14 décembre
Le froid étreignait Mary alors qu'elle était assise sur le banc emmitouflée dans sa grosse doudoune aux couleurs du club. À côté d'elle, la place habituellement prise par Robyn était vide, la jeune kiné n'ayant pas eu le droit de se déplacer après son dernier rendez-vous chez le médecin et ayant été mise en arrêt pour une semaine suite à une trop grande fatigue. La jeune femme et ses commentaires pendant les matchs lui manquaient en cet instant précis.
Sur le terrain, l'ensemble des joueurs se démenaient pour remporter le match depuis déjà cinquante-sept minutes. Celles-ci s'égrainaient plus que lentement alors que le spectacle n'était pas au rendez-vous. Les passes des deux équipes terminaient bien trop souvent dans les pieds des joueurs adverses et l'entièreté de l'action se déroulait au milieu de terrain où la balle semblait bloquée, le match n'arrivant pas à s'emballer.
La kinésithérapeute baille de façon peu discrète, récoltant en réponse un sourire amusé de son collègue David. Elle hausse les épaules un sourire amusé se peignant sur son visage. Si elle aimait travailler en compagnie de sportifs, le football n'était pas une passion pour elle. Elle avait d'ailleurs pendant longtemps eu l'impression d'être une vraie impostrice, volant le poste de quelqu'un qui aurait rêvé depuis l'enfance de travailler pour le FC Liverpool.
Ça n'avait jamais été son cas. Mary avait toujours rêvé d'être kiné, dans le sport de haut niveau. Après plusieurs contrats en handball, elle avait fini par se faire embaucher par le club de Premier League et elle ne l'avait plus jamais quitté. Mais ce n'était pas pour le sport qu'elle restait, c'était pour l'ambiance conviviale et familiale qui y régnait lorsqu'elle avait mis les pieds dans les lieux la première fois.
Depuis, elle s'y était fait des amis parmi ses collègues et elle ne s'imaginait plus ailleurs. Avec l'évolution du football, elle se posait malgré tout régulièrement la question de si cet univers était toujours celui où elle avait envie de travailler. Mais les joueurs n'en étaient pas vraiment responsables, et surtout pas ceux qui rêvaient encore de Liverpool, Arsenal, Manchester ou Chelsea.
— Tu pourrais être plus discrète.
David dont la voix vient de se porter à son oreille fait partie de ceux qui sont devenus des amis via son travail. Ils passent des soirées ou journées ensemble, elle connait sa femme et ses jeunes enfants, elle les invite à manger chez elle parfois. Il faisait partie des raisons qui la faisaient rester dans le club quand elle se posait parfois la question de le quitter pour découvrir d'autres choses.
— Ne me dis pas que tu es satisfait de ce que tu vois ou que tu prends du plaisir devant ce piètre spectacle.
Contrairement à elle, le kiné aimait le football et s'occuper des joueurs du club était son rêve d'enfants. Il avait gardé de celle-ci son incroyable mauvaise foi quant au niveau qu'affichait parfois les joueurs ou concernant les décisions arbitrales qu'il trouvait perpétuellement anti-Liverpool.
— Ce n'est pas une rais...
Elle ne comprend pas pourquoi il coupe sa phrase au beau milieu. Elle lève ses yeux clairs pour voir ceux verts être figés sur le terrain et son visage se décomposer. Ses prunelles se tournent vivement en direction de celui-ci. Elle découvre alors Andrew assis par terre.
— Merde.
Un sourire s'arque tandis qu'elle se réintéresse à son collègue qui a vu la scène, cherchant à savoir s'il s'agissait d'un coup, d'une torsion ou d'autre chose.
— Musculaire je pense. Il s'est stoppé net dans sa course en se tenant la cuisse.
