CHAPITRE SIX

- On va à la plage ? propose Dan.

Je relève la tête vers lui et marche jusqu'à la sortie des cours avec les autres. Je finis par répondre :

- Je peux pas, j'ai déjà un truc à faire.

Ce " truc " comme je dis, c'est aller voir Noah. Je ne suis pas passé depuis jeudi et nous sommes maintenant mercredi soit presque une semaine. En fait, j'avais trop peur d'y retourner après sa, je ne sais pas, crise de panique ? Pas peur de lui, mais peur qu'il ne veuille plus me voir.

- Sérieux ? Mais tu vas où encore ?

- Cool, Dan. J'ai ma vie aussi.

- Sauf que tu dis jamais où tu vas, fronce-t-il les sourcils.

Je commence à le connaître Dan, c'est un impulsive ce gars. Les trois filles ainsi qu'Antoine et Stan, un autre ami de notre classe, me fixent et j'avoue alors :

- Je vais à l'hôpital, ça te va ?

Ils me regardent tous confus et je m'adresse maintenant à tout le monde :

- Je vais voir Noah.

- Noah ? s'étouffe presque Dan.

- Oui, Noah. Et il faut que j'y aille.

Je pars, les mains dans les poches et ayant cloué le bec de tous.

- Édouard !

Je m'arrête à l'entente de mon prénom et Antoine vient marcher avec moi. Nous ne parlons pas et je ne comprends pas vraiment pourquoi il souhaite que nous soyons seulement tous les deux. J'avoue que depuis ce qu'il s'est passé samedi, j'ai posé mes limites. Autant dire que j'ai construit un mur entre nous deux. Et c'est peut-être mieux comme ça. Je ne sais pas encore où j'en suis et je n'ai pas envie d'être perturbé.

- À propos de samedi.

Il semble assez gêné et je balbutie alors :

- On avait bu.

Ce n'est pas une excuse, je sais. Surtout que je lui avais dit que je ne regretterais pas et que j'agis tout comme. Ce que je sais aussi, c'est que j'avais une érection et lui aussi et que nous avons " juste " réglé le soucis entre nous. C'est tout, rien de plus, enfin je l'espère.

- Je sais. Mais ça ne change pas le fait que je sois gay et que, et que personne ne soit au courant.

Il semble un peu stressé, mais je le rassure immédiatement :

- Je ne dirais rien. Je n'ai pas à le faire à ta place Toitoine, je le charrie gentiment et il se détend. Tu n'as aucun soucis à te faire à ce sujet, tu peux me faire confiance.

Et c'est vrai. Si j'étais à sa place, j'aurais aimé la même discrétion. Et non, la même que j'ai eu à l'égard de Noah. Je ne ferais pas l'erreur deux fois.

- Merci.

- C'est normal.

Je pense à placer ma main autour de ses épaules pour le réconforter, mais je m'abstiens automatiquement. Mauvaise idée vu la situation. Depuis quand je suis devenu aussi tactile ? Il semble soulagé de notre conversation et il finit par me questionner :

- Tu connais bien Noah ?

- C'est mon voisin de maison.

Ça ne répond pas vraiment à la question, mais c'est ma réponse. Antoine hoche la tête et finit par me saluer avant de rejoindre les autres pour leur sortie plage. Je reçois un message de lui lorsque je suis dans le bus.

" J'espère que la soirée de samedi ne change pas les choses entre nous. "

Je souffle sans savoir pourquoi et pose ma tête contre la fenêtre. Je repense alors à Geoffroy, surtout lors de notre année en seconde. Vive les hormones à ce moment-là. Aussi gênant que c'est de m'en rappeler, nous nous étions toucher mutuellement. Une ou deux fois, ou peut-être même plus d'ailleurs et c'est ce qui m'interpelle maintenant. Nous en avions parlé à personne étant donné que ça n'avait pas lieu d'être et que nous ne sortions même pas ensemble. C'était plus comme de la découverte, de l'expérience entre nous ponctuelle. Quelque chose que nous apprécions tous les deux à tel point que ce n'est pas resté une simplement exception.
Je me dis que j'ai peut-être un truc avec les garçons, mais je me souviens aussitôt de Cassandra. Une " amie " faite pendant les vacances de seconde en Espagne. Ma première relation sexuelle ( avec pénétration ) également.
Est-ce que ça fait de moi un bisexuel pour autant ? Je ne sais pas et je n'ai pas vraiment envie de savoir. Je suis juste un peu bizarre et surtout perdu. Je m'étais déjà posé ce genre de questions au collège, mais j'avais tout de suite opté pour les filles. Plus simple, plus logique et surtout plus normal.
Je réponds finalement au message de l'asiatique :

" Non, bien-sûr que non. C'était sous le feu de l'action et l'alcool mais ça ne change rien entre nous:) "

Je reçois ensuite une réponse juste après que je sois sortir du bus :

" C'est cool alors :) "

Je range mon téléphone et me rends à la chambre seize. Je frappe mais n'entends pas de réponse. Je reproduis alors mon geste et Noah vient m'ouvrir lui-même pour la première fois. Il a les cheveux mouillés et porte des vêtements qui lui collent légèrement à la peau. Pas de doute, il sort de la douche.

