CHAPITRE DIX-HUIT
« Hey :) Tu prends le bus ce matin ?»
J'attends de savoir la réponse de Noah même si je prends de toute manière le bus à cause de la pluie. J'aime faire du vélo mais sous ces conditions, c'est juste une très mauvaise idée.
Je me rends donc à l'arrêt de bus et espère y voir Noah car je ne l'ai pas vu depuis le premier de l'an, soit quatre jours. Quatre jours ne me paraissent pas beaucoup mais quatre jours sans lui me paraissent étonnement beaucoup plus longs.
— Hey toi.
Je souris à Antoine avant de me positionner debout à côté de lui.
— J'ai pas encore eu l'occasion de te souhaiter bonne année de vive voix alors bonne année.
— Merci, bonne année à toi aussi.
Je lui souris gentiment tandis que je ne peux m'empêcher de penser à une seule chose. Je demande alors assez rapidement après avoir échangé quelques banalités :
— Est-ce que les gars ont compris que j'étais avec Noah ?
— Plus au moins alors Dan l'a dit. Seulement pour que certains gars arrêtent de dire des conneries, Précise-t-il.
Je grimace aussitôt qu'il mentionne le mot «conneries». Parce que ça veut clairement dire que ce n'est pas bien passé, le fait que je sois avec Noah, un garçon.
— Baptiste et Pierre ? Je demande même si je suis assez sûr que ce soit eux.
— Tiens, regarde qui est là.
Antoine me donne un coup de coude avec un petit sourire tandis que je me tourne vers l'avant du bus. J'y découvre alors Noah, les cheveux trempés malgré le fait qu'il est un sweat à capuche. Il me fait un petit signe de main que je lui rends avant d'aller se mettre plus loin. Je continue de le fixer jusqu'à que Antoine lâche :
— Vous êtes sérieux, vous vous parlez même pas ? !
— Bah non, qu'est-ce que tu veux que je fasse d'autre aussi ?
— Lui dire de venir ?
OK, je suis assez débile. C'est juste que c'est étrange pour moi de penser à toutes ces choses. Ce n'est pas naturel chez moi, j'ai l'impression.
Je finis par aller voir mon copain qui porte des écouteurs. Il me remarque au bout d'un moment et je lui lance un sourire que j'imagine assez niais.
— Hey, comment tu vas ?
— Hey, ça va. Et toi ?
— Ça va aussi. Ça te dit de venir avec nous ?
— Si tu veux.
— Oui, je le veux.
Noah lève les yeux au ciel bien qu'il sourit avant de me suivre vers Antoine. Je dois avouer que je suis étonné qu'il est accepté aussi vite.
— Salut, Sourit gentiment mon ami aux cheveux noirs.
— Salut, Répond Noah d'un ton neutre.
— Ça fait longtemps qu'on s'est pas parlés !
— Ouais, pratiquement un an.
Aussitôt que Noah termine sa phrase, un silence s'en suit. Je ne crois pas que mes amis, qui sont surtout les anciens amis de Noah, et Noah soient tout à fait compatibles. D'autant plus, sachant ce qui s'est passé entre moi et Antoine en début d'année.
Je ne sais même pas si je dois en parler à Noah. Est-ce qu'il s'en foutrait complètement ou au contraire serait-il jaloux ? Aucune idée, mais cette question demande sûrement à avoir une réponse. Je dis sûrement parce que je ne suis pas sûr de vouloir y chercher une réponse.
— Euh, ouais. Lâche Antoine, tout de même un peu gêné. Comment c'était votre premier de l'an ?
Je lance un regard vers Noah et comprends rapidement qu'il ne va pas répondre. Je le fais donc pour nous :
— C'était bien, on a bien profité.
— Super alors.
— Et vous, c'était comment ? Intervient finalement Noah d'une voix pas très forte.
— Bien aussi, on s'est bien amusés.
Antoine se met alors à nous raconter des anecdotes de cette soirée tel que Baptiste qui a couru nu dans la rue. Pauvre Baptiste, toujours à se ridiculiser plus qu'il ne le devrait.
