5 | Ton nom ?
* écrit le 06.09.21
Little Nightmares II
If Crossblood
Chapitre 5:
Ton nom?
La télévision grésillait bruyamment, affichant des particules noires et grises. La faible lumière qu'il dégageait pu émettre un peu de clarté dans la pièce sombre. Ses mains sur ses oreilles, la fillette tentait de couvrir son ouïe, une tâche quasiment difficile pour elle. Quelque chose ne tournait pas rond. Certes, dans Pale City, tout n'était pas clair. Mais ce signal là ? C'était autre chose. Au fond, Nueve croyait que c'était un message. Lequel ? Aucune idée. Et plus ce boucan continuait, plus sa tête allait exploser.
Difficilement, elle entrouvrit ses yeux avec une grimace. La télévision n'était même pas branchée à la prise ! De plus, l'écran était de travers et des fissures étaient également visibles sur les cotés. Comment c'était possible qu'il fonctionne ? Nueve regarda de l'autre coté de la pièce. Était-ce l'antenne qui agissait ? Non, elle était loin et tordue. Inquiète et nerveuse, la petite fille se fit violence pour se rapprocher de la télévision, tendant sa main sur l'écran. Son coeur tambourinait brutalement contre sa cage thoracique et sa respiration s'accélérait, l'adrénaline lui provoquait plus de sensation qui lui était encore jusqu'ici inconnu. Ses iris noisettes reflétaient la couleur sombre et non-linéaire de cette machine carrée. Une fois sa main droite dessus, la fillette envoya sa deuxième main dessus.
Ses oreilles suppliaient à ce que ce grésillement cesse. Malgré tout, Nueve continuait de admirer l'écran. Elle plissa ses yeux, attentive et intriguée. C'était flou. Mais on aurait dit une silhouette. Assise. Recroquevillée.
— ...Ohé ? Dit-elle après hésitation.
Les dessins changèrent. À présent, on aurait dit des vagues aux deux extrémités, se rejoignant au centre, comme pour, dissimuler ce qu'elle arrivait à percevoir. La brune s'humecta les lèvres et s'élança de nouveau, cette fois-ci en haussant sa voix, espérant qu'on l'entende.
— Hé ! Y a quelqu'un ? Pas vrai ?
Sans réponse. La fillette se résigna puis soupira, penchant sa tête vers le bas, ses mèches suivaient sa direction, suspendant dans le vide. Peinée, la brune soupirait. Et dire qu'elle croyait qu'un miracle pourrait se produire. Elle rêvait trop ! Parler à une télévision, pour espérer croire que quelqu'un y était enfermé ? Dans quel délire la brune s'imaginait ? Avec une moue triste, Nueve se détacha de l'écran, remit ses mains à ses oreilles à cause du bruit infernal, s'éloignait de la pièce au plus vite, afin de ne plus entendre ce foutu son.
Une oreille plus sensible que l'autre, avait saigné. Ses doigts étaient imprégnés de son sang et Nueve soupira une énième fois. Le plancher grinçait sous ses petits pas. La clé bougeait au rythme de ses déplacements, dans son sac à dos, parmi d'autres matériels et provisions. La brune repassait en boucle dans ce couloir, ne s'empêchant pas de se moquer intérieurement des visages hideux des monstres.
Réfléchir dans un coin plus calme était la meilleure solution qui s'offrait à elle. Autrement dit, la chambre. Sur le matelas, contre le coussin, son sac à coté, Nueve fermait ses yeux, tentant de trouver la réponse à sa question qui revenait à « à quoi sert cette clé ? Il n'y a aucune serrure dans le coin ! ». Trop fatigué et stressé, elle s'assoupit. Quelques heures après, des bruits suspicieux la réveillait en sursautant. Flûte, la nuit était tombée ! Nueve pivota sa tête et attrapa son sac, le mettant à son dos. Elle se redressait légèrement, gardant un genou sur le matelas puis s'immobilisa, sa respiration se bloquant.
Dans les couloirs, une faible clarté se dévoilait, avec une ombre se mouvant avec. Les yeux ronds, Nueve restait sur place. Elle attendait que cette personne s'éloigne. Des sueurs froides glissaient le long de son échine et ses battements de coeur ne cessaient de marteler contre sa poitrine. Effrayée qu'on puisse la trouver, elle serrait ses mains, jusqu'à ses phalanges blanchissent. Le plancher grinçait sous le poids de l'inconnu. La fillette fermait ses yeux, paniquée. Le grincement était plus aiguë, sans doute que la personne poussait la porte, se préparant à rentrer dans la chambre.
