✩ Chapitre 2 : Le cercueil ✩
Point de vue de Sofia :
Le désagréable sentiment de ne pas être à ma place ne me quitte pas depuis que je suis arrivée. J'ai été bête. Je n'aurais pas dû me sentir obligée d'accepter l'invitation de Conrad. Ma tête va exploser.
La musique trop forte agresse mes tympans et les basses se répercutent dans mon estomac. Je vais vomir. Une odeur de transpiration flotte dans l'air. Pliée en deux et la main devant la bouche, je me fraye un chemin entre mes camarades alcoolisés qui dansent avec leur verre. L'un d'eux ne me voit pas et renverse une partie de son whisky haut de gamme sur mes cheveux et ma robe. Il fallait s'en douter... Je ne pouvais pas m'en tirer aussi facilement...
Cependant, je ne me départis pas de mon optimisme. Malgré cet épisode contrariant, je me sens de nouveau moi-même et reprends mon souffle, loin de l'agitation, dehors.
Le vent joue aux abonnés absents et c'est tant mieux. La fraîcheur de la nuit me remet aussitôt les idées en place. L'esprit aventureux, je pars en quête d'un coin tranquille et m'éloigne de l'immense chalet. Ses lumières rassurantes me guident jusqu'à un rocher plat en lisière de forêt. Je m'assois et profite du silence qui règne en maître. Même les chouettes rayées ne hululent pas. Puis, le décor se met à changer brusquement.
Des visages qui me sont tristement familiers me scrutent sous tous les angles. J'aurais tant aimé les oublier pour toujours. Madison s'approche de moi, entrelace nos doigts et m'intime de la suivre. La fête bat son plein mais nous débouchons cette fois-ci sur un cimetière. Je retiens ma respiration. Je sais d'ores et déjà ce qui va se produire. Des rires diaboliques s'élèvent si haut que je suis persuadée qu'ils atteignent la cime des arbres, effrayant sans l'ombre d'un doute la faune sur leur passage. J'ai beau me débattre, m'évertuer par tous les moyens de me dégager de ses serres, rien n'y fait.
La panique déforme mes traits. Celle que je considérais comme ma meilleure amie me trahit encore une fois de la pire des manières. Elle appelle en renfort les garçons musclés de la bande.
Sans difficulté, ils me soulèvent du sol alors que je hurle de terreur. Mon cœur bat la chamade et je ne parviens plus à me contrôler. Mes membres tremblent comme des feuilles. L'angoisse pulse dans mes veines et entame une course folle dans chaque parcelle de mon corps. Mon cerveau ne répond pas aux ordres que j'essaie de lui envoyer.
Je mords sauvagement l'un des joueurs de l'équipe de baseball qui me tient par les poignets mais il ne lâche pas sa prise. Au contraire même, il la resserre. Mon sang ne fait qu'un tour.
Le cercueil dans lequel ils avaient trouvé drôle de m'enfermer se rapproche bien trop à mon goût, il n'est qu'à quelques mètres. Je ferme les yeux, m'agite, lutte, crie, refusant de revivre cette affreuse épreuve.
Je me redresse dans mon lit, désorientée et trempée de sueur. Les larmes roulent en abondance sur mes joues. Je ne me rappelle que trop bien cet épisode juste avant que je déménage de Vancouver.
Mes ongles qui grattent, s'effritent contre la surface dure du bois. Le manque d'oxygène, la chaleur étouffante dans cet espace clos. J'avais cru mourir. Mon aîné, Connor, avait pété un plomb lorsqu'il avait appris ce qui s'était passé et s'était porté volontaire pour leur refaire le portrait. Mes parents avaient alors dû intervenir, user de leur grosse voix et étaient parvenus à le raisonner in extremis.
Encore aujourd'hui, je me demande comment j'ai pu éviter la claustrophobie. C'est un supplice que je ne souhaite pas, même à mon pire ennemi.
Secouée par les sanglots, je tente de me calmer. J'attrape mon oreiller et le serre contre moi. Assise en tailleur, je me balance d'avant en arrière pour redevenir maîtresse de moi-même. Je suis forte, je peux vaincre ma peur.
Je reporte mon attention sur mon réveil. Les chiffres fluorescents indiquent trois heures du matin.
Je me penche vers ma table de chevet et y prends un mouchoir. Comme si je craignais de me casser, je tapote mes joues en douceur et essuie l'eau salée qui y ruisselle. Mon nez est quant à lui bouché. Et je suis sûre que si j'osais jeter un œil dans la glace, je constaterais un lien de parenté évident avec les lapins russes.
D'un coup sec, je retire la couette. Il faut que je me désaltère. Je m'approche du bord du lit et glisse mes pieds dans mes bottons. J'arrange ensuite mon pyjama polaire Lilo et Stitch et me redresse. En silence, j'abaisse la poignée de ma porte et me faufile à l'extérieur de ma chambre. Connaissant par cœur le chemin jusqu'à la cuisine, je parviens à me repérer dans la pénombre, je monte les marches une à une et... hurle !
Je viens de rentrer dans quelque chose de dur. Et si c'était un cambrioleur ? Je fais un bond de côté pour l'éviter s'il charge et arrondis les yeux de surprise quand Ethan appuie sur l'interrupteur.
Furieuse, je lui assène une tape sur le torse et le contourne pour atteindre l'évier.
J'espère ne pas avoir ameuté le quartier avec ce glapissement digne des plus grands films d'horreur.
— Je suis désolé de t'avoir effrayée. Je n'imaginais pas croiser quelqu'un cette nuit. se justifