33- Torture
Les flammes vacillent dans les galeries de la mine tandis qu'Alex et Keth s'avancent tranquillement vers la cellule de leurs prisonnières. La mission de Gan et Félix a été couronnée de succès, ce qui a permis aux troupes de festoyer une bonne partie de la soirée. Profitant d'un moment de répit, Alex et son compagnon finissent de préparer la pièce qui sera son terrain de jeu.
Plus éloignée dans les tunnels et se trouvant dans une cellule sombre, Sophia est suspendue par les poignets, ressentant des douleurs au niveau des bras et des épaules. Ses genoux s'escarpent sur le sol rocheux, à mesure que ses mouvements la font balancer. Cela fait maintenant quelques heures qu'elle a repris conscience en entendant acclamer la victoire de ses ennemis. Durant ce temps, elle a hurlé de l'aide, s'égosillant après chacun de ses cris avant de laisser tomber en ne voyant personne arriver, et en la laissant seule avec elle-même.
Elle se sent poisseuse sous la chaleur qui règne, collant ses cheveux sur son visage. Ses poignets sont serrés par les menottes spéciales, entravant l'utilisation de ses pouvoirs et de toutes communications avec son ami Evy, qui tente de se défaire de son implant pour fuir.
Elle repense au hurlement de Luka qu'elle avait entendu avant de sombrer dans l'inconscience. Cette complainte de désespoir et de colère qui lui avait fendu le cœur, et qui la nourrit dans sa propre vengeance aux noms des loups. Sophia ferme les yeux pour tenter de vider son esprit en attendant qu'une âme quelle qu'elle soit puisse enfin faire don de sa présence.
Deux heures plus tard, le cliquetis sinistre de la serrure brise le crépitement des torches. Les tortionnaires de la demoiselle se sont décidés à venir la chercher, et la découvrent endormie, la tête penchée en avant.
— On dirait que la petite princesse dort après avoir vidé ses cordes vocales, ricane Keth.
— Tu crois réellement qu'elle dort ? Passe-moi ça, ordonne brusquement Alex.
Il récupère un seau d'eau de la mer de brume qu'il jette sur Sophia. Elle reçoit de plein fouet l'eau glacée, la faisant cracher et renifler bruyamment. La particularité de cette eau, est qu'elle est composée à quatre-vingt-dix-huit pour cent de sel et d'une substance huileuse, rendant le corps de la demoiselle encore plus poisseux qu'elle ne l'était dû à la chaleur. Le contraste des températures la fait trembler, claquant les chaînes entre elle.
— Tu vois bien qu'elle est réveillée, j'ai mené l'expérience plus tôt et elle n'avait pas bougé d'un pouce, s'esclaffe à son tour Alex.
Il se rapproche de Sophia, offrant une vue sur ses pieds alors qu'elle a encore la tête baissée. Il attrape son visage avec force pour la forcer à croiser son regard bleu sombre qui la scrute avec un sourire sadique.
— On va bien s'amuser tous les deux, annonce-t-il.
Elle ne se démonte pas et soutien son regard en rassemblant de la salive dans sa bouche qu'elle crache violemment en visant ses yeux. Alex s'essuie la joue du revers de la manche avec lenteur en la foudroyant du regard. Keth explose de rire, ne manquant pas d'énerver son compagnon qui, de plus en plus énervé, gifle Sophia avec force, la faisant retomber sur ses genoux endoloris.
— C'est qu'elle ne t'aime pas la demoiselle, Alex, glousse encore Keth.
— Ferme là, grogne-t-il, détache là et emmène là dans l'autre pièce. Et, assure-toi qu'elle soit solidement ficelée, ordonne-t-il à la suite.
Keth jubile devant l'acharnement de la demoiselle, ce qui permet à Sophia de profiter de la faille où il l'a décroché pour lui envoyer ses poings dans le menton. Le jeune métisse perd son équilibre et lâche sa prise, ce qui donne l'occasion à la demoiselle de détaler comme un lapin en passant dans le dos d'Alex sorti de la cellule.
