Chapitre 4 : Secret enfin révélé


J'étais en train de paniquer. Complètement en train de paniquer. J'avais amorcé le pire moment de ma vie. Et je ne pouvais plus me défiler. Mais après tout, n'était-ce pas mieux comme ça ? Je ne devais pas attendre plus longtemps, cette histoire était en train de me ronger petit à petit. Maintenant que j'avais dit la vérité au manager et à Namjoon, il était normal que le reste du groupe la connaisse aussi. Mais c'était tellement difficile !

Sentant déjà les larmes monter à cause de la panique, je pris un instant pour respirer calmement. Ce n'était que l'affaire de quelques minutes, pas plus. Après, j'allais pouvoir m'isoler dans mon coin, les éviter et ne pas leur infliger ce que j'étais. Oui, voilà, c'était ça. Mais j'avais tellement peur de les perdre. Ils étaient mes amis, mes frères. Si je chutais maintenant, je savais que mes os allaient se briser et que jamais je ne me relèverais.

Sachant qu'ils m'attendaient, je me décidai enfin à me mettre en mouvement. Lentement, je quittai la cuisine pour les rejoindre dans le salon. Ils étaient tous installés dans le canapé ou les fauteuils. A l'exception de Namjoon, qui se tenait derrière le canapé. Il me regarda et je lui lançai un regard douloureux. Pas après pas, je m'approchai de ma sentence. Les autres me fixaient eux aussi, curieux, surpris, inquiets. Finalement, je me postai face à eux, devant la télévision. Je soufflai un bon coup. Je ne savais absolument pas par où commencer, c'était affreux. J'avais l'impression que mes jambes allaient se dérober sous moi. Mon coeur était sur le point de s'arrêter. Je tentai de les ignorer, mais sans succès. Ma bouche s'ouvrit enfin, mais un son étouffé en ressortit à la place de mots cohérents. Bien, premier essai raté. Je maîtrisai mes larmes du mieux possible.

- Je ... Je voulais vous dire un truc ...

Oui, ça, tu leur a déjà dit, Yoongi. Fais un effort.

- En fait, je ...

Comment leur dire ? Quels mots utiliser ? Enfin, mes idées furent un peu plus claires et je décidai de commencer par autre chose. Ma voix se fit plus forte, plus sûre.

- Je suis désolé. Je marquai une légère pause avant de reprendre. Mais je vous aime tous tellement, je ... ne peux pas continuer comme ça. Vous m'apportez tellement tous les jours, j'ai l'impression d'être un imposteur. Je ...

Je déglutis. Voilà, j'étais de nouveau perdu. Je leur avais dit que je les aimais, qu'ils me rendaient heureux au quotidien, même s'ils étaient parfois fatigants. Je voulais leur dire tellement de choses.

- J'espère que vous ne changerez pas après ça, murmurai-je un peu plus bas.

Je relevai un regard coupable vers eux. Je m'en voulais tellement. Comment quelqu'un comme moi avait pu être mis en contact avec des êtres aussi innocents qu'eux ? Ils me fixaient toujours, assimilant mes paroles. Alors que j'allais de nouveau ouvrir la bouche pour continuer dans ma lancée, pendant que mon courage était encore un peu présent, je fus coupé par Jungkook.

- Tu veux pas partir, quand même ? Demanda-il avec empressement.

Je ris nerveusement.

- C'est bien la dernière chose que je voudrais faire.

Je le vis soupirer de soulagement, et les autres se détendirent un peu. A croire qu'ils avaient tous pensé à ça. Enfin, sauf Namjoon, qui était au courant de tout. Pour autant, ils ne récupérèrent pas leurs sourires, sentant que tout était loin d'être terminé.

- A vrai dire, je n'ai pas ... Je vous ai caché quelque chose et ... et ... Et je crois que ... qu'il est temps de vous le dire. J'espère vraiment que ... vous me pardonnerez ...

Incapable de soutenir leurs regards, je baissai de nouveau la tête. Je ne méritais pas d'être à leurs côtés. Je les salissais. C'était tellement horrible de ne pas pouvoir me sentir complètement vivant parce que j'étais différent et que mon pays ne l'acceptait pas. A nouveau, mes jambes se montrèrent faibles et je dus me forcer à rester debout. Je ne devais pas flancher devant eux, c'était inconcevable. Je devais assumer ce que j'étais, et c'était bien ça le problème. Je n'assumais pas, je n'y parvenais pas. J'avais honte de moi-même. Honte d'aimer les hommes, honte de ne pas réussir à faire semblant et à me forcer à aimer les femmes.

- Je ne ... Je ne suis pas comme vous. Je ne suis pas ... normal. J'ai ... Je ...

