CHAPITRE 8 : Amnésie traumatique
Il lui fallut un long moment pour s'habituer à l'abondance de lumière. Celle-ci n'était pourtant guère vive, mais omniprésente. Disséminée dans les angles du caveau, elle provenait de minces tubes, parfois montés sur un carcan collé au mur. Cet éclairage oscillant entre le bleu et le vert pâle révélait une voûte incurvée et des ogives perçant les parois. Elle avait débouché sur un piédestal, ou un empilement de marches aux arrêtes triangulaires, face à une tranchée.
Immobile, Aresh se tenait à ses côtés.
Aélig cligna des paupières à plusieurs reprises et les contours de la salle se précisèrent. Alignés au-dessus de chaque bordure de la saignée, des silhouettes bipèdes attendaient, trop acérées pour être humaines. Elle distingua les reflets discrets d'armures sombres et exotiques, surmontées par des gueules reptiliennes d'une couleur de charbon. Leurs yeux étaient aussi pâles que la lumière environnante, parfois troublés par des mouchetures actiniques.
Certains serraient une sorte de vouge, ou de lance, contre leur poitrine, des armes d'une sophistication primitive – mais les câblages discrets incrustés aux lames tranchantes trahissaient leur nature véritable. Tous, à l'exception d'un seul, portaient l'umbrarmure, et tous regardaient dans leur direction.
La vision d'Aélig se brouilla et elle chancela. Quelque chose n'allait pas. Une défaillance se glissait dans son esprit, insidieuse. Parmi les figures sombres d'une fixité de pierre, elle en avait aperçu une autre, bien plus haute ; mais cette apparition disparût dans les ténèbres.
Elle sentit Aresh toucher doucement son épaule.
— Nous sommes arrivés, l'entendit-t-elle dire, et sa voix lui parvenait à travers une cascade d'eau déchaînée.
— La dieucité parle à nouveau ! s'exclama quelqu'un au loin. L'ancienne machine a choisi sa voix... notre attente a...
Le reste de la sentence se perdit dans les limbes. Aélig se plia en deux, un pieu de douleur planté sous le cou. La chose incrustée dans son dos devenait un tison ardent, du métal en fusion versé sur ses nerfs. Dans le carré de confusion et de souffrance qu'était devenue sa conscience, Aélig décela une série d'incantations étranges, prononcées dans une langue impropre aux oreilles humaines, une langue des sous-sols.
Une bouillie criarde de réalisme se déversa dans son cerveau. Elle se vit happée par un tourbillon d'aiguilles, à la fois spectatrice extérieure et victime. Elle assista au dépeçage méthodique de son corps, à l'évacuation de tout ce qui n'avait pas été jugé nécessaire, et son esprit se brisa en même temps que ses os. Impuissante, elle se sentit scrutée par une entité fossilisée et calculatrice. Accrochée la tête en bas, disséquée, son système nerveux déroulé par des pinces microscopiques, elle contempla sa reconstruction écœurante. Un processus exécuté comme une routine, le moindre mouvement optimisé jusqu'à la perfection. Des flux noirâtres injectés dans sa nouvelle chair, encore et encore, la secouant comme un pantin.
Elle entendait Aresh en écho, quelque part au loin.
« Si seulement... si seulement je pouvais comprendre les instructions », disait-il, et elle eut envie de hurler. Se débattant dans ce cauchemar vivide, elle fut entraînée par une force contre laquelle elle était incapable de lutter. Ses pieds raclèrent le sol. Quelqu'un, ou quelque chose, la portait en la tirant par les aisselles. Elle n'aurait su dire s'il s'agissait d'une hallucination. Projetée sur la toile imaginaire de son esprit, sa vivisection malsaine monopolisait toute son attention. Le flot de mots étranges qui l'inondait devint plus bruyant encore, éteignant sa conscience dans un déclic salutaire.
Aélig ouvrit les yeux, la rétine crépitant d'une multitude de triangles lumineux.
