Chapitre 16 - Une monstrueuse attraction (2/2)
Dans cette première salle, l'obscurité était opaque. L'air, froid et humide. Seule une mélodie grinçante, accompagnée de croassements lointains de corbeaux, nous tenait compagnie. Je saisis le bras de Michael dans le noir, et nous nous mîmes à avancer.
Nous le faisions à l'aveugle, nos chaussures chuintant sur la fausse pelouse que je devinais sous mes semelles. J'attendais, à la fois nerveuse et agacée, qu'un « acteur » nous tombe dessus pour nous faire peur.
Mais rien.
À la place, une vive lumière qui m'éblouit tant que je dus cligner plusieurs fois des yeux pour recouvrer la vue. Le décor nous apparut enfin dans toute sa splendeur : nous nous tenions face à l'entrée d'un restaurant, qui s'était comme matérialisé devant nous. Un restaurant pas comme les autres.
Il me fit penser à un diner américain, avec ses banquettes rouges et son sol en damier noir et blanc, que j'apercevais à travers la porte vitrée de l'entrée. Mais le panneau lumineux qui grésilla au-dessus de nos têtes, à moitié détaché de la façade en contreplaqué, me renseigna à lui seul sur ce qui nous attendait à l'intérieur.
À la bonne chair
Une maison de l'horreur sur le thème des démons mangeurs d'hommes. Ils n'avaient vraiment pas froid aux yeux.
Soudain, une silhouette surgit devant nous pour nous barrer la route. Je manquai de crier de surprise et lançai un regard noir à la nouvelle venue. Une vampiresse, au vu de ses yeux de chat couleur or et de sa peau presque translucide, qui laissait apparaître une fine toile de veines sombres.
La créature se redressa de manière à nous toiser du haut de ses talons aiguilles, mais point de grondement animal ni de crocs luisants de salive, comme je m'y étais attendue. À la place, son regard s'attarda sur mes tresses et sur les lunettes de Michael, puis elle repoussa les courtes mèches blondes qui balayaient son front avant de déclamer avec un charisme digne d'une huître desséchée :
— Approchez, chers visiteurs. N'ayez crainte. Bienvenue dans notre humble établissement, où nous ne servons que la viande la plus fraîche et la plus juteuse. C'est toujours un plaisir de recevoir les humains de passage. Notre devise : une panse bien remplie fait un repas réussi. Je vous remercie d'ores et déjà : je sais que votre présence suffira à nous régaler tous.
Et elle conclut sa petite tirade par un rire nasillard tout chevalin.
Sa réplique, qu'elle avait récitée par cœur sans y mettre le moindre effort, manquait tant de conviction qu'elle fut suivie d'un long blanc empreint de malaise.
Michael et moi échangeâmes un regard éberlué. Étions-nous censés avoir peur ? Nous n'eûmes cependant pas le temps d'y réfléchir davantage : la vampiresse ouvrait déjà la porte et nous enjoignait à entrer avec des gestes saccadés du bras, qui témoignaient d'un certain agacement. Nous nous exécutâmes un peu gauchement, et elle claqua la porte derrière nous.
Une fois dans le restaurant, je scrutai avidement le décor qui nous entourait. Il était si réaliste, avec ses murs turquoise parés de pancartes lumineuses et de posters de demoiselles en petite tenue, ses banquettes rembourrées, ses tables ceintes d'aluminium et son bar chromé... derrière lequel nous attendait un démon, qui gardait jalousement deux grandes cloches en inox.
Michael se tendit à mes côtés lorsqu'il aperçut le monstre. Il fallait dire que ses cheveux fauves, les poils drus qui lui recouvraient le bas des joues et les quatre énormes crocs qui dépassaient de ses épaisses lèvres n'avaient rien de très engageant.
Nous approchâmes à pas mesurés sous son regard peu amène. C'est alors qu'un effroyable hurlement, qui nous fit tous deux sursauter, nous parvint de deux portes battantes qui menaient à ce qui devait être les « cuisines ». Sans s'émouvoir, le démon jeta un coup d'œil rapide par-dessus son épaule, et c'est tout juste s'il ne soupira pas. Lorsqu'il reporta son attention vers nous, ce fut pour nous dire platement :
— Vous pouvez passer à la salle suivante.
Il s'était adressé à nous avec une indifférence qui me surprit. Et je me sentis encore plus perdue quand je remarquai les traces de sang qui salissaient le comptoir et les deux cloches rutilantes.
— Et ça, alors ? lui lançai-je en les désignant du menton.