Elle court dans les tunnels, tournant à chaque intersection en ne sachant pas où elle peut trouver la sortie. Elle regarde en arrière en entendant ses geôliers la poursuivre en se disputant. Pourtant, au moment où elle souhaite accélérer, elle percute de plein fouet le torse d'une personne, ce qui la renverse sur les fesses. En relevant la tête, grimaçant d'avoir perdu toute échappatoire, elle découvre avec effroi le garçon sorti de nulle part qui la fixe sévèrement de son regard noir avec une poussière de doré en son centre.
— Non, souffle-t-elle choquée.
Le jeune fauconnier l'attrape violemment par le bras gauche pour la relever de force, en même temps que ses collègues arrivent :
— Draguir que fais-tu ici ? crache violemment Alex.
— Le maître souhaite savoir si elle est réveillée, répond-il froidement.
— Tu vois bien que oui, tu la serres entre tes bras, rétorque le rabatteur sur le même ton.
Sophia est tétanisée par le comportement austère de son ami. Elle se demande s'il joue un rôle ou si c'est sa véritable personnalité, évitant soigneusement de faire la remarque sur l'échange animé des deux hommes.
— J'allais la préparer, intervient Keth, elle m'a prise de surprise et en a profité pour s'échapper, cela ne se reproduira plus.
— Je l'espère bien, tiens, prends-la.
Il pousse brutalement la demoiselle contre Keth qui se tend face au ton glacial de Draguir.
— Alex, j'ai à te parler.
Le rabatteur hoche gravement la tête avant de disparaître avec le fauconnier. Keth traîne la jeune fille dans les tunnels en direction de la salle. Elle ne résiste plus, l'esprit embrouillé par cette rencontre, ne comprenant pas ce changement radical de comportement. Elle sort de ses songes quand Keth tire sur ses menottes et découvre avec frayeur, la salle où elle a été conduite.
L'éclairage d'une trappe montre des outils métalliques accrochés aux murs, et d'autres posés sur des établis. De longues chaînes descendent du plafond, alors qu'une corde se balance près d'un rouage à manivelle.
— Viens là, peste Keth en tirant une fois de plus sur les menottes.
Sophia tente à nouveau de s'échapper, mais le geôlier l'attrape par la taille et la bloque dans ses bras. Il la traîne au milieu de la salle, puis tente de l'accrocher aux chaînes, mais Sophia oppose de la résistance en gesticulant. Elle sait qu'elle ne va pas jouer à la dînette si elle reste ici, mais bien au contraire morfler comme jamais.
— Reste sage, grogne Keth en contrant les coups de Sophia. Je vais déjà me prendre une sévère punition par ta faute, donc n'en rajoute pas une couche, gronde-t-il.
— Écoute-le ! Si t'es adorable, tu verras la lumière, annonce Alex en arrivant dans la pièce, par contre si tu n'obéis pas...
Il la regarde distraitement avec indifférence en hochant les épaules. Keth arrive enfin à verrouiller les derniers liens avant de s'écarter en soufflant.
— Merci Keth. Tu peux aller voir Draguir. Il va t'accompagner auprès du maître pour un premier rapport, ordonne-t-il.
— Compris. Amuse-toi bien, réponds Keth en s'éclipsant.
— J'y compte bien, susurre le jeune blond.
Sophia se débat de toutes ses forces, mais rien n'y fait, elle tourne sur elle-même, la pointe des pieds touchant à peine le sol. Alex s'amuse de la voir ainsi, ne rassurant pas la demoiselle. Il s'approche lentement d'elle, tandis qu'elle tente de lui tourner le dos. Mais il l'attrape en glissant sa main sous son t-shirt, en appuyant sur son dos pour se rapprocher d'elle à quelques centimètres.
— Depuis que je t'ai croisé au refuge, je n'ai eu qu'une envie, te faire voir mille et un cauchemars, chuchote-t-il, mais notre très cher ami nous a fait un rapport intéressant sur tes stupéfiantes capacités.