Les mots « encodage », « structuration partielle assimilée » et « duplication » obsédaient son esprit pour une raison inconnue, mais son dos ne la faisait plus souffrir. S'était-elle évanouie ? Cela ne ressemblait pas à un malaise : elle ne se sentait ni vaseuse ni écœurée. Se tournant sur le flanc, elle put éprouver la mollesse de sa couche avant de s'extirper de l'alcôve où elle était logée. Ses pieds nus rencontrant le sol glacé la firent frissonner. Elle ignorait où elle se trouvait et comment elle avait atterri sur ce drôle de matelas tressé.
Son seul souvenir se résumait à cette tranchée aux parois étroites et à la douleur abrutissante.
Quel genre de crise cela pouvait-il être ? se demanda-t-elle. Cela ressemblait à une réminiscence qu'on aurait poussé de force à la surface de son esprit, alors que son cerveau ne voulait pas s'en rappeler. Quelque chose avait fait sauter ses mécanismes de défense psychologique, mais quoi ? Quelle clé pouvait être perfectionnée au point d'ouvrir le verrou amnésique installé par son esprit sur ces images d'une cruauté insupportable ? Et surtout... surtout, comment n'avait-t-elle pas encore définitivement sombré dans la folie ? Emmaillotée dans un carcan élastique, celle-ci était tenue à distance de sa conscience par une force de traction inimaginable.
C'était impossible. Aucune psyché ne résistait à autant de fractures, aucun esprit ne pouvait revenir de la mort en restant sain ; cette cohérence intérieure ne venait pas d'elle. À l'instar de son corps, son esprit avait lui aussi été recousu, piqué de milliers de points de suture. Impossible, encore. Il n'existait aucune médecine pour rapiécer une âme.
Karavindra aurait dit d'elle qu'elle était « complètement FUBAR », fucked up beyond any repair, foutue au-delà de toute réparation.
Et pourtant...
Aélig se leva, craignant de perdre l'équilibre, mais il n'en fut rien. Elle se trouvait dans une pièce plus longue que large, dont le plafond devait culminer à une trentaine de mètres. Cette démesure constante commençait à la lasser au plus haut point. Des colonnes soutenaient la voûte, ouvragées et épaisses à l'instar d'un temple oublié en pleine Égypte. Les hiéroglyphes en patte de mouche luisaient faiblement dans la pénombre, flattés par la lumière osseuse du ciel juste en face d'elle. Traversant le firmament nocturne en un coup de pinceau pailleté, un fragment de nébuleuse jetait un éclat spectral sur l'obsidienne aux alentours.
Ce cosmos cristallin paraissait tout proche. Aélig distinguait la plupart de ses riches volutes, figées dans une traînée gazeuse parmi les étoiles. Fascinée par la magnificence de ce panorama, elle en oublia son désarroi pendant un court instant.
Ce monde tordu avait réussi à conserver de rares parcelles de beauté, c'était indéniable. Mais tout comme lui, cette beauté était figée et morte, froide comme la pierre qu'elle foulait. Aucune âme vivante ne l'animait et elle se sentit soudain triste.
Contournant une des colonnes gravées, elle reconnut vaguement un sas octogonal, fermé par un vantail automatique – elle l'avait récemment franchi, elle en était sûre, mais pas par ses propres moyens. Ce portail d'usine menait à l'antichambre de la tranchée. Elle n'était pas si loin de son point de départ.
Où était donc Aresh ? Il se tenait juste à côté d'elle quand ils avaient quitté les méandres de la mégastructure, sa main s'était même posée sur son épaule...
Un frôlement lointain la mit sur le qui-vive. Une paume sur les inscriptions, elle plongea son regard entre les colonnes. Rien. Le vide et le silence. Pourtant, un signal d'alerte s'alluma dans ses terminaisons nerveuses. Elle soupçonnait l'implant triangulaire d'en être responsable. Le bout de chair arraché à l'ancienne structure modifiait quelque chose en elle, d'une manière indicible, elle en avait la certitude. C'était une impression quasi-somatique.
Mue par un instinct à peine découvert, elle s'accroupit.
— Aresh ? murmura-t-elle.
