47 - Remodelage

Reirtsedi baisse les paupières de son frère qui gît dans la marre de sang, se tardant à aller aider le groupe qui peine à déblayer le terrain. Thomas s'approche de lui, puis pose une main sur son épaule :

— C'est ce qui était prévu n'est-ce pas ? souffle-t-il.

Le sage se relève en soupirant, et ne répondant pas à son second. Il se tourne vers la porte de la grande salle et admire ce soleil qu'il a tant connu dans sa tendre enfance. Lasse, il pose son regard, vairon, mi-ambre, mi-vert, vers son ami :

— Jojo ne sait pas ce qui attend ses filles, le sort qui leur est réservé pour avoir perturbé les univers, annonce-t-il dans un murmure.

— Je sais, et tu le lui as bien caché, répond Thomas froidement avant d'ajouter, pour que son pouvoir se renforce et que leurs enfants les obtiennent il faut qu'elles meurent.

Reirtsedi lève la tête vers le sommet de la dernière demeure de son frère avant d'énoncer :

— Un cœur meurtri par l'amour qui s'évanouit, les piliers des éternels se faneront quand leurs âmes seront unies sous la protection du feu puissant du dragon...

Thomas se place à ses côtés et complète son récit, le regard perdu dans le vide :

— Le temps se figera pour que la lumière soit, chassant les ténèbres qui s'amoncellent. La mort en action délivrera l'épée de destruction.

Reirtsedi baisse la tête, puis porte son regard sur le doyen qui prie aux côtés d'Astos. La déesse des vies tente de rentrer en communication avec sa création comme le lui a conseillé Patrick, mais ses tentatives se résolvent par des brides de pensées qui s'évanouissent dans les profondeurs de la terre.

— Evy, je ne comprends pas ce que tu me dis, s'inquiète-t-elle de plus en plus.

Transfert... implant...

Ses transmissions sont brouillées, quand une chaleur soudaine s'échappe en fumé des fissures du sol, faisant reculer le groupe pour se protéger.

— Qu'est-ce que ? s'étonne Astos en levant son bras devant lui.

— Cela provient de Sophia, affirme Herba en fronçant les sourcils.

Impuissant face à l'afflux de puissance, tous reculent en redoutant un effondrement de la mine plus important. Le sage s'approche d'eux pour les aider en soulevant sa canne, mais Herba tombe à genoux en ressentant la douleur de la perte de sa sœur Flamma. Reirtsedi ressent un violent vertige également de son côté, se faisant rattraper par Thomas et Jackiel qui accourt vers lui. En posant sa main sur son chef, le fauconnier restant ressent le désarroi s'emparer de l'homme, alors que celui-ci porte sa main au front en ruminant :

— C'est impossible.

— Qu'il y a-t-il Reirtsedi, s'inquiète Thomas en l'aidant à se relever.

Le sage le regarde d'un air affolé, ressentant la présence de son neveu s'affaiblir. Il fait un geste à Jackiel pour que celui-ci le porte sur son dos. Herba remarque sa manœuvre du coin de l'œil tandis qu'elle se remet douloureusement de la perte, certes d'une sœur ennemie, mais du lien qui les unis. Elle se redresse péniblement sur ses jambes, puis envoie un jet de lumière dans le ciel pour prévenir Loa qui est resté aux bois et Gothika proche de l'arbre.

Toutes sans exception ont souffert de cette perte, mais surtout d'un autre lien qui s'est brisé. Elles doivent impérativement mettre la main sur Sophia avant que ce ne soit le sage ou Gan qui s'en approprie.

Après le souffle de l'onde de choc, les quatre hommes dans la mine restent dans l'indifférence de ce qui se passe au-dessus de leurs têtes. Elias se penche au-dessus de Flamma pour baisser ses paupières sur ses yeux choqués, tandis que Gabriel détache les menottes qui lui entravaient les poignets, pensant que cela pourrait lui être utile.

Luka renifle les alentours à la recherche de l'odeur de Sophia, cherchant une piste à suivre depuis qu'elle s'est volatilisée. Alors que Draguir ramasse Evy sur le sol, remarquant l'implant, mais surtout l'inactivité étrange du bijou. Le dragon a les yeux fermés et repose comme à son premier jour d'un long sommeil.

— Je ne saisis pas ce qui a pu se passer, remarque Elias.

— De ce que j'ai pu constater, l'esprit de Sophia a pu expulser Gan qui la contrôlait, mais cela n'explique pas pourquoi Evy se retrouve entier sur le sol, indique Gabriel.

