25. « La prunelle de mes yeux. »



— Le jour où j'irai plus loin, ce sera parce que tu l'auras tellement désiré que, quand je te pénétrerai, rien ne pourra retenir le son de ta voix criant mon nom. Ni mes lèvres contre les tiennes, ni même ma main. Tu me supplieras de te laisser hurler, Kiymetlim benim.

Sa voix, douce et pourtant dévastatrice, résonne dans l'espace restreint de la pièce. Puis, comme une ombre insaisissable, il s'éloigne, laissant une chaleur brûlante là où ses mots m'ont atteint.

Je n'ai pas le temps de répliquer qu'il m'attire soudainement dans ses bras avec une aisance désarmante. Un bras glisse sous mes jambes, l'autre soutient mon dos, et je me retrouve nichée contre lui, impuissante face à sa force tranquille.

— Qu'est-ce que tu fais ? murmurai-je, la voix encore vacillante.

Il ne répond pas. Mon front repose instinctivement contre son torse, et j'entends son cœur battre, régulier et imperturbable. Mes pensées s'embrouillent tandis qu'il m'emmène vers la salle de bain.

Là, il me dépose doucement sous la douche. L'eau tiède commence à couler, enveloppant mon corps, tandis que son regard reste fixé sur moi. Ce regard... intense, profond, dévorant. Il ne dit rien, mais il n'a pas besoin de mots. Sa présence seule semble capable d'ébranler chaque fibre de mon être.

— Tu risques de faire attendre ton rendez-vous, dis-je enfin, brisant le silence d'une voix à peine audible.

Un léger sourire étire ses lèvres, mais son regard ne faiblit pas.

— Je dirai que je m'occupais d'une brune trempée.

Je lève les yeux au ciel, exaspérée par sa désinvolture.

— Tu te souviens de ce que tu m'as dit? demande-t-il, visiblement amusé, ses bras croisés comme pour m'observer avec plus d'attention.

Je fronce les sourcils, cherchant à comprendre ce qu'il insinue. Puis le souvenir me frappe. La fois où, pleine de défi, je lui avais juré que jamais il ne pourrait m'approcher, pas même avec un bâton.

Un roulement d'yeux m'échappe avant que je ne lâche, agacée :

- Defol ! ( dégage)

Mon ton est ferme, mais il capte aussitôt l'étincelle d'humour dans ma voix.

- Quoi? dit-il, les sourcils légèrement haussés, intrigués.

Je me mords la lèvre, regrettant presque mon choix de mot.

— À force, il faut bien que j'essaie de comprendre ce que tu dis, non ?

Il rit doucement, un éclat chaleureux qui contraste avec l'intensité de son regard quelques instants plus tôt. Ses épaules se détendent, et je sens que, pour lui, cette petite rébellion est bien plus un jeu qu'un véritable affront. Il secoue la tête, et quitte la pièce, un silence lourd prend toute la place. Je l'entends bouger dans la maison, ranger quelque chose, puis la porte claque doucement. Il est parti. Pas un mot.

Je ferme les yeux, chassant cette douleur sourde qui s'installe. Pourquoi est-ce que je ressens ça ? Pourquoi lui ?

C'était... Incroyable et pourtant je sais que c'est mal. Parce qu'elle existe. Erica.

Elle et toutes les barrières qu'il y a entre nous. Est ce qu'elle compte vraiment pour lui ? Je dois avouer que je ne préférerais pas. Pourquoi est-ce qu'il se permettrait de faire une telle chose ?



⚖︎


La sonnerie de mon téléphone me tire brusquement de mes pensées. Je me sèche rapidement, enfouissant mes émotions sous un masque d'indifférence. Mais lorsque j'entends la voix de mon père, un frisson familier me traverse.

— Salut, chérie...
— Papa ? Tout va bien ?
— Je peux passer cet après-midi ? demande-t-il.

Je ne suis pas prête. Pas après la dernière dispute, pas après ce qu'il a permis. Mère m'a foutue dehors, et il n'a rien fait. Je me pince les lèvres, hésitante.

