, concéda-t-il avec un certain cynisme. Mon prototype s'est fait arracher la tête comme on fait sauter un bouchon de champagne. Et quand le vainqueur du duel s'est tourné vers moi, quand j'ai vu le regard moqueur qu'il me lançait, j'ai compris qu'il avait l'intention de réclamer son dû. Et qu'il n'y aurait aucun moyen de lui échapper.
Un silence de mort tomba dans l'habitacle, seulement adouci par le vrombissement de la voiture qu'Anton dirigeait désormais sur une route de campagne. J'avais du mal à le reconnaître, mais je commençais à avoir de la peine pour Wright. C'était sans doute sa détresse résignée, conjuguée à son air de chien battu, qui avait eu raison de mon agacement. Nika était visiblement dans le même état que moi, car elle alla jusqu'à poser une main réconfortante sur l'avant-bras de l'homme tout en lui soufflant :
— Ne vous faites pas de bile, on est là pour vous protéger.
Mais à peine avait-elle prononcé ces paroles rassurantes qu'un projectile fit violemment sauter le pare-brise, terminant sa course près de mon épaule.
Du sang gicla en même temps que la voiture faisait une violente embardée. Laurine cria une injure et se jeta sur le volant, mais c'était trop tard : le véhicule dérapa dans un crissement de pneus agonisant et quitta brusquement la route.
***
Coucou 🤗 Que pensez-vous de cette fin?
Les ennuis commencent pour nos héroïnes, et ça me donne envie de faire un petit sondage sur le chapitre suivant 🤩 Qui pense:
✔️ que les filles vont réussir à protéger Wright (qui aura bien appris la leçon et se tiendra tranquille le reste de sa longue existence 😇)?
❌ que les filles vont échouer et que leur client va malheureusement connaître une fin tragique (potentiellement sanglante 🤭)?
N'hésitez pas à me signaler les coquilles s'il y en a (j'ai fait pas mal de modifications) et à cliquer sur la petite ⭐ si ce chapitre vous a plu.
Merci de m'avoir lue et à la semaine prochaine 😍😘
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