77 - Chaton

4x16 - A

What power art thou ? - Fink

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*pov Carl*

Daryl me fait signe d'y aller. Alors je pose mon chapeau sur le capot qui recouvre le long coffre du pick-up et je me baisse pour me mettre d'abord à quatre pattes. Je me convaincs que je ne vais pas me retrouver nez à nez avec un rôdeur farceur.

Je n'ai clairement pas assez dormi.

Bras tendu, genoux au sol, je fixe d'abord Daryl dans mon mouvement puis tourne lentement la tête vers ma gauche.

Aucun rôdeur, ni animal sauvage et terrorisé planqué là-dessous, juste une tête ébouriffée comme jamais.

-Hey...

Y/n est là, recroquevillée, tout au fond sous le pick-up. Ça me fait drôle de la voir comme ça. D'habitude c'est elle qui me soutient, qui vient me chercher. C'est elle la plus forte de nous deux.
Elle me fixe mais ne me sourit pas. Me sourira-t-elle encore ? Plus tard peut être. J'espère.

-Bien dormi... ?

Mais quel con ! Comment elle a pu dormir, là, par terre, dehors, alors que j'ai eu du mal à l'intérieur, à l'abri.

Après ce qu'il s'est passé, autant pour elle que pour moi. Même si je n'ai rien vu vraiment, je devine aisément.

Je ne l'ai pas revue depuis hier soir, depuis que l'homme m'a tiré hors de la voiture.

Je ne l'ai qu'entendue crier. Une seule fois.

Elle est là maintenant et c'est ce qui compte.

Elle me regarde. Elle ne m'en veut pas, ne recule pas davantage ou ne se sauve pas par derrière. Elle reste là à me regarder, comme je la dévisage. Je suis content de la voir. J'aimerais pouvoir le lui dire.

Les chaussures de Daryl juste en haut de ma tête m'en empêchent. On va dire ça, ouai.

La vérité, c'est que je ressemble trop à mon père.

-Pas terrible non... et toi ?

Elle chuchote. Comme Papa tout à l'heure. Sa voix tremble même un peu on dirait. Mais je ne commente pas. Je n'ai pas envie qu'elle s'arrête. Alors je me tais. Je fais une moue pour lui répondre.

-T'aurais un chigom ?

-Un quoi ?

J'ai pas compris. Le mot est trop baragouiné. Dixon déteint sur elle quand elle déprime.

-...un chigom à la menthe...

J'ai compris menthe, j'ai compris tout court. Je m'allonge, sur le ventre, j'ai mal aux genoux. Ma main droite sous ma joue, pour me protéger du bitume et l'autre palpe la poche arrière de mon jean.

-J'dois avoir des chewing-gums dans ma poche...

je le dis plus haut pour que Daryl m'entende et m'aide. Parce que mes poches sont vides. Alors je tends le bras vers lui et je l'entends farfouiller, avant de sentir qu'il pose quelque chose dans ma main ouverte. Je présente son offrande, en même temps que je la découvre, à Y/n.

-Un... Mars ?

Y/n s'approche en rampant jusque moi et atteint ma main sans me quitter des yeux. Je lui laisse la barre chocolatée. Elle l'ouvre et la coupe en deux pour m'en donner un morceau. Comment elle sait que je salive déjà ?

-Bon appétit...

-Merci...

-Merci Dixon... avant de croquer dans la friandise.

*pov Y/n*

Le chocolat fond dans ma bouche sèche. Ca fait du bien, j'avoue. Pas ce que j'attendais comme petit déjeuner, c'est plutôt du goût de Michonne, mais c'est bon, c'est vrai.

-Merci p'tit mec...

Je le redis parce que je le pense. Je suis contente de le voir. Juste lui. Alors que j'ai aussi mal au coeur de le voir.

-Pardon...

Le mot suivant me sort de la bouche pleine de chocolat fondu.

-De quoi ? Daryl cherchera des chewing-gums à la menthe dès qu'on aura repris la route, pas vrai ?!

Il regarde vers le ciel avec un ton plus léger. Je sais que Dixon n'a pas bougé de son poste juste derrière le pneu. Mais je ne bougerai pas davantage du mien non plus, pas plus que ce qu'il m'a fallu pour pouvoir toucher Carl. Peut rêver.