Draguir fixe le bracelet en plissant les yeux, ne sachant quoi répondre à ses collègues. Il glisse son doigt sur la feuille de lierre relié à la queue du dragon, alors qu'une petite décharge lui pique le doigt.

— Que...

— Qu'est-ce qui se passe ? demande Elias en remarquant la châtaigne que vient de se prendre Draguir.

— Je ne sais pas encore, mais cette partie ne peut être touchée, indique-t-il.

— Tu devrais me le donner, propose Gabriel en ajoutant, tu n'as plus vraiment de poches à disposition pour l'instant.

Le jeune fauconnier prend fait de ses habits. Sous la chaleur intense qui s'est dégagée il y a peu, cela lui a désintégré son t-shirt et brûlé son pantalon le laissant en lambeau, le recouvrant à peine sous la ceinture. Draguir secoue la tête en se renfrognant :

— Je préfère garder Evy avec moi, je vais aller mettre quelque chose de plus décent dans mes appartements.

— Cela ne me dérange pas, insiste Gabriel.

Draguir le fusille du regard puis disparaît en s'éclipsant.

— Putain quelle tête de mule celui-là, grogne grincheux.

Elias lui pose une main sur l'épaule en secouant la tête, tandis que Luka se joint à eux essoufflé.

— Je n'ai pas flairé Sophia, mais ma sœur m'a indiqué que tout le monde se rapproche de l'arbre, que ce soit le sage et les déesses, tout le monde rajoute-t-il paniqué.

— Merde, bougonne Gabriel.

— Nous devons impérativement les rejoindre, presse Elias. Si tout le monde va dans cette direction, c'est forcément pour une raison et Gan risque fort de revenir.

Ils se mettent à courir vers l'entrée de la grotte en quatrième vitesse, laissant le cadavre de la déesse derrière eux et abandonnant la recherche de Sophia. Draguir s'habille rapidement dans ses appartements après avoir déposé Evy sur sa table de chevet. Il enfile son t-shirt quand il ressent une présence meurtrière dans son dos.

N'appréciant pas le moins du monde d'avoir été éjecté, Gan se tient dans l'encadrement de la porte en scanne la pièce de ses yeux enragés. Draguir pose son regard sur le dragon, et plonge sur celui-ci pour contrer le fauconnier de la peur qui tente de s'en emparer.

— Ne fait pas ça petit, j'ai une revanche à prendre sur ce maudit lézard, siffle Gan en colère.

Draguir envoie son poing dans le visage de son adversaire qui n'esquive pas tant qu'il est obnubilé par le dragon. Le fauconnier de la peur n'avait pas prévu la manœuvre d'Evy pour lui fausser tous ses plans. Certes, son objectif d'anéantir la déesse de l'amour et des volcans a réussi, mais la sournoiserie de son ennemi s'est manifestée sans qu'il s'y attende. Gan est propulsé par le coup du jeune fauconnier qui l'envoie balader par-dessus le balcon.

— Juste retour des choses, cingle-t-il avec hargne.

Il se saisit du bracelet inanimé puis s'éclipse de nouveau vers ses compagnons. Sans qu'il comprenne pourquoi, il se retrouve face à l'arbre qui pulse de plus en plus ses vibrations autour de lui, mais surtout en face de sa présence. Le reste des troupes le rejoignent en ressentant un malaise, tandis que chacun découvre avec effroi que Sophia se trouve près du tronc, la main posée sur l'écorce en ne bougeant pas d'un pouce.

— Ma chérie, ça va ? demande Patrick soulagé de revoir sa fille.

Il s'avance vers elle, mais Gabriel lui barre le chemin en sentant la menace émaner de la demoiselle. Jojo reste auprès de l'homme avec Astos, gardant leurs arrières sous l'avertissement du fauconnier de la mémoire, celui-ci glisse une main dans son dos en attrapant le manche de son couteau. Tandis que Elias sort son katana de son fourreau.

Les fauconniers sont en alerte devant le silence de Sophia, tout comme les jumeaux qui prennent forme en fusionnant. Le sage remarque leurs positions quand il arrive à leurs niveaux comprenant que quelque chose cloche avec la jeune femme.

Herba et Gothika s'avancent prudemment, tandis qu'une vague d'eau remonte de la mer. Un liquide translucide s'en sépare pour prendre forme. La couche de liquide glisse sur le corps de Loa au fur et à mesure qu'elle s'avance aux côtés de Lyvia.