- Oh, désolé de te déranger.

Il hausse les épaules et me laisse entrer. Il s'assoit sur son lit et me toise du regard. Et si, finalement, il m'en voulait de ne plus être venu ? Je me sens soudainement très mal qu'il ait pu le prendre comme ça et tente :

- Si je ne suis pas venu depuis jeudi, c'est parce que-

- Parce que je suis taré et bizarre, finit-il pour moi, je sais.

- Non, pas du tout.

Mince. Au fond, j'avais juste peur qu'il ne veuille plus me voir, mais je n'ose pas lui dire.

- Je ne voulais pas te causer d'autres problèmes. J'aime bien être ici et je ne viendrais pas si je n'aimais pas.

Il ne cille pas et continue l'admiration de ses pieds nus. Je rajoute alors parce que je le pense depuis que je le connais et que je veux le rassurer :

- T'es fort, tu sais. Tu n'es pas bizarre et encore moins taré. Et je sais que tu vas t'en sortir. Je le vois et ça se voit que tu fais parti de cette partie des gens : les combattants.

Il lève la tête vers moi et observe mon tee-shirt avant de lire l'inscription :

- " Hakuna Matata ".

Je baisse les yeux sur l'écriture blanche et souris.

- Tee-shirt pour après le sport. Le mercredi, on finit par sport. l'informais-je.

Il hoche la tête puis je le défie :

- Une revanche, ça te dit ?

Je vois un sourire en coin se dessiner sur son visage, un de ses premiers que je peux voir, puis nous partons à la salle de jeux qui est équipée du précieux baby-foot. Je le lamine encore une fois et nous terminons affalés sur le gros pouffe comme la dernière fois. Nous regardons le plafond et je ne trouve pas les mots tant plein de choses me passent par la tête. Il finit par chuchoter :

- Merci de venir. C'est sympa.

Je souris et me rends alors compte que nos épaules se touchent ainsi que nos hanches, mais cette proximité ne me dérange pas plus que ça.

- C'est rien, vraiment.

- Je voulais juste que tu le saches, hausse-t-il les épaules.

Je sors mon téléphone ainsi que mes écouteurs et je le sens m'observer curieusement. J'en glisse un dans mon oreille droite et fais de même dans sa gauche. Il ne dit rien et se contente d'attendre. J'actionne le bouton " play " puis laisse la musique de Ludovico Einaudi se diffuser. Il relâche sa tête en arrière, contre le mur, et je fais de même. Nous ne parlons pas, mais je crois que ça ne nous dérange pas. La chanson le fait pour nous.
À la fin de la musique, je range mes écouteurs ainsi que mon portable. Nous retournons dans sa chambre et je le questionne :

- Tu fais quoi cette après-midi ?

Il hausse les épaules, comme toujours, puis lâche, un air ennuyé et blasé :

- Ma mère devrait passer ainsi que mon père. Je vais sûrement regarder la télévision en les attendant.

À mon tour de hocher la tête.

- Au fait, tu as commencé le livre que je t'ai apporté ?

- Je l'ai fini.

- Déjà ? ! je m'étonne. Il était bien ?

- J'ai bien aimé. Tu devrais le lire. ajoute-t-il, en le sortant avant de le poser sur la table de nuit.

- Ce n'est pas un peu bizarre que je t'emprunte le livre que je t'aie moi-même offert ?

Je souris et il fait de même avant de répliquer :

- Je crois qu'on a dépassé la ligne du bizarre depuis longtemps.

Je lâche un petit rire et me saisis du livre. Je ne suis pas un grand lecteur, mais j'ai envie de faire un effort pour une fois.

- Et toi ? Tu fais quoi cette après-midi ?

Je suis un peu gêné de lui exposer mon programme étant donné qu'il est bloqué ici et pas moi.

- Je vais à la plage, avec des amis. Je ne sais pas si tu les connais, c'est Dan et sa bande.

Je remarque immédiatement son regard se voiler et je réalise que j'avais raison depuis le début en pensant qu'il y avait quelque chose entre le bouclé devant moi et Dan.

- Je ne le connais pas.