Nueve le savait pertinemment. Elle devait fuir. Et au plus vite ! Déterminée et à la fois effrayée, la brune rouvrit ses yeux. De suite, elle sentit tout son corps se geler. Son coeur cessa toute action et sa respiration se coupa. Oui, elle ne rêvait pas. Il s'agissait bien du monstre de la supérette. Ce dernier, tout aussi surprit de retrouver la fugitive et voleuse, avait des yeux globuleux. Répugnée, la brune, reprit son courage à deux main s'empressa de lui échapper, tandis que lui, tendait sa main pour l'attraper.
De retour en scène de poursuite, Nueve tomba au sol, courut, glissa sur le plancher pour éviter ses mains dégoûtantes. Haletante, recommençant un marathon – de survie – la fillette ne baissait pas les bras. Elle pouvait entendre ce monstre hideux pousser un râlement glauque et la chasser avec sa lampe à huile. Entre un géant et une naine, qui pouvait remporter ce match ? La brune grinçait des dents et accéléra sa course. Ses poumons étaient en feu. Ses pensées étaient brouillée et sa gorge piquait. Si ce type était de retour, était-ce parce que c'était son habitat ? Elle n'avait aucune idée. Et honnêtement, ce qui l'arrangeait le plus, c'était de sortir d'ici le plus vite possible.
Un grognement plus grave fit grincer des dents la brunette, qui, bien sûr, refusait de jeter un coup d'oeil derrière elle, s'entêtant à gravir des échelons après sa fuite. Elle monta difficilement les marches, espérant le semer. Mauvais choix, puisque la main crasseuse du monstre l'attrapait rien qu'en se penchant. Après tout, il était grand. Lorsque le vendeur rapprochait sa prisonnière de son visage, il entrouvrit sa bouche. Une puanteur sans nom dérangeait l'odorat de Nueve qui grimaçait de plus belle, tout en cogitant dans sa main. Des couinements s'échappaient des barrières de ses lèvres et les larmes montaient à ses yeux. Pas question de mourir ! Elle refusait à ce destin funeste !
S'inspirant des rongeurs, Nueve planta ses dents dans la main du vendeur qui relâchait une plainte audible. Automatiquement, avec la douleur, l'aigri relâcha la fillette, qui tombait lourdement par terre. Difficilement, elle se redressait, ignorant la douleur aux genoux à sa chute puis enjamba le couloir, haletante, surveillant cette fois-ci, ses arrières. Sa queue de cheval traînait derrière elle et apeurée, Nueve craignait que cette fois-ci, il ne lui ferait aucun cadeau. La brunette renifla en regardant de nouveau devant elle, les sourcils froncés. Hors de question de périr ici ! Elle survivrait quoi qu'il advienne !
Le sol se dérobait sous elle. Certes, Nueve avait gagné un peu de temps en lui échappant. Toutefois, ce géant gagnait large en terrain avec son corps. Ses yeux étaient sombres la première fois que la fillette l'avait rencontré. Après qu'elle l'ait mordu, ses conjonctives étaient enflammées et bien rouges. Probablement sous la colère. Il poussait des cris à en glacer le sang. Pas le choix, l'enfant devait impérativement se ranger sur sa gauche, dans une autre pièce. C'était la cuisine. Nueve eut soudain un éclair de génie puis s'empressa de glisser sur le sol, se planquer derrière le mur qui faisait un angle entre la porte et l'entrée. Juste devant elle, une fissure. Accroupit, la brunette s'y rangea puis, se redressait une fois à l'intérieur, serrée, elle faisait un pas chassé, pour être à coté de la faible lumière qui éclaircissait la pénombre.
Dorénavant en sécurité, Nueve put reprendre son souffle et se détendre. Ses muscles se décontractaient, bien que son coeur lui, était encore affolé. Dehors, on pouvait le vent souffler fort, suivit par des tintement, fracas... La fillette se fichait que l'individu foute tout en l'air. Ça lui était bien égal. Elle resterait cachée, jusqu'il parte de cette pièce. En attendant, elle devait sérieusement songer à fuir cet abri, qui n'avait pas duré, comme elle s'en était doutée.
Une fois qu'il fut bien défoulé, en plus d'avoir gueulé, le vendeur partit de la pièce. Par précaution, Nueve attendit le bon moment avant qu'elle ne sorte de sa cachette. Comme elle s'en était doutée par le boucan ; la cuisine était sans dessus dessous. Avec sa petite lampe torche, elle constatait qu'une chaise avait été démolie, des résidus jonchaient le carrelage, avec une casserole, une poêle, des carottes et..