— Le jeune garçon et sous sa surveillance, indique-t-elle à ses sœurs.

— Bien, acquiesce Herba avant de reporter son regard sur Sophia.

La jeune femme n'a pas bougé depuis leurs arrivées, elle concentre sa main sur le tronc d'arbre, absente de tout ce qui l'entoure. Reirtsedi s'approche à son tour en plissant les yeux, mais s'arrête quand Gan apparaît au côté de la demoiselle en posant sa main sur sa gorge. Il s'essuie un filet de sang qui lui coule du coin des lèvres en fusillant du regard Draguir. Le jeune fauconnier serre les poings en voyant cela.

— Je te conseille fortement de la lâcher, crache-t-il.

— Tout doux petit, je ne vais pas lui faire du mal, rétorque Gan avec plaisance, juste récupérer ce qui m'appartient.

Les loups grognent de plus belle ce qui force le fauconnier de la peur à resserrer sa prise autour du cou de Sophia qui ne bouge pas d'un pouce, telle une statue pétrifiée par le temps. Gan jette un rapide coup d'œil vers le visage de Sophia, puis fronce les sourcils en remarquant ses yeux. Un vert doré intense luit tel un brasier verdoyant dans ses prunelles, alors que sa peau est totalement recouverte d'écaille argentée reflétant par endroit à l'anthracite.

— Impossible, souffle Gan.

Il est le seul à voir l'état de la jeune femme qui fait dos aux autres, et comprend mieux leurs états d'alertes, ce qui le fait sourire d'autant plus. De sa main posée sur le cou de Sophia, il se connecte à son esprit faisant face au néant qui l'habite. Gan porte son regard sur son frère et lui sourit en plissant les yeux :

— Tu ne la reverras jamais, mon cher grand frère, souffle-t-il avant de lever les doigts et de les claquer.

Gan voulait disparaître avec Sophia, mais l'arbre pulse une nouvelle onde le perturbant légèrement. Il se tourne vers la jeune femme qui garde la même position, il tente de retirer sa main, mais celle-ci semble coller sur son cou.

— Tu me fais quoi ma belle là, grogne-t-il.

Elle tourne la tête vers lui sans cligner des yeux, révélant une partie de son visage à ses compagnons. Tous sont choqués de voir son apparence.

— Herba va falloir mettre une barrière pour protéger tout le monde, hurle Loa devant la menace.

Sa sœur hoche la tête et prépare son sort, mais une autre pulsation lui bloque ses pouvoirs. Elle regarde ses mains paniquer avant de les lever vers la jeune femme. Les jumeaux tente de sauter sur Sophia, alors que l'arbre envoie ses ondes en séparant les loups les forçant à reprendre forme humain.

Gothika tente à son tour de l'attaquer, mais n'y parvient pas. Un rictus s'affiche sur le visage de Sophia alors qu'elle fixe encore Gan qui essaie de se défaire d'elle, tandis que les autres reculent devant les pulsations qui se font de plus en plus intenses. Seul Draguir observe les mouvements de sa sauvageonne et remarque une chose que les autres ne voient pas. Il glisse sa main dans sa poche pour toucher le bracelet sans vie, et le longe jusqu'à atteindre l'implant.

En le touchant, il reçoit une nouvelle décharge, mais le tronc de l'arbre se met à craqueler. Il comprend de suite à qui ils ont affaire.

— Ce n'est pas Sophia, indique-t-il en se tournant vers les autres.

— Comment peux-tu dire ça elle est devant toi, cingle Gabriel en la pointant du doigt.

— Il a raison, confirme Luka en toussotant.

Les jumeaux ont eu du mal à se relever à cause de l'onde, mais Luka avait remarqué l'aura de la bête ayant pris possession de Sophia. Lui et sa sœur l'avaient flairé, alors que l'odeur de la jeune femme n'est plus du tout présente.

— Et tu peux me dire qui c'est ? demande Elias en tenant toujours le manche de son katana.

— Evy, souffle Draguir en serrant le poing sur le bijou.

Un long silence plane au-dessus de tout le monde, brisé seulement par le vent qui commence à se lever. Le dragon s'est totalement emparé du corps de Sophia, la cachant aux yeux de tous, mais surtout au regard perfide de celui qui maintient sur lui. Il lève la jambe pliant son genou, puis pose son pied contre le sol, provoquant un tremblement de terre.

