Gilbert Blythe - Anne with an E

Voici finalement la commande de Cass1509 Merci de ton incroyable patience, j'espère que cet imagine te plaira !

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À la course, je noue un ruban noir dans mes cheveux châtains et enfile rapidement mes chaussures. Je me regarde une dernière fois dans la glace, m'assurant ainsi de ne pas avoir accidentellement oublié une mèche rebelle, puis m'élance dans le grand escalier de chêne qui mène à l'étage du dessous.

Les orages de la veille m'ont empêchée de dormir pendant plusieurs heures la nuit dernière. Épuisée par le manque de sommeil, je me suis levée trop tard ce matin, et me voilà en retard pour l'école.

En passant par la salle à manger, j'attrape en guise de petit-déjeuner une pomme dans le grand bol de fruit placé au milieu de la longue table et file dans le hall d'entrée. Alors que je m'apprête à passer la porte pour quitter la maison, une voix s'élève depuis le salon :

- Athéna, viens ici ! s'exclame mon père de sa voix forte mais pourtant si douce.

J'accours donc dans le salon pour le rejoindre, pressée de savoir ce qu'il me veut pour enfin pouvoir partir pour l'école.

- Tu pensais pouvoir filer sans souhaiter une bonne journée à ton vieux père ? il me demande finalement en levant la tête de son journal.

Un sourire tendre se dessine sur ses lèvres puis sur les miennes.

- Pardonnez-moi, je dis en me penchant pour lui donner un rapide baiser sur la tempe. Je vous souhaites une excellente journée, père.

- Passe une bonne journée également. File, maintenant. Je ne voudrais pas avoir des problèmes avec ton instituteur à cause de ton retard.

J'acquiesce d'un hochement de tête puis me dépêche de finalement quitter la maison. Nous avons perdu ma mère lorsque j'étais très jeune, c'est donc mon père qui m'a élevée avec comme seule aide notre gouvernante. Malgré les hauts et les bas, nous avons toujours été très proches et tenons énormément l'un à l'autre.

Mon père et moi sommes arrivés à Avonlea il y a seulement deux ans lorsqu'il a décidé de déménager pour le travail. Étant de nature plutôt timide, devoir changer d'école a été une grosse épreuve pour moi. J'avais peur de ne pas être capable de m'intégrer, mais heureusement, j'ai rencontré Jane Andrews, la plus jeune fille de nos voisins, qui m'a rapidement pris sous son aile. Elle m'a présentée à ses amis ainsi qu'à son frère, Billy, qui est également devenu un ami très proche, même si je trouve parfois sa mentalité un peu douteuse. Il a toujours été là pour moi et m'a vite aidée à me sentir à l'aise.

Nous avons pris l'habitude de marcher ensemble tous les trois le matin pour aller à l'école, seulement, vu mon retard, je me doute qu'ils sont déjà bien loin devant moi aujourd'hui. Du moins, c'est ce que je pensais, jusqu'à ce que j'aperçoive Billy à mi-chemin, adossé contre un arbre.

- Billy ? je m'étonne en arrivant près de lui. Qu'est-ce que tu fais ici à cette heure ? Tu vas être en retard.

- Tout comme toi, visiblement, il répond en s'engageant sur la petite route avec moi. Qu'est-ce qui s'est passé ?

- Je me suis levée trop tard, mais toi pourquoi es-tu là ? j'insiste en fronçant les sourcils.

- Quand j'ai vu que tu n'étais pas là ce matin, j'ai décidé de t'attendre en espérant que tu finirais par arriver. Je sais que tu n'aimes pas attirer l'attention et c'est ce qui serait arrivé si tu étais rentrée seule en classe au beau milieu du cours, alors je me suis dit que ce serait moins pénible pour toi si nous étions deux.

Billy tourne la tête vers moi et m'affiche un large sourire auquel je réponds aussitôt, grandement touchée par cette attention. Il est loin d'être parfait, il peut même être un vrai salaud avec certains par moment, mais il a toujours été tendre avec moi et je l'apprécie énormément pour cela. Peut-être est-ce juste son côté à vouloir jouer les héros, mais n'empêche que ça fait du bien d'avoir quelqu'un qui est là pour nous soutenir.

Lorsque nous arrivons finalement à l'école, Billy entre dans la classe avec moi dans son ombre. Comme je m'y attendais, toutes les têtes se tournent vers nous, et notre professeur, monsieur Phillips, interrompt sa leçon pour s'adresser à nous :

- Monsieur Andrews et mademoiselle Black, vous daignez finalement nous faire part de votre présence. Peut-être jugez vous que vos camarades et moi-même ne méritons pas le respect de vous pointer à l'heure ?

À ce moment, mon seul souhait serait de pouvoir disparaître devant une telle honte. Je tente inconsciemment de me cacher derrière Billy qui, au contraire de moi, répond sans gêne à notre instituteur :

- Au contraire, monsieur. C'est simplement que nous avons croisé un chien enragé sur le chemin, et ne voulant pas risquer qu'il s'attaque à Athéna, j'ai préféré passer avec elle par un autre chemin, ce qui explique notre retard.

