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Chapitre 1
« Bonjour les robes, bonjour le maquillage. »

Habituellement, je passe mes journées, ici, sur le bord de l'eau, derrière chez moi à écouter le chant des mésanges et à observer le coucher du soleil. Cela n'est donc pas surprenant si je vous dis que j'y suis encore.

📩 Alee Pearson
Reçu à 18:31
« Fais-toi jolie, je viens te chercher dans une heure. »

Une fille intelligente qui sous-estime grandement sa capacité de réussir. Elle excelle dans l'art de séduire, tout le contraire de la humble personne que je suis. Un regard perçant légèrement bleuté accompagné d'une chevelure doré, immanquablement le type de jeune femme ayant le physique d'une mannequine hors-pair à l'affiche sur les magazines érotiques. Ses raisonnements immoraux m'obligent parfois à rouler des yeux, mais j'y vois en elle la capacité d'imaginer l'irréaliste. Malgré nos différences imminentes, Alee est ma meilleure amie. Je lui réponds sagement que je ferai mon possible.

Je danse entre les conifères qui m'attendries, déposant sur chacun d'eux une parcelle de ma joie. Sautillant sur les dalles de pierre telle une enfant immature, j'atteins finalement le seuil. J'entrevois ma chambre au bout du couloir blanc vidé de son charme d'autrefois. J'y cours injustement. J'ouvre d'un geste magistrale ma penderie touchant du bout des doigts les différents tissus. Je m'arrête sur cette robe bleue proprement fade. Je l'enfile maladroitement tout en me contemplant. Elle atteint facilement le dessous de mes genoux tel que je l'espérais, mais dénude mes avant-bras. Cette superficialité m'étouffe. Je n'ai jamais apprécié porter des robes pour cette raison. Je ne suis pas ce mensonge. Je souris ou du moins j'essaie tout en faisant un tour sur moi-même. Je soupire. Ma respiration s'accélère, l'air salit mes pensées. J'accours me réfugier dans la salle de bain où j'asperge faiblement mon image fiévreuse.

Une soirée, une seule. Déplorais-je nerveusement.

Je saisis discrètement la bouteille en verre camouflée sous les serviettes délayées. Un parfum délectable légèrement corsé que j'avais décelé dans une boutique lors d'un voyage scolaire. Toutes mes amies coloraient leurs jolies visages de maquillage tandis que moi j'en étais interdite.

« Pas de rouge, pas de fard. Réfléchis-y Mila, tu n'es pas une prostitué. » Me répétait plus d'une fois ma mère.

C'est aussi l'une des raisons pourquoi Alee n'a jamais pu mettre les pieds dans cette maison et pour laquelle je n'ai jamais pu passer une nuit chez elle comme le feraient normalement deux inséparables.

« ...elle n'est pas une vraie amie et elle ne le saura jamais. Fait preuve d'un peu de jugement. »

Mon alcoolique de mère m'enferme entre le désespoir et la jalousie. Je suis née une fille, je suis née plus belle qu'elle. À la longue, j'ai réalisé que cette famille était loin d'être le reflet de ma personnalité. Ils ont créé ce qu'ils ont toujours rêvé d'être. En dépit de cette hypocrisie, j'ai toujours fait preuve d'humilité envers eux. Peut-être qu'un jour, je me débarrasserai de cette cage qui m'entoure, qui sait, peut-être même que je finirai par m'accepter tel que je suis.

Comme à l'habitude, je laisse mes cheveux courir sur mes épaules en plaçant inconsciemment une mèche derrière mon oreille. Je m'étudie une dernière fois en m'imaginant là-bas, différente de tous ceux qui s'y amuseront. Tout va bien aller, ou du moins je l'espère. Je nage jusqu'à la pièce adjacente, ma chambre ordonnée. Je glisse de sous mon lit une boîte qui, dissimulée sous des vêtements, prend la poussière depuis plusieurs années. Une paire de chaussures blanches comme neige sans talon, sans motifs disparates. C'est Blair, ma tante, qui me les avait offertes afin de greffer un peu de féminité à ma garde-robe. Je les retire doucement de leur nid, un sourire en coin. Elles sont toujours aussi magnifiques que dans mes souvenirs. Est-ce acceptable de porter une chose aussi pur et précieuse pour un événement comme celui-ci?

