1.
❛ Why do I care what people say ? ❜
Splash.
Une brique de lait qui tombe, des rires moqueurs et des bousculades.
Jisung soupire, les fesses sur le sol de sa classe et trempé de la tête aux pieds. Il va encore se faire engueuler parce qu'il sera rentré avec son uniforme abîmé et puant. Ses camarades le fixent de leurs yeux ronds et vides, personne ne lève le petit doigt lorsqu'il glisse sur le liquide en se levant en grimaçant. Ils sont tous là, assis sur leurs chaises, à éviter son regard ou au contraire, à l'accabler de leur mesquinerie moqueuse. Ses agresseurs sont assis sur son bureau et jouent avec ses affaires de cours, continuant encore et encore de le provoquer.
Tout le monde sait que Han Jisung n'est pas du genre à se laisser faire trop longtemps et que quand il tape, il fait mal. Mais c'est amusant de le voir se mettre dans tous ses états pour « deux-trois plaisanteries ». Encore plus lorsque c'est lui qui finit toujours dans le bureau de leur professeur principal. Personne ne prendra parti pour quelqu'un comme lui.
— Pourquoi tu fais cette tête Hannie ? J'croyais que ça te branchait d'être aspergé par un mec, lui lance Kim Seungmin d'une voix faussement innocente en haussant les épaules.
— Rends-moi ça, répond Jisung en tendant la main vers son sac de cours que Hwang Hyunjin et lui fouillent depuis plusieurs minutes.
— Fais gaffe qu'il te touche pas Hyunjin, on sait pas où il traîne. Il a peut-être le sida, chuchote le plus jeune d'entre eux, faisant ricaner le dénommé.
Jisung mord l'intérieur de sa joue. Il se contient, ça se voit. Il a l'habitude de prendre sur lui, c'est le fils du commissaire après tout. Il a les attentes du monde sur les épaules et les regards des citoyens sur le dos.
Personne lui dit rien à Han Jisung quand il déconne mais ils n'en pensent pas moins. Et ça n'empêche pas certains de venir l'emmerder tout en sachant qu'ils seront protégés par papa-maman si ça tourne au vinaigre. Quand on est l'enfant d'une des personnes les plus influentes de la société ou d'un député, on a plus de droits que le simple gamin de prof ou de flic. C'est injuste, mais c'est ça la société de Corée du Sud. Ils les mènent par le bout du nez et ils s'y plient, parce que personne viendra les aider dans leur galère. C'est toujours la faute de ceux qui triment pour gagner leur vie de toute façon.
Surtout quand on est ouvertement gay dans un pays comme le leur. Parce qu'à Han Jisung, tout le monde lui léchait le cul pour son physique, ses notes ou son avantage à ne pas pouvoir finir en garde à vue. Mais ça, c'était avant qu'il dise être ouvert à une relation amoureuse avec un garçon à ses amis. Forcément, ils ont tous vite retournés leurs vestes, ses supers copains. Le reste du lycée avec, parce que bien évidemment, le fils du commissaire Han qui dit être attiré par les hommes, ça fait parler. Et ça attise les mauvais regards, ceux dégoûtés, ceux désolés, ceux qui ne sont pas fatigués d'être purement méchants. Comme ceux de Hwang Hyunjin et Kim Seungmin, ses prétendus anciens amis.
— Allez ta gueule, soupire Jisung en lui arrachant son sac, ça s'chope même pas comme ça, espèce de débile. Ton père t'apprend pas ce genre de choses ?
Seungmin a esquissé un mouvement de recul quand le garçon s'est approché. Il s'en fiche d'un quelconque contact physique lui, il ne veut juste pas que Jisung le frappe. Il ne supporterait pas d'avoir un bleu sur son visage.
Hyunjin se redresse, indigné et serre les poings en fusillant le plus jeune du regard. Parler de son papounet, c'est s'avancer sur un terrain glissant et Jisung le sait. Ça l'énerve, il le déteste. Mais lui non plus n'a pas envie de se faire taper.
— J'comprends pas pourquoi tu t'es pas encore tiré une balle avec le flingue de ton daron, tu rendrais service à tout le monde. Lui le premier.
Son père, c'est un sujet sensible pour Jisung aussi. Et Hyunjin le sait. Mais contrairement à lui, le plus jeune n'a pas peur de la bagarre. Alors c'est sans ménagement qu'il jette son sac pour attraper le col du plus grand en levant le poing, prêt à lui péter les dents. Les gens dans la classe crient, c'est toujours marrant les bagarres sauf quand c'est celui que tout le monde déteste qui gagne.
Lâche comme il est, Seungmin s'est barré, laissant son ami se débrouiller pour aller chercher un professeur. « Y'a Jisung qui tape encore sur quelqu'un ! »
Enfin, il lui aurait salement refait le portrait à ce connard si son bras n'avait pas été saisit par une forte poigne.
