20. Au néant
La nuit m'oppressait. Et je me laissais engloutir, marchant lentement, les mains enfoncées dans mes poches, laissant le vent glacial du soir fouetter mon visage et traverser mon t-shirt. T-shirt qui me rappelait que je l'avais laissé s'enfuir, son visage décomposé, perdu dans mon trop grand sweat.
Le froid me mordillait les chevilles. Brûlait mes yeux. Faisait frissonner mon être entier, douloureux. Mais ce n'était pas comparable à ce qu'il se passait à l'intérieur.
Je ne savais plus quoi penser. Je ne savais plus qui j'étais, ce que je foutais là. Pourquoi mon coeur faisait toutes ces choses étranges alors que je voulais seulement être en paix. Seul.
Mais je n'étais plus seul. Il était là. Il m'avait embrassé, et il me manquait. Il m'avait embrassé, et j'avais renchérit. Il m'avait embrassé puis il avait pleuré. Puis son silence m'avait repoussé. Et ce foutu silence m'avait anéanti. Consumé à petit feu.
Qu'est-ce-que j'avais fait de mal? Aurais-je dû l'empêcher de me toucher? Aurais-je dû seulement m'écarter au lieu de le désirer si fort? Aurais-je dû agir comme si rien de tout ça n'était arrivé? Aurais-je dû faire comme si je n'avais pas vu les larmes dans ses yeux?
Ses larmes amères qui avaient brillé toute l'après-midi, et le soir encore.
Ses larmes là m'avaient rendu fou. J'avais l'impression d'avoir mal agit en l'embrassant un peu plus.
C'était sans doute le cas.
Peut-être avait-il seulement voulu embrasser ma joue? Et que tout avait dérapé.
Je ne me souvenais de rien. Du moins mes souvenirs étaient merveilleux, et je revoyais nos sourires. L'un contre l'autre.
Alors pourquoi avait-il pleuré?
Je m'en voulais. J'aurais voulu être normal. Être comme tous les autres. Aimer les filles. Leurs longs cheveux et leurs formes voluptueuses.
Mais je me fichais d'elles.. je ne voulais que lui. Que son magnifique sourire encadré de lèvres si douces. Que ses grands yeux d'enfant émerveillés. Son visage d'ange. Son corps si fin, sculpté dans la plus pure des pierre. Sa peau blanche, et son rire.
Mais je l'avais laissé partir. Je l'avais laissé, lui et ses larmes de dégout. Ses larmes de peur.
Et je m'était enfuis. Comme le sale lâche que j'étais.
J'avais donné un coup de pied dans une poubelle qui trainait dans la rue, furieux. Contre lui parce qu'il ne me disait rien. Parce qu'il avait gardé le silence alors qu'au fond rien n'allait. Parce qu'il avait pleuré au lieu de m'avouer que j'avais tout gâché.
Et j'étais furieux contre moi. Surtout contre moi.
Puis j'étais rentré, fuyant ma chambre qui me rappelait beaucoup trop sa présence. Et je m'étais assis dans le fauteuil, en face de la télévision.
Et je l'avais appelé. Parce que je m'en voulais bien trop d'être resté sans rien faire.
Mais il n'avait pas répondu.
Alors j'avais laissé un message. Espérant qu'il prendrait le temps de l'écouter, bien qu'il se refusait à ouvrir ceux que je lui avais écrit.
— Jaemin-ah.. avais-je commencé. Réponds-moi s'il te plait. Je sais que ça ne va pas. Parle-moi. Dis-moi quelque chose. Reviens-moi. Dis moi ce que j'ai fait.. explique-moi où j'ai merdé. Je m'en veux tellement.. je tiens à toi, tu sais. Peut-être trop? Mais j'crois pas que rien ne soit de trop pour toi.
J'avais soupiré. Je ne savais plus ce que je disais. J'étais perdu.
— Pardonne-moi de t'avoir laissé. Pardonne-moi de t'avoir.. euh.. enfin, tu sais de quoi je veux parler. C'était peut-être une erreur. Mais j'étais heureux. Je croyais que tu l'étais aussi..
Un autre soupir, tremblant cette fois-ci, m'avait échappé, j'avais alors terminé mon monologue brusquement, parce que c'était trop pour moi :
— Bonne nuit.
Et j'avais raccroché.
*
Jaemin-ah❤️ est en train d'écrire..