Ce n'était pas lui. Elle était sûre de reconnaître le son de ses pas, elle l'avait écouté durant un millier d'heures. Le frôlement glissa à nouveau dans les ténèbres aqueuses, discret tel un souffle. Cliquetant imperceptiblement sur la surface lisse, une masse se déplaçait un peu plus loin. Prenant appui sur un socle bombé, la silhouette diffuse grimpa sur un poteau minéral, louvoyant avec habilité.
Fermant les paupières, Aélig se concentra sur son ouïe.
Le crissement ténu se répercutait désormais au-dessus d'elle, quelque part dans le plafond invisible. Bandant ses muscles, elle roula sur le côté, prête à bondir. Son dos heurta la colonne adjacente dans un son étouffé et elle serra les dents, comprenant avoir surestimé son agilité. Son corps devait être apprivoisé. C'était frustrant. Elle expira.
— Je sais qu'il y a quelque chose là-haut, s'écria-t-elle, lançant un défi à l'inconnu.
C'était idiot, elle en avait conscience. Elle avait passé assez de temps dans cet enfer pour savoir que le moindre de ses recoins abritait une menace potentielle. Délogeant un fragment pointu de la fissure la plus proche, elle le lança en direction du cliquetis avec un sifflement de rage.
Le caillou percuta une rangée de runes et se perdit au loin dans un staccato.
— Qui que tu sois, descends de là ! s'époumona-t-elle en vain.
Ne recevant aucune réponse, elle se releva. Ce rôdeur invisible la mettait sur les nerfs, bien qu'elle refusât de l'admettre. Jurant intérieurement, elle se mit à courir. Son sprint résonna beaucoup trop bruyamment à son goût. Son arrêt fut rapide et brutal. Elle n'avait nulle part où aller. La salle s'arrêtait dix mètres plus loin, s'ouvrant sur le ciel nocturne et son éclat irisé délivré par l'espace lointain.
— Merde, lâcha-t-elle.
Ce n'était pas la bonne direction. Elle était coincée. Se retournant, elle vit que son poursuivant avait daigné reposer les pieds à terre. Aucun doute, elle avait aperçu cette grande silhouette dans la salle de la tranchée. Haute de deux mètres ou presque, la créature était plastronnée dans une umbrarmure, mate sous le manque de lumière.
L'assemblage harmonieux de plaques émettait un frottement à peine perceptible.
Dessinant une arabesque élégante, le casque se rétracta dans la partie supérieure de l'umbrarmure, révélant la gueule cachée derrière le métal.
Aélig recula par réflexe. Un Thanyxte. Sa physionomie différait sensiblement de celles qu'elle avait croisé au-dessus de la tranchée : moins délicate, plus obtuse, malgré certains traits aigus et des arcades sourcilières profondes. Un museau de serpent et des mâchoires de loup. Le prisme des cornes surmontait le crâne, amenant un goût de déjà-vu dans son cerveau.
Ce n'était pas leur première rencontre.
Contrairement à ses compatriotes, les yeux de celui-ci n'étaient pas composés d'une palette de bleu, mais de jaune. Le jaune cuivré de l'ambre, tranchant sur une peau noire.
Noire ? Dans son souvenir, il était d'un bleu océanique, moucheté – celui d'un lac. Cela ne collait pas. Mais les yeux ne mentaient pas. Elle voulut parler, et les mots mourraient dans sa gorge.
« Tu étais morte, puis nous t'avons amenée ici », lui avait confié Aresh.
Elle se revit traînée vers un autel. La pointe de la pyramide noire au-dessus d'un containeur, ou d'un cercueil. Comment pouvait-elle voir ça alors qu'elle était à l'intérieur ?
La mémoire du corps, comprit-elle, luttant contre la nausée. Les étranges signes imprimés sur son épiderme se souvenaient de tout, contrairement à son esprit.
— N'approchez pas, dit-elle.
Sa voix ne tremblait pas. En face, Vol'Zan s'immobilisa. Quelque chose avait changé, elle le sentait, sans pouvoir mettre de mots dessus. C'était peut-être son attitude, ou sa silhouette, plus ramassée, plus bestiale. Déjà lourd à l'origine, il paraissait peser vingt kilos de plus.
Et sa carnation, Seigneur, songea-t-elle. Était-il devenu son ennemi ?