Les yeux de Sophia s'agrandissent d'effroi en s'apercevant que Draguir ait révélé ses secrets. A-t-il été forcé ou encore l'a-t-il fait de son plein gré ? Ces questions restent en suspens dans l'esprit de la demoiselle. Alex se met à s'esclaffer devant le désarroi de sa proie :
— Je crois que tu ne t'attendais pas vraiment à ça.
Il glisse sa main le long de la colonne de Sophia en la faisant frissonner. Ses ongles jouent avec sa peau en se penchant à l'oreille de la demoiselle :
— Très chère, il ne faut jamais faire confiance à l'un d'entre nous, quelle que soit sa nature ou sa provenance, susurre-t-il.
Il s'écarte sèchement et se dirige vers la manivelle qu'il tourne pour ouvrir de plus en plus la trappe. Sophia lève la tête et est aveuglée un instant en découvrant un soleil brûlant de mille feux dans un ciel rouge orangé. L'image connu des enfers s'impose dans son esprit. La trappe se referme de moitié en laissant de la luminosité sur le devant de la pièce.
— Si tu es obéissante et que tu réponds à mes questions, commence Alex en se plaçant devant un établi, tu pourras visiter notre beau pays.
— Et si je ne réponds pas, tente Sophia, pas très sûre de vouloir connaître la réponse.
— Alors, on va longuement s'amuser, toi et moi.
Il se rapproche avec un fin tissu noir et cache les yeux de Sophia en le nouant à l'arrière de sa tête.
— Pourquoi me mettre ça si je sais d'avance ce que tu comptes me faire ? interroge-t-elle tout bas.
— D'habitude, les visions que j'inflige à mes prisonniers, ils ne les voient pas arriver.
Alex dépose un couteau sur la table dans un bruit sourd en grattant sur la table. La vision obscurcie oppresse Sophia qui peut uniquement se reposer sur son ouïe pour deviner où se trouve son tortionnaire.
— En revanche, avec toi qui bloques nos pouvoirs, je dois innover un peu.
Il se rapproche et se positionne derrière Sophia. Lentement, il pose ses lèvres dans le cou de la jeune femme en la faisant sursauter. Le goût salé de sa peau le délecte au fur et à mesure qu'il remonte sa langue jusqu'à son oreille, sentant les frissons qui la font trembler.
— Et je pense que ne rien voir, va inévitablement t'apporter une intense sensation de plaisir, susurre-t-il avec sadisme.
Sophia reste un instant sous tension, ressentant les désagréables sensations qu'Alex lui transmet par ses gestes. Elle attend avec inquiétude ce qu'il s'apprête à faire, alors qu'il laisse les secondes s'écouler en se délectant de la fragilité de sa prisonnière. Il plaque brusquement sa main sur le ventre de Sophia, qui instinctivement se met à se débattre. Mais il ancre sa prise contre lui en posant un objet lourd et froid sur le dos de la demoiselle, contrastant la température avec son corps brûlant.
— Première question, d'où viens-tu ?
Sophia reste muette, la peur lui enserre la gorge. De plus, elle ne veut pas révéler sa terre natale. Alex compte dix secondes avant de glisser son instrument contre son dos. Les hurlements de douleur de Sophia s'échappent avec force. Le tenant par le manche, la tête de l'objet est munie d'une boule où trois lames crantées sortent et rentrent simultanément. Les dents des lames sont dotées de cristaux provenant de Blasqueen, provoquant un froid insoutenable à leurs victimes, et avec le contraste de la chaleur environnante, cela amplifie la souffrance.
Alex calcul la trajectoire de son outil, déchirant en lambeau la peau de Sophia. Il s'interrompt pour replacer l'objet en haut du corps de la demoiselle, qui tente de reprendre son souffle en pleurant de douleur. Elle a affreusement envie de vomir quand Alex lui dit d'un ton enjôleur :
— Tu as l'air d'apprécier, je crois même que tu en redemandes.
De nouveau, il répète la manœuvre, arrachant un autre cri à Sophia.
— Ma question est pourtant claire, aboie-t-il dans l'oreille. D'où viens-tu ?