— Non. Fin, on se retrouve au café Long Fear. Je ne suis pas chez moi.

Sa voix est étrange, enrouée, comme alourdie par un poids invisible. Il semble préoccupé, et cette idée me déplaît. Le soupir qu'il lâche en réponse me laisse un goût amer. Finalement, il acquiesce et s'empresse de raccrocher.

Je me frotte les tempes, mais un énième flash m'attrape. Sa voix résonne encore dans mon esprit, douce mais implacable :

« Le jour où j'irai plus loin, ce sera parce que tu l'auras tellement désiré... »

Ses paroles s'enroulent autour de mon esprit comme un lierre, me laissant engourdie, presque incapable de bouger. Un détail soudain me traverse l'esprit : le plan de travail.
Il l'a fait ? Il a nettoyé le plan de travail... ?
La sonnerie de la porte retentit, interrompant mes pensées. J'ouvre avec hésitation et me retrouve face à une silhouette de dos. Ses cheveux bruns légèrement ondulés sont attachés en une queue-de-cheval haute, laissant quelques mèches encadrer son visage.
Elle se tourne enfin, et je découvre une jeune femme grande, élancée, avec une silhouette athlétique.

— Bonjour, dit-elle d'un sourire prononcé.

Ses pommettes hautes lui donnent une allure déterminée, complétée par une mâchoire bien définie. Mon regard glisse brièvement sur son uniforme rouge, orné de l'inscription d'une compagnie de livraison. Avant même que je ne réponde, elle enchaîne :

— Voici votre commande, Madame... Falconetti ?

Elle jette un coup d'œil hésitant à l'écran de son appareil, probablement les informations du client. Son sourire chaleureux s'élargit, dévoilant une rangée de dents blanches. Ses yeux pétillants, encadrés de sourcils bien dessinés, me scrutent tandis qu'elle me tend un sac isotherme.

— Montserrat, je rectifie. Bonjour. Je n'ai fait aucune commande.

— Votre mari vous a laissé une note avec, ajoute-t-elle.

Je reste figée. Mon mari ? Thémis n'est pas mon mari.

— Ce n'est pas...

Elle m'interrompt avec un rire léger, presque complice.

— Il a vraiment l'air attentionné. Vous avez beaucoup de chance, lâche-t-elle avec un soupir admiratif.

Je la regarde, perplexe. Son ton et son regard brillant d'un intérêt qui me met immédiatement mal à l'aise. Mes sourcils se contractent face à son enthousiasme étrange. Depuis quand une livreuse est-elle aussi intrusive ?

Je mordille ma lèvre inférieure.

— Vous connaissez Thémis ? je demande en croisant les bras m'appuyant contre l'encadrement de la porte.

— Oh... pas vraiment, dit-elle en levant les mains. Mais il est passé la dernière fois, pour une autre commande. Très poli. Et ce sourire... Elle marque une pause rêveuse. Rare de croiser des hommes comme lui. Puis dans ce petit patelin à force de livrée on reconnaît rapidement les tête.

Je la fixe, incrédule.

— Vraiment ? dis-je d'un ton sec.

— Vous êtes chanceuse, reprend-elle avec un sourire éclatant. Charmant, prévenant et... elle hausse un sourcil, sûr de lui.

Un rire nerveux m'échappe.

— Sûrement, dis-je en haussant les épaules, prenant soin de ne rien laisser transparaître.
Je saisis le sac de fast-food d'un geste brusque.

— Merci pour la livraison.

Elle hésite, puis tente une dernière pique, comme pour tester ma réaction :

— Si jamais il a un frère, vous me prévenez, d'accord ?

Je lui adresse un sourire froid.

— Je doute que ce soit votre genre, réponds-je en fermant la porte.

Un souffle court m'échappe dès qu'elle disparaît de l'autre côté. L'audace de cette fille... Charmant et prévenant ? Si je lui disais qu'elle avait le champ libre et que ce n'est absolument pas mon mec, ce serait quoi la prochaine étape ?