Je n'insiste pas d'avantage et je ressens toute sa gêne. Nous ne parlons pas plus et je me prépare à partir. Je me vêts de ma légère veste et lui dis :

- Salut.

J'ouvre la porte et juste avant que je ne sorte je l'entends me répondre :

- À demain.

Et sa réponse me fait tout drôle. Parce que lui aussi en a envie à présent et j'avais peur que ça n'aille que dans un sens. Je souris et fourre mes mains dans mes poches de pantalon avant de sortir de l'établissement. Il veut me revoir demain et ça me fait plaisir, parce que moi aussi au fond.

*

Un message a suffit pour que je me retrouve avec la troupe à la plage. Je suis en compagnie de Dan, Perrie, Charlène, Ingrid, Antoine, Pierre et Baptiste. Ces deux derniers décident d'aller se baigner. Au début, nous nous en occupons pas et continuons de parler, mais ces deux débiles immatures reviennent avec des algues et du sable mouillé qu'ils nous lancent.

Bien-sûr, les filles crient et les gars veulent se venger. Nous finissons tous à l'eau et je nage tranquillement jusqu'aux rochers. Charlène me rejoint et nous nous asseyons un peu plus loin.

- Pourquoi tu ne nous l'as pas dit avant pour Noah ?

- Je ne sais pas, parce que je n'en voyais pas l'intérêt.

- C'est pas simple ce qu'il a vécu. soupire-t-elle, les jambes se balançant dans l'eau.

- Comment ça ? Tu es au courant ?

- Dan nous a expliqué la situation après ton départ.

Je sens mon sang ne faire qu'un tour après sa phrase. Je ne suis pas du genre à m'énerver, mais il s'agit de quelqu'un d'autre soit Noah et non de moi ce qui a le don de tout changer. Je ne sais pas ce que Dan ne comprend pas dans " ne le répète pas ". Je tente de faire mine de rien et de ne pas paraître en colère, mais c'est dur de me contrôler. Je fais alors un plongeon et nage plus loin, abandonnant Charlène sans même m'en rendre compte. Je rejoins les autres gars et prends Pierre pas surprise en le coulant. Il sort la tête de l'eau et je ris face à sa tête.

- C'était pour le sable dans mon short.

Idiot comme il est, il m'a étiré mon short de bain pour y glisser du sable plus tôt. Du moment que ça le fait marrer. Je remarque deux paires de jambes faire le poirier et réalise, qu'une fois leur tête à la surface, qu'il s'agit d'Ingrid et Antoine. Ils rient tous les deux avant que le brun me lance un regard. Il me sourit et je fais de même avant de disparaître sous l'eau. Je reprends ma respiration et je continue de nager, Antoine à mes côtés.

- Le premier arrivé à la roche là-bas ? je le défie.

Il sourit et s'engouffre sur l'eau. Je crie alors :

- Tricheur !

Puis, je me lance à sa poursuite. Je l'attrape par la jambe et en profite pour passer devant lui. J'arrive alors le premier et souris de toutes mes dents.

- Et tu oses me traiter de tricheur ? s'indigne-t-il faussement.

Je ris et il s'approche pour me couler. Sauf qu'il n'a pas le temps de réagir que j'inverse la situation et que c'est lui qui se retrouve la tête sous l'eau. Nous prenons un malin plaisir à nous battre avant d'arrêter, essoufflés aussi bien l'un que l'autre. Nous nous plaçons sur le dos, en position " étoile de mer " et observons le ciel dégagé. Recevant une algue sur le visage, je me redresse brutalement, pris de peur, et constate que Pierre nous parle en compagnie de Baptiste qui se marre :

- Vous venez les pédales ?

Antoine ne dit pas un mot, mais je sais que ça le vexe le " pédale ". Je le comprends. Être traité de " pédale " lorsque nous en sommes considérés comme une est loin d'être valorisant. Nous arrivons au bord et nous pouvons enfin nous tenir sur nos deux jambes. Je passe une main dans le dos d'Antoine et lui assène une petite tape avant de le rassurer :

- Ne les écoute pas.

Il me sourit, seulement à moitié, et part se sécher. Dan me lance ma serviette et je le remercie après l'avoir rattrapé. Je lui parlerai plus tard, lorsque nous serons seuls. Ça ne sert à rien de nous mettre en scène devant les autres. Nous nous séchons sous le soleil et Charlène me demande :

- Tu peux me mettre de la crème solaire dans le dos, s'il te plaît.

Pour toute réponse, j'attrape son tube de crème et m'installe à côté d'elle à genoux. Je tartine sa peau légèrement dorée et masse consciencieusement chaque partie de son dos.

- Un petit sourire.