Dans le feu de l'action, Jisung est prêt à lui en mettre une aussi, à celui qui vient contrecarrer son plan, mais il se fige quand il se retourne et ses épaules se détendent. C'est pourtant pas l'envie qui l'en démenge mais Han Jisung, il pourra jamais frapper Lee Minho. Pas parce que c'est le fils du proviseur, non, après tout il s'est pas gêné pour péter le nez à celui du maire.
Lee Minho, c'est bien l'une des rares personnes qu'il défigurera jamais. Parce que c'est le seul qui ne lui tend pas la main par pitié dans ce bahut de merde. Jisung est borné et il l'envoie souvent bouler avec quelques mauvais regards, mais derrière sa carapace de gros dur, il lui est reconnaissant de ne pas lui marcher dessus comme ces autres connards égoïstes qui ne voient pas plus loin que le bout de leur nez.
Minho ne dit rien, il se contente juste de le regarder de ses yeux de biches avant de le tirer hors de la salle de classe. Tout le monde l'a vu faire, tout le monde se pose des questions sur lui aussi. Minho, c'est le gars cool du lycée, un terminal que beaucoup apprécient. Il a débarqué du jour au lendemain dans la classe de Jisung pour arrêter une bagarre et défendre le plus jeune... Mais il doit juste avoir envie de jouer le rôle du grand frère, même avec les plus démunis. C'est logique, on dit qu'il a bon cœur.
Jisung est emmené jusqu'à l'extérieur, à l'arrière du bâtiment, là où les élèves dealent et se fument des paquets de clopes en secret. Ça pue la merde quand le plus vieux des deux lâche l'autre contre le mur. Il pince les lèvres et se gratte l'arrière de la tête, il est un peu gêné. Jisung n'a pas sa langue dans sa poche et il se démène toujours pour essayer de l'énerver, même si ça ne marche jamais. Minho est gentil, il parle pas beaucoup mais il en jette avec son charisme et son honnêteté. Il est beau aussi, extrêmement beau mais ça, contrairement à ses groupies, Jisung se garde de le laisser paraître.
— J'voulais le cogner. Pourquoi tu t'es pointé ? Grogne le garçon en ébouriffant ses cheveux bruns toujours aussi trempés de lait.
— Ça va t'attirer que des emmerdes Jisung, soupire Minho en enfonçant ses mains dans les poches de son uniforme.
— J'suis pas à ça près, il balaye sa remarque d'un geste de la main et détourne le regard.
Mine de rien, il est intimidant Lee Minho. Bien plus que son cadet lorsque celui-ci s'énerve. Ses yeux sombres transpercent Jisung, ils essaient de lire ce qui se trame dans sa tête, de voir sous les coutures. A chaque fois, ça met le brunet complètement à nu et ça l'agace parce que même après tout ce temps, il sait toujours pas ce que Minho lui veut.
— Tu préfères pas les éviter ?
— Tu m'excuseras Monsieur Parfait mais contrairement à toi, y'en a ici qui doivent se battre pour survivre dans c'monde de merde.
— Et si l'asile est offert à Monsieur Grognon, est-ce qu'il arrêtera de vouloir jouer au jeu de la taupe avec tout ce qui respire ?
Jisung relève les yeux vers lui et soupire de nouveau, appuyant son dos contre le mur derrière lui. Ça schlingue. Minho se pose à ses côtés et y'a un moment de silence durant lequel les deux garçons se fixent, vidés de mots. Ça aussi, c'est un truc typique du plus vieux. Il le fait frissonner et le tire vers le haut rien qu'avec un petit sourire comme celui qu'il a aux lèvres à ce moment-là. Il fait même battre son cœur d'une drôle de manière et c'est pas comme ces fois où il s'emballe de rage. Non, Lee Minho, il fait divinement s'affoler le palpitant de Han Jisung. Et le garçon n'est pas sûr de savoir si ça lui plaît ou non.
— Alors primo, c'est faux, j'ai pas envie de taper tout le monde, il lève les yeux au ciel. Et deuzio, tu sais pertinemment que l'asile sera très vite désasilé.
Minho pouffe légèrement et se tourne pour faire face au profil de Jisung. Y'a ses cheveux noirs qui lui tombent devant les yeux, sa respiration un peu trop lourde qui résonne dans le petit préau et ses longs cils qui papillonnent constamment. Jisung ne le regarde pas, il sent sa peau qui chauffe d'elle-même. Bizarrement, les sacs poubelles devant eux sont bien plus intéressants.
— Je parlerais à mon père.
— Mmh, rappelle-moi c'que ça a donné la dernière fois ? Non parce que mis à part mes vêtements de sports noyés à la javel et un début de collection de tags sur mon casier, j'ai pas trouvé que ça avait changé plus que ça depuis.
