2 | Pourchassé

* Ecrit le 28.02.21


Little Nightmares II

If Crossblood


Chapitre 2:

Pourchassé



Les doigts se plièrent, parvenant à saisir la dernière boîte de gâteau. Le souffle rauque et bruyant du monstre se faisait entendre et suscitait la peur chez la petite fillette qui s'était mise en boule, tel un animal se cherchant à se protéger. Un hérisson, notamment. Le coeur tambourinait contre la poitrine de cette enfant, qui retenait jusqu'à présent son souffle. Elle étouffait, suait et ses yeux étaient embrumés de larmes.
La main s'éloigna enfin d'elle, l'incitant à relâcher toute la pression qu'elle contenait jusqu'ici. Un bruit de pas s'éloignait, lui signalant que l'individu partait dans une autre direction. Nueve s'efforça à se relever après cette terrible expérience. Ses jambes flageolaient, et les gouttes de sueurs perlant sur son visage ne cessaient de couler abondamment. Aussitôt, elle effectua des pas chassés, évitant de faire bouger d'autres boîtes, qui pourraient alerter la personne se trouvant dans la supérette. Se retrouvant au bout, par précaution mais aussi par curiosité, la brune se pencha un peu. Elle distingua le monstre.
Le corps déformé, aigrie, un pantalon dépravé couleur sable, une chemise à rayures et une grosse tête. Un double menton très prononcé et les cheveux courts gras. Le regard vitreux et sombres. Sa taille faisait exactement pile poil cinq étages. Nueve déglutit sa salive et recula un peu. Comment pouvait-elle lui échapper? Déjà, rester silencieuse. Ensuite... peut-être, passer derrière une porte, derrière une vitrine exposant différentes sortes de viandes. Cela pourrait la mener en lieu sûr. De toute façon, il n'y avait pas plus de solution qui se présentait à elle. Autrement dit, c'était sa seule issue de secours.

Les poumons ayant suffisamment prit de quantité d'oxygène, la fillette se décida enfin à bouger. Elle descendit prudemment de l'étagère, son ombre, s'écartant sous elle, avec l'effet de la lumière au plafond, au même rythme qu'elle rejoignait la terre ferme. Au contact du carrelage, l'enfant frissonna. Cependant, elle s'efforça de ignorer les contraintes qui lui faisaient obstacle, se dépêchant de déguerpir d'ici au plus vite. Les battements de son coeur y allait crescendo, au point d'avoir du mal à discerner sa présence et celui du monstre hideux se baladant ici, au mauvais moment. Accroupit, à pas de canard, Nueve avança.

Le souffle rauque de la deuxième personne n'inspirait rien de bon. En effet, cet individu, sans doute de sexe féminin, faisait un tri dans les rayons. En étant donc concentrée dans sa tâche, elle n'avait su encore repérer l'intrus se trouvant dans sa petite échoppe quasiment abandonnée. Régulièrement, le monstre bougeait, incitant à Nueve à se plaquer contre les étagères, demeurant immobile, le temps de s'assurer à avoir la voie libre pour s'enfoncer au fond du magasin. C'était stressant pour elle, d'ailleurs, devoir limiter ses déplacements, de peur d'être choppé.

Chose qui lui était incompréhensible ; pourquoi ces individus étaient aussi grand ? Comme des sortes de titans, mesurant dix fois sa taille ? Y comprit la majorité des objets et meubles, sans compter les habitats, l'environnement ? A vrai dire, depuis qu'elle était seule, Nueve s'interrogeait souvent sur son existence. Du fait qu'elle soit aussi petite, minuscule comparé à tout. Comme si... elle était étrangère dans ce monde. Aussi bien pour elle, que pour d'autres enfants, qu'elle avait connu jusqu'ici. Bien sûr, la brune était quasiment persuadée qu'elle n'était pas la seule survivante. Ce serait trop absurde de croire à cette option là. Néanmoins, depuis la découverte de Pale City... Il y avait personne. Pas de rescapé. Pas de survivant. Aucune signe de vie, sauf elle.

A quel point le monde était grand ? Existerait-il un lieu de répit, regroupant tout survivant comme la fillette ? Elle voulait y croire. Un endroit moins cauchemardesque, plus reposant, plus joyeux... moins morose et aussi effrayant. Bien sûr, de préférence, avec un joli paysage et ciel, comme dans des illustrations exposées dans des livres ! Ah, et des animaux tout mignon aussi, en pleine liberté ! Ces pensées remplis de rêveries et d'innocences la requinquait. Et lui donnait du courage. Nueve enjamba enfin vers la vitrine, qu'elle contourna aussitôt. A présent caché, grâce à la hauteur de la vitrine, la brune reprit son souffle, une main portée près de sa poitrine, au niveau de son coeur. Tantôt, l'enfant leva sa tête. La porte était close, néanmoins, à proximité, en haut, il y avait un conduit d'air. Autrement dit, un chemin parfait à emprunter pour la fuite. La petite fille balaya du regard les lieux.

La vitrine exposait de la viande crue ; tels que des saucisses, de la volaille, du jambon, ... Un coin pour de la charcuterie. Un gros couteau de cuisine était planté dans du porc, la viande ayant pourrie avec le temps, des mouches y planant autour, désignant que cette nourriture était déconseillée pour les autres. Etonnamment, du jus avait laissé des traces, depuis le verre, sur le plan de travail au petit plateau. Nueve se hissa, pour y accéder. En effet, si elle longeait le long du plan de travail, jusqu'au mur, elle pourrait ensuite sauter sur un drôle de mannequin avec une tête de porc. Avec la hauteur de ce dernier, la fillette pouvait parfaitement sauter sur sa gauche, pour remonter sur une étagère en hauteur, dessus, plusieurs cadres poussiéreux, et à proximité, le conduit d'aération.

Ce parcours s'annonçait sportif, néanmoins, avec la présence d'une autre personne, cela ne pouvait que rendre encore plus angoissant. Il suffisait d'une erreur. D'une gaffe. Un mauvais pas, et c'était foutu. Nueve fronça des sourcils, se focalisant sur son objectif principal, déterminé à ne pas échouer dans sa démarche. Elle entreprit donc d'avancer, en fonction de cachette. En effet, du sel, un lot de papiers d'emballages et d'autres affaires étaient disposés un peu partout, comme si ils étaient là pour la protéger. Une chance qu'ils aient été bien positionnés, cela lui donnait l'opportunité de vite se cacher dès que le monstre était tout prêt.

Toujours aux aguets, Nueve ne reprit que son avancé que lorsque le monstre s'éloignait de la vitrine. Toujours accroupit, le dos courbé vers l'avant, comme si cela pouvait la rendre plus minuscule qu'elle ne l'était déjà. La tension était palpable et la fillette faisait de son mieux pour rester discrète et incognito. Après quelques minutes, qui lui paraissaient les plus longues de sa vie, la brune sauta et grimpa derrière le mannequin, glauque pour elle. Soudain, des bruits de chariots s'entrechoquaient. Des râles plus que graves parvenaient jusqu'à ses oreilles, lui arrachant un frisson à travers tout son échine. Des pas se suivirent, successivement. Inutile de chercher à compter dans un moment pareil. La survivante devait se focaliser sur son objectif principal et non se laisser distraire !

Toutefois, la curiosité représentait un vilain défaut. Et comme disait si bien un dicton ; la curiosité tue le chat. De plus, elle perdait un temps précieux rien que pour étudier la source du bruit. Ses pupilles noisettes se dilatèrent devant une scène qui se déroulait sous ses yeux ahuris. Un débarquement de créature. Un, avait la tête encrée dans une télévision, on ne sait par quelle force, il arrivait encore à bouger avec. D'autres, avait soit un corps difforme, le visage manquant ou un visage las et à la fois sans vie. A vrai dire, ils entraient en groupe. Leur manière de se déplacer était différente de la première. Nueve plissa ses yeux et tourna sa tête.