Elle ne se résigne pas en secouant la tête, refusant toute coopération malgré la souffrance qui lui inflige. Elle sent le sang couler le long de son dos, ne pouvant cicatriser aussi vite que d'habitude grâce à ses pouvoirs. Les oreilles bourdonnantes, elle sent qu'Alex la relâche comme un vieux chiffon.
— Je sens que je vais bien m'amuser avec toi, clame-t-il d'un air satisfait.
Il se dirige vers le mur opposé en balançant l'outil sur l'établi et attrape une nouvelle arme :
— Je vais te donner un indice sur mon jouet favori. Tu dois certainement connaître, indique-t-il heureux tout en faisant claquer une chose sur le sol.
Les muscles déjà crispés se tendent face au bruit qui se répercute dans la pièce. Elle devine sans mal que le taré qui s'occupe d'elle va s'amuser avec un fouet. Il claque son premier coup contre le ventre de Sophia, lui arrachant un nouveau cri.
Il tourne autour d'elle comme un fauve, la fouettant à plusieurs reprises et en laissant passer plusieurs minutes en lui faisant croire qu'il en avait fini avec elle. Il la torture plusieurs heures ainsi en essayant d'obtenir la réponse à sa première question. Le corps meurtri, Sophia ne tient plus physiquement, mais mentalement, malgré la fatigue, elle continue de se battre.
La douleur la foudroie au fur et à mesure que son fouet l'atteint. Alex rit en voyant l'état de la demoiselle qui lui supplie de s'arrêter. Mais son dernier geste enroule le cuir de l'arme autour du cou de la jeune femme, puis il tire en l'étranglant sauvagement.
— Allez, ma belle, pourquoi ne veux-tu pas répondre à cette simple question, murmure-t-il à son oreille.
Son souffle se répercute contre la joue de Sophia alors qu'elle suffoque sous son emprise. Un râle d'extase se fond dans la gorge d'Alex qui glisse son autre main sur la hanche de Sophia.
— Dois-je te rappeler qu'il nous la faut en vie, annonce une voix.
Le fouet se desserre de sa prise, laissant les poumons de la demoiselle se remplir et provoquant une crise de toux, alors que Méric apparaît dans le champ de vision d'Alex.
— Désolé, mais le fait qu'elle cicatrise plutôt vite, cela m'a d'autant plus excité. Je n'ai pas pu résister, répond Alex.
— Qu'as-tu obtenu ?
— Rien, elle est tenace.
Son collègue se rapproche en soupirant lourdement.
— As-tu essayé de lui arracher le bracelet au moins ?
Alex blanchit devant cet oubli. Tandis que son chef se tape le front avec la paume de sa main.
— Je vois, cela fait des heures que tu es en sa compagnie et tout ce que tu as réussi à faire, c'est de péter les plombs en t'acharnant sur elle ! Je passe sur cette fois-ci, mais la prochaine fois, je ne te raterai pas.
— Bien, chef, désolé, répond Alex, dépité.
Cette situation arrache un bref gloussement à Sophia qui ne peut pas le contenir.
— Quand ton patron est là, tu fais moins le malin, lance-t-elle sarcastique.
— Saleté de monstre, crache violemment Alex en faisant claquer son fouet sur la joue de Sophia.
Sa tête tourne avec violence, mais son rire se déploie dans sa folie. Alex grogne face à la moquerie incontrôlée de sa proie. Il s'approche de la demoiselle et lui empoigne les cheveux avec force en la tirant en arrière. Il accroche la chaîne sur des crochets, bloquant ainsi le balancement du corps de Sophia. Le calme et l'excitation qui l'animaient jusqu'à présent a été remplacés par des envies de meurtre.
Il se met à donner des coups de poings dans l'abdomen de Sophia qui essuie les impacts de plus en plus violents. Son souffle se coupe à chaque coup, changeant de trajectoire dans l'épaule, au visage. Il se satisfait de se défouler sur elle :
— Tu fais moins la maligne là à te moquer, espèce de pourriture, beugle-t-il sous la colère.
— Alex, stop, prévient Méric.