L'espace d'un instant, j'ai cru rêver. Pour qui se prend-elle ?

Quelque heure plus tard
Cafétéria Long fear

Prise d'un élan d'affection, je m'approche de Papa. Et alors que je lui saute dans les bras, je suis forcer de constater son étrange comportements. Vêtu de façon inhabituelle pour lui, arbore un style vestimentaire extravagant, avec un costume aux motifs criards et une cravate assortie qui contraste fortement avec son apparence habituellement sobre.

— Papa ! C'que tu m'as manqué. Je l'enlace chaleureusement.

Père est distant.
Nous finissons par nous assoir.
Il se racle la gorge. Lève la main pour interpeller l'un des servants.

'Serait-ce possible d'avoir une boisson gazeuse s'il vous plaît'

Une boisson gazeuse ? Le seul moment où il souhaite en prendre c'est lorsqu'il a besoin de se détendre. Mais très vite la question de ce qu'il peut bien ingurgiter ou non s'efface.

— Écoute... Il amène ses mains sur la table qui nous sépare. Il les joints entre elles. Je- Je tenais à te faire part du testament... Du mien si tu préfères. Annonce-t-il, laissant planer un sentiment d'inquiétude dans l'air.

J'écarquille les yeux, déconcertée par cette révélation.

— Ton testament ? Je saisis le dossier qu'il me tend, mais ma main tremble légèrement sous le choc de son annonce.

Père n'est pas si vieux, et il se porte très bien. Il va même à la salle et ça bien plus qu'Ugo. Quelque chose ne tourne pas rond.

— Est-ce qu'il y a un souci Papa ? Dis moi ce qui ne va pas. Je demande, cherchant désespérément une explication rationnelle à son comportement étrange.

— Tout va pour le mieux, mon cœur. Répond-il d'un ton qui ne parvient pas à dissimuler son trouble. Simplement parce que je veux que tu en prenne connaissance.

— Si comme tu le dis, tout va bien. Alors j'ai quelque chose à t'annoncer.

Il s'arrange de manière à me faire comprendre qu'il est tout ouïe.

— Je vais partir en déplacement quelque temps. Pour du travail.

— Du travail à l'étranger Gemma ? Quel genre de travail est-ce ? demande-t-il d'un ton neutre qui cache mal son agacement.

— Je comprends que cela te perturbe. C'est aussi inattendu pour moi mais-

— Tu ne veux pas plutôt y réfléchir ?

— Réfléchir ? À quoi et pourquoi papa ? C'est une grande opportunité. Je ne veux pas que tu rende les chose plus compliqué. Et en ce qui concerne mère et Ugo, j'aimerais que tu arrête de leur couper les vivres et d'être mauvais lorsque je te manque. Je te promet de t'appeler TOUT les jours.

J'appose ma main sur la sienne tentant de le ramener à la raison, mais il semble déterminé à poursuivre. Si j'avais pu lui dire toute l'entière vérité tout aurait été plus simple. Le contrarier me mets mal.

— Gemma Eda Montserrat, tu n'iras nul part. Dit il sèchement, je le regarde questionneuse, surprise.

Il ne m'avait jamais parler ainsi.

— Si papa.. Et j'ai vingt-deux ans maintenant, tu ne vas pas décider de MES choix.

— Gemma...soupire mon père, posant sa main sur ma joue. Tu vas te marier.

Ce n'est pas d'actualité.. Pas que je ne le sache.

— Pourquoi est ce que tu me parle de mariage je viens de te dire que je partais à but professionnel ? Je ne t'ai présenté personne.

Je cherche à comprendre ou il veut en venir mais j'en suis vraisemblablement incapable.

— Je te l'annonce ma chérie. Avec ta mère, nous avons décider que tu allais te marier.

Je ris.
Avec mère..
Pourtant c'est elle qui m'a conseillé de m'éloigner d'eux.

« — Si tu ne veux pas que les choses se complique encore plus, t'as plutôt intérêt à trouver une moyen de ne plus monopoliser son esprit Gemma. » avait-elle dit d'un ton franc.