La brune plaqua une main sur sa bouche, horrifiée. Elle voyait des boyaux. Des petits boyaux, des tripes, bien visqueux, imprégnés d'une sauce qui rendait la vue plus déroutante. C'était trop pour elle et la brune se retourna, vomissant par terre. La fillette tremblait. Si elle avait été attrapée, ce monstre l'aurait aussi bouffé ? Des larmes coulaient de ses yeux et elle s'appuyait sur ses genoux, pliée en deux. Ça la rendait malade. À vrai dire, la première fois qu'elle avait vue cette pièce, la brune ne voulait pas vérifier sur ce que contenait les ustensiles de cuisine. À croire qu'elle avait bien fait... même si là, elle le savait à présent.
— Je... je dois partir... vite.. urgh..
Le goût déroutant de la bile qui était sortit de son œsophage persistait. L'enfant retira les restes de sa bouche puis s'éloigna de son vomi. Pâle, elle regardait encore une dernière fois la pièce, avec l'aide de sa lampe torche. Avant de reprendre sa course effrénée, la petite bu vite quelques gorgées de sa bouteille d'eau et le rangea dans son sac, un peu mieux. Nueve inspira un grand coup puis essaya de se calmer. De suite, elle s'éloigna de la cuisine. Vérifiant que le monstre soit pas dans les couloirs, pour le moment, la brunette se déplaça rapidement, recommençant à remonter les marches, pour aller au premier étage.
Une fois hissée vers le haut, le bruit de ses pieds nus faisaient échos dans la pièce. En passant devant une pièce, la fillette sourcilla puis dirigea sa tête en direction d'une grande salle en mauvais état, où se trouvait la télévision. Celle-ci, n'émettait plus aucun son ni image. C'était suspicieux. De toute façon, la brune n'avait pas le temps d'enquêter sur ce détail. Hésitante, elle n'effectua que un pas puis reporta son attention à l'écran, lui adressant la parole. Peut-être bien qu'elle devenait folle. Ou peut-être que inconsciemment, la solitude la rongeait depuis trop longtemps et Nueve ressentait le besoin de parler à vive voix à quelque chose, vivant ou non.
— Pourquoi tu es silencieux ? Tu étais bruyant avec moi tout à l'heure. Remarquait t-elle, presque sur une pointe de critique.
Nueve serrait ses poings, vexée. Elle avait le besoin aussi de se défouler malgré la situation.
— J'en ai marre ! À l'échoppe l'autre jour c'était pareil ! Dehors aussi ! Et là aussi ! Tu joues avec moi, hein ?! J'ai fait quoi de mal ?! Je veux juste survivre ! Je veux vivre !
Son coeur se serrait douloureusement à sa poitrine. Nueve relevait sa tête, brisée et mal, elle portait une main sur sa salopette usée. Ses orbes marrons s'écarquillèrent lorsque l'écran s'illumina subitement, sans le moindre bruit. Deux mains se posaient sur l'écran, noires. Curieuse et inquiète, la fillette rentra dans la pièce. Réduisant sa distance avec la télévision, intimidée, elle pesait le pour et le contre pour toucher une main. Était-ce un piège ? Une voix faible répétait une de sa phrase plus tôt.
« ...vivre... »
Sans avoir aucune idée dans quoi elle allait s'embarquer, la brunette sourit faiblement, posant instantanément ses mains sur les mains noires de l'écran. L'enfant hochait la tête et s'étonna de repérer ensuite un visage noir – une ombre ? -. Alors qu'elle allait dire quelque chose, la petite fille lâcha un cri de surprise, lorsqu'elle sentit qu'on s'accaparait de ses mains avec une violence hors du commun. Tout en se débattant, Nueve craignait à être aspirée dans la télévision.
— NON ! Hurla t-elle, en reculant, entraînant les mains puis le corps de la personne qui voulait l'emporter dans la télé.
Lorsqu'elle ouvrit ses yeux, Nueve lâcha un hoquet de surprise. Premièrement, elle venait de tomber en arrière, sur son postérieur. Deuxièmement, la silhouette de l'individu reprenait des couleurs. Il s'agissait d'un garçon de sa taille. Des cheveux très courts sombres, des yeux en amandes aussi sombres. Lui aussi, était stupéfait. Sa longue veste flottait derrière lui, étant maintenu par un bouton. Puis, le brun tomba sur la fillette. Ses mains étaient posées entre la tête de la brune, qui le dévisageait.
C'était un rêve ? Ou bien un garçon venait de sortir d'une télévision ?
