Armando - Mercredi 19 Juillet 2017
J'ai merdé. Grave. Mais ce n'est peut-être pas plus mal. J'ai merdé. Et tant mieux. Mais seulement parce qu'Amandine a été là pour compenser. Pour compenser à quel point j'ai merdé. Pour éviter que ça ne dégénère. Parce que ça aurait pu. Facilement. Tellement facilement. J'ai merdé. Et tant mieux quelque part. Parce qu'au moins, maintenant, Amandine elle sait ce que je ressens. Maintenant les choses sont claires. Maintenant elle peut m'aider. M'aider à ne pas tomber. Même si ça ne devrait pas être à elle de faire ça. Même si je m'en veux tellement de lui imposer ça ! Au moins maintenant les choses sont claires. Au moins maintenant elle sait.
Amandine elle avait du sable plein son t-shirt. Son t-shirt noir qui accrochait les grains de sable. Elle s'était allongée dans le sable, Amandine. Et toute la journée elle était restée avec du sable dans le dos. Et toute la journée j'avais lutté contre l'envie de passer la main dans son dos pour enlever le sable. Le truc c'est que si ça avait été n'importe qui d'autre qu'Amandine je l'aurais fait sans hésiter. Sans en faire toute une histoire. Mais c'était Amandine. Alors je ne pouvais pas. Je ne pouvais pas la toucher. Parce que j'en avais trop envie. Et pas seulement envie parce que je suis un peu maniaque sur les bords et que voir le sable me dérange.
Donc il y avait ce sable qui m'avait fait de l'œil toute la journée. Et Amandine aussi. Elle m'avait tellement regardé. Avec toujours dans les yeux soit un rire, soit de la tristesse, soit les deux. Et, la tristesse, je crois que je la comprenais. Mais le rire, pas du tout. Des fois j'avais l'impression que ça l'amusait. Que ça l'amusait de voir à quel point j'étais torturé. On était en train de faire une chasse au trésor. Et elle a vu à quel point mon crayon était déglingué à force que j'ai passé la journée à le mâchouiller. Elle savait. Je suis sûr qu'elle savait. Elle l'a regardé en souriant et m'a demandé si j'étais nerveux à l'idée que mon équipe soit en train de perdre la chasse au trésor. Mais je suis sûr qu'elle savait. Je suis sûr qu'elle savait que ce n'était pas pour ça que j'étais nerveux. Je suis sûr qu'elle savait que c'était à cause d'elle que j'avais déglingué mon crayon. Et elle me narguait. Je ne comprenais pas pourquoi elle faisait ça.
Alors je lui ai demandé. J'ai essayé le sable sur son t-shirt et pendant que j'étais derrière elle et ne pouvais pas voir sa réaction, je lui ai demandé. Je lui ai demandé pourquoi elle me faisait ça. J'ai été un moins que rien ! C'était pas sa faute à Amandine. Je lui ai demandé pourquoi elle me narguait. Je lui ai demandé pourquoi elle se moquait du fait que moi je sois en train de lutter de toute mes forces et de me sentir coupable. Je lui ai demandé ce qu'elle trouvait de drôle là dedans. Parce que moi je ne voyais absolument rien de drôle. Rien d'amusant. Rien de plaisant.
Et Amandine elle s'est retournée face à moi. Et elle a rigolé. Elle a rigolé et elle a dit : « Je ne sais pas. Je crois que ça m'amuse parce que je sais qu'il ne va rien arriver. Je sais qu'il ne va rien se passer. Je sais qu'on va faire ce qu'il faut ; donc rien du tout. Je rigole parce que je n'ai pas envie d'en pleurer. Puis ouais, ça me fait marrer, de me retrouver dans cette position là. De me retrouver à lutter moi aussi contre ce que je ressens. Tu ne réalises pas à quel point c'est ironique ! J'aurais carrément mis ma main à couper que jamais je ne me retrouverais dans une situation pareille. Que jamais je ne me retrouverais dans une histoire comme celle là ; et que si c'était le cas, ce ne serait certainement pas dans ce rôle là. Et voilà, je suis dans l'autre rôle ; le mauvais. Mais ça ne change rien à mon raisonnement sur ce qu'il convient de faire. Alors il ne va rien se passer. Il ne se passera rien. T'as pas à t'inquiéter. Il ne se passera rien. Pas parce que je ne veux pas. Mais parce qu'il ne faut pas. Et qu'on va faire ce qu'il faut ; donc rien. » Je crois que je suis assez proche de ce qu'elle a vraiment dit. J'ai l'impression d'entendre encore ses mots dans mon esprit.
Ses mots qui la rendent encore plus géniale. Plus géniale que si elle m'avait embrassé. Plus géniale que si elle m'avait convaincu de nous laisser une chance à tous les deux. Plus géniale que dans n'importe quel autre scénario possible. Je ne vois pas ce qu'elle aurait pu faire de mieux que ça. Mais il y a une part de moi qui, sur le moment, a trouvé ça dommage qu'elle fasse ça au lieu de m'embrasser. Faut le reconnaître. Quand elle s'est retournée face à moi. Il y a une part de moi qui a cru, qui a espéré. Mais elle a rigolé. Je ne la remercierais jamais assez d'avoir rigolé. Et d'avoir ensuite dit ce qu'elle a dit. Amandine elle a rigolé. Elle a rigolé, puis elle a raisonné. Elle a été forte comme je n'aurais jamais pu l'être.
Puis on s'est éloignés chacun de notre côté, retrouver nos équipes respectives pour la chasse au trésor. Et quand je me suis retourné, j'ai vu qu'elle n'était plus en train de rigoler. Elle était en train de pleurer. Et j'aurais voulu pouvoir aller la prendre dans mes bras. J'aurais voulu pouvoir la consoler. J'aurais voulu lui dire à quel point j'étais désolé. A la place je l'ai laissée partir. Je l'ai laissée en train de pleurer. Je m'en veux tellement de lui donner tout ça à porter. Sur ses petites épaules si mignonnes. Ses petites épaules qui ne mériteraient pas de porter quoi que ce soit d'autre que du bonheur. Ses petites épaules qui ne mériteraient pas d'être seules. Ses petites épaules qui devraient ne jamais avoir à se soulever au rythme de sanglots.
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