Sans doute le propriétaire du magasin. Ou juste un vendeur. Ses déplacements étaient raides mais rapides. D'ailleurs, cet individu soulevait plusieurs caisses, contenant des bouteilles de verres, les disposant avec précaution dans le rayon liquide. Au moindre geste suspicieux de sa clientèle, la créature faisait volte-face, grogna, se pressa jusque vers la personne qui la troublait et la poussait sèchement. Autrement dit, c'était une invitation à respecter les règles. Au risque que cela se terminait mal. Etonnamment, les autres personnes se fichaient éperdument de ce qu'il se tramait près d'eux. Nueve ravala sa salive et arrêta toute observation et se dépêchait de faire son chemin pas aussi simple à emprunter, sauf pour les plus courageux et agiles.

Enfin en hauteur, haletante, la fillette fit des pas chassés le long du mur, les bras écartés, se rapprochant du conduit d'aération. Tout près du but, sans avoir eu trop de difficulté, l'enfant remercia la chance d'être de son coté aujourd'hui. Alors que jusqu'ici, tout était relativement calme, un grésillement la coupa de court, ainsi que les occupant du magasin. Se tournant vite vers la source de l'ennuie, Nueve craignait le pire. En effet, à proximité, se trouvait une petite télévision. Pour une raison inconnue, celle-ci s'était allumée, diffusant des images ainsi que du son, on aurait dit qu'une chaîne humoristique avait été mit en marche. Captivés, toutes les créatures avancèrent vers la vitrine, la tête levée vers l'instrument de leur attention.

Nueve sua et grinça des dents, les yeux exorbités.


— Non... Ils vont me voir... ! Je dois me dépêcher ! Vite ! Paniqua t-elle intérieurement.


Son coeur s'affolait. Sous le coup de la précipitation, elle manqua de faire tomber un cadre photo. De suite, la vendeuse leva sa tête. Et elle repéra l'intrus. Sa réaction fut immédiate. Non loin d'elle, un balais. Elle se prit, s'en servant comme arme pour choper cet insecte qui venait déranger son lieu de prédilection. Nueve se sentit tanguer dès que le bout du bâton cogna l'étagère de bois. Néanmoins, elle s'efforça de continuer à courir, jusqu'à la sortie de secours. Dans un saut précipité et mal préparé, elle sentit son corps prêt à l'abandonner. La brune parvenait toutefois à se tenir aux ailes du conduit. Aussitôt, elle se hissa et rentra dans le trou, ignorant les cris indignés du monstre derrière elle.

Inaccessible pour l'instant, Nueve souffla et posa sa main vers son coeur, tremblante. Elle se permit de rester immobile pour au moins deux minutes avant d'avancer, accroupit. Ne sachant où se diriger, elle se contentait donc d'avancer en face. Après tout, aucun autre chemin se présentait. Aucune déviation, rien. Il faisait noir, alors qu'elle s'éloignait de la lumière. La brune rechercha l'ouverture de son sac et sortit sa lampe torche et l'activa. Une source de lumière s'y émanait, lui permettant ainsi de se repérer. Son ombre s'étendait derrière elle, à chaque pas qu'elle faisait. L'enfant gardait son calme, sa respiration s'étant enfin stabilisé après un moment de panique. Cependant, l'adrénaline pulsait toujours dans ses veines, tellement qu'elle restait sur ses gardes.

Il ne fallait pas s'avouer victorieuse de si tôt. Après tout, sous elle, elle pouvait entendre les grognement incessant de la propriétaire du magasin. Celle-ci, avait l'air de savoir où Nueve se dirigeait. L'enfant espérait que ce ne soit pas le cas, que au contraire, elle trouve vite la sortie menant à l'extérieur. Au bout d'un certain moment, la brune aperçut enfin un échappatoire. Certes, elle devait se faufiler entre des plaques horizontales, mais espacées, elle avait largement la possibilité d'y sortir, si elle les écartaient un peu plus. De plus, de la lumière y dégageait à l'extérieur. Rapidement, Nueve éteignit sa lampe torche et la rangea dans son sac.

Ses pas faisaient des échos dans la plateforme où elle se trouvait. Alors qu'elle croyait vite sortir indemne, un bruit assourdissant retentit, suivit d'un vent violent, de battement... une seconde, des battements ? Nueve grinça de nouveau ses dents, se protégeant le visage avec ses bras, les jambes pliées, ses cheveux attachés emportés par le courant d'air vers l'arrière.