Nous finissons par arriver au lycée et au moment où je propose à Noah de venir avec mes potes, il se défile. En fait, je ne sais même pas pourquoi j'ai proposé ça parce que c'était évident qu'il ne viendrait pas et que la situation serait étrange s'il le faisait.
— OK, pas de soucis. On se voit ce midi ?
Mon copain hoche timidement la tête et fixe le sol.
— Ça va ?
— Oui, juste un peu stressé mais ça va.
— Qu'est-ce qui te stresse ?
— Les devoirs que nous avons aujourd'hui ? Propose Noah.
Aujourd'hui nous sommes effectivement gâtés entre l'histoire et la philosophie. En plus, c'est le genre de matière où tu as beau apprendre, c'est comme si ça ne te servait à rien une fois devant ta feuille.
— Non, c'est pour rien. Enfin, rien t'important.
Il me fixe droit dans les yeux et ça me donne toujours vraiment envie de l'embrasser. Je crois qu'il le comprend et qu'il le veut, mais pas ici, devant tout le monde et surtout devant ma bande de potes qui nous observent plus loin. Quelle bande de commères ceux-là !
— Est-ce que ça te gêne qu'on soit ensemble au lycée ? Je préfère m'informer.
— Je ne sais pas, je ne pense pas. Mais on est quand même le premier couple gay du lycée, enfin, peut-être que je n'ai jamais remarqué d'autres aussi.
— Ça craint pour toi, d'être le premier ?
— Faut bien des premiers à chaque fois, Il hausse les épaules.
Je penche la tête sur le côté et sans que je n'ai le temps de comprendre quoi que ce soit, Noah vient poser ses lèvres sur les miennes. Il le fait si doucement que ça me provoque des frissons. Surtout quand je pense que nous sommes forcément observés. Nous avons beau être en 2016, il y a des choses qui mettent encore du temps à changer.
Je saisis les hanches de mon copain et presse tout aussi doucement ma bouche contre la sienne. L'échange dur seulement quelques secondes mais ça suffit pour me faire sentir bien, trop bien même pour un simple échange.
— Bonne journée, Je finis par déclarer, le rouge aux joues, après que je me sois doucement reculé.
Noah me rend un sourire franc avant de se diriger vers l'escalier.
Et forcément, quand je vais vers mes potes, ils me fixent tous intensément. C'est d'ailleurs vraiment gênant, ce qui n'arrange en rien mon visage qui est je suis sûr rouge.
— Hey, Je tente le plus naturellement possible.
Au fond, au creux de mon ventre, je sens quelque chose de très désagréable me peser. J'ai beau toujours la jouer cool, je suis présentement complètement flippé de la réaction des autres. Dan me lance un clin d'œil tandis que Pierre lâche avec une émotion que je ne saurais décrire :
— Alors tu tapes vraiment le dépressif ?
Ne pas relever son vocabulaire toujours aussi désobligeant et stupide, ne pas relever. Ce n'est pas important, je ne dois pas m'inquiéter.
— Euh ouais.
Ma voix part dans les aigus tandis que j'arrive seulement à dire ces deux mots.
— Bon, c'est bon, tout le monde a vu qu'ils étaient ensemble, on peut passer à autre chose ? Me sauve Dan.
— C'est quand même quelque chose, Déclare Stan, les yeux un peu plus ouverts que d'habitude.
Je lance un regard vers Stan qui détourne le sien aussitôt. Je ne peux m'empêcher d'être surpris face à la réaction de Stan. Dan passe alors son bras autour de mes épaules et nous nous dirigerons tous les deux vers les escaliers.
— T'en as là-dedans pour avoir fait ça devant tout le monde, Sourit-il en regardant vers mon pantalon.
— Je pensais pas le faire en fait, mais c'est peut-être mieux comme ça.
— Tu m'impressionnes de jour en jour.
Je lâche un petit rire avant de le remercier sincèrement :
— Merci de t'en foutre pour moi et Noah.