-Nan... de... de pas t'avoir aidé... hier soir...

-T'y pouvais rien, ils étaient tous...

-Il t'a fait... mal... ?

Je sais que je vais le gêner, qu'il va sans doute me jeter, refuser de me répondre, et il aura le droit, je ne lui en voudrai pas. Mais ça m'a tenue toute la nuit, en plus de la brûlure, ça m'a vrillé le ventre. Pourvu que le porc ne lui ait pas fait d'mal.

-Non...

Il baisse les yeux, n'ose plus me regarder en face. Mais il me répond au moins. J'approche ma main de son visage.

-C'est bien vrai ?

-... Il m'a juste... écrasé. Il s'est juste... assis sur moi... et m'a appuyé la tête par terre... j'ai un peu mal à l'oreille droite.... mais ça va... Papa est intervenu avant qu'il puisse...

-Ok... tant mieux...

Je ne veux finalement pas en savoir davantage. C'est en l'entendant, après avoir tant attendu, que je réalise que je ne veux plus savoir tout en détail. Il est là, vivant et ouvert à me parler, c'est tout ce que je veux : ne pas l'avoir perdu, ni lui ni son amitié.

Je ne peux plus me retenir. Ma main se pose sur ses mèches longues dont je dégage son front si blanc. Ca me fait presque drôle de le voir sans son chapeau. J'y découvre un autre petit garçon. Mais qui reste mon petit garçon.

Ma paume frôle sa pommette, mon pouce caresse son front et descend doucement entre ses sourcils, suit la courbe de son petit nez alors qu'il ferme les yeux.

Son soupire léger m'arrive aux oreilles.

Il se détend et moi aussi. Ma main repose davantage sur sa joue tiède maintenant, mon pouce masse son nez, ses sourcils doucement. Nos respirations se synchronisent toutes seules.

Je n'ai plus de mot à dire, juste à le regarder, à le retrouver. A le sentir, physiquement. Il m'a manqué toutes ces heures, mais il est là, il est toujours là. Une vague de soulagement m'envahit le ventre. Elle est totalement égoïste, je le sais parce que cela ne va pas tout résoudre. Mais si mon ventre se détend, je serai plus apte, plus présente à le soutenir.

Un autre soupir, qui est davantage un sanglot on dirait. Une larme gonfle au coin de son oeil clos.

-Je suis désolée mon bonhomme...

Ma voix ne suit pas. Mais je sais qu'il m'a entendue.

-Tu as eu peur hein ?

Il hoche la tête très lentement, sans ouvrir les yeux, sans bouger davantage. Comme s'il craignait que je ne lève ma main. Mais elle est bien là où elle est, pas l'intention de bouger moi non plus. Son menton tremble imperceptiblement.

-Il ne m'a pas fait mal, pas tant qu'à toi... Je le sais bien... mais oui, j'ai eu très peur... et Papa a... Papa a fait ce qu'il fallait...

-Je sais bien. Il nous a sauvés, toi et moi... je sais bien...

-Alors pourquoi tu te caches ?

Il a ouvert les yeux sur ses mots. Et j'ai enlevé ma main.

-Je ne me cache pas.

-Il te cherche partout... il est parti dans les bois parce que...

-Je ne me suis pas enfuie non plus...

-Tu pouvais venir dans la voiture avec Michonne et moi...

-Non je ne pouvais pas Carl...

-Pourquoi ?

-Parce que... j'avais besoin de rester seule un moment...

-Tu vas nous quitter ?

-Quoi ? Non !

-Si tu veux rester toute seule, tu vas vouloir partir...

-Un moment j'ai dit, mon chéri... Je ne veux surtout pas te quitter ! J'avais juste besoin de...

-Il faut qu'on bouge... On peut pas rester là...

-Je sais bien... Dixon n'attend que l'instant où je vais sortir un peu pour me choper par la peau du cou comme un chaton coincé dans une bouche d'égout...

Cette fois je l'ai dit assez fort pour que l'intéressé m'entende. Et derrière le pneu je l'entends marmonner. Il sait que j'ai raison. Il n'attend que le moment de m'attraper. Mais ce sera quand moi, je l'aurai décidé.

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04.04.20
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