Une fissure part du talon de la jeune femme et se déplace entre les membres du groupe avant de se nicher dans la terre et de traverser la chaîne des montagnes de Voltamur. Un des volcans rentre en irruption crachant un jet de lave au-dessus des alpages. Le sol de Blackvoïd se craquelle en une multitude de brèches, forçant les destriers, les armées et les prisonniers à fuir le plus vite possible.

— Nous devons décamper, tout va s'écrouler, hurle Astos sous le vacarme de la terre se déchirant.

— Je ne laisse pas ma fille ici, rétorque Patrick qui essaie d'avancer vers elle.

— Ce n'est plus elle, indique Gabriel qui lui attrape le bras.

Une nouvelle secousse, les souffle, les renversant, tandis que des morceaux de la falaise tombent dans la mer.

— Méric, rassemble tout le monde et trouvez une échappatoire, ordonne Draguir.

— Je vais rester ici pour l'aider, informe le sage à Thomas, guide nos compagnons et l'armée sur les terres des plaines.

Thomas acquiesce en faisant confiance à son chef. Il part rejoindre les autres dans Blackvoïd alors que tous essaient de garder l'équilibre. Luka aide sa sœur à se déplacer, tandis que Jackiel transporte Jojo et Patrick sur son dos en sifflant son destrier. Elias se met à courir dans sa direction, mais se retourne et pose un dernier regard à Evy. Le dragon émet une autre secousse, le forçant à fuir les lieux. Seuls les déesses, le sage, Draguir et Gan reste sur place, tandis que la falaise se fissure de plus en plus. Herba croisent ses bras et fusille du regard sa création :

— Evy, tu pourrais rendre la place à Sophia. Ce n'est pas le moment de piquer une colère, rétorque-t-elle agacé.

— Impossible, répond le dragon froidement.

— Et en quoi cela est impossible, rétorque la déesse, il suffit juste que tu reprennes place dans le bracelet.

Draguir tourne la tête vers Herba. Il comprend que seul lui, Gan et ses compagnons qui étaient dans la mine savent que le bijou n'est plus en possession du corps de la jeune femme.

— Je confirme que ce maudit lézard dit est la vérité, cingle Gan en lâchant l'affaire de récupérer sa main.

Il s'appuie contre le tronc et fixe son frère qui observe sans dire mot. Cela l'agace d'autant plus, quand celui-ci détourne le regard fuyant celui de Gan. Le fauconnier de la peur se met à s'esclaffer :

— Tu as bien caché tes véritables intentions Reirtsedi, franchement là je te tire mon chapeau mon frère.

Tous se tournent vers le sage, alors que Draguir tente de s'approcher furtivement de sa cible. Le sage remarque les déesses, mais surtout Herba qui fronce les sourcils. Celle-ci connaît l'homme depuis son passage sur les terres des dragons. Elle l'avait aperçu avant d'effectuer le rituel avec le roi des dragons, offrant sa vertu pour donner naissance à Evy. Elle avait été déboussolée quand l'homme qu'elle aimait tant s'était fait anéantir par Hellakiel et Gan, pulvérisant son monde à tout jamais.

Une sourde colère monte dans son sang, quand elle remarque les prunelles du sage apparaître. Elle lève le bras pour envoyer un jet de lumière à son encontre, mais sa magie lui faisant toujours défaut ne s'active pas.

— Pourquoi ? rage-t-elle.

— Dans les pleines capacités de mon neveu, vos pouvoirs sont éteints, annonce calmement Reirtsedi.

— Ton neveu ? balbutie la déesse.

Il fait un signe de tête vers Evy qui a reposé son regard sur le tronc. Les trois déesses se tournent vers la jeune femme en clignant des yeux.

— De ce que je remarque, Sophia ne porte plus le bracelet ni l'implant sur elle. Quand Evy à interverti sa position avec elle, il l'a protégé, mais également expulsé, qui sait où son esprit se trouve actuellement, indique le sage sur le même ton posé.

— Et je ne vous dirais pas où elle se trouve actuellement, annonce Evy de sa voix froide.

Il lève à nouveau le pied avant de l'écraser sur le sol. Il décale sa main sur le côté et envoie une onde vers la terre qui se propage dans l'air. Le dragon puise depuis son arrivée dans la magie de l'arbre pour recréer sa terre natale que Sophia voulait lui offrir. Il l'avait vue quand il a plongé sa pointe dans l'âme de la jeune femme, de son amie.