Il l'a toujours été, susurra une voix sournoise dans son esprit déboussolé. Un ami... un ami ne te traîne pas dans un endroit pareil. Sa vision devint floue.
— Pourquoi ? réussit-elle à cracher. J'étais... j'étais morte, putain. Alors pourquoi ?
Le voyant esquisser un pas en avant, elle l'arrêta d'un geste.
— Restez loin, l'avertit-elle.
Comme pour lui répondre, le reste de l'umbrarmure se défragmenta avec élégance, réintégrant la longue capsule fichée dans son dos et révélant une combinaison tout aussi noire ; il n'en devint pas pour autant moins menaçant.
— Sur le moment, cela me paraissait la chose à faire, prononça enfin Vol'Zan.
Ce n'était même pas une vraie réponse. Sa voix était différente, elle aussi. Mate à l'instar de son umbrarmure.
Suffoquant, Aélig revit les entrailles putrides du Caveau sur Kappa-Centauri. La fusillade. Les cris et l'agonie. Son père – non, pas maintenant, elle ne voulait pas y penser. Poussée à bout, elle s'était jetée dans l'étreinte tranchante du Substitut Setesh, mettant fin à son existence, obéissant à une impulsion qui avait grandi en elle durant des mois. Pendant quelques secondes, le temps que sa conscience s'éteigne, elle avait trouvé le répit dans le néant.
— On était... vous étiez acculé, poursuivit-elle, reprenant difficilement sa respiration. Il ne restait plus personne... à l'intérieur... pour vous aider, mais... mais vous avez réussi à sortir, à traîner mon cadavre hors de cet antre dégueulasse... vous n'avez pas pu faire ça tout seul.
Inclinant la tête, Vol'Zan la vrilla de son regard jaunâtre.
— Il ne t'a rien dit ? s'intéressa-t-il, esquivant une nouvelle fois la question véritable. Aresh, précisa-t-il.
— Me dire quoi ?
— J'ai négocié, dit-il, obnubilant son intervention. Je voulais retourner chez moi, et je n'acceptais pas de perdre ma seule amie, alors j'ai négocié. Les résultats sont...
Vol'Zan n'alla pas jusqu'au bout de sa pensée. Aélig eut l'impression qu'il en avait déjà trop dit. Une chose malsaine et vicieuse se dissimulait à l'intérieur de ses paroles.
Quand tout le monde était mort, déchiqueté par ce qui se faisait appeler Setesh... il ne restait plus personne pour négocier quoi que ce soit.
À part... à part, bien sûr...
— Oh mon Dieu, réalisa Aélig en une épiphanie sinistre. Nazarah, vous avez parlé à Nazarah.
— Une entreprise délicate, mais pas impossible, commenta-t-il. Cela m'étonne vraiment qu'Aresh ne t'ait rien dit. En général, il est très bavard. Peut-être qu'il s'est découvert une morale.
Il eut un claquement de mâchoires qu'elle avait toujours associé à un rire.
— Ce n'était pas votre décision, souffla-t-elle, au bord de l'asphyxie. Ce n'était pas à vous de décider si je devais continuer à vivre !
Elle avait hurlé ces derniers mots. L'écho mourut dans les colonnades. Un tremblement s'empara d'une de ses mains et elle serra le poing pour le contenir. Une question lui déchirait la glotte de ses griffes invisibles, mais elle n'osait la poser.
— Tu ne demandes pas ce que je lui ai donné en échange, constata Vol'Zan, donnant la désagréable impression de lire dans ses pensées.
— J'allais le faire, mentit-elle. Alors ?
Il garda le silence, se contenant de l'observer, une expression indéchiffrable plaquée sur son faciès de crocodile.
— Rien n'est jamais gratuit, ajouta-t-elle.
Cela sonnait creux.
— Je n'avais qu'une seule chose à lui donner. Malheureusement. Quelques zettaoctets d'informations. Je ne pensais pas que cela allait fonctionner, mais il est d'une logique binaire, il ne voit que le profit. La connaissance, c'est le pouvoir, et j'en avais assez sur votre civilisation pour qu'il puisse s'y intéresser.
