J'entre chez moi en coup de vent évitant soigneusement mes parents qui pourraient me poser des questions. J'atteins rapidement ma chambre et m'effondre sur mon lit. Les larmes ne cessent de couler sur mes joues. Je sais pertinemment que je ne devrais pas réagir ainsi, mais c'est plus fort que moi, c'est comme si tous les souvenirs de ce moment de ma vie refont surface et je ne veux surtout pas revivre ça. Je décide de prendre mon téléphone pour appeler Jess. Je l'appel au moins trois fois, mais elle ne répond pas. J'ai besoin de me changer les idées, je suis en train de devenir folle.

En cherchant des mouchoirs dans ma poche, je sors le numéro d'Evan. Une partie de moi me répète que ce n'est pas une bonne idée, mais une autre partie de moi a désespérément besoin de sortir de cet état. Je décide finalement de lui envoyer un texto.

Salut Evan, c'est Alice. Je me demandais si tu étais disponible ?

À peine quelques minutes plus tard, il répond.

Si ce n'est pas ma patiente préférée. En ce moment je suis libre, on se rejoint quelque part?

Je relis son message, doutant de la pertinence de cette rencontre. Mais à quoi bon ? Je n'ai rien à perdre, et je suis consciente que rester seule en ce moment n'est pas une bonne idée. La douleur que je ressens est si intense que certains vieux mécanismes négatifs pourraient ressurgir, et je m'étais promis de ne plus retomber dans ces moments sombres.

D'accord, où et combien de temps ?

Wow tu ne tournes pas en rond, j'aime ça. Disons, pub St-Felix dans 45 minutes ? 

Parfait. J'y serai.

Je me prépare rapidement, désireuse d'arriver au pub en avance, histoire de prendre un verre. Soyons honnête, si je tarde un peu, je risque fort de changer d'avis. Heureusement, le pub n'est pas loin de chez moi, donc je décide d'y aller à pied.

J'arrive finalement à notre point de rencontre 15 minutes plus tôt. Je m'assois au bar et me commande un verre et un shooter. J'en profite pour regarder la partie d'hockey à télévision. J'étais absorbée par le match parce que je n'ai même pas vue Evan entrer. Il pose sa main sur mon épaule et je sursaute.

- Hey ça va Alice, c'est juste moi.

J'émets un rire timide et le regarde en souriant bêtement.

-Alors à ce que je vois, nous avons déjà commencer à boire ici. Dommage, je n'ai même pas eu le plaisir de te payer la première consommation.

- Eh bien, ne t'empêche surtout pas de payer la deuxième, rétorquais-je avec un ton espiègle.

Son regard parcourt tout mon corps, me dévorant des yeux. Peut-être est-ce l'effet de l'alcool qui commence à me jouer des tours, mais je sens mes joues rougir involontairement.

- Un deuxième verre pour mademoiselle ici s'il vous plait et deux shooter.

Une fois les verres vidés, ma gêne s'estompe peu à peu et je me sens mieux. Les souvenirs de la soirée commencent à se dissiper peu à peu. Je regarde mon cellulaire pour voir l'heure et je réalise que Thomas essaie de me contacter depuis mon départ. Il a même passé par Jess puisqu'elle aussi me demande où je me trouve. Je décide de fermer mon téléphone pour éviter d'être dérangée. Après tout, je ne fais rien de mal.

- Alors, commence Evan, ta relation "non officielle", je crois comprendre qu'elle n'a pas abouti ?

-En fait, c'est beaucoup plus compliqué que ça, mais je n'ai pas vraiment envie d'en parler.

- C'est pour ça que tu m'as écrit ce soir, pour te changer les idées ?

- Non, je ... je voulais...

- Pas de ça avec moi Alice, dit-il en m'interrompant. Soit honnête je t'en prie.

- Bon oui, mais pas seulement, tu sembles quelqu'un d'assez direct et simple. J'aime bien être avec toi, j'ai l'impression que je peux être moi-même.

- Et pas avec... ta relation?

- Je ne sais pas, je crois que tout est aller trop vite entre nous deux. Notre relation est trop intense...mon but était d'éviter d'être blessée et regarde où j'en suis aujourd'hui.

- Écoute, nous ne nous connaissons pas beaucoup, mais je sais une chose, c'est que tu mérites tout le respect et le bonheur du monde. Et je le pense sincèrement. Nous ne sommes que de simples connaissances pour l'instant, mais tu sembles être une personne formidable. Cependant, je ne souhaite pas non plus me retrouver dans une situation compliquée. Alors c'est à toi de décider comment les choses vont se passer.

Je le regarde, un peu hébétée. Je devrais partir. J'ai peur de faire quelque chose que je vais regretter. J'apprécie trop Thomas pour tout gâcher ainsi. Pourtant, malgré ses pensées, je sens que mon corps, malgré la volonté de ma tête, s'approche peu à peu de ses lèvres. Il me caresse les cheveux et ensuite mes joues. Je ne pourrai pas résister bien longtemps. Je sens mon cœur bat dans ma tête, peut-être à cause de l'effet de l'alcool. Oh et puis, étant donné où j'en suis, je m'abandonne. Je m'approche, enroule mes mains autour de son cou et l'embrasse. Il retourne mon baiser et pendant ces quelques secondes, je me sens bien, je me sens vivante, désirée et libre. Je me retire tranquillement de notre étreinte.

- Wow Ali... c'était juste incroyable.

- C'était en effet très bien, répondis-je en gloussant. Mais écoute Evan je ne crois pas que ...

- Je sais, ton cœur est déjà pris, je comprends, mais garde mon numéro, comme ça, si ta situation se simplifie un jour, tu seras qui appeler.

- Ce n'est pas exactement ce que j'allais dire, mais merci. Merci de comprendre et de ne pas faire d'histoire.

Il termine son verre, paie la facture et me regarda une dernière fois, avant de me dire : 

- Merci pour l'invitation, rappelle-moi si ce nul ne te traite pas correctement, plaisante-t-il. À plus, Alice.

- Promis, rétorquais-je en souriant. À bientôt Evan.

Je rassemble mes choses et me dirige vers la sortie du bar. En marchant vers ma maison, les dernières minutes commencent à défiler dans ma tête. Qu'est-ce que je viens de faire ? Je ne me reconnais pas, embrasser un garçon que je connais à peine parce que mon copain, si je peux l'appeler ainsi, a couché avec une fille avant même que nous commencions à se fréquenter. On dirait que je me passe un film dans ma tête et que j'en suis le personnage principal. Je me répète la scène encore et encore et je ne sais pas ce qu'y m'a pris. Ce que je sais, cependant, c'est que cela va certainement finir par causer des problèmes. Je marche dans la nuit, sentant le poids de la culpabilité s'abattre sur mes épaules. Je sais que je devrais faire face à mes actions et affronter les conséquences de mes choix, mais pour l'instant, je me sens perdue et déchirée entre mes émotions.