Je ne doutais pas que quelques surprises terrifiantes y étaient dissimulées. Mais contre toute attente...
— C'est rien, grommela-t-il. Juste de la déco. Allez, dépêchez-vous, ajouta-t-il ensuite avec un mouvement sec de la tête. Il y en a d'autres qui attendent.
Cette fois-ci, le ton quasi excédé qu'il avait employé me fit grincer des dents. Traitaient-ils tous leurs clients avec cette attitude désobligeante ou avions-nous droit à un traitement de faveur ? Comme s'il avait entendu mes interrogations muettes, Michael me souffla à l'oreille au moment même où nous franchissions la porte battante :
— J'ai comme l'impression que nous avons été repérés.
Il pensait donc comme moi : la fille aux couettes avait dû prévenir ses comparses qu'une Chasseuse s'apprêtait à pénétrer dans leur antre. Et la troupe infernale avait visiblement décidé d'édulcorer le voyage.
Au fil des salles, le personnel de l'attraction nous traita avec la froideur que l'on réserve normalement aux inspecteurs des impôts venus contrôler les comptes d'une entreprise.
Le démon qui faisait office de cuisinier, avec son costume et sa toque imbibés de faux sang, garda les bras croisés devant son torse massif quand nous le contournâmes. Ses oreilles canines pointées vers nous, il cachait à moitié les fausses pièces de viande sanguinolentes qui jonchaient son plan de travail. L'une ressemblait à s'y méprendre à une jambe de femme. La chair à vif se teintait de pourpre sous la lumière indigo des néons.
Dans la salle suivante, tapissée de plastique comme dans un abattoir, nous découvrîmes des corps à moitié dépecés qui pendaient tête en bas, retenus par de larges crochets. Et dans celle d'après, un bourreau et son supplicié. Dans la pénombre, les yeux rouges du démon luisaient comme deux gouttes de sang. Il brandissait sans conviction sa hache à découper au-dessus d'une jeune femme brune menottée à un brancard. Il ne pipa mot, et même l'humaine ne daigna pas simuler la peur quand nous longeâmes le mur, se contentant de nous fixer avec effronterie.
Que ce soit dans le sombre cachot qui vint ensuite, où un couple était ligoté à des tuyaux, ou dans la reconstitution d'une ruelle en briques rouges, où du faux sang avait été répandu à foison, aucune créature ne nous sauta dessus pour nous donner la peur de notre vie.
Rien, que dalle, nada.
Seule l'horripilante bande-son nous suivait à travers le dédale de pièces sans vie. Et alors que nous traversions un cimetière éclairé par une pleine lune de la taille d'un couvercle de poubelle, je laissai éclater ma colère sans plus pouvoir la retenir :
— Trente livres pour ça ? tempêtai-je tout en slalomant entre les pierres tombales en faux marbre. Nous taxer du fric, ça va, mais il n'y en pas un qui assume derrière !
Mes chaussures rebondissaient sur le gazon comme sur un matelas. Mon regard, lui, restait rivé sur le panneau lumineux qui indiquait la sortie.
— Ils craignent sans doute qu'on leur retire leur autorisation, supputa Michael. Elle n'a pas dû être facile à obtenir, vu le nombre de créatures et la violence de certaines scènes...
— La vraie question est peut-être de savoir s'ils auraient dû l'obtenir dès le départ.
Je m'immobilisai à quelques mètres de la porte. Qu'importe : à nouveau, nous étions livrés à nous-mêmes, seuls dans cette ambiance sordide qui, dépourvue de ses figurants, devenait juste grotesque.
Je me tournai vers l'Éclaireur : il me considérait avec attention. Lui non plus n'était pas particulièrement affecté par les enregistrements de cris qui nous cassaient les oreilles.
— Tu penses vraiment que c'est une bonne chose, repris-je, d'enfermer des humains avec eux là-dedans sans surveillance ?
Il passa sa main sur son menton, une moue dubitative aux lèvres.
— Je doute qu'ils risquent quoi que ce soit. Pour moi, ces démons ne constituent pas une menace. On est au milieu d'une fête foraine, et ils ont effectivement des humains dans leur équipe.
— Des humains qui ont l'air aussi sains d'esprit que les adeptes d'une secte, m'énervai-je. Ils ont totalement perdu le sens des réalités : leurs petits copains ont beau jouer les gentils monstres, reste qu'ils ont des instincts. Et des instincts mortels.