Étudiant attentivement ses moindres réactions, la fillette ne toucha pas un mot. Le garçon se redressait, ahuri, se laissant s'asseoir sur ses genoux, regardant ses mains à l'avant et à l'arrière, tremblant, comme si, il découvrait qu'il avait un véritable aspect humain. Nueve le considérait. Il portait également une chemise usée sous sa veste, un pantalon. On aurait dit un garçon tout à fait normal. Une fois qu'elle se redressait sur les coudes, le brun se crispa puis tourna vivement sa tête, plaçant une main pour cacher son visage d'elle. Confuse, la brune sourcilla.
— ...Euh... qui es-tu... ?
— Ne me regarde pas. Dit-il sèchement.
— Pourquoi ?
— Je ne te répondrais pas.
Sa voix était distante et enrouée. Nueve se rapprocha de lui, à quatre pattes, ce qui fit tressaillir le garçon, l'obligeant à reculer, heurtant la télévision. Il grinçait des dents et fermait ses yeux, mal à l'aise.
— Laisse-moi ! Lui criait-il.
— Pourquoi tu couvres ton visage ? Tu t'es fait mal ? Demanda doucement Nueve en le jaugeant.
— Non ! Et laisse-moi ! Je ne veux voir plus personne !
— Hein ?
Il tremblait. Est-ce que lui aussi, il avait peur ? Nueve se ravisa puis retira son sac, l'ouvrit devant le garçon, qui, l'observait faire, d'un œil ouvert, restant méfiant. Après ce qu'il avait subit, il n'avait plus confiance en qui que ce soit.
— TADAA ! Regarde ! Si tu te mets ça, peut-être que tu ne seras plus gêné ! Lui présenta t-elle avec un sourire chaleureux, lui tendant un masque de papier avec deux trous pour les yeux.
Le brun se raidit.
— Où tu as eu ça ?
— Je l'ai trouvé par hasard, un ruisseau d'eau l'emportait et je le trouvais rigolo. Alors j'ai prit ! Sourit la brune. Je te l'offre!
Un peu ahuri, le garçon tendit sa main pour le prendre. Nueve souleva le masque. L'inconnu fronça des sourcils, s'interrogeant pour ce geste injustifié.
— En échange, je veux ton nom !
— Pour quoi faire ?
— Ton nom ! Insista t-elle, en le regardant toujours avec une moue.
— ...Mono.
— Mono, hein ? Enchanté, moi c'est Nueve ! Tiens, voici ton masque ! Sourit-elle, de suite plus amicale.
Le dénommé Mono attrapa le masque de papier un peu brusquement puis l'enfila. Ses muscles se décontractèrent de suite, ayant l'impression de retrouver peu à peu ses origines. Il regardait la brune qui lui adressait toujours un sourire joyeux, chaleureux. C'était insouciant et à la fois mignon. Contrairement à elle...
Le garçon ferma ses yeux puis inspira un grand coup.
— Bien, pourquoi tu es sortit d'une télé, Mono ? Lui questionna hâtivement Nueve, curieuse.
— Je... euh...
Hésitant, il la regardait, incrédule. Il n'était pas convaincu qu'il pouvait lui faire entièrement confiance. Après tout, on l'avait trahi. On l'avait jeté dans les abysses, seul, l'obligeant à affronter des horreurs sans nom. Il était seul, personne ne pouvait le sortir de cet enfer. Lui, qui avait tout donné pour une amie, pour au final, qu'elle l'abandonne lâchement, sans lui dire quoi que ce soit, gardant un visage indifférent.
Cette fille qui l'avait sortit des ténèbres, pouvait tout à fait être du même tempérament de Six. Mono la dévisageait, rancunier et le coeur brisé après cette terrible épreuve. Il lui fallait du temps pour s'en remettre.. mais aussi, le garçon désirait retrouver cette fille qui l'avait laissé derrière. Tous deux devaient s'entretenir.
Sans réponse, ils furent tous deux interrompus par un grognement lourd. Le vendeur se trouvait désormais à l'embrasure de la porte, son corps, penché en avant, fixant les deux enfants. Lentement, un large sourire s'identifiait sur son visage, son double menton prononcé, bien visible. La brune sursauta puis virevolta, son sourire, s'effaçait d'un clin d'oeil. Elle tendit son bras gauche, comme pour protéger le garçon au masque de papier. D'une voix plus grave et fébrile, elle lui prévint :
— J'espère que tu sais courir Mono.. avec lui, il est fou...
— Le monde et les personnes sont déjà fous. Lui interrompit Mono en se redressant avec elle. Tu sais où on doit aller ?
— Oui. Je peux coopérer avec toi ? Demanda t-elle sans le regarder, ses yeux, ne quittant pas le monstre rentrer dans la pièce.
— Le temps qu'on sorte, oui.
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