Une moue désolée s'installe sur le visage de la mère de famille qui observe attristée son compatriote quitter le terrain en compagnie des médecins. Le défenseur semblait passer un début du mois de décembre particulièrement compliqué. Elle le suit du regard alors qu'il pénètre dans le tunnel en direction des vestiaires accompagné d'un des médecins du club qui allait certainement directement l'examiner.
— Est-ce que l'un ou l'autre de vous peut le masser ? On passera une échographie à Liverpool, mais je pense que c'est une grosse contracture.
Le médecin est à quelques mètres d'eux dans l'allée d'entrée vers le terrain. L'écossaise se lève, laissant son collègue sur le banc. David n'a même pas esquissé un mouvement, sachant certainement que le défenseur appréciait la femme aux cheveux blanchissants et encore plus quand il n'allait pas bien. Elle se dépêche de glisser dans les couloirs pour rentrer dans la salle de soins où Andy l'attend.
— Hey.
— Hey.
Le visage est triste. Les traits sont affaissés. Elle pénètre dans la pièce et s'approche du défenseur assis sur la table de massage et semblant l'attendre. D'où elle est, elle peut voir la déception présente chez son binôme de cuisine. Ses bras entourent doucement les épaules du brun qui l'attire à elle sous le regard étonné du médecin qui ne dit rien et quitte les lieux.
— Je déteste le mois de décembre.
Les mots sont étouffés alors qu'il a le visage enfoui dans sa doudoune qu'elle porte toujours. Mary savait qu'il ne disait pas la réalité, décembre lui avait peut-être fait du mal mais il restait son mois préféré pour de nombreuses autres raisons, la principale étant la présence de Noël à la fin de celui-ci. Il finit par se détacher d'elle alors qu'elle le serrait dans ses bras comme elle pouvait le faire avec son fils ou sa fille quand ils étaient tristes.
— Allonge-toi, je vais te masser et ça devrait passer plus vite.
La tête est doucement hochée et il se retrouve bientôt assis, le torse légèrement redressé tandis qu'elle commence à enfoncer ses doigts dans le muscle où elle sent immédiatement une boule. Lorsqu'elle appuie dessus, une grimace se forme sur le visage du défenseur et un petit cri lui échappe. Elle ne relève pas les yeux pour ne pas voir la douleur qui déforme son visage alors qu'elle travaille encore et encore le muscle, des sons échappant régulièrement au brun même s'il tentait de lui cacher sa souffrance.
— T'as offert quoi comme cadeau aujourd'hui ?
— Des places pour une spectacle de danse de la compagnie à Marcus. Sa fille et sa femme en sont fans et j'en ai quelques-unes vu que j'aide toujours aux costumes et à la vente des tickets.
Le spectacle de danse de Noël se déroulait tous les ans le dernier week-end avant les fêtes. Mary avait commencé à aider à celui-ci quand sa fille y participait. Elle n'avait jamais arrêté par la suite, aimant l'ambiance sympathique de l'organisation d'événements avec d'autres bénévoles.
— J'ai des caramels et des guimauves pour toi et Robyn dans ma valise. Elle était pas là ?
Andy avait ce don de toujours parler pendant qu'elle s'occupait de ses blessures. Une façon de détourner sa concentration de la douleur et de la focaliser sur autre chose. Elle hoche négativement la tête.
— Elle est en arrêt depuis hier soir.
— Quoi ?! C'est grave ? C'est le bébé ? Est-ce que...
Mary étouffe un léger rire devant la réaction du joueur dont elle stoppe sa question par sa réponse avant qu'il ne se fasse un film catastrophe.
— T'inquiète pas, elle est juste fatiguée et il a compris que s'il ne le faisait pas elle continuerait d'en faire beaucoup trop malgré tout ce qu'on essaie de faire pour qu'elle arrête.
Le soupir de soulagement qui échappe à Andrew ne passe pas inaperçu à ses yeux et elle est heureuse quand elle voit son visage précédemment crispé par la crainte se détendre et un sourire naître sur les lèvres du joueur.
à demain avec le retour du point de vue de robyn :)
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