Je repensai à la vampiresse, qui distribuait ses tracts sous le regard tant intrigué que craintif des passants. Était-ce vraiment cela, le monde auquel aspirait Frédéric ? Un monde où démons et humains se mêleraient les uns aux autres, dans la joie et la bonne humeur ? J'avais beau avoir défendu l'idée auprès de Nika quelques heures auparavant, toutes les cellules de mon corps se rebellaient contre cette idée. Oui, il existait des démons inoffensifs. Oui, des vampires parvenaient à ne pas se nourrir de sang humain ou à s'en procurer sans tuer personne. Mais combien d'autres n'hésitaient pas à tuer dans l'ombre et à se repaître de notre chair ?
— Je veux croire que Frédéric a raison d'espérer, soufflai-je. Mais ce n'est pas la vraie vie. Dans la vraie vie, on retrouve des filles vidées de leur sang dans les décharges. Dans la vraie vie, des enfants disparaissent sans laisser la moindre trace. Ça, fis-je en englobant la pièce du regard, c'est juste un rêve.
Ma déclaration fut suivie d'un lourd silence, qui s'étala de longues secondes entre nous. Michael entrouvrit finalement les lèvres, sans doute pour me rassurer, mais il n'eut pas le temps de me répondre.
Un grognement enragé, qui déchira l'air, l'interrompit dans son élan et résonna jusque dans mes entrailles.
Je poussai le jeune homme du chemin au moment même où un démon se détachait des ténèbres et bondissait sur nous.
J'avisai ses cornes de taureau, ses yeux injectés de sang et ses lèvres noires, et j'oubliai où nous étions, ce que nous faisions. Je n'entendis même pas la voix de Michael quand il chercha à m'arrêter. Seuls restèrent mes vieux réflexes, hérités de mes centaines d'heures d'entraînement, qui m'enjoignirent à choper le bras du monstre quand il arriva à ma hauteur et à l'envoyer valser par-dessus mon épaule.
Ni une, ni deux : le grognement du monstre devint un hoquet de surprise quand il percuta de plein fouet la porte, l'ouvrant à la volée. Soudain, le tintamarre de la fête foraine s'invita dans le petit cimetière, qui m'apparut de nouveau pour ce qu'il était : le décor méchamment kitch d'une simple maison hantée. Et je venais d'en agresser le dernier figurant.
Je posai une main sur ma bouche quand je réalisai l'énormité de ma bourde.
Le démon décrivit un impressionnant vol plané avant d'atterrir en plein milieu de l'allée, sous les exclamations inintelligibles des ados qui attendaient leur tour. Michael se précipita à l'extérieur, et je le suivis, véritablement mortifiée.
Le monstre, qui était tombé face contre terre, roula sur le chemin avant de se redresser, un peu sonné. Il était si grand, si massif que, même assis sur son séant, il faisait la même taille que les enfants qui jouaient à côté à la pêche aux canards.
Sentant poindre un vent de panique, le démon s'empressa de rentrer son attirail de chasse : ses cornes s'enfoncèrent dans son crâne jusqu'à disparaître, et ses lèvres s'éclaircirent pour prendre une délicate teinte de pétale de rose. En quelques secondes, il était devenu un homme comme les autres, si ce n'était pour sa taille de semi-géant et son allure de Terminator pressé d'en découdre.
Le vacarme eut tôt fait de faire rappliquer l'arnaqueur de la caisse et le clone de Mercredi Adams, qui se jeta au cou de Schwarzie en lui demandant s'il n'était pas blessé. Quand toutes les paires d'yeux accusateurs convergèrent vers moi, je compris qu'il était temps de tirer ma révérence.
— Pardon, pardon, pardon ! m'écriai-je.
Et j'agrippai le poignet de Michael et nous fis quitter la place dare-dare sans attendre de voir si des huées saluaient notre départ. Je remontai l'allée à toute allure, traînant l'Éclaireur derrière moi comme un âne tirait son chariot, et ce fut finalement un éclat de rire de sa part qui me fit m'arrêter à côté d'un carrousel.
Le temps de me calmer, j'observai les enfants à bord du manège, qui n'avaient de cesse de faire coucou à leurs parents, insouciants de la musique d'accordéon un peu surannée qui rythmait leur balade.
Michael finit par me tirer vers lui et caressa mon visage cramoisi du dos de la main.
— Quelle honte, marmonnai-je, mais ça a été plus fort que moi : j'ai vraiment cru qu'il allait nous attaquer.
— Si tu l'as fait pour m'impressionner, c'est réussi, répondit-il avec une moue rieuse. Si une compétition de lancer de démons devait être organisée un jour, tu gagnerais haut la main, je peux te le garantir.
