6 | Allié
* Publié le 22.05.2022
Little Nightmares II
If crossblood
Chapitre 6:
Allié
Ce n'était plus surprenant pour la fillette qui croisait des monstres difformes où qu'elle aillait. La fuite était devenue une habitude. L'irritation sous ses pieds n'avaient plus aucun secret et abîmés, la douleur s'était multipliée par deux.
Depuis plusieurs mois de solitude, de survie, Nueve avait enfin rencontré un autre enfant comme elle. Un autre survivant, qui avait accepté de collaborer avec elle, le temps de fuir l'individu qui les pourchassaient, lui aussi, en courant, avec difficulté, apparemment, il boitait. La brunette n'avait pas le temps de regarder derrière elle. Sa gorge piquait, sa respiration était irrégulière et ses poumons infiltraient mal la circulation de l'air qu'elle aspirait. Des craquement subvenaient de partout et la malheureuse n'était pas au bout de ses surprises.
En effet, plusieurs portes du couloirs s'ouvraient, successivement. Des pieds sortaient des chambres, en prenant leur temps. Horripilée, la petite fille accéléra la cadence, suivit de près de Mono. La pression fléchait considérablement. L'adrénaline et l'instinct de survie les aidaient dans leur fuite désespérée. Dans ce monde de dystopie, il n'existait pas de récompense.
Les miracles quant à eux, étaient minimes. Ce serait un euphémisme de croire que tout ira bien. Être un positif était clairement un signe de stupidité et de naïveté.
Sous un lit juxtaposé en piteux état ; un trou au mur. La brunette interpella à vive voix le garçon au masque de papier pour qu'il la suive. Très vite, ils tournèrent sur leur gauche, glissant au sol, passèrent entre les jambes du monstre difforme qui essayait de les attraper. Le plus vite possible, tout en manquant de déraper un peu, les enfants se redressèrent et dans un mouvement précipités, ils se hâtèrent sous le lit. Le premier à pénétrer dans le trou, fut Mono, suivit par Nueve. Des grognements provenaient de l'autre bout puis, une violente secousse et la chambre fut saccagée. Hors danger, les deux survivants haletaient, se déplaçant à pas chassé entre les parois rocailleuses. Des toilettes araignées dérangeaient leur chemin. Le garçon au masque de papier les repoussaient d'un geste de main.
Une énième secousse se fit. Des petits gemmes de marbre s'échouèrent sur la tête de la brunette qui émit un léger « aïe » audible. Visiblement, les monstres se donnaient un mal fou à se cogner contre le mur, en quête de rattraper leur prochain repas, qui sait. Doucement, tout sentiment d'angoisse s'atténuait. Et après un long moment dans l'obscurité, une faible source de clarté se manifestait devant les enfants.
Le garçon s'assura qu'il n'y avait aucun ennemi dans le coin, avant de sortir du trou, que devait sûrement emprunter des rats et araignées. Silencieusement, le duo avançait, regardant attentivement autour d'eux. L'ampoule au-dessus d'eux, suspendue au plafond, grésillait. Le carrelage était glacial. Contre le mur, une flaque d'eau. Un long rideau blanc cachait quelque chose, néanmoins, on pouvait parfaitement repérer une silhouette ; une ombre, assise, la tête, basculée en arrière. Aucun mouvement, ni de bruit. En dehors de mouches qui planaient quelque part. Une forte odeur putride empestait les lieux.
Un WC sans abattant était jaunâtre, quelque chose de fort et de dégoûtant flânait par là. Un lavabo était situé à coté, en mauvais état et une odeur nauséabonde s'y échappait, mêlée à une forte odeur de remontée des égouts. En bref, une salle de bain pas du tout entretenue depuis longtemps. La poussière animait chaque recoins, avec des toiles d'araignées. Plusieurs tâches s'y trouvaient partout.
Comparé à ailleurs, la grande porte était close. Impossible de l'ouvrir, puisque la poignée était trop haute et qu'il n'y avait aucun élément qui pourrait les aider à monter au niveau convoité. Nueve plaçait une main près de sa poitrine, faisant encore une fois du repérage. S'ils traînaient encore longtemps ici, quelqu'un les trouveront. La salle de bain ne devait être pas loin des autres chambres...
Mono bougeait, cherchant lui aussi, une issue de secours.
— Euh... excuse-moi.. je peux... te demander quelque chose ?