— Q..Quelqu'un a activé la ventilation... ? Suspecta t-elle, d'une voix enrouée.


Une image d'une certaine créature se dévoilait, de dos, dans son esprit. Nueve pesta et s'empressa de s'accrocher à la sortie. Dans ces conditions, si elle lâchait les barres, sous la puissance du vent, elle se ferait emporter facilement et, finira par se faire déchiqueter plus loin par les ailes ! La petite fille tentait désespérément d'espacer un peu plus les barres, par ses propres moyens – allant même à poser une jambe pour appuyer vers le bas et repousser avec son autre bras vers le haut.


— Je refuse... de mourir dans ces conditions... ! Déclarait-elle dans ses pensées.


La grille de ventilation finit par céder. Tordue et bien ouverte, Nueve put enfin souffler, en sortant de la gaine d'aluminium dans laquelle elle était enfermée depuis quelques minutes.

Bien sûr, sur le moment de liberté, elle manqua de glisser, oubliant de regarder sous elle avant de sortir. Dans un petit cri de surprise, elle chuta et se cogna, le dos en premier contre quelque chose de dur. Le choc émit un petit son. Tandis que Nueve se redressa péniblement, elle agita vivement sa tête, essayant de comprendre où elle se trouvait désormais. Au-dessus de plusieurs casiers. Certains, portes mi-ouverte avec des chemises et badges. L'ampoule au milieu du plafond était éteinte et sur sa gauche, la fenêtre était close. On pouvait entendre la pluie finir taper contre la vitre et voir les gouttes glisser le long du verre, certaines, se fusionnant pour ensuite s'écraser contre le marbre.

Donc, la survivante se trouvait dans l'espace réservé au personnel ; les vestiaires. Doucement, Nueve se leva et longea les casiers gris, pour ensuite, amortir sa chute sur une chaise. Suivit alors le sol. Un petit « hup » lui échappait la barrière de ses lèvres, puis, de nouveau en exploration, elle enjamba dans la salle commune. Une table était dressée contre le mur totalement abîmé. Du papier peint totalement usé avec le temps et sale. Juste en face, un meuble de cuisine, avec un micro-onde, la porte ouverte, plus fonctionnel. Un évier, contenant plusieurs tasses pas nettoyés, dégageant une odeur d'eau du robinet pas traité. Des tâches suspicieuses donnait l'impression que la propreté a été négligé. Et la porte menant aux toilettes, ouverte aussi, avec du PQ mit à disposition. Long long du papier, touchait le sol. A croire que les employés n'avaient guère envie de se préoccuper de l'hygiène par ici !

En dépit de ces détails peu important pour l'enfant, celle-ci se balada dans l'espace de repos, continuant de examiner les environs. Passant sous la table, Nueve fit d'étranges symboles au mur, fait au crayon rouge. De plus près, on aurait dit des nombres en bâtons, rayés, comme ci, cela indiquait le nombre de jours passés. Doucement, intriguée, la brune posa sa main dessus, glissa du bout de ses doigts, se demandant si cela signifiait qu'il y avait aussi quelqu'un comme elle, ici. Vivant ? Mort ?

Désespérée, sa main se laissa retomber vers le bas, tandis que son front se colla contre les symboles exposés au mur. Nueve ferma ses yeux, à bout de sa solitude. C'était pesant d'être seule. A affronter tout ces dangers, subir tout ces cauchemars, à lutter... toute seule, sans soutien, ni avoir de réconfort quand tout allait mal.

...Non, elle ne devait pas se laisser morfondre de la sorte ! La petite fille devait déjà quitter cet endroit, saine et sauve. Il devait bien avoir quelqu'un encore vivant dans cette ville infestée de monstres. Une fois que Nueve se décolla du mur, déterminée, elle s'immobilisa suite à plusieurs grincement. Quelqu'un montait ici. Lentement, la brunette tourna sa tête au-dessus de son épaule.

Le premier monstre du magasin venait de monter, cette fois-ci, avec un cutter en main en plus du balais, l'air plus que énervé, le souffle rauque, ses épaules montant et descendant. 


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