Je lui envoyai une tape sur le bras, mais l'aplomb avec lequel il avait énoncé cette absurdité eut raison de ma gêne, et je pouffai de rire.
— Allez viens, fit-il ensuite en passant un bras autour de mes épaules, il se fait tard. Je nous ramène à la maison.
Je me blottis contre son flanc et opinai de la tête.
Sur la route du retour, on riait encore de l'incident, surtout du glapissement de chiot que le démon avait poussé quand il était passé par-dessus la balustrade.
— Tu crois qu'il a ignoré les consignes ou que le mot n'est pas remonté jusqu'à lui ? me demanda l'Éclaireur.
Michael conduisait avec décontraction, sa main gauche sur le volant, la droite glissée entre les miennes. En fond, le dernier tube à la mode en Espéritie : un morceau de RnB dans lequel le timbre rauque d'une chanteuse répondait à un piano mélancolique.
Je me caressai le menton, songeuse.
— Je pencherais pour la deuxième solution : il avait l'air sacrément surpris de se faire envoyer dans le décor.
— En tout cas, j'aurai appris la leçon : avec toi, une petite visite de contrôle risque toujours de se terminer en branle-bas de combat.
— Ce n'est pas vrai ! m'insurgeai-je en tournant le buste vers lui. Je sais me maîtriser quand même.
Sandy était aussi d'avis que j'étais parfois un éléphant dans un magasin de porcelaine, mais je gardai cette information compromettante pour moi.
À une grande intersection, le feu passa à l'orange, et Michael ralentit l'allure. Nous étions de retour à GhostValley, et la voiture approchait les quartiers animés de la ville. D'ailleurs, les rues grouillaient de monde en ce vendredi soir. Nous nous stoppâmes devant un large passage protégé. Le feu piéton passa alors au vert, et Michael se détourna des passants pour me rendre mon regard.
— Ne t'en fais pas. Ton petit côté tête brûlée n'est pas pour me déplaire.
Il avait dit sa réponse dans un souffle, et sa main s'était échappée des miennes pour s'égarer sur ma cuisse. J'oubliai toute réponse que j'aurais pu formuler quand il m'embrassa. Presque un baiser volé, car sa bouche dévia ensuite le long de ma mâchoire jusqu'à mon cou. La chaleur de ses lèvres sur ma peau me fit longuement frissonner, et j'empoignai ses mèches pour le plaquer davantage contre mon corps.
Alanguie, je m'obligeai pourtant à entrouvrir les paupières, histoire de vérifier que le feu était encore rouge et que personne n'allait bientôt entamer un concert de klaxon derrière nous. Et oui, il l'était encore, rouge, même si celui des piétons s'était mis à clignoter. Mais ce n'est pas cela qui m'ôta brusquement le peu de souffle qui me restait.
Ce fut la silhouette familière qui s'attardait près de notre voiture.
Cette fois-ci, j'ouvris pleinement les yeux, et je dus lutter pour ne pas pousser Michael loin de moi. Car la personne qui était là, devant notre capot, c'était Shawn, et ses yeux clairs étaient braqués sur nous.
Je cessai tout mouvement, incapable de respirer. Lui avait ralenti le pas, à contrecourant des passants qui se dépêchaient d'atteindre l'autre côté de la chaussée. Bien sûr, il m'avait reconnue. Je le compris à l'expression intriguée qu'il affichait tandis qu'il tentait d'apercevoir le visage de Michael derrière le pare-brise. Et lorsque nos regards se croisèrent enfin, mon cœur accéléra sa cadence, devenu fou.
Le jeune homme me scrutait fixement, ses sourcils haussés de surprise, comme s'il n'en croyait pas ses yeux de me voir là, à ce croisement. Comme si le destin était effectivement aussi têtu qu'il le prétendait. Et peut-être cette pensée lui traversa-t-elle bel et bien l'esprit : bientôt, je crus le voir rire, comme d'incrédulité.
— Il y a un problème ?
La voix de Michael me parvint de très loin, comme à travers les flots d'une eau tumultueuse que mimait ma magie au fond de mon ventre. Ma conscience me rappela à l'ordre suffisamment tôt pour qu'il ne remarque pas mon trouble, et je lui répondis après avoir dégluti :
— Non, c'est juste... le feu qui est passé au vert.
— Ah oui.
L'adolescent déposa un dernier baiser dans le creux de mon cou avant de redémarrer. Alors qu'il dépassait le passage piéton, je tournai une dernière fois la tête vers Shawn, que j'apercevais encore à travers la vitre. Il s'était arrêté sur le trottoir, mains dans les poches. Ses lèvres pleines esquissaient un sourire en coin. Un sourire complice, presque tentateur, qui m'apparut pour ce qu'il était.