Dan arbore alors un sourire assez crispé pour réponse tandis que nous continuons d'avancer. Il finit tout de même par souffler :
— J'essaye juste de réparer ce que j'ai déjà brisé.
Je réalise alors qu'il y a beaucoup de choses que je ne sais pas à propos de Dan et qu'il est bien plus que l'image qu'il donne. Que caches-tu Dan ?
Il serait temps que je sache plus que ce que je ne sais actuellement. Il y a tellement de choses qui me perturbent mais que j'ai toujours préféré ne pas les relever à propos de Dan.
À force de ne pas vouloir me prendre la tête, j'en oublie parfois de m'impliquer concernant les autres.
*
— J'ai vraiment bien aimé le film, et toi, t'en as pensé quoi ?
J'ouvre la porte de sortie à Noah avant que nous nous engouffrions dehors, sous le froid de ce mois de Janvier.
— J'ai bien aimé aussi, Déclare-t-il simplement.
Je sais qu'il y a un truc qui ne va pas aujourd'hui et même depuis une semaine. Je l'ai su à la seconde où je l'ai vu avec ses cernes et son bonnet noir. Pourtant, j'ai essayé de faire abstraction pour ne pas l'embêter et lui remonter le moral. Je n'ai peut-être pas proposé le meilleur film aussi. Legend, film avec des gangs, des bastons, un jumeau froid et l'autre taré, enfin avec des troubles psychiatriques.
— Il était quand même énorme le jumeau avec des problèmes mentaux, Je lance pour essayer de faire dire quelque chose à mon copain silencieux.
— Ouais.
— Un peu spécial mais marrant. En plus, il était gay.
— Tu crois que c'est le fait qu'il est des problèmes mentaux qui l'a fait devenir gay ?
Petit moment de silence de ma part parce que je ne m'attendais pas du tout à ce genre de remarque présentement. Qu'est-ce que je suis censé répondre ? Je lance tout de même honnêtement :
— Ça reviendrait à savoir d'où vient l'homosexualité et je n'en ai aucune idée. Je ne pense pas que ce soit ses troubles mentaux qui l'ont fait devenir homo en tous les cas.
— Il avait pas de chance en tous les cas.
— Pourquoi ? Je m'intrigue, tout en fronçant les sourcils.
— Bah, en plus d'avoir des problèmes mentaux, il était gay. Franchement, j'appelle pas ça de la chance.
J'ai l'impression de m'être pris un coup dans l'estomac lorsqu'il dit ça et je crois que je viens enfin de réaliser quelque chose. Quelque chose d'important mais que j'avais toujours mis de côté et ignoré. Je suis avec un gars, pas avec une fille et c'est, c'est moins commun.
J'ai toujours pensé que c'était OK d'aimer un garçon et qu'on s'en fichait mais je réalise, que non, c'est quand même un peu important. Tout autant important que la vieille dame qui a écarquillé les yeux lorsque Noah m'a fait un rapide baiser pour me dire bonjour ou le groupe de filles qui faisaient que de nous fixer dans la salle de cinéma alors qu'il y avait d'autres couples mais hétérosexuels.
Je n'ai toujours pas envie de penser à ce sujet dont parle Noah cependant alors je me tais et rumine. Je tente pourtant de me voiler la face et réplique :
— C'est pas une mauvaise chose d'être gay.
Noah lâche un petit soupire moqueur avant de monter dans le bus. Il se met au fond après avoir passé sa carte et pose ses fines jambes sur la barre devant lui afin de les allonger un peu. Je me place en face de lui et tripote les lacets de mon sweat assez distraitement.
— Prétendre que ce n'est pas une mauvaise chose, c'est se voiler la face.
— Pourquoi tu me sors ça ? ! Je lève le ton et je suis bien content qu'il n'y est vraiment pas grand monde avec nous. T'es avec moi, un gars, alors que t'es un gars et tu me sors que c'est de la merde. Où tu veux en venir en me disant ça ?