Son partenaire la jaugeait, attendant patiemment la suite de ses paroles. Gênée, Nueve baissait ses yeux marrons de lui, n'osant lui faire face. Toutefois, elle tenait au moins à lui faire part le fond de ses pensées.
— Est-ce que... On pourrait... faire équipe ? Une fois sortie d'ici ?
L'expression du garçon était caché par le masque papier. Il était clairement impossible de deviner ses émotions. Néanmoins, la fillette nota qu'il était tendu et crispé. Mono vint même à serrer ses poings. Avec un timbre de voix sèche et ferme, il lui donna sa réponse.
— Non.
— P...Pourquoi ? Voulut-elle savoir, en relevant ses yeux pour le regarder.
Nueve se sentait démunie face à lui. La solitude la pesait. Avoir une compagnie n'était pas de refus. C'était même source de réconfort pour elle. Elle se sentait moins seule, moins rongée par la peur. Intérieurement, la brunette croyait qu'elle avait fait quelque chose de mal envers lui. À l'absence de réponse de son camarade, la petite fille évitait de se rapprocher de lui, de peur de le froisser davantage. Avec une mine attristée, presque malheureuse, la survivante remarqua que le garçon lui tournait la tête.
— ...Tu n'as pas besoin de le savoir.
— J'ai fait quelque chose de travers ? Insista t-elle avec une petite voix.
— ...C'est....
Le début de sa phrase laissée en suspend, Mono pivotait légèrement sa tête et crut percevoir une silhouette familière se tenir derrière Nueve. Bien que ce ne soit que le fruit de son imagination, le garçon au masque de papier sentit bouillir au fond de lui. Il s'agissait de la personne avec qui il avait aidé. Avec qui, il avait offert son amitié. Sa confiance. Tout. Et qui l'avait abandonné.
La fille au manteau de pluie jaune, la capuche en tête, recouvrant en partie son visage ; Six.
L'amitié n'était jamais éternel. Au contraire, dès que l'occasion se présentait, la personne la plus proche, peut poignarder à tout moment. Pour ensuite, tourner le dos. Mono ne pouvait plus accorder sa confiance à qui que ce soit. La personne en face de lui, était certes, plus expressive, cependant, elle pouvait elle aussi, le trahir à tout instant.
Sentant bien la réticence du garçon, Nueve se ravisa. Forcer n'était pas la meilleure idée qui soit.
— Désolé... je ne t'embêterais plus.
Son coéquipier lança un coup d'oeil dans sa direction, n'ajoutant rien de plus. Il restait méfiant. Après tout, son coeur était meurtri. Une partie de lui, s'excusait pour son attitude aussi glacial et hautin. Sa conscience s'indignait, insistant sur le fait qu'il avait eu raison de la repousser. C'était mieux ainsi. Mono baissa sa tête puis la redressa, se concentrant sur son objectif, qu'était de sortir d'ici.
Un trou était visible au-dessus de la baignoire. Assez épais, pour passer par là. D'abord hésitant, le garçon réfléchissait aux options et à la probabilité que tout aille dans son sens s'il y allait. Quant au parcours pour y grimper, les rideaux. La barre collée au mur n'était pas assez proche du plafond. En revanche, si Nueve lui faisait l'échelle, ceci fonctionnerait.
Le travail d'équipe. Une démarche importante pour la survie. Mais aussi, source d'ennuis.
Derrière son masque de papier, le survivant grimaçait et grinçait des dents. Admettre qu'il avait finalement besoin d'aide, lui retournait l'estomac. À vrai dire, ça l'écoeurait. Toutefois, il n'y avait pas d'autre choix.
— Hoi.
Nueve le considéra, ses cheveux attachés, pivotaient en suivant son mouvement mi-circulaire. Elle suivit le doigt du garçon qui lui désignait la grosse fissure au plafond. La brunette acquiesça et emboîta le pas en le suivant. Tous deux grimpèrent le long du rideau de douche, plastifié, qui était d'un blanc maculé. Parfois, c'était glissant. Néanmoins, les deux enfants parvinrent à tout remonter, se retrouvant au-dessus de la barre en bois. Intriguée, la fillette jeta un coup d'oeil en direction de la personne immobile qui se trouvait dans le bain.
Elle glapit et blêmit. Nueve fit de son mieux pour éviter de perdre équilibre sur la barre.