Minho soupire et se tourne de nouveau.
— Ça m'énerve.
— J'vois pas pourquoi.
— Jisung...
— Tu devrais t'occuper de ton bac Minho, pas de moi. Je gère.
— Tu gères rien du tout.
Jisung claque sa langue contre son palais et soupire bruyamment à son tour.
Ouais, il gère rien du tout. Ça fait des mois qu'il est comme ça et malgré toutes les démarches qu'il a entreprise, en dépit même des interventions du fils du proviseur, la situation est restée la même. Jisung dit qu'il gère, il se laisse pas marcher sur les pieds. Mais la vérité c'est qu'il commence à être fatigué d'être constamment sur ses gardes, de se faire réprimander par les professeurs et ses parents. Jisung, il en a marre de devoir passer son temps à s'occuper de gamins qui ne trouvent rien d'autre à faire que de s'amuser du harcèlement alors qu'il pourrait se concentrer sur ses études. Jisung a toujours aimé l'école mais dernièrement, c'est devenu une vraie plaie.
Il est épuisé, complètement lessivé par toute cette énergie volée. Il voudrait exploser, tout envoyer valser, faire trembler la terre. Sa différence au sein des autres le tue à petit feu et ça, il ne peut pas l'accepter. Le pire, c'est qu'il sait qu'il ne peut pas se le permettre et qu'il se force à subir, à aller à l'encontre de toutes ses convictions. Il est perdu dans ce tunnel bien trop long, bien trop sombre qu'est sa vie depuis plusieurs mois et plus les jours défilent, plus la lumière qui se trouve au bout s'éloigne. Jisung, il en a marre d'avancer à tâtons dans l'obscurité.
La sonnerie retentit à l'intérieur du bâtiment, ça fait trembler les tympans des deux lycéens. Ils doivent retourner en cours, chacun de leur côté et l'un comme l'autre n'en a aucune envie. Jisung a cours d'anglais et il adore l'anglais. Sauf quand c'est avec Lee Felix, le super pote de Hyunjin, que le prof l'a mis en binôme. Lui aussi, il est con comme un manche à balai. Jisung lui a déjà poignardé la main avec son stylo.
Minho râle quelque chose d'inaudible, lui non plus n'a pas envie de retourner en classe. La terminale, ça craint de ouf, comme il dit souvent. Mais c'est le fils du chef du bahut, faut qu'il se tienne à carreaux et qu'il montre l'exemple.
— J'ai aucune envie d'y aller, marmonne le brunet en grimaçant. J'suis dégueulasse en plus.
Minho se mord la lèvre, il a le cerveau à deux doigts de perdre un neurone. Ça se voit à ses sourcils froncés et ses traits crispés. C'est la guerre dans sa tête, il est tiraillé entre le bien et le mal. Mais il finira par choisir la première option. Parce que Lee Minho, c'est celui que tout le monde regarde pour avoir un repère.
Le noiraud s'approche de son cadet et pose ses longs doigts sur son épaule pour enlever une feuille d'arbre qui s'est collée au lait. Puis son regard croise celui épuisé de Jisung. Il voit les nuages de la défaite, de résignation, d'agacement et de peine. Ouais, il cache bien son jeu le fils du commissaire. Il sent son cœur se serrer dans sa poitrine parce que y'a pas si longtemps que ça, les orbes de Han Jisung brillaient de rayons de de soleil.
— Je te passe des vêtements propres et t'y retournes pas.
— Hein ? Il écarquille les yeux en grand, pas certain d'avoir bien entendu.
Minho soupire et lui attrape la main qu'il serre. Fort, très fort. Il lui sourit de son fameux sourire qui plisse ses yeux en demi-lunes, ce fameux sourire qui emballe ce truc qui bat un peu trop fort dans la poitrine de Jisung.
— Je me tire d'ici et je t'emmène avec moi. Même s'il sera pas bien long, je t'offre l'asile.
Y'a des jours où Lee Minho est tenté par le mal. Des jours où Han Jisung lâche la prise.
Et ce cocktail explosif ouvre un portail sur un monde bien plus rassurant que le leur.
;『• • • ✎ nda • • •』;
mmmh ça c'était pas prévu... j'adore me mettre dans des draps pareil quand c'est pas le moment apparemment
c'est pas comme si j'avais les rattrapages de mes partiels la semaine pro non-
bien bien, j'espère que ça vous a plu sinon :) c'est un peu sans prise de tête, sans plan vaguement écrit dans un coin, c'est chill et jcrois que ça se voit à la manière dont c'est écrit ptdrrrr
brf jvous souhaite une bonne journée (ou nuit hihi), hydratez-vous et prenez soin de vous
<3
sunny~
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