Chapitre 4
Je ne sais pas combien de temps nous sommes restés à nous regarder, mais après une éternité à mes yeux, il décida enfin de parler.
-Salut Alice, ça va? commence-t-il.
-Euh... oui, oui ça va et toi, rétorquais-je en bégayant.
-Ça va aussi, dit-il en souriant. En fait je suis juste content que tu me parles, car si on pense aux dernières fois que nous nous sommes vus, la tendance aurait été que tu m'ignores.
Je sais exactement de quoi il parle. Après que notre amitié a pris fin, il nous arrivait encore de nous rencontrer lors de certaines soirées. Au début, j'allais le voir, comme si de rien était, nous prenions des nouvelles sur un et l'autre, sans plus. Ces conversations ont fini par m'achever. Pour éviter de souffrir à chaque fois que nos chemins se croisaient, j'ai choisi de l'ignorer, de faire comme si lui et moi n'avions jamais partagé quoi que ce soit. Ce n'était pas la solution idéale, je sais, mais c'était la seule à ce moment-là qui m'évitait d'avoir mal chaque fois que nos chemins se croisaient. Notre dernière rencontre remonte à deux ans, et je m'étais promis que si je devais le revoir, je le confronterais plutôt que de fuir. Malgré cette promesse, une partie de moi me supplie de partir sans me retourner, mais une autre partie de moi semble différente des fois précédentes, me laissant ainsi face à lui sans bouger. Il continue donc en me demandant :
- D'ailleurs, pourquoi es-tu partie tout à l'heure ?
- Je ne sais pas de quoi tu parles, murmurais-je, en baissant les yeux.
- Alice, tu sais de quoi je parle, lorsqu'Alexa est venue me voir, tu étais avec elle, et pourtant dès que j'ai lâché son étreinte tu n'étais plus là.
- Ah, je vois, lançai-je. Eh bien, je me disais simplement que vous aviez beaucoup de choses à vous dire, je ne voulais pas vous interrompre.
Il me regarde un instant et je perçois qu'il voit clair dans mon mensonge. C'est toujours comme ça avec lui et moi, c'est comme s'il fallait jouer aux devinettes quand on en vient à ce qu'on pense réellement, mais en même temps ce fut une de mes amitiés les plus authentiques que j'ai connues. Nous avons toujours été capables de lire entre les lignes, de décoder les silences et de saisir les non-dits. C'est cette connexion spéciale qui nous a liés depuis le début, et même si nos chemins se sont séparés, cette complicité demeure. C'est difficile à comprendre, je le sais.
- Tu ne m'interromps jamais Al, lâche-t-il seulement en plongeant son regarde dans le mien.
Je le fixe intensément, cherchant une réponse dans son regard. Je suis déconcertée par son comportement. Je détourne le regard. Je ne comprends pas son attitude. Après deux ans de quasi-silence, il me lance des répliques comme s'il n'avait jamais disparu de ma vie. Je ne peux pas concevoir qu'il ne réalise pas la douleur qu'il m'a engendré lorsqu'il n'a pas voulu continuer notre amitié. Mon premier instinct est de partir, comme je l'ai fait toutes ces dernières fois. Pourtant, une part de moi désire ardemment rester et engager une conversation avec lui, qui durerait des heures. Je lutte contre cette dualité intérieure qui me pousse à la fois à fuir et à m'ouvrir à lui. Cependant, la crainte de revivre une telle douleur m'envahit, et je me rends compte que je ne suis pas prête à affronter ces émotions une fois de plus. Il me faut simplement m'éloigner rapidement et accepter de laisser derrière cette partie de moi qui souhaite renouer avec un passé auquel je pensais ne plus avoir à faire face.
- Ce fut agréable de te revoir Thomas, mais je dois partir.
Il attrape mon bras et m'arrête. Je regarde sa main qui tient mon bras et mon cœur fait un bond dans ma poitrine.
- Alice, s'il-te-plait, ne pars pas. Tu n'as pas idée comme je suis heureux de te voir ce soir. Laisse-moi une chance de te parler s'il te plait. Je n'en peux plus de te croiser sans avoir la chance de te parler. Il me semble que nous avons tant à nous dire.
Malgré moi, je rougis. Allez, Alice, reprends-toi, me dis-je. Je vais attribuer cette réaction à l'alcool.
- Je suis contente de t'avoir vue aussi, m'avançais-je, mais je dois vraiment y aller, alors si tu veux bien m'excuser...
Je tente de me départir et au même moment il me dit:
- J'ai appris pour Will et toi, je suis désolé.
Je le regarde, les yeux écarquillés, ne sachant pas quoi dire. J'essaie de masquer ma surprise et ma confusion, mais je sens que mon visage trahit mes émotions. Il n'est pas sérieux! Je peux à peine rassembler mes pensées en ce moment et il doit me parler de Will. Je prends une profonde inspiration pour me calmer avant de répondre d'une voix un peu tremblante :
- Écoute, j'essaie encore de ne pas trop y penser, alors si ça ne te dérange pas trop, j'aimerais bien éviter ce sujet, murmurais-je en reculant pas à pas.
J'essaie de donner l'impression que je suis forte et que je gère la situation, même si à l'intérieur, tout est encore en désordre.
- Bien sûr, je comprends Alice. Je tiens juste à te dire que je suis sincèrement désolé que tu aies dû vivre cette rupture. Je sais que ce n'est jamais facile, et je m'excuse d'avoir été absent à ce moment-là. Je suis ici maintenant, et si tu as besoin de parler ou de soutien, je suis là pour toi, ajoute-t-il.
Mes joues deviennent de plus en plus rouges, mais qu'est-ce qui m'arrive ? Heureusement, il ne peut pas entendre mes pensées, me dis-je.
- Merci, maintenant si tu veux bien m'excuser, dis-je en remontant mon regard afin de le fixer droit dans les yeux.
Il prit un bref instant avant de retirer sa main de mon bras et me laisser passer. Enfin, il ajoute :
- Alors, à plus tard Alice.
Je grimpe les escaliers avec détermination, essayant de me distancer de Thomas et de son regard qui semble me suivre. Je me concentre sur chaque marche, m'efforçant de garder mon calme malgré l'agitation qui règne en moi. Une partie de moi est tentée de me retourner, de voir s'il me suit du regard ou s'il monte lui aussi les escaliers. Mais je sais que céder à cette tentation ne ferait qu'attiser davantage mes émotions déjà instables.
Je m'oblige à continuer mon chemin, à mettre de la distance entre nous. Je me répète que c'est la meilleure chose à faire pour préserver ma paix intérieure.
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