3 | Pause
*Ecrit le 25.06.21
Little Nightmares II
If Crossblood
Chapitre 3:
Pause
Haletante, les poumons en feu, la gorge asséchée, les yeux rouges et les pupilles dilatées, les mèches flottant derrière elle en suivant difficilement la cadence de sa course, la fillette courait pour sa survie. Ce géant l'avait aperçu et la chassait. Ses pas, faisaient vibrer le sol, à cause son poids. Les pieds de l'enfant se dérobaient du carrelage et elle hoqueta, refusant d'abandonner de si tôt. Elle se mit à grincer des dents, ne se laissait pas se décourager.
On aurait dit que Nueve se trouvait dans une fichue prison. L'unique moyen de survivre, était la fuite. Comment une enfant pouvait se mesurer à un monstre, aigrie, difforme et était gigantesque par rapport à elle ? Se concentrant dans sa fuite, la brune ignorait les gouttes de sueurs qui coulaient sur son visage. Si seulement quelque chose pouvait se manifester ! Ne serait-ce pour lui accorder un peu de temps pour semer ce cauchemar !
Faute d'inattention, ses pieds nus s'échouèrent sur les grains de riz éparpillés sur le sol. La brune retenait ses gémissements en se mordant les lèvres inférieures, les yeux fermés. Cette fois-ci, elle avait perdue de l'avance. Elle avait ralentit. C'était foutu d'avance pour elle. Inutile de se retourner, qu'il était déjà évident que le commerçant s'était penché en avant, prêt à l'attraper. Nueve baissa sa tête. La défaite obnubilait ses pensées désormais.
Cling ! Un drôle de son arrêta tout et attira l'attention du monstre, qui, pivota sa tête vers la source. En direction de l'entrée, vers les caisses enregistreuses, le tiroir-monnaie était ouvert, l'argent à découvert. La bobine papier avait sortit du capot, le règlement facturé. Le géant émet un grognement et se hâte pour s'y rendre. Il pousse le tiroir pour cacher le reste et retire le papier. Il lit le contenu. Profitant de ce petit miracle pour vite se cacher, Nueve se plaça derrière un produit d'entretien ménager. Haletante, tremblante, elle essaya d'observer le soit-disant humain depuis sa cachette. Surprise, la fillette discerna un drôle de petit bonhomme descendre de la caisse derrière l'individu. Il avait des pieds, des bras et mains... plus petit qu'elle, mais la peau était grisâtre et était nu. Sur la tête, un long chapeau conique fendillée, cachant les yeux ; autrement dit un nome.
Facile de faire le lien. Cette petite créature l'avait sauvé d'une mort certaine. Rapide, le petit nome courut en direction du rayon opposé des produits ménagers. Le vendeur l'aperçut quand il levait ses yeux du papier. Il plissa ses yeux, actionna le mécanisme de son cutter pour faire sortir la lame. Hâtivement, il écarta sa jambe arrière, prit de l'élan avec son bras et jeta son cutter. Sa cible a été touchée et il tomba à terre. Visiblement encore vivant, le commerçant se déplaça, le souffle rauque, ses pas, faisant échos dans sa supérette. Nueve avait plaqué ses mains sur sa bouche, évitant d'émettre un son, sous le choc. Depuis ses iris, elle visionnait ce monstre retirer le cutter du pauvre nome, pour le poignarder à plusieurs reprises, s'assurant de bien le tuer.
Du sang giclait. Son sauveur s'était fait assassiné. Il ne gigotait plus et ne bougeait plus, inerte. Sous lui, un flot rouge métallique. Le tueur aigrit se releva, agita sa tête et se déporta sur sa droite, la recherchant sûrement. Une fois éloigné, Nueve décolla sa main de sa bouche, haletante. Son coeur se serrait en revoyant le corps du nome pas loin d'elle. Retenant difficilement ses larmes, la brune le remercia et s'excusa dans sa tête et s'efforça de quitter sa cachette. Maintenant, l'enfant savait à qui elle avait affaire. La brunette avança et se fia aux bruits. Les pas, la respiration du monstre. C'était un peu plus compliqué de se focaliser qu'à cela, en dépit de ses douleurs articulaires, aux battements de son coeur et au stress qui l'envahissait.
Mais elle n'avait pas le choix.
Sur ses gardes, la fillette de neuf ans marcha. Cela ne faisait que quelques heures qu'elle était ici. Pourtant, ça lui semblait être une éternité. Sans doute avec la peur... Pour économiser ses forces, elle évitait de courir. Après avoir contourné plusieurs rayons, elle se crispa suite à un bruit suspicieux et s'accroupissait, restant derrière plusieurs barquettes de fruits pourris juxtaposés. Elle discerna au bout, le monstre, remontant les escaliers métallisés, qui grincèrent sous son poids.
— On va éviter d'aller en haut. Souffla t-elle à elle-même avec une grimace inquiète.