Mila, tu réfléchis trop. Me fais-je remarquer tout en fermant les yeux.

J'insère un pied, puis l'autre. Mes mains tremblent. Un bruit se fait entendre depuis l'entrée, quelqu'un toque à la porte. Sans que je ne puisse placer un mot, Alee entre sans gêne. Elle ne me regarde pas, visiblement hâtée, excitée.

Je t'avertis, Tommy a invité au moins une centaine de personne. Tes dix-huit ans seront gravés dans ta mémoire pour le restant de ta vie, je te le promets. Annonce-t-elle en mettant l'emphase sur les quatre derniers mots.

et si tu voyais l'endroit, c'est minuscule. Sincèrement, je ne sais pas comment... s'interrompt Alee lorsqu'elle pose son regard sur moi.

Elle arque un sourcil tout en m'analysant d'haut en bas.

Dis-moi que c'est une blague, Mi'. Tu crois que je vais te laisser porter ça pour cette soirée mémorable? Il en est hors de question. Sourit-elle en posant sous mon nez un sac empli de robes et de maquillages.

Mais... Marmonnais-je.

Alee m'entraine dans ma chambre et verrouille la porte. Elle se dirige vers le fameux sac qui ne tarde à exploser.

N'est-elle pas remarquablement splendide? Lâche-t-elle tout en criant devant la robe qu'elle extirpe brusquement du sac décousu.

Elle est d'une couleur clair tirant vers le crème et je parie qu'elle ne s'arrête qu'à mi-chemin entre mes hanches et mes cuisses. Cette robe est belle, mais je ne peux tout simplement pas la porter.

Tu ne crois pas que c'est un peu trop... Commençais-je sans finir.

Séduisant, sexy. Justement, c'est exactement ce qu'il te faut. C'est ta soirée, Mila. Un peu de changement ne te fera aucun mal. Poursuit-elle sérieusement.

J'ai presque l'impression de me déguiser lorsqu'Alee me convainc de l'enfiler. Je sens le rouge me monter aux joues quand j'ouvre mes yeux pour voir sa réaction.

Il ne reste qu'à maquiller ce joli visage. Dit-elle en s'applaudissant.

[...]

Plus d'une demi-heure plus tard, elle m'oblige à garder les yeux clos. J'ai peur. Je sais d'avance que la fille que je fixerai ne sera pas moi. Au du moins, elle ne me ressemblera pas.

J'ai presque terminé. Déclare Alee, concentrée à étendre, je suppose, du rouge-à-lèvres sur celles-ci.

Sans sa permission, je bas des cils et dévisage subtilement le résultat. J'avoue ne pas savoir si je n'aime pas ou si c'est juste parce que j'en suis impressionnée. Mes paupières ont pris une teinte rosée et la courbe de mon œil est tracée d'une fine ligne noire. Mes lèvres sont peintes d'un rouge si naturel, si parfait. Je calcule l'ampleur de ce que je m'apprête à dire.

C'est surprenant, Alee, merci. La félicitais-je.

Ce n'est pas simplement surprenant, Mi'. Tu es sublime. Renchérit-elle avec sincérité.

Je souris en guise de réponse. Le miroir affiche une tout autre image de moi, une femme intimidante. Rares sont les fois où j'ai ressemblé à cela, une belle femme.

Tu choisis laquelle? Me sort-elle de mes pensées.

Je pivote pour comprendre de quoi il s'agit. À mes pieds m'attendent deux paires d'escarpins, toutes deux ayant le potentiel de s'agencer avec ma robe. J'attrape sans réfléchir celle qui me paraît la plus abordable. Rien de très extravagant, la paire que j'ai choisie, étant de la même couleur que ce que je porte plus haut, est neutre et feutrée.

Prête ou pas, on y va. Dit Alee haut et fort, alertant mes parents de sa présence.

Elle est resplendissante dans sa robe blanche avantageant sa taille. Je la regarde sourire de ses dents parfaitement alignées, balançant sa chevelure jaune derrière elle. Elle a l'air si confiante que j'en reçois des frissons. Je prends une grande respiration.

En espérant que tout ira bien. Chuchotais-je dans le vent.

qu'est-ce que vous avez pensé du premier chapitre? j'ai du faire
quelques modifications, mais je le trouve bien. des idées pour la suite?

si tu es Mila, tu comprendras.
—phy

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