Ouais, où il veut en venir ? Pourquoi il me dit ça après avoir aimé Dan ? C'est quoi le soucis avec moi ? Noah serre la mâchoire et met plusieurs secondes avant de juste dire :
— Que ce n'est pas normal.
— C'est tout ce que t'as à dire, «ce n'est pas normal» ? Parce que tu sais, ce n'est pas la première fois que je l'entends. Tu veux aussi me dire le fameux «c'est contre nature», je crois que je ne l'ai pas assez entendu celui-là ?
Face à son mutisme et son regard pourtant noir, je termine :
— Je vais te dire, moi, ce qui n'est pas "normal". Ce qui n'est pas normal, c'est de ne pas accepter qui on est juste pour plaire aux autres et de se rendre malheureux pour ça. Ça, c'est pas normal, pas normal du tout même.
Noah m'excède lorsqu'il rétorque :
— Mais c'est peut-être eux qui sont normaux et nous nous en rendons juste pas compte.
Il peut pas avoir dit ça et être aussi con, c'est pas possible. Franchement, je ne comprends pas ce qu'il me fait là. Il est gay, il le sait, je le sais, Dan et mes potes le savent et là il me sort qu'il n'est pas "normal" juste parce qu'il est gay. Ça n'a aucun sens, totalement aucun et je me demande ce qui lui passe par la tête.
— Parce que t'en as réellement quelque chose à faire d'être "normal" ? Normal, c'est rentrer dans des normes et devine qui les impose ces normes ? La majorité, c'est tout, on va pas chercher plus loin et l'avis de tous, juste celui du plus grand nombre de personnes. Tu me fais vraiment de la peine de penser que tu n'es pas normal parce que t'es gay. Surtout alors que tu sors avec moi.
Et sentant mon cœur battre à tout rompre et la colère monter, je sors du bus sans prévenir. Je n'ai aucune idée de la raison pour laquelle je descends mais je l'ai fait. Je me sens en colère alors que je ne le suis vraiment pas souvent et du coup ça me saoule de l'être.
Je crois que j'ai flippé aussi avec ce qu'il a dit. Parce qu'il y a des fois où, moi aussi, je me demande si je suis "normal" et si c'est bien d'aimer des garçons. Je crois que j'ai eu aussi peur qu'il me dise qu'il veuille tout arrêter entre nous. En fait, c'est de surtout ça que j'ai peur. Je le sais parce que j'ai une boule au ventre et que ça aussi, ça me saoule. Je n'aime pas ce que me fait Noah.
Une fois que j'ai compris où je me trouvais par rapport à chez moi, je rentre tout en bouillonnant de pensées. Je ne dis pas un mot à ma famille et m'habille en tenue de sport. Je fais alors des exercices chez moi, pompes, tractions, fentes, altères, chaises, abdominaux, jumping jacks. Je n'arrive même plus à m'arrêter tant je bouillonne encore. Pourtant, je sais qu'après je vais en pâtir physiquement d'avoir trop forcé ainsi. Heureusement, ma mère vient me prévenir que nous mangeons et je descends même si je n'en ai pas du tout envie.
— Ça va, chéri ? Me demande cependant ma mère lorsque je mets la table assez mollement.
— Ça va, oui.
— Ça n'a pas l'air. Tu veux en parler ?
— Je sais pas. C'est juste, Noah qui m'a saoulé. Je souffle finalement.
— Ça arrive les disputes dans un couple, tu sais.
Pitié pas cette phrase là.
— On s'est pas disputés, enfin je crois pas, je n'en sais rien en fait. Je lâche tout en m'asseyant.
— Qu'est-ce qu'il s'est passé alors ? Demande ma mère avant de poser le plat de lasagnes.
— Déjà, il a fait la tronche toute la journée et après il a commencé à dire que ce n'était pas normal d'être gay et des conneries du genre. Il me dit ça alors qu'il sort avec moi. Je suis censé le prendre comment ?
Ma mère semble réellement analyser la situation et choisir ses mots car elle met quelques temps avant de répondre quelque chose.
— Peut-être qu'il a peur.