Ma respiration était en train de me faire souffrir. Tout dans mon corps me brûlait. J'avais la sensation de me consumer de l'intérieur, et c'était extrêmement douloureux. Une première larme coula sur ma joue, finissant par mourir dans mon cou. Dès lors, de nombreuses autres larmes la suivirent. C'était fini, j'avais cédé avant même d'avoir pu leur dire. J'étais pathétique. J'entendis un léger mouvement en face de moi, mais je ne parvins pas à relever la tête pour voir ce qu'il se passait. J'avais envie de mourir sur place, de m'écrouler et de ne jamais me relever. Je n'étais plus capable d'affronter ce monde.

- J'aime les hommes. Finis-je beaucoup plus fort que tout le reste.

Ces mots m'arrachèrent la gorge autant qu'ils me délivrèrent. Ma voix était empreinte de colère, de tristesse, de résignation et de honte. Voilà, c'était dit. Toujours incapable de les regarder, je baissai encore plus la tête, comme si c'était possible, et me mis à pleurer clairement. Je savais que si je restais là, immobile, j'allais tomber. Mais j'étais incapable de faire le moindre geste. J'avais envie de fuir loin d'eux, de les laisser, de ne plus toucher à leur candeur, mais mon corps ne voulait pas faire le moindre mouvement. J'étais pris au piège.

- Tu ... Quoi ?

Malgré mon état, je reconnus la voix de Jimin. Je pris cette question comme un énorme coup porté à ma poitrine. Pourtant, il n'y avait pas de dégoût dans ses paroles, juste de la surprise. Mais ça, j'étais incapable de l'entendre, trop bouleversé. J'entendis un murmure, mais ne compris pas le moindre mot. Je ne savais pas qui venait de parler. Mes pleurs redoublèrent d'intensité et je me sentis vraiment plus bas que terre. Pourquoi ne disaient-ils rien ? Pourquoi ne m'insultaient-ils pas ? Pourquoi aucune réaction de leur part ? C'était ce qu'il y avait de pire. Enfin si, Jimin avait réagi, mais ce n'était pas une réaction très prononcée.

Puis, tout bascula. J'étais sur le point de m'effondrer quand un corps me heurta. Deux bras vinrent s'enrouler autour de ma tête. Celle-ci fut collée à celle de quelqu'un d'autre, tempe contre tempe. Deux mains se posèrent dans mes cheveux. Et ce corps bien vivant me serra contre lui comme si l'avenir du monde en dépendait. Il me serra tellement fort qu'il coupa le souffle déjà erratique que j'avais. Sans me contrôler, j'ouvris grand les yeux. Puisque j'avais la tête relevée, je pus enfin voir mes amis, qui me fixaient étrangement. Et je compris très rapidement qui était en train de tenter une fusion entre nos deux corps. Taehyung.

- Pleure pas ! Hurla-t-il. S'il te plaît Yoongi, arrête de pleurer. J'ai tellement mal quand tu pleures, c'est insupportable.

Sur sa dernière phrase, sa voix était presque suppliante, douloureuse. Il me serra encore plus fort contre lui, comme si c'était possible. Moi, je n'étais qu'un pantin qui se laissait faire. S'il n'avait pas été là, je serais déjà au sol, immobile, vide de vie. Mais il était là, et j'étais encore debout grâce à lui. Il pleurait lui aussi, ce qui me serra le coeur. Non Taehyung, tu n'as pas le droit de pleurer à cause de moi. Je suis tellement désolé. Pardonne-moi, ce n'était pas ce que je voulais.

Mes yeux toujours dirigés vers les autres, je me reconnectai enfin un peu à la réalité. A autre chose que ce corps brûlant qui essayait de communiquer avec moi pour me réveiller. Namjoon me souriait tristement, mais ses yeux brillaient d'un je ne sais quoi que je ne pus identifier. Ils avaient tous le regard fixé sur mon visage. Que pensaient-ils de moi en cet instant ? J'aurais tant voulu être dans leurs pensées rien qu'une seconde. Tae reprit la parole, la voix cassée par les sanglots.

- Nous aussi on t'aime tu sais !

Au moment où il prononça ces mots, mon coeur eut une réaction étrange, mais je ne me sentis pas mal pour ça. C'était plutôt une délivrance. Mon regard croisa celui de Seokjin. Il hocha doucement la tête pour me faire comprendre qu'il était d'accord avec les paroles dites à l'instant. Il me sourit avec tendresse. Je détaillai rapidement les trois autres. Jimin avait la tête baissée et jouait avec ses mains. Cette vision me fit énormément de mal, j'eus l'impression de le dégoûter. Jungkook respirait la gêne, mais pas de façon négative. Quant à Hoseok ... Il me regardait, bouche grande ouverte, sous le choc. Puis il se rendit compte que mon regard s'était arrêté sur lui. Il ferma la bouche rapidement, pencha la tête sur le côté et sembla réfléchir. Son expression était indéchiffrable, bien qu'il n'y avait pas d'animosité sur ses traits. Avec lenteur, il se leva. Je crus défaillir sur place. Il allait partir. Il était le premier d'entre eux à s'en aller. Combien allaient le suivre ?