Instantanément, il avait regretté son action, mais il ne pouvait plus faire machine arrière. Puisant dans la puissance qui s'écoule dans les veines de Sophia, Evy modifie les propriétés atmosphériques de Blackvoïd. Il sent une prise sur son poignet, et tourne la tête sur le jeune fauconnier.

— Il ne manquait plus que toi pour réaliser son rêve, indique le dragon.

Draguir le fixe et devine ses intentions. Il l'avait lui-même vue dans l'esprit de la jeune femme lors de sa guérison.

— Vous complotez quoi vous deux, grogne Gan.

Evy se tourne vers lui :

— Tu ne mets plus d'aucune utilité, grogne dans un râle le dragon.

— Evy non !

Reirtsedi lance sa canne sur l'enveloppe de Sophia et plante sa main dans l'arbre alors qu'Evy la lever pour tuer Gan. L'effet ventouse qui emprisonnait la main du fauconnier sur le cou du dragon se dissipe, libérant le fauconnier qui s'éclipse avant d'apparaître au côté de son frère.

— Merci, mon frère, ce n'est pas passé loin, indique-t-il en se massant la paume et les doigts.

— Ne le fais pas trop vite, je ne t'ai pas pardonné ! tranche Reirtsedi.

Gan fronce des sourcils, mais ne rétorque pas. Les intentions de son frère sont indéchiffrables encore à ce jour. Il ne sait s'il est du côté du bien où du mal, mais il sait qu'il fera tout pour protéger sa famille. Evy grogne en voyant le sang s'écouler de sa main empalée, il ne peut cicatriser tant qu'il reste ainsi.

— Comment comptes-tu faire pour la récupérer ? lui murmure Draguir.

— Ce n'est pas moi qui vais le faire, mais toi. Je ne te demanderai pas de la tuer, mais tu vas devoir m'arracher le cœur une fois que j'aurais fini, répond Evy froidement.

— Tu veux dire...

Draguir plisse les yeux devant sa demande, alors qu'Evy le regarde avec ses yeux émeraude.

— Fais-moi confiance, et imagine-toi que c'est elle. Tu as deviné quand tu as ressenti les décharges, dès que l'arbre aura atteint le point culminant, plonge ta main en moi et met toi ce putain de bracelet en même temps.

— Et toi ?

— Ne t'inquiète pas pour moi, j'ai fait ce qu'il faut.

Evy sourit d'un air espiègle et amorce la manœuvre. Il expulse ses ailes qui brillent d'une intensité argentée, envoyant une nouvelle onde autour de lui propulsant les déesses et les frères loin d'eux.

La falaise se détache de Blackvoïd et se met à monter dans les airs, ainsi que plusieurs morceaux des terres arides. Toutes âmes vivantes se trouvant encore dans le lieu se voient monter en même temps. Les racines relient les plateformes flottantes, tandis que les montagnes se déchirent avant de s'écrouler dans la lave ou de se mettre à voler.

Evy a activé l'apesanteur de la zone, forçant la parcelle où se trouve l'arbre à grimper plus haut que le reste des îles flottantes qui se forment. Blackvoïd change du tout au tout, transformant sa zone aride et sèche en un majestueux paysage s'élevant dans les airs. Il sourit face à ce spectacle avant de donner le signal à Draguir.

Ils ne sont plus que tous les deux autour de l'arbre meurtri, les déesses ont été expulsées sur une autre île, tandis que Gan et Reirtsedi se sont éclipsé à temps. Les deux hommes reviennent à temps, au moment où Draguir enfile le bracelet dragon à son poignet.

— Non, ne fais pas ça, hurle le sage paniqué.

L'implant envoie une onde d'électricité dans le corps de Draguir au moment où il s'implante, tandis qu'il plonge sa main dans le corps de Sophia avec force et détermination en attrapant son cœur.

— Ma douce sauvageonne, je suis tellement désolé.

— Ne le sois pas, ce n'est que temporaire.

Une lumière blanche déchire le tronc le l'arbre en englobant les êtres se trouvant à proximité, et aveuglant le reste d'Imaginarium. Jojo, qui est arrivé dans les plaines, se cache les yeux avant que la lueur ne disparaisse.

— Tu penses que Draguir a réussi, demande Elias avec espoir.

— Seul l'avenir nous le dira.

Le lapin lève la tête vers Balckvoïd et admire le changement du paysage. La brise lui effleure les poils, tandis qu'il prie de tout son être pour la survie de ses jeunes protégées. 

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