— Mais peur de quoi ? Tout le lycée sait qu'il est gay ! Et on s'en fout.
— Calme-toi un peu déjà et laisse un peu le temps passer.
— Ouais, Je fais la moue.
Lucas arrive en courant et vient s'assoir sur mes genoux tandis que ma mère appelle le reste de la famille. Nous passons alors le repas tout ensemble tandis que je ne peux pas m'empêcher de penser à Noah. Je le déteste pour ça.
C'est la même chose lorsque je pars me coucher sachant qu'il habite dans la maison d'à côté. Je ne sais même pas si je lui en veux de quoi que ce soit. Je crois que je suis blessé et aussi effrayé qu'il ne veuille plus de moi alors que moi, je veux encore de lui. Je n'ai pas envie que ça se termine juste parce qu'il pense qu'être avec moi, c'est pas normal. Non, je n'en ai vraiment pas envie parce que ça serait totalement du gâchis.
*
Le lendemain, je me rends à l'athlétisme et le cours se passe vraiment bien. L'ambiance est au rendez-vous et je passe surtout un bon moment avec Antoine. Nous décidons même d'aller chez lui ensuite et nous parlons d'athlétisme tout le long du chemin. Nous finissons par faire des détours en vélo avant de finalement se poser chez lui. L'heure du repas arrive et je me retrouve à manger avec sa famille. Je suis un peu gêné tandis que ses parents sont très chaleureux avec moi.
— Tu veux faire quoi l'année prochaine ? Me demande le père et je me dis "pas encore cette question".
— J'aimerais bien intégrer STAPS et donc réussir le concours en mars prochain. Dans tous les cas, quelque chose en rapport avec le sport, je pense.
— Ça a l'air compliqué de rentrer en STAPS, il n'y a pas tellement beaucoup de places.
La mère m'explique ensuite son métier de kinésithérapeute et ça me parle vraiment bien. Le repas se termine tout de même et je regarde un film avec Antoine. Une fois celui-ci finit, je m'étire comme une baleine et ne me gêne pas pour écraser mon ami.
— Fais-toi plaisir, Il lâche et je souris.
Je finis par recevoir un message et je regarde de suite, contrairement à d'habitude, espérant que ce soit Noah. Je réalise qu'il s'agit seulement de ma mère et Antoine se moque de moi :
— C'est quoi cette tête déconfite ?
— Rien, c'est, juste ma mère. En plus, elle veut que je rentre bosser parce qu'on a des évals. J'aurais pas du lui dire que j'en avais.
Antoine lâche un petit rire avant de se lever.
— Si c'est l'appel de la mère alors, je ne peux rien faire, je ne suis qu'un pauvre mortel.
— Tais-toi, Je secoue la tête en riant. Parfois, je me demande ce que je fais avec toi.
— Parce que je suis drôle justement.
— Mais bien sûr.
Je remets mes chaussures et fixe Antoine avant de déclarer :
— Bon, bah je vais y aller.
— Yep, bosse bien alors pendant que je ne bosserais pas.
— Connard, Je lance.
Mon ami me sourit avant de me raccompagner jusqu'en bas et de me dire au revoir. Je file alors chez moi et arrive rapidement avec mon vélo. Ma mère m'accueille de ce pas :
— Désolée, Ed mais il est quinze heures et il faut que tu travailles un peu pour lundi.
— Ouais, je sais.
Je n'attends pas qu'elle me parle davantage et me rends directement dans ma chambre où je bosse sur mon économie puis sur mes maths. C'est comme ça que ma journée se termine tandis que je vérifie encore une fois que Noah ne m'a pas envoyé un SMS. Mais bien sûr, aucun message de lui.
Je finis par lire le bouquin que j'avais offert à l'hôpital pour Noah. Ça faisait déjà quelques temps qu'il traînait dans ma chambre et je n'avais jamais daigné l'ouvrir jusqu'à aujourd'hui. Je me surprends même à apprécier le livre alors que ce n'est pas le genre de chose que j'aime normalement faire. Je lis jusqu'à un peu plus de minuit puis je me décide enfin à dormir, moi qui suis habituellement un couche tôt. Sauf que forcément, c'est maintenant que mon téléphone se met à vibrer. Je m'en saisis pourtant et ouvre le message de Noah le cœur battant.