Le soleil se levait à peine, et j'étais réveillé, assis sous le porche de la maison. Je fixais la gare au loin, qui se découpait dans les faibles rayons du soleil, morne, triste.
Je ne voulais pas y aller. Mais à la fois, j'en mourrais d'envie.
Alors, j'avais lu son message, avec l'espoir que tout aille mieux. Mais non.
Ne m'attends pas ce matin.
Je ne voulais même pas savoir pourquoi.
Il se foutait seulement de moi. De mon message. De ce que je pouvais bien penser. De ce qu'il m'avait fait ressentir. Il se fichait de lui. Il se fichait de tout.
Et je ne lui en voulais même pas. Le pouvais-je seulement?
Alors j'avais verrouillé mon téléphone. Et je m'étais levé.
J'avais longé le ruisseau, mon pantalon se gorgeant de la rosée que portaient les herbes hautes. J'avais traversé les champs lentement, regardant le jour se lever. Presque apaisé.
Je me retrouvais comme avant. Seul. L'esprit léger.
J'avais décidé de ne me souvenir que des moments heureux. Les seuls qui me revenaient dataient d'hier. Et je ne pensais qu'à ça.
Je m'étais alors assis sur le banc, naufragé au beau milieu d'une mer de carrelage blanc.
Et j'avais regardé les rails, sans bouger, fermant parfois les yeux, épuisé par la nuit blanche que j'avais passée à attendre une réponse. Un mot de sa part. Des nouvelles.
Rien. Que du vide. Et le message de ce matin.
Je ne l'attendais pas. Je lui obéissais. Parce que j'étais son pantin. Sa marionnette. Il aurait pu me faire dire n'importe quoi.
Pour lui, j'aurais tout donné.
Parce que je n'avais plus que lui.
Et c'était bien triste d'être rejeté à nouveau par la seule personne à qui vous teniez.
Puis le train s'était arrêté à quai, me tirant de mes pensées en crachant son souffle chaud dans l'atmosphère fraiche du matin.
Par habitude, je m'étais levé, observant chaque wagon, l'esprit vide. Vide de tout.
J'avais marché, longeant le tas de ferraille, et j'avais terminé par son wagon.
J'avais observé la peinture qui en tombait. Les vitres sales. Et derrière les vitres, sa place.
Sa place qui n'était même pas vide.
Il était là.
Enveloppé dans mon sweat. Le visage caché dans ses mains.
Et j'avais sentit quelque chose s'effondrer en moi.
Mes espoirs s'évanouir.
Mon coeur s'effriter, devenir un tas de poussière, aussitôt balayé par la brise du vallon.
J'étais resté là, fixant son corps qui ne bougeait pas.
J'avais sentit mon ventre se nouer. Se tordre. Se détruire en m'envahissant d'un sentiment que je ne pouvais nommer.
Il n'avait pas bougé. J'avais fais un pas en arrière, manquant de tomber.
Perdu.
J'avais sortit mon téléphone.
L'avais pris en photo.
Et lui avais envoyé.
Rien ne se passait. Strictement rien. Et j'étais paralysé. Par la douleur. La peur. La peur de le perdre. De ne plus jamais le voir descendre du dernier wagon.
Puis il avait remué. Regardant son téléphone.
D'ici, je voyais nettement ses yeux gonflés. Rouges. Et ses cernes.
Puis il avait tourné son visage vers moi.
J'aurais voulu faire quelque chose.
Mais je l'avais seulement fixé.
Les sourcils froncés, la mâchoire serrée.
Brisé en deux.
Puis le train avait sifflé.
Emportant sans doute avec lui la dernière image que j'aurais du garçon que j'aimais.
Son sourire étendu sur ses lèvres, ses joues baignées de larmes.
Et j'avais hurlé. Hurlé tout seul sur le quai de notre gare.
Hurlé pour qu'il me revienne, écrasant mon poing dans un mur, fou.
Fou de lui.
Des larmes de sang tombant au sol dans un bruit sourd, éteint.
Éteint comme la vie au fond de mes yeux.
_______
C'est un chapitre pour introduire le prochain.
J'ai l'impression qu'il s'y passe rien.
Mais c'était important de l'écrire pour la suite.
Alors comme j'ai peur que vous ne l'aimiez pas, j'pense faire une double update aujourd'hui.
À ce soir?
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top