Devant le récit de Billy débité sans la moindre hésitation, monsieur Phillips se retrouve bouche-bée. Il nous fait sèchement signe d'aller prendre place, nous avisant au passage qu'un prochain retard de notre part serait lourdement puni. Tous les élèves dans la classe nous regardent avec un petit sourire en coin, admiratifs de la confiance et l'éloquence de Billy qui a su déstabiliser notre professeur. En fait, tous sauf un. Gilbert Blythe, un des garçons dont je me suis grandement rapprochée ces derniers temps au point de le considérer comme un ami, me lance un regard de déception. Il pousse un soupire désapprobateur qui ne m'échappe pas avant de retourner sa tête vers l'avant de la classe où le cours reprend.

Durant les heures qui suivent, je suis incapable de me concentrer sur la leçon, repensant sans arrêt à la réaction de Gilbert. Il avait l'air tellement déçu, voir même dégoûté. Je sais qu'il est plutôt du genre à respecter les règles, mais pourquoi une telle réaction pour un simple retard ? Il aurait plutôt dû être heureux de voir que moi et Billy échappions à une punition.

Je continues à me questionner sans trouver de réponse jusqu'à ce que l'heure de la pause sonne finalement. Du coin de l'œil, j'aperçois Gilbert quitter la classe. C'est le moment idéal pour aller le confronter, mais j'hésite timidement à le faire. Cependant, le besoin de comprendre me pousse à aller le rejoindre et je l'arrête alors qu'il se dirige vers le petit ruisseau.

- Gilbert, je lance en le rattrapant. C'était quoi ce regard tantôt ?

- Quel regard ?

- Quand je suis rentrée en classe avec Billy, tu m'as regardée comme si je venais de commettre un véritable affront.

- Tu as dû mal interpréter, il répond froidement avant de détourner les yeux de moi.

J'accélère le pas et viens me poster devant lui pour l'obliger à s'arrêter.

- Ne me mens pas, Gilbert Blythe. Je sais qu'il y a quelque chose.

Il pousse un soupire et croise les bras.

- Tu veux savoir la vérité ? il déclare finalement. Depuis que as commencé à traîner autant avec Billy, tu n'es plus la même.

- Quoi ? je réponds, décontenancée. J'ai toujours passé du temps avec Billy, je ne vois pas où est le problème.

- Mais ces temps-ci c'est plus fréquent, et il a une mauvaise influence sur toi. Il y a deux semaines, tu t'es trompée sur la moitié des mots de vocabulaires alors que tu rivalises toujours avec moi d'habitude.

- Oui, car je n'avais pas étudié. Je croyais que l'évaluation était la semaine suivante !

- Et aujourd'hui, tu arrives en retard, insiste Gilbert en mettant les mains sur ses hanches. Tu crois vraiment que j'allais avaler cette histoire de chien errant ?

- Donc tu m'en veux car je suis amie avec Billy.

- Il est mauvais pour toi.

Je lève les yeux au ciel et prends une grande inspiration pour garder mon calme, sans grand succès. Je sais qu'il n'a jamais apprécié ma relation avec Billy, mais il va trop loin.

- Qui crois-tu être pour te permettre de juger avec qui je me tiens ? je m'énerve sans pouvoir m'en empêcher. Billy a toujours été très correcte avec moi, il n'est pas parfait, mais il est un bon ami. Et pour ton information, si je ne suis pas arrivée à l'heure ce matin, c'est car je me suis levée en retard. Tout ce que Billy a fait, c'est m'attendre pour s'assurer que j'allais bien et me sauver d'une punition. Je ne sais pas ce que tu as aujourd'hui, mais c'est moi qui ne te reconnais plus, Gilbert.

Désappointée par tout ce qu'il vient de me dire, je le laisse en plan pour aller rejoindre mes amies. Pour tout dire, ses paroles m'ont fait mal. Comment peut-il croire que je me laisserais influencée ainsi ? Je croyais qu'il avait plus d'estime pour moi, comme j'en ai toujours eu pour lui. Je croyais qu'il m'appréciait plus que ça, comme moi je l'apprécie de plus en plus.

Il y a toujours eu une certaine compétition entre Gilbert et moi. Nous nous affrontons souvent dans les duels de grammaire que monsieur Phillips organise, l'un battant l'autre à tour de rôle. Ces derniers mois, cette amusante rivalité s'est transformée en petite compétition amicale. Nous avons commencé à discuter après les cours des duels, puis éventuellement de d'autres sujets. J'ai appris à connaître le garçon derrière le camarade de classe, et ce garçon m'a beaucoup plu. Le voir agir ainsi aujourd'hui m'a piquée au vif, m'a blessée.

Le coeur serré, je n'ai pas été capable d'avaler quoi que ce soit durant le déjeuner. Les filles n'ont posé aucune question sur mon attitude, à mon grand soulagement. Même si je les connais depuis plusieurs mois, je suis encore gênée de parler de mes émotions avec elles, comme avec tout le monde pour tout dire.