"Hey, tu m'as dit que je pouvais te parler quand je n'arrivais pas à dormir alors je le fais. Je suis désolé pour hier, j'ai été con. Je ne voulais pas te vexer ou quoi que ce soit d'autres. Désolé encore."
"Hey, tu as bien fait de m'envoyer un SMS. Moi aussi, j'arrive pas à dormir de toute façon."
Je ne sais pas que lui mettre d'autre alors j'envoie seulement ça. Il répond heureusement assez rapidement tandis que je suis accroché à mon portable.
"Ça te dit qu'on se voit demain ?"
"Ma mère veut que je bosse... Viens maintenant discrètement ?"
"Ok, je laisse un mot à mes parents et j'arrive"
Je souris tout en étant impatient qu'il soit là malgré l'heure si tardive. Je jette alors mes boxers qui sont au sol dans mon armoire et enfile un tee-shirt ainsi qu'un bas de jogging. Le plus discrètement possible, je descends et ouvre à Noah après qu'il m'ait envoyé un message pour me dire qu'il était devant ma porte. Nous ne nous embrassons pas et montons directement à ma chambre dans un silence de morts.
— Salut.
— Salut, Je réponds alors que Noah paraît à deux doigts de tomber de fatigue.
Nous continuons de nous fixer et je ne peux pas m'empêcher de me rapprocher de lui. Noah vient naturellement se coller contre moi et je le sers affectueusement en retour. Je crois qu'il est vraiment fatigué, c'est même totalement évident et limite flippant.
— Je suis désolé, Ed, vraiment désolé pour hier, je voulais pas dire tout ça.
– Ça va, Je réponds simplement d'un chuchotement.
Forcément que ça va quand il est là. Je le colle le plus possible à moi jusqu'à ce qu'il relève la tête et m'embrasse. Je ferme automatiquement les yeux et me laisse faire, oubliant tout le reste. Nous continuons de nous embrasser tout en nous asseyant tandis que je sens mon pouls battre contre ma tempe. J'ai eu vraiment peur que ce soit fini nous deux et que je ne puisse plus faire ça, vraiment peur. Je serre alors davantage Noah contre moi et il caresse doucement ma nuque. Je finis tout de même par intervenir :
— T'as l'air crevé depuis une semaine et d'autant plus ce soir, qu'est-ce qu'il se passe ?
Noah reste muet et laisse sa tête contre mon épaule de sorte que je ne le voie pas.
— Noah, parle-moi, je veux t'aider.
Toujours aucun mot de sa part. Je
frictionne alors doucement son dos et attends ainsi une quelconque réponse.
— J'en ai marre, j'en ai trop marre. Finit-il par lâcher.
— Marre de quoi ?
— De vivre. J'en peux plus.
Je sens mon cœur louper un battement à cette annonce. Ce ne sont pas des mots que j'entends tous les jours et de savoir que c'est mon copain qui les dit, c'est encore pire.
— Tu dis ça aujourd'hui mais ça ira mieux demain, Je tente de le rassurer bien que je crois que c'est plus moi que j'essaye de rassurer.
— Demain, c'est encore pire. Chaque jour, c'est pire en fait. J'en ai marre d'espérer quelque chose qui ne viendra jamais.
Ok, c'est violent pour moi d'entendre ça.
— Mais t'as ta famille, Léon, moi et puis Moon surtout.
— Justement, c'est encore pire. J'ai l'impression d'être juste un boulet pour vous tous.
— Dis pas ça, Noah, c'est totalement faux. Tu crois vraiment que je serai avec toi si je pensais que t'étais un boulet ?
— Regarde hier, j'ai encore merdé avec mes doutes à la con. Faut vraiment que j'apprenne à la fermer.
— C'est justement bien que tu arrives à dire tes doutes.