L'individu était maigre, voire squelettique, pas de cheveux sur la tête. Sa peau était minime. Le regard était éteint et des mouches volaient autour de lui. Il était éventré et des organes noircies avaient glissés entre ses cuisses. On pouvait y déceler son intestin, longer du ventre ouvert, placé au-dessus d'un foie ? Elle ne serait dire. L'eau était basse, ne recouvrant rien. Une odeur putride s'y échappait, et le liquide était rouge. Ce spectacle plus que macabre rendait l'enfant nauséeuse.
— Ne regarde pas et avance. Lui conseilla tardivement Mono.
— Je... j'essaie...
Son partenaire la fixait. Oui, Nueve était sensible. À croire qu'elle n'avait jamais rien vu de tel. Comment s'était-elle démenée pour arriver jusqu'ici ? Mono écarta ses questionnements, avança jusqu'au mur et leva son doigts vers le trou. Il recula une jambe et se positionna, de sorte à aider sa camarade à se hisser vers le haut. La brunette monta sur lui et dès qu'il l'envoyait vers le haut, un râlement s'entendait derrière la porte, alertant les survivants.
Mono leva sa tête, ordonnant à ce que la fille lui trouve quelque chose pour l'aider à monter. Nueve opina du chef et s'exécuta. Maintenant qu'elle était à l'étage au-dessus, elle ne constatait qu'il n'y avait rien pour lui prêter la main.
— Il n'y a rien ! Cria t-elle.
Mono grommela et baissa ses yeux. Pourquoi l'avait-il laissé passer en première ?! Il se retrouvait dans un nouveau pétrin là ! Face à cette situation stressante, réfléchir à d'autres solutions devenait compliqué. Nueve sortit du trou et atterrissait sur la tringle à rideau, surprenant son partenaire, qui s'attendait à ce qu'elle l'abandonne. La brunette tira sur le rideau de douche. Le plus fort possible. Les anneaux se rassemblèrent et elle tirait vers le haut. Le garçon au masque de papier comprit très vite ce qu'elle comptait faire et l'aida dans sa manœuvre.
La porte s'ouvrit brusquement. Le monstre qui les poursuivaient, avec son menton prononcé, respira comme un bœuf et examina la pièce avec attention. Très vite, il remarqua le rideau bouger anormalement. Il leva sa tête et aperçu ses proies suspendues à la barre de douche. Il avança rapidement.
Au même moment, Nueve remonta jusqu'au trou, emmenant avec elle le rideau. Mono haletait, et fit face au monstre difforme qui attrapait un genre de balais au coin de la pièce pour essayer de l'attraper. Suite au signal de sa camarade, le garçon s'agrippa au rideau et remonta le long. Le balais le ciblait, le dérangeait dans son escalade vertigineuse.
Avec le travail d'équipe, Mono put finalement échapper à son agresseur, Nueve, ayant remonter au maximum le rideau au trou, le garçon parvint à s'infiltrer. Très vite, les deux enfants lâchèrent le rideau de douche, qui retomba et s'éloignaient du trou, en marchant à pas de canard le long du passage secret. Très vite, leur stress redescendait. Un cri remplit de colère faisait écho jusqu'à eux. Un sentiment de fierté et de victoire fit sourire les deux survivants.
Sortit du passage, ils se trouvèrent dans une énième chambre, qui ressemblait plus à celle d'un enfant, avec des jouets partout, tels que des poupées, des peluches, des cubes de dé... Mono repéra de suite une fenêtre ouverte. Il s'empressa de remonter le meuble de bois, suivit de près de Nueve, puis, sauta par dessus la fenêtre avec elle. Tous deux glissèrent sur les tuiles, puis furent arrêtés sur une gouttière. Il ne pleuvait plus à l'extérieur, néanmoins, le ciel était toujours lugubre ; noir. Comme si le jour n'existait pas dans Pale City.
Des cintres en métal étaient disposés sur une ligne de câble électrique. Celle-ci, ne fonctionnait pas. Les deux enfants en prirent un et se laissèrent traverser en étant agrippés au cintre, fuyant l'hôtel, voyageant entre plusieurs immeubles, jusqu'à attérrir sur un autre toit. Un poteau avait cessé leur trajet vertigineux. Le duo se laissait se poser sur les tuiles. Ils remontèrent un peu et calculaient la distance parcourue de l'hôtel jusqu'ici. Ils étaient désormais loin.