Mais son collègue continue de marteler le corps de Sophia sans s'arrêter. Le goût du fer envahi la bouche de la demoiselle qui subit la douleur, mais ne l'empêche pas d'afficher un vieux sourire dégoulinant de sang et le garde ancré sur son visage, provoquant ainsi plus Alex qui tombe tout droit dans le panneau et intensifient ses frappes avec acharnement.
— Putain, Alex, arrête ! Elle te cherche, et tu tombes en plein dedans ! Tu vas la tuer ! crie Méric.
— Rien à foutre, ça résoudra tous les problèmes, non ? rage Alex en poursuivant ses coups.
— Tu ne me laisses plus le choix...
Méric sort son bâton pour assommer son collègue, mais au même moment, la porte s'ouvre à la volée, laissant s'engouffrer un vent glacial dans la pièce.
— Que fais-tu ? s'écrie Alex, décongèle-moi, putain.
Le corps meurtri de Sophia sent le poing congelé de son tortionnaire contre sa peau nue marquée de bleues. De puissantes mains la décrochent du crochet, gardant méticuleusement les menottes autour de ses poignets. Sophia ne tient plus sur ses jambes qui tremblent violemment. Elle sent le bandeau se défaire et prend quelque temps en clignant des yeux, laissant sa vue se réhabituer à la lumière et découvrir la montagne qui la soutient. Bastos est intervenue en gelant toute la salle.
— Quand on te dit plusieurs fois qu'il faut immédiatement s'arrêter, c'est qu'il y a une raison, imbécile ! peste Bastos contre Alex qui est partiellement gelé.
Celui-ci foudroie Sophia de son regard, en essayant de s'extirper. Elle le fuit en scrutant le reste de la pièce et remarque qu'un autre garçon est coincé dans la glace aussi, son bâton tendu en avant.
— Tu ne paies rien pour attendre le retour du bâton, grince Alex entre ses dents.
— Tu crois que tu me fais peur avec tes tours de passe-passe minus ? conteste le fauconnier.
Bastos se tourne vers Méric et d'un claquement de doigt fait disparaître la glace emprisonnant ses collègues.
— Va prévenir H de la gravité des blessures de notre prisonnière et de l'incompétence d'Alex. J'escorte la fille dans mes appartements où je pourrais la faire soigner.
— Pour qui tu te prends Bastos, crache Alex.
— Pour ton supérieur, bordel ! engueule celui-ci. Tu avais ordre de la faire parler, pas de l'achever, putain ! Mais qu'est-ce qui se passe dans ton cerveau, hein ?
— Heu Bastos, tu sais qu'elle est toujours consciente ? intervient Méric.
Bastos regarde sur Sophia qui chancelle dans ses bras à demi consciente, mais restant aux aguets. Elle remarque dans leur échange que la peur a pris possession dans les yeux de Bastos. L'unique espoir de ce pays a failli disparaître sous les coups d'un dégénéré.
Il soupire en fermant les yeux et émet un léger sifflement. Une ombre apparaît derrière Sophia et pose sa main sur son crâne en la forçant à s'endormir. Bastos porte le corps inconscient de Sophia en quittant la pièce.
* * * * *
Un effroyable hurlement réveille Sophia en sursaut. En sueur et désorientée, elle se crispe en sentant les douleurs se réveiller dans ses membres. Elle scrute le lieu où elle se trouve à présent, découvrant une chambre éclairée par des bougies accrochées au mur. Elle est assise sur le lit en remarquant qu'elle porte un large t-shirt noir lui tombant sur l'épaule et possédant toujours les menottes lui entravant les poignets.
Une crise de panique se faufile en se remémorant les longues heures passées avec Alex. Elle tente de calmer ses tremblements en se machinant les mains et constate qu'Evy n'est plus à son poignet. La peur qu'il ait disparu prend le pas sur son état. Elle se lève et se met à fouiller la pièce en essayant de mettre la main sur son bracelet.
— Bordel, t'es où ? peste-t-elle.