Mon cœur rate un battement alors que je suis pétrifiée par ses paroles.

La seconde qui suit je ris sans aucune retenue. Assez fort pour que les clients non loins me lâchent des regards en coin bien trop dérangeants. Mère... Ce n'est pas comme ci elle ne me souhaite que du bonheur. Elle me l'a dit. Elle va me pourrir.

— Tu te marieras avec le fils aîné des Turan. Déclare-t-il d'un ton catégorique, tandis que mes yeux s'écarquillent d'incrédulité devant cette annonce choquante chaque fois un peu plus qu'il n'ouvre la bouche.

— Et si je ne veux pas ? grondais-je impuissante, tentant de résister à cette pression soudaine.

— Aylan Turan. Il répète, et une vague de terreur m'envahit alors que je me remémore la personne en question.

— Merci papa. Je n'avais absolument pas compris. Dis je désormais agacé par son jeu, j'applaudis. Je ne vais pas me marier, je ne le connais pas. Je m'insurge, refusant de céder à sa volonté autoritaire.

— Je ne te donne pas le choix ma puce. Il déclare avec un calme glaçant, et je sens mes mains trembler de colère. C'est en lien avec le testament. Je veux m'assurer qu'avant ma mort, ma fille récupère ce qui lui est du. Et pour ça, il faut que tu sois marier. Alors je m'en assure.

Il enchaîne connerie sur connerie.

— Ça ne me fais absolument pas rire. Personne n'a besoin d'un testament PUISQUE PERSONNE NE VA MOURIR. Et personne ne va se marier. Attends- Est-ce que tu serais capable de me soumettre pour tes besoins ?

Brusquement, je me lève de mon siège, sentant que je suis sur le point de perdre le contrôle. J'ai bien peur qu'il ne soit pas entrain de me faire une mauvaise blague.
Papa ne fait pas de blague. Il ne ris pas. Jamais. Son ton bien trop méconnaissable m'ordonne de m'asseoir et de l'écouter, et je me retrouve prisonnière de sa volonté, impuissante face à ce retournement de situation inattendu.

— Ne me pousse pas à faire ce qui risque d'être regrettable. Il faut simplement que tu accepte.

Mon père me menace t'il à cet instant ? Pourquoi en vient il a ce niveau ?

— ¿Así que también me estás convirtiendo en tu peón? Dis je perdu. Tu oubli que je suis ta fille ? Toute cette paperasse. Je tape de ma main sur son testament. Tu l'as ramener pour m'effrayer, ainsi j'accepterais toute tes requêtes ? Mais je t'assure que ça ne fonctionnera pas. Je finis en sanglot.
( Alors toi aussi tu fais de moi ton pion ?)

Comment est ce qu'il peut me faire une telle chose ?
Pas lui. Pas mon papa.

— Parce que tu es ma fille Gemmy. La prunelle de mes yeux. Tu obéiras. Dit il d'un ton bien plus posé. Je n'ai pas besoin de tout ça pour te faire obéir. En revanche-

Mes pupilles me brûlent. Je me sens pâlir. Qu'est ce qu'il me fait ? Pourquoi ?

— Cet homme fait trois fois mon âge. Je le coupe.

— 43, Gemma. Dit il fermement.

— Je ne veux pas papa.

Gemma.

VAS TE FAIRE FOUTRE ANTÓN MONTSERRAT. Hurlais je en plein café, bondissant de ma chaise. Je quitte la table.

REVIENS ICI. Je n'ai pas finis.

« Moi j'en ai finis avec cette famille. » murmurais-je

— Gemma te juro que lo que le va a pasar a tu hermano va mucho más allá de tus miedos. Il ajoute en comprimant mon poignet. (Je te jure que ce qui risque d'arriver à ton frère est bien au dessus de toute tes craintes.)

" Parce que tu es ma fille, la prunelle de mes yeux "

Est ce que c'est une putain de farce ?

~

À très vite !
With love Ana. ✨

Instagram 📸 : Anaamayleee_
TikTok 🎶: Ana.maylee

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top