Elle jeta un coup d'oeil derrière elle. La porte d'entrée était fermée. Et les fenêtres ouvertes étaient situées en hauteur. Autrement dit, impossible de franchir par là, s'il n'y avait rien à escalader à proximité. Les caisses étaient trop éloignées. Il n'y avait réellement aucune issue de secours ? Nueve baissa ses yeux et regarda ses mains rouges. Une ampoule s'était formée sur la paume de sa main. Et ses ongles étaient rongés, puisqu'elle était trop stressée. Enfin, à vrai dire, elle avait toujours fait ça depuis toute petite..
A court de solution, la brune ferma ses yeux, désemparée. Elle se remémora d'un de ses amis, qui était accro aux énigmes. Elle se rappelait très bien écouter ses vantes avec les autres. S'il avait survécu lui, qu'aurait-il fait ? Il se serait très bien débrouillé. Nueve soupira et releva sa tête. Tant pis si c'était risqué. Il fallait le faire.
Se redressant, déterminée, Nueve s'empressa d'aller vers le rayon de bricolage. Elle escalada l'étagère. Heureusement, les écarts entre les trous qu'il y avait sur le tube acier perforé carré n'étaient pas grande. Cela permettait à la fillette de monter, bien qu'avoir les doigts bien serrés et se hisser vers le haut avec son corps, n'était pas une mince affaire. Heureusement qu'elle était légère et souple ! Une fois avoir atteint le niveau qu'elle souhaitait, l'enfant se stabilisa et s'entreprit à déchirer un emballage. Dedans, une corde extensible verte, avec un crochet au bout. La brunette poussa l'ensemble volontairement dans le vide. Heureusement, le bruit n'avait pas l'air d'avoir été haut en décibel pour avoir alerté le monstre en haut.
Prudente, l'enfant descendit par le tube carré. Estimant que le sol n'était plus trop loin, elle lâcha prise et tomba. Ses pieds brûlèrent avec l'impact et son corps vacilla un peu. Se reprenant, la petite fille aux cheveux attachés reprit ses outils et s'entourait dedans, l'apportant en direction des chariots tous rapatriés ensemble. Encore une fois, Nueve escalada et une fois en hauteur, elle dénoua le nœud de la corde et elle enroula le matériel sur le caddie. Après s'être assuré que c'était bien attaché, elle tira sur la corde. Le crochet, devait être lancé vers la fenêtre.
Premier essaie, échec. Le crochet s'échoua contre le carrelage. Deuxième essaie, raté. Troisième, pareil. La brune fronça des sourcils et tenta autre chose. L'enfant se tourna en direction du chariot qu'elle avait attaché. Pouvait-elle essayer de le faire avancer par sa propre force ? Cela ne lui coûtait rien d'essayer. Nueve le fit. Elle gémissait légèrement sous l'effort. Les caddies se daignaient enfin à bouger, dans un tintement strident. Le premier sortit du lot, roulant jusqu'à la fillette, qui, leva son menton, ses yeux, dégageant une lueur remplit d'espoir. Elle pouvait enfin sortir d'ici !
Cet instant de pur joie bascula aussitôt, puisque le monstre avait entendu ce boucan. Un frisson traversa tout l'échine de Nueve, qui accéléra les choses. Plaquant le caddie contre le mur de béton, elle l'escalada. Un grognement sourd se faisait entendre non loin d'elle. Et soudain, son coeur arrêta de battre, dès lors qu'un cutter fila juste à coté d'elle, se plantant contre le mur, traversant les barres de fer du chariot. La brune pâlit et se sentit paralysé à cet instant précis. Son cerveau, ne cessait de lui transmettre le message « Fuis ! Vite ! Ou tu mourras comme ce nome ! »
Derrière elle, le vendeur réduisait sa distance avec elle. Ses grognements, comparables à un animal enragé, l'intimidait. Pas question de abandonner. Nueve se hissa vers le haut, ne remarquait pas le dessin d'un œil à coté de la fenêtre en noir – probablement fait avec de la peinture ? - et parvint à passer outre la fenêtre. Deux pas, puis elle sauta à l'extérieur. L'enfant pouvait vaguement sentir les doigts de son agresseur, tenter de la rattraper. Trop tard pour lui. Pour l'instant. La brune sentit tout son corps s'écraser sous la gravité, contre les dalles pas bien alignés et mouillés. Dehors, il pleuvait toujours. Le ciel, était toujours aussi sombre, ne dégageait aucune lumière, aucun signe d'espoir dans ce monde quasiment apocalyptique. Les fils électriques suspendaient de travers avec les poteaux, à cause du chemin qui n'était pas plat. En effet, cela formait un sorte de creux, au milieu, en quelque sorte, un problème de dénivellation concernant les dalles. Quant aux lanternes, elles aussi, étaient penchées. Néanmoins, les ampoules grésillaient, la lumière, s'activait et s'éternisait en quelques secondes.