Elle s'arrête net en entendant des pas s'approcher. Le cœur palpitant, elle regarde autour d'elle en essayant de trouver un objet pour se défendre. Elle se glisse dans le placard après avoir repéré une canne en bois, puis tente de prendre le contrôle sur sa respiration en plaquant sa main sur sa bouche. Elle ferme les yeux et tend l'oreille sur ce qu'il se passe.
— Notre petite princesse s'est réveillée, dit Méric.
— Elle en a profité pour retourner mon logement, peste Bastos, qu'en penses-tu ? Elle est toujours là ?
Il questionne l'ombre se trouvant à ses côtés, mais n'obtient pas de réponse.
— Méric, avez-vous retrouvé le dragon ? demande Bastos.
En entendant cette question, cela rassure Sophia sur le fait que son ami ne se soit pas fait capturer.
— Lui retirer les menottes était risqué, mais son état était grave et il fallait la soigner en urgence, soupire Bastos, maintenant, il faut la retrouver ! Elle ne doit pas être très loin. Elle a peut-être le don de guérison, mais les attaques infligées par Alex mettent du temps à cicatriser.
— Je vais immédiatement fouiller les dortoirs, répond gravement Méric.
— Très bien, je vais faire l'étage avec lui, indique Bastos. Si nous la trouvons, émettons ce signal, ensuite, nous l'emmènerons voir H.
Ils se séparent en laissant la chambre vide. Sophia attend quelques minutes avant de s'extirper de sa cachette. Elle sait que Bastos fera tout pour l'aider, mais ne connaissant pas les deux autres l'accompagnant, elle ne souhaite pas le découvrir. La porte est restée ouverte, lui offrant une occasion de s'enfuir.
Sur la pointe des pieds, elle s'avance prudemment vers la sortie. Mais le battant se referme lentement sur le paysage aride, ne lui laissant pas le temps de l'atteindre. Le verrou s'actionne, la bloquant à l'intérieur de la pièce, volant sa liberté tant souhaitée. Elle serre la canne contre elle quand les bougies s'éteignent une à une, plongeant la pièce dans l'obscurité la plus totale. Une sensation de mal-être plane autour d'elle.
Elle tremble, les sens aux aguets, mais entend seulement son cœur tambouriner dans ses tempes. L'atmosphère devient de plus en plus lourde. Sophia tente de reculer vers le placard pour se cacher de nouveau de la chose qui rôde dans la chambre, mais elle n'atteint jamais son objectifs lorsqu'une ombre aussi noire que la pièce l'entoure. Elle se recroqueville en se bouchant les oreilles comme elle le peut avec ses menottes et se met à hurler de toutes ses forces.
La demoiselle a extrêmement peur de l'aura morbide qui l'enveloppe dans sa cape. Elle souhaite s'enfuir, mais est dans l'incapacité de faire le moindre mouvement. L'oppression est plus intense, étouffant ses cris dans les abysses ténébreux. L'impression de se noyer sans pouvoir reprendre sa respiration.
Une voix glaciale tente de l'accaparer, mais s'éloigne et se rapproche en faisant perdre la tête à Sophia qui se redresse en hurlant et fouettant le vide avec sa canne. Une texture gluante se faufile sur elle, alors qu'elle essaie de s'en extirper. La consistance lui bloque tous ses muscles, emprisonnant ses membres du moindre geste et laissant sa vie à la merci de son assaillant.
— Laisse-toi faire, susurre la voix glaciale dans le lointain obscur.
Le son est faible et distant, alors que Sophia tente de bouger pour se battre, mais son corps est figé. La peur l'étreint, lui faisant regretter son entretien avec Alex. Son esprit tente de s'évader en projection contre l'ombre qui se moque de son impuissance. Les larmes coulent sur ses joues, se sentant comme une enfant abandonnée dans une forêt sombre, aussi faible qu'un agneau agonisant. Tremblant comme une feuille, totalement désespéré, sans pouvoir résister contre cette aura.
La capacité à penser s'échappe tant la peur la saisie. Elle n'arrive pas à reconnaître la voix qui la tourmente, et qui lui dévore les tripes. Perdue dans ce cauchemar, pleurant et hurlant le désespoir, elle ne souhaite qu'une chose : fuir et mourir.
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