Je n'ai pas le temps de comprendre et me contente de relever la tête pour constater que Baptiste nous prend en photo.

- Arrête de faire ta paparazzi, Bapt'.

- Scoop sur Nantes : drague entre Édouard et Charlène. Qui franchira le premier pas ? Nous le serons dans la prochaine édition.

Avec sa voix et ses mimiques exagérées de gronzesse, il nous fait tous rire, moi le premier. Charlène se retourne vers moi et me lance un clin d'œil que je lui rends par un sourire.

Nous restons jusqu'à plus de dix huit heures avant de tous nous dispatcher. J'attends Dan, qui a toujours sa langue fourrée dans la bouche de Perrie. Absolument répugnant si vous voulez mon avis.

- Ils sont dégeulasses.

Antoine explose de rire et je le suis aussi en me rendant compte de mon enfantillage.

- Tu ne diras pas ça quand ça sera toi. me charrie-t-il, en passant un bras autour de mes épaules.

- C'est ce qu'on verra. Vous avez bientôt fini les mollusques ? je braille aux deux tourtereaux ce qui accentue le rire d'Antoine.

Ils se détachent enfin et je salue mon ami avant de suivre Dan par le chemin qu'il me montre. Aussitôt que nous sommes un peu éloignés, je l'interroge calmement :

- Pourquoi tu as dit à tout le monde pour Noah ?

- Ils voulaient tous savoir pourquoi il était à l'hôpital.

- Pourquoi ?

J'essaye de le bloquer et de l'inciter à me parler de ce que je ne sais pas encore. Dan répond alors, un peu sur la défensive :

- Je ne sais pas moi, parce qu'il était dans notre lycée. Et toi ? Pourquoi tu vas le voir ?

Je fronce les sourcils. Il retourne la situation, l'enflure. En fait, je n'en sais rien du pourquoi du comment je vais voir Noah. Je voulais juste être sympa au début et maintenant je me rends compte que c'est le genre de personne que j'aime bien. Il est vrai, naturel. Ce n'est peut-être pas le plus souriant tout le temps, mais je sens que ça reviendra. Peu importe le temps que ça prendra.

- Alors, pourquoi ?

- Parce que c'est mon voisin.

- Et alors ?

- Bah je tiens à lui montrer mon soutien.

- C'est cool de ta part.

Je ne réponds rien, mais lui demande  plutôt, n'ayant jamais osé abordé le sujet avec le bouclé hospitalisé :

- Il traîne avec qui au lycée ?

- Je ne sais pas. Je n'ai jamais fait attention.

Je suis sûr que si j'étais muni d'un détecteur de mensonge, il s'affolerait et afficherait rouge. Lorsque nous arrivons à la maison de Dan, il me propose de rester un peu et j'accepte.

- Tes parents sont où ?

- Ils travaillent.

Je ne commente pas et le suis à sa chambre. Enfin chambre, studio serait plus adapté pour décrire la pièce avec réalité. C'est impressionnant et j'ai halluciné la première fois que je suis venu. Il a une chambre, un bureau, une salle de bain et douche, un billard, un baby-foot.

Nous nous faisons une partie de billard et il me bat sans surprise sous mes protestations. Je déteste perdre ! Le temps passe et c'est seulement lorsque ma mère me téléphone vers plus de dix-neuf heures que je rentre chez moi.

- Heureusement que je t'ai appelé !

- Désolée, 'man.

Elle lève les yeux au ciel et nous passons à table. Une fois le repas et ma toilette du soir terminés, je me pose dans mon pouffe extérieur avec mes écouteurs aux oreilles. Ça commence à devenir une habitude d'observer le ciel se coucher avec toujours la même musique. Je me laisse ainsi aller dans mes pensées. Noah n'échappe pas à la règle.

Je trouve impressionnant sa capacité à gérer tout ce qu'il lui arrive. Je ne sais pas si j'aurais pu le faire aussi bien. Je vois bien que parfois il se perd dans ses pensées ou qu'il bloque sur certaines choses, mais il sourit tout de même parfois. Il me sourit, à moi, et ça me fait chaud au cœur à chaque fois. Il n'a pas de fossettes ni de plis au coin des yeux comme ce qu'aime la plupart des gens, mais j'adore son sourire.

Ma mère vient me réveiller sur ma terrasse et me borde jusqu'à mon lit. Je ne réfléchis pas plus et m'endors comme une masse dans mes draps tel un petit enfant.

Hey tout le monde !
Chapitre un peu bateau et pas forcement le plus intéressant mais qui permet de rythmer l'histoire. Il y aura plus de mouvements au chapitre prochain !
Plein de gros bisous et à bientôt !

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