— Ouais mais ça t'a blessé.
— Forcément que ça m'a blessé. Tu dis que les homos sont contre nature et anormaux et tu sors avec moi. Tu voulais peut-être que je te saute dans les bras ?
— Je sais, je sais. C'est juste que, parfois, je doute. Je me dis que toute ma vie, je m'en prendrais toujours plein la tronche juste parce que j'aime les hommes alors que ça me rend heureux et j'ai pas envie de ça. Pas en plus de, tout ça, tout le reste.
— Je comprends, je suis passé par là aussi et il y a encore des jours où je doute.
— Vraiment ?
— Ouais, Je souffle.
C'est peut-être le moment de m'ouvrir un peu plus à Noah. Il le fait chaque jour avec moi alors pourquoi ça ne serait pas mon tour ? Il faut que je m'ouvre et que j'arrête de trop me l'interdir sans raison. Je commence cependant pas très sûr de moi et assez maladroitement avant de le faire plus naturellement :
— L'attirance pour un garçon, c'est pas quelque chose que j'ai super bien pris. Au début, je pensais que c'était bizarre et que j'avais une sorte de problème, tu vois. J'essayais plus de refouler ce que je ressentais alors je faisais beaucoup de sport et je me suis pas mal renfermé pendant ma troisième et aussi ma seconde jusqu'à un pote.
Je fixe Noah, ne sachant pas si je dois continuer ou pas. Est-ce qu'il veut vraiment savoir et est-ce qu'il a à savoir ? Cependant, Noah me coupe dans mes pensées et me questionne :
— Il s'est passé quoi avec lui ?
Je déglutis et me sens tout gêné de raconter :
— On s'est découvert sur le plan sexuel et comme nous étions tous les deux un peu pommés, ça restait entre nous. Mais ce qui m'a encore chamboulé, c'est l'été d'après où j'ai rencontré une fille que j'ai réellement bien aimée. J'ai alors essayé de me persuader qu'avec mon pote, c'était que les hormones et rien de plus. Puis, j'ai réalisé avec toi que ce n'était pas juste les hormones, c'est mon attirance.
— Donc t'as eu un copain et une copine ?
— Je ne dirais pas ça à vrai dire. Avec mon pote, on n'est jamais vraiment sortis ensemble, c'était plus de l'attirance et de la découverte disons et avec la fille, c'était seulement deux semaines pendant des vacances alors je sais pas si on peut appeler ça vraiment une "copine".
Noah opine d'un léger mouvement de tête avant de continuer de m'interroger :
— Et actuellement, tu en es où ?
— J'ai l'impression d'aimer autant les filles que les garçons. Je veux dire, quand je repense à mes expériences passées, ça m'a paru aussi normale et naturelle avec les deux alors je ne sais pas.
— Je comprends.
— Alors tu vois, ne te fais pas de soucis. On traverse tous des trucs pas, forcément très drôles.
Noah embrasse doucement mon épaule avant de demander honnêtement :
— Tu crois que ça va durer longtemps nous deux ?
— J'en sais rien, Noah. Pour l'instant, je, je me sens vraiment bien avec toi. J'avoue bien que très peu sûr alors je tente de prendre sur moi et de m'assumer. Je veux dire, je ne vois aucune raison pour que ça s'arrête demain ou après-demain. Et, et toi, tu penses qu'on restera longtemps ensemble ?
— J'en sais rien aussi. Enfin, je pense tout de même que tu ne tiendras pas avec moi. C'est juste réaliste de ma part quand je dis ça, je ne vois pas ce qui pourrait te faire rester plus longtemps.
— Ça fait quand même trois mois qu'on est ensemble. Ce n'est pas rien.
— C'est sûr, ce n'est pas rien. Pourquoi tu as voulu qu'on soit plus qu'amis ?
— Parce que je t'appréciais plus qu'un ami ? Et que je ne me voyais pas rester juste ami avec quelqu'un comme toi, ça aurait été une belle connerie.