Nueve se laissa tomber sur son fessier. Ses jambes l'avaient lâcher. Ses muscles se décontractaient et un soupir de soulagement s'échappa de la barrière de ses lèvres, rassurée d'être loin du danger. Pour le moment. L'air frais lui faisait du bien et ses mèches rebelles qui couvraient son visage s'écartaient avec le vent. Elle regarda le garçon qui restait debout, son regard, posé sur une grande tour.
— Nos chemins vont se séparer ici alors ?
— En effet.
Ne désirant pas le retenir, bien qu'elle souhaitait le contraire, la brunette opina et se recroquevilla.
— Merci de m'avoir aidé... bonne continuation...
Mono la regardait, étonné. Un remerciement. Est-ce que Six l'avait déjà remercié de vive voix quand il l'avait aidé ou secouru ? Non. Au contraire, elle restait muette et évitait de montrer ses émotions aussi facilement. À sa rencontre avec elle, dans ce chalet, avec ce chasseur qu'ils ont abattu, elle lui paraissait si fragile. À protéger. Il avait eu tord. Face à lui, Nueve. Tout le contraire de la fille avec qui il avait traîné.
— Qu'est-ce que tu vas faire ? Lui demanda finalement Mono.
— Survivre... trouver un endroit tranquille...
Il s'agissait d'un idéalisme. Être en quête d'un confort. Mono ferma ses yeux, comprenant parfaitement cette optique. Après tout, c'était pareil pour lui, avant...
— Et toi ? L'interrogea Nueve.
— Je cherche quelqu'un...
— J'imagine que je serais un poids si je t'aide.
Un sourire maladroit se dessinait sur les lèvres de la fillette. Bien évidemment, elle était désolée de ne pouvoir lui être utile. Même s'il s'était montré distant et froid avec elle, Nueve gardait sa gentillesse et sa sensibilité auprès des autres. Elle ne voulait pas être détestée par un autre survivant. Au contraire, elle aurait apprécié faire alliance jusqu'au bout. Voire devenir amis. Pour ce garçon, la brunette respecterait ses choix. Qu'importait si elle serait abandonnée. Ou si elle venait à mourir seule.
L'altruisme n'était pas toujours une bonne chose. Ceci ne pouvait que engendrer d'autres méfaits, bien que c'était un acte de bonté.
Mono prit un instant en l'écoutant se rabaisser de la sorte, tout en gardant un sourire. Il passa une main sur sa nuque, son manteau dépravé, flottait au rythme du vent. Le bruit de son masque en papier se jouait dans l'air.
— Ce n'est pas ça. Au contraire, tu t'es montré... utile. Lui fit-il comprendre, en repensant à la poursuite plus tôt. Mais... la personne que je cherche, ne concerne que moi. Et pour ta sécurité, je préférerais que tu ne me suive pas.
Un frisson lui traversa l'échine. Mono sentit un regard intense se poser sur lui. Dès qu'il pivotait légèrement sa tête, il sursauta à la réaction insensée de la fille de son âge. Ses yeux s'émerveillaient et ses joues rosissaient et un large sourire illuminait davantage son visage. On aurait même dit que des étoiles scintillaient autour de ses orbes marrons.
— Tu ne me déteste pas ! S'exclama t-elle, avec euphorie.
— Eh... ? Lâcha le garçon, prit de court, perdu par son attitude.
— C'est génial ! Jubila Nueve en levant ses poings au-dessus de sa poitrine. Ça veut dire qu'on se reverra ! Hein !
Son coté insouciante et innocente fit rougir légèrement le garçon masqué. Il recula et balbutia faiblement un « peut-être », ce qui enchantait encore plus la fillette. Pour couper cette conversation, le garçon masqué s'éloigna et se stoppa dès que Nueve l'appelait et lui souhaitait bon courage en lui faisant signe de la main. Mono opina puis disparaissait du champ de vision de la fillette après avoir sauté.
Toute souriante, la brune retira son sac de son dos, l'ouvrit, sortit un carnet avec un crayon à papier. Elle écrivit sur une page, l'utilisant comme un journal intime. Une fois avoir écrit, elle dessinait Mono. Au fur et à mesure de ses coups de crayon, son sourire se détériorait et son visage s'assombrissait. Ses yeux, s'humidifiaient et des larmes se versèrent. Sa gorge se nouait et la brûlait. Son coeur, se serrait douloureusement à sa poitrine.
Il était temps de reconnaître un fait.
Être seul, était douloureux. Il aidait certes, à se fortifier.
Mais il ne pouvait panser ce vide au coeur.
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