C'est d'une oreille distraite que j'écoute le reste des cours de la journée, me surprenant à de nombreuses reprises à fixer le vide, l'esprit ailleurs. Mon altercation avec Gilbert tourne en boucle dans ma tête. D'un côté, son attitude m'a profondément dérangée, mais de l'autre, je me demande si je n'ai pas été trop dure avec lui. Gilbert n'a pas la moindre once de méchanceté et même si ses paroles m'ont blessée, je sais au fond de moi que ce n'était pas du tout son intention.

La fin des cours sonne finalement au bout d'interminables heures. Billy a décidé de rester encore un moment à l'école pour passer du temps avec ses amis et Jane doit reprendre une évaluation qu'elle a manquée; je me retrouve donc à marcher le chemin du retour seule.

Alors que je m'engouffre dans le petit boisé, une voix s'élève dans mon dos :

- Athéna ! Attends !

Je regarde par dessus mon épaule pour voir Gilbert accourir vers moi. Il s'arrête une fois rendu à mon niveau, haletant.

- Est-ce que je peux te raccompagner ? il me demande en reprenant son souffle.

- Oui, si tu veux, je réponds sans trop comprendre son intention.

Je reprends donc la route à ses côtés dans un silence légèrement gênant. Depuis que nous nous connaissons, c'est la première fois qu'il me propose de faire le trajet avec moi, alors je me doute que sa demande ne soit pas anodine.

- Écoute, Gilbert. Si tu veux me dire quelque chose fais-le maintenant, je finis par laisser tomber.

- Oui, bonne idée.

Il s'immobilise et je fais de même, me retournant pour lui faire face avant qu'il ne reprenne :

- Je voulais m'excuser pour ce que j'ai dit plus tôt. Ce n'était pas adminissible de parler de Billy ainsi, ni de te traiter de la sorte.

- Ce n'est pas grave, je réponds en haussant les épaules. Je sais que tu ne voulais pas mal faire. De mon côté, je n'aurais pas dû te répondre aussi sèchement.

- Non, tu as bien fait, insiste-t-il. J'ai été injuste envers toi. Tu es une fille formidable et je sais très bien que tu avais tes raisons de rater l'évaluation et d'être en retard ce matin.

Je sens mon coeur s'accélérer inexplicablement en entendant ses paroles. Moi ? Une fille formidable ? Gilbert pense vraiment ça de moi ?

- Est-ce que tout va bien ? me demande Gilbert en remarquant mes sourcils froncés qui miroitent mon questionnement.

- Oui, désolée. Mais, tu... tu trouves que je suis formidable ?

Ses joues se teintent de rouge tandis qu'il échappe un petit rire gêné.

- Bien sûr que je te trouve formidable, il m'avoue avec un doux sourire. Tu es tellement brillante, amusante et gentille. J'ai rarement connu quelqu'un comme toi, Athéna.

Sans que je m'en aperçoive, un large sourire s'est dessiné sur mes lèvres au cours de ses paroles. Savoir que Gilbert me voit ainsi me procure un sentiment d'euphorie sur lequel je suis incapable de mettre des mots.

- Tu n'es pas mal non plus, je finis par répondre sur un ton blagueur pour éviter que la scène devienne trop sentimentale.

- Je te remercie, rigole Gilbert en passant une main dans ses cheveux. Alors, tu veux bien me pardonner ?

- Bien sûr.

Nous échangeons un sourire et reprenons la route. Sur le chemin, nous discutons de tout et de rien, rigolant comme si la scène de ce matin ne s'était jamais produite. Je réalise à quel point je l'apprécie réellement, comment son simple sourire me procure des papillons dans le ventre.

Nous arrivons finalement à ma maison après un trajet qui a semblé beaucoup plus court que d'habitude. Gilbert me raccompagne jusqu'à ma porte, s'arrêtant sur le pallier.

- Merci de m'avoir pardonné, dit-il alors que je me retourne pour lui faire face.

- C'est normal, merci à toi d'avoir pris le temps de venir en discuter.

- C'était la moindre des choses. Tu sais, je tiens à toi, Athéna.

- Je tiens aussi à toi, Gilbert. Au fond, tu es plus que pas mal, je lui avoue avec un petit sourire en coin.

- Est-ce que cela veut dire que je suis formidable également ? il demande en haussant un sourcil.

- Il ne faudrait pas exagérer !

Nous rigolons tous les deux puis nos regards s'accrochent soudainement. Nous reprenons alors notre sérieux, puis Gilbert fait un pas dans ma direction, ne laissant qu'un mince espace entre nous. Je n'ai pas le temps de réaliser ce qui est entrain de se passer que nos lèvres se rencontrent dans un doux baiser. Gilbert finit par rompre le contact, restant toutefois à quelques centimètres de moi.

- Et ça, est-ce que c'était plus que pas mal ? il me demande avec un petit sourire.

- C'était formidable.

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