Je vois Noah sourire timidement et il réplique :
— Tu sais, je crois que t'es une des rares personnes sincères avec moi depuis belle lurette. Et ça, ça fait toute la différence avec n'importe qui.
— J'essaye de l'être.
— Et je t'en remercie.
Nous profitons ensuite du silence et de la présence de l'autre, enlacés. Noah finit par bailler plusieurs fois et je sens qu'il ne va pas tenir éveillé très longtemps.
— Faudrait que tu dormes un peu, Noah.
Je caresse doucement les cheveux ondulés de mon copain tandis qu'il se laisse aller contre moi.
— J'ai trop peur.
— De quoi ?
— De me réveiller à cause de cauchemars et de revivre ce que j'ai déjà vécu encore une fois. Ça me rend fou ça aussi.
— C'est, quel genre de cauchemars ? Je me risque à demander.
— Je revis exactement tout. Je te jure, c'est trop flippant. C'est comme si je pouvais encore sentir ses doigts sur moi, entendre sa voix, sentir son odeur. J'en peux plus, ça dure depuis plus de quatre mois et ça part toujours pas. OK, ça a diminué mais c'est toujours là.
— Tu crois pas que tu devrais voir un psy pour t'aider avec ça ?
— J'ai déjà essayé et c'est pas du tout pour moi.
— Faut que tu trouves une solution alors, tu ne peux pas rester comme ça.
— Je sais, Il souffle tout en se collant plus à moi. J'aimerais aussi bien dormir. En vrai, je ne sais plus ce que c'est de passer une nuit normale avec ce sentiment d'avoir juste dormi et bien en plus de ça.
— T'as essayé l'homéopathie ?
— Non.
— Tu vas pas retourner chez toi maintenant quand même ?
— J'avoue que je m'en sens pas la force.
— Allez, reste ici. Je te passe de quoi dormir et on essaye.
— J'ai peur, Éd. Il avoue et ça me fend le cœur de l'entendre.
— T'as pas à avoir peur, je suis là.
Je me lève après avoir embrassé tendrement Noah et lui passe un bas de pyjama avec un de mes tee-shirts. Instinctivement, je me tourne et j'entends le bouclé me lancer un «merci» sincère ce qui me fait légèrement sourire.
— C'est bon, la princesse ?
— La ferme, t'es plus petit que moi alors c'est galère tes fringues.
Forcément lorsque je me retourne, j'explose de rire. Parce que, c'est effectivement un peu court mais Noah flotte un peu dans mes affaires étant donné qu'il n'est vraiment pas épais. J'avoue que c'est tout de même assez satisfaisant de le voir avec mes habits. Je m'allonge sur Noah et le taquine à propos de mes habits tandis qu'il essaye de se dégager lamentablement. Je me mets tout de même à bailler et il fait de même. Je pose alors ma tête contre son torse et écoute son cœur battre. J'aime vraiment ça, partager ce que nous partageons.
— Allez, on essaye.
— On essaye, Je réponds.
Je pars éteindre ma lumière et me glisse sous mes draps.
— Bonne nuit, Je finis par lâcher pour briser le silence tout de même assez pesant après avoir éteint la lumière.
— Bonne nuit à toi aussi.
— Merci.
Je l'entends bouger tandis que je m'installe à ma guise. Quelques minutes passent avant que Noah me touche maladroitement le haut du torse.
— Désolé.
— Pas de problème.
Il vient alors se rapprocher de moi et se blottir contre mon torse. Je souris automatiquement et l'embrasse quelques fois. C'est ainsi que nous finissons par dormir : sa bouche contre mon cou après tous ces baisers et mes bras autour de lui comme pour le protéger instinctivement. Parce que merde, il a en bien le droit maintenant, de se sentir en sécurité.
☀️Hey tout le monde !
Je reviens avec ce chapitre☀️
🌓Je suis désolée pour le temps que je mets à poster en ce moment mais aussi étonnant que c'est (je suis quand même en vacances !!), je ne suis pas très productive.🌗
Je vous fais plein de bises et vous dis à bientôt,
L🌈
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