Le porte à coté, s'ouvrit dans un fracas audible. Nueve hoqueta et virevolta, se retrouvant avec cet individu aigrit. Cette fois-ci, il tenait entre ses mains, une boite de conserve vide, sans couvercle. Une seconde. Est-ce qu'il comptait l'attraper et l'emprisonner dedans ? Lui couper tout oxygène ? Lui priver de sa liberté et la tuer ? Son agresseur n'avait pas décidé de lâcher l'affaire ? Pourtant elle n'avait rien fait de travers ! Elle ne l'avait pas gêné ! Pourquoi tant de méchanceté ? Pourquoi on voulait sa mort ?
Elle recula. Ses pieds, frottaient les flaques d'eaux sous elle. Tout d'un coup, au-dessus d'elle, un tuyau de pvc craqua, les colliers qui le maintenait s'étaient détachés du mur. Tout l'eau qui était contenu depuis un moment, se déversait bruyamment devant elle. Le vendeur leva sa tête, se prenant cette eau de pluie en pleine figure à son tour. La fillette serra ses poings et fuit. Le plus rapidement possible. La respiration sifflante, ses muscles, contractés et brûlant. Son coeur avait de plus en plus de mal à s'adapter à sa cadence.
Se dressait devant elle, une poubelle, rectangulaire, complètement remplie, le couvercle, ouvert. Dans un mouvement précipité et avec maladresse, Nueve glissa et tomba. Sa rotule droite lui faisait terriblement mal. Les larmes lui montaient aux yeux et malgré la douleur, elle rampa, s'abritant en dessous. Le monstre était toujours en train de la pourchasser et cette fois-ci, il l'avait définitivement perdu de vue. Il relâcha un râlement et fit demi-tour, pestant lourdement, retournant à ses affaires.
Cette fois-ci, l'enfant était sauve. Elle rampa de nouveau, sortant de sa cachette. Honnêtement, Nueve se fichait de se retrouver trempée jusqu'aux os. Là, tout ce qu'elle voulait, c'était de se reposer. De se remettre de ses fortes émotions. Son genou lui faisait atrocement mal. Ceci l'obligeait donc à se prendre définitivement une pause. La brune se laissa s'asseoir, sa salopette, prenait une couleur plus foncée, aspirant l'eau sous elle. L'enfant s'adossa contre la poubelle, haletante, se frottant les yeux.
Quelques minutes après, Nueve rouvrit ses yeux. Apparemment, elle avait piqué du nez. Elle se sentait si fatiguée. Elle avait froid. La petite fille se recroquevilla, enfouissant sa tête sur ses genoux, ses bras, enroulant ses jambes. C'était déjà un miracle de s'en être sortit vivant. Elle ne devrait pas s'en plaindre. Et pourtant, la brune mourait d'envie de hurler. D'éclater en sanglot. Crier que tout est de la faute aux autres. Qu'elle était innocente. Qu'elle ne désirait que la paix, le calme et la sérénité. Qu'elle ne comprenait pas pourquoi ce monde était aussi cruel et effrayant. Que la solitude n'était pas fait pour elle. Qu'elle en avait marre. Et pourtant, Nueve voulait encore croire aux miracles. Qu'un jour, une lumière apparaîtra sous ses yeux, lui signalant que l'espoir était encore là, quelque part, dans les ténèbres.
Cette ville était complètement incompréhensible. Tout était si silencieux, ce n'était pas normal. Et pourtant, c'était quotidien par ici. Nueve frotta ses paupières de nouveau et releva sa tête. Les yeux ronds, elle aperçut au loin, un drôle d'élément, se faisant porter par un courant d'eau. On aurait un petit sac, avec deux trous qui pourraient permettre à quelqu'un de voir à travers. Intriguée, la fillette se leva, se pointa devant et attrapa le sac, qui semblait être fait de papier. Doucement, elle cligna des yeux, inspectant le sac avec curiosité.
— Je me demande bien à qui ça appartenait...
Nueve plissa ses yeux et se le mit sur sa tête. Un petit sourire amusé se dessinait sur ses lèvres. Effectivement, elle pouvait voir le monde extérieur à travers. En revanche, ça faisait bizarre pour elle.
— Ca donne un drôle de style. Ehe...
Elle se l'ôta et baissa les bretelles de son sac. L'ouvrit et rangea le sac de papier dedans en le pliant. Soudain, le sol se mit à vibrer. La fillette vacilla et tomba sur ses genoux. Les bâtiments courbés par la transmission émisse depuis la Tour, redevenaient à leur forme d'origine. Béate, Nueve regardait la scène, confuse. Qu'est-ce qu'il se passait ? Lorsqu'elle levait ses yeux, une lumière se mit à briller depuis la grande Tour. Aveuglante, puis, s'éteignit. Tout devenait plus sombre et soudain, les ampoules des lampadaires éclatèrent à l'unisson, plongeant la ville dans l'obscurité absolu.
Un silence de mort s'installa. Sans lumière. Juste, le noir. Les ténèbres.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top