Une invitation.
La voiture s'éloigna rapidement, et je le perdis de vue. Je me renfonçai dans mon siège, cherchant par-dessus tout à recouvrer mon calme. Les oreilles bourdonnantes, je peinais à me concentrer sur la voix douce de Michael, dont les paroles se retrouvaient soudain englouties par le morceau de rock qui secouait l'habitacle. Je lui répondais par un sourire, quelques mots, et j'espérais surtout qu'il ne puisse pas deviner à mon visage défait les pensées coupables qui m'assaillaient sans me laisser de répit.
Je grattais mon jean de l'ongle, l'esprit en ébullition, lorsque nous arrivâmes enfin au manoir. L'Éclaireur coupa le moteur, mais j'eus le temps d'apercevoir l'heure sur le tableau de bord : il était onze heures et demie passées.
— Tes parents ne vont pas s'inquiéter ?
Il avait dû surprendre mon coup d'œil furtif. Je secouai la tête :
— Je leur ai dit que j'étais chez une amie.
Même s'ils n'avaient pas entièrement gobé mon mensonge.
— Mais tu as raison, repartis-je, je devrais rentrer.
Nous sortîmes de la voiture et nous retrouvâmes dans la douce obscurité d'une nuit étoilée. La lune presque pleine, auréolée d'un nuage vaporeux, se levait par-dessus la cime des arbres.
Seul le crissement des graviers sur l'allée comblait le silence lorsque Michael et moi nous dirigeâmes vers l'entrée du manoir. Ce n'est qu'une fois au pied des marches qu'il avala la faible distance qui nous séparait.
Il me prit dans ses bras, et ses lèvres vinrent cueillir les miennes pour un dernier baiser. Je fermai étroitement les yeux, désirant plus que tout au monde ressentir à nouveau cette magie qui m'avait fait vibrer il y avait encore quelques minutes.
Malheureusement, mon corps engourdi ne m'écoutait plus, tout au vertige qui me montait à la tête à l'idée de la folie que j'envisageais de commettre.
Quand Michael se sépara de moi, la tendresse qui habitait son regard fut presque douloureuse à voir.
— J'ai passé une très bonne soirée.
— Moi aussi, chuchotai-je en réponse.
— Tellement que je voudrais qu'il y en ait une deuxième, enchaîna-t-il en me caressant les lèvres du pouce. Qu'est-ce que tu en penses ?
J'avais toujours été douée pour dissimuler. La preuve, mes parents ne voyaient pas, même après tant d'années, que je leur mentais jour après jour. Il suffisait de faire le vide dans son esprit. De fixer l'autre comme si plus rien n'existait à part lui. Et de dire les mots qu'il souhaitait entendre, sans laisser apparaître le chaos qui pourtant dévastait tout en nous.
— Je pense que c'est une très bonne idée, souris-je.
Une fois Michael rentré dans la bâtisse, j'observai longuement l'ombre du manoir, qui s'élevait au centre de la clairière. Derrière les rideaux tirés transparaissaient quelques silhouettes, ombres chinoises qui se découpaient dans la lumière. Je songeai à Nika, à l'inquiétude que notre conversation avait fait naître chez elle, à l'attention qu'elle me porterait sans doute ces prochaines semaines, et à l'expression que prendrait son visage aux traits fins si elle venait à apprendre que j'avais trahi ma promesse.
Je restai longtemps ainsi, les poings serrés contre mes cuisses. Lorsque je me détournai finalement du manoir, ce ne fut pas pour rentrer chez moi. Pas encore. J'avais quelque chose à faire avant. Quelque chose de fou, qui ne me ressemblait pas.
Et avant que ma raison ne me fasse changer d'avis, je m'élançai d'un pas résolu sur le petit chemin menant au centre de GhostValley.
***
Hello !
Vous avez sans doute deviné ce que notre héroïne s'apprête à faire 😱Qu'auriez-vous fait à sa place:
- auriez-vous cédé à la tentation? 😈 (gnark gnark, on a qu'une vie!)
- ou seriez-vous sagement rentrées chez vous? 😇 (allez hop, au dodo 😴)
Pour info, avec le prochain chapitre, nous en arriverons grosso modo à la moitié de l'intrigue.
Merci de continuer à suivre les aventures d'Alicia ❤️ (si le chapitre vous a plu, pensez à la petite 🌟 ).
Bisous et à la semaine prochaine 😍😘
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