Aélig tomba dans un puit noir et profond.
— Vous avez vendu... toute mon espèce, prononça-t-elle, et cette phrase lui parut venir de loin, non pas de sa gorge, mais de derrière elle.
Sa voix ne pouvait être aussi cassée.
— Tu n'es plus des leurs, désormais, prononça Vol'Zan comme à travers un mur de glace. Et puis sois pas hypocrite. T'en as jamais eu rien à foutre. Tout ce qui t'importait, c'était ta propre personne.
— Je vais vous tuer, s'entendit-elle expirer.
Dans un état second, elle se jeta sur lui, franchissant la distance qui les séparait en quelques pas.
— Fils de pute ! hurla-t-elle en essayant de le frapper.
Elle ne désirait qu'une chose : lui faire mal. Lui faire mal comme elle avait eu mal, lui faire ressentir cette lame tranchante et incendiaire qui venait de se planter entre ses omoplates. Elle savait son visage désormais tordu par la haine. Insensible à sa fureur, Vol'Zan lui crocheta les poignets, la repoussant avec assez de force pour la faire trébucher.
Conservant son équilibre dans un effort, Aélig cracha de colère avant de revenir à la charge. Mais il était trop grand, trop fort, trop agile – elle n'était pas de taille, elle ne l'avait jamais été, et il l'envoya valdinguer d'un simple revers du bras. Elle se réceptionna un mètre et demi plus loin, patinant sur le sol lisse avant de tomber sur les genoux.
— Ne me provoque pas, menaça Vol'Zan. Tu as le droit d'être en colère, mais...
— Oh, j'ai le droit d'être en colère ? répéta Aélig sans se relever.
Son ton était méprisant au possible. Levant le menton, elle éclata d'un rire sans joie.
— Arrête ça, la prévint-il. Tu n'as absolument aucune idée de ce que j'ai dû subir pour en arriver là.
— Il faut que je te plaigne, Haïdès ? Il faut que je fasse preuve de gratitude ? s'égosilla Aélig. Faut que je te dise merci pour la chance inestimable que j'ai d'être encore en vie ? J'ai vu ce que ce truc m'a fait subir, alors va te faire foutre ! Ta seule amie, vraiment ? Va te faire foutre, alien de merde ! T'as jamais rien percuté sur les êtres humains, tu me dégoûtes... t'aurais mieux fait de me laisser crever dans ce putain de Caveau !
Ce fut de trop, mais elle ne s'en rendit compte qu'à l'instant où il bondit sur elle. Roulant sur le côté, elle l'évita de justesse.
Vol'Zan grogna, les griffes de ses mains crissant sur le sol, et elle en profita pour lui décocher son pied nu dans le museau, de toutes ses forces – assez pour qu'il découvre les dents. Elle avait réussi à le faire sortir de sa réserve, et cela lui procura une satisfaction sombre.
— Désolée, mais quoi que t'aies soi-disant subi, c'était pour rien, cingla-t-elle en se mettant debout avec célérité.
Il se redressa à son tour dans un éclat furtif de ses iris jaunes.
— Est-ce qu'on peut en discuter ?
Mais Aélig en avait plus qu'assez.
— Tu ne peux pas me demander de vivre avec ça, dit-elle, au bord de l'hystérie. Tu ne peux décemment pas me demander... de... continuer... de subir... cette espèce d'existence monstrueuse... juste parce que tu me l'imposes ! Je ne suis pas un caprice, merde !
Elle étouffa un sanglot, incapable de déterminer s'il s'agissait de tristesse ou de colère.
— Ça ne marche pas comme ça ! hurla-t-elle.
Lentement, elle recula vers le bord de la terrasse et son ciel immaculé. Le sifflement près de l'abîme lui indiqua qu'elle se trouvait très haut et qu'elle allait par conséquent avoir très mal, mais elle s'en fichait.
— Tu recommences, constata Vol'Zan. C'est inutile.
Mais ne l'écoutant plus, elle se jeta en arrière.
— Ça ne marchera pas, acheva-t-il alors qu'elle disparaissait dans les ténèbres sans crier. J'ai déjà essayé.
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