A mon plus grand étonnement, c'est vers moi qu'il se dirigea. Délicatement, il ouvrit grand les bras pour nous saisir, Taehyung et moi. Il était placé de mon côté, et put facilement coller sa tête à la mienne. Nous étions maintenant trois corps debouts, enlacés. Avec une infinie douceur, il nous serra contre lui. Sa voix parvint à mes oreilles bourdonnantes.

- Sèche aussi tes larmes Taehyung, il n'aime pas te voir pleurer.

Aussi surprenant que ça puisse paraître, je sentis ses lèvres s'étirer en un sourire réconfortant. Puis il me murmura quelques paroles qui m'étaient personnellement destinées.

- Ne change pas non plus ce que tu es, Min Yoongi, tu es un homme formidable.

Il baissa légèrement la tête pour la poser dans mon cou. Il sursauta légèrement et je compris pourquoi quand d'autres mains se posèrent sur moi, sur lui, sur Tae. Ils nous avaient tous rejoints pour une etreinte collective. Mon esprit sombra à ce moment-là, certainement. Je ne savais plus où j'étais, je ne savais plus qui j'étais. Je savais juste que j'aimais ces six petits gars qui partageaient ma vie et qui me portaient. Sans eux, je ne serais qu'une coquille vide. Mes sanglots calmés et mon esprit retrouvé, je les remerciai d'un murmure. Je me sentais toujours sale, c'était indéniable, mais j'avais l'impression d'être au moins en partie accepté. Finalement, je repoussai doucement mes amis, commençant à étouffer. Et puis je n'aimais pas spécialement le contact physique, il fallait dire.

Je sentis qu'ils avaient envie de me poser des questions, de discuter, mais je les arrêtai très rapidement en leur indiquant que je devais aller dormir. Ce que je fis sans demander mon reste. Étonnement, aucun d'eux ne me suivit, pas même Taehyung. Ou Hoseok. Tant mieux, du reste.

Je plongeai sous mes draps avec délectation. Ils étaient frais, et ça me fit un bien fou. Mon corps était encore endolori d'avoir été aussi tendu. A bien y repenser, j'en avais un peu trop fait, non ? Je n'avais pas un peu exagéré ? Je n'avais pas l'impression, mais peut-être que les autres si. Petit, on m'avait toujours appris que l'homosexualité était quelque chose d'affreux et que seuls les démons punis sur terre étaient homosexuels. Étais-je réellement un de ces démons réincarnés ? Je n'en avais pas du tout l'impression. Je m'endormis très rapidement. Mais près d'une heure après m'être éclipsé du salon, Seokjin me réveilla à moitié quand il vint se coucher. Il n'alluma pourtant pas la lumière et ne fit pas trop de bruit, mais j'avais un sommeil trop léger pour ne pas l'entendre. Quand il fut en pyjama, il s'approcha de moi. Encore à moitié dans le monde des rêves, je ne réagis pas quand il passa sa main dans mes cheveux.

- Tu as été bien courageux ce soir, Yoongi. Passe une bonne nuit.

Il m'avait dit ça dans un murmure doux, comme on pouvait s'y attendre de sa part. Sa main quitta mes cheveux et je l'entendis s'installer dans son propre lit. C'était vrai qu'il venait quasiment toujours me souhaiter bonne nuit quand je me couchais avant lui, faisant toujours attention de ne pas me réveiller. Parfois, je ne dormais pas et je lui répondais, parfois j'étais trop fatigué pour le faire, et certaines fois je dormais complètement. Je souris avant de m'endormir à nouveau.

Ma nuit prit une tournure moins plaisante quand je me réveillai à cause d'un bond fait par mon coeur. J'avais fait un cauchemar. Dans lequel mes amis me rejettaient. J'avais pris des insultes, des coups, et pire encore. Ils ne voulaient plus ni vivre ni travailler avec moi. J'avais l'impression que ma cage thoracique tentait de se tordre dans tous les sens, j'avais mal. C'était l'effet de cauchemars un peu trop réalistes. Je n'en faisais pas souvent, mais quand c'était le cas, mon corps les vivait visiblement à fond. Je tentai pendant plusieurs minutes de calmer cette douleur dans ma poitrine et cette respiration sifflante, mais je peinais visiblement à me maîtriser.

Malgré tout, j'avais peur que ce rêve devienne réalité au lever du soleil. Avais-je rêvé leurs paroles et leurs câlins ? Avaient-ils joué la comédie ? Je n'avais jamais vraiment discuté de ce sujet avec eux, je ne savais pas comment ils voyaient l'homosexualité. Tout ce que je savais, c'était que ce pays n'acceptait pas ce genre de différence, et qu'on me l'avait répété des milliers de fois. Lorsque je me calmai enfin, une seule et unique pensée occupait mon esprit.

J'étais un déchet.

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Et voilà pour le quatrième chapitre. J'espère qu'il vous aura plu. Maintenant que tout le monde est au courant, l'histoire va pouvoir avancer un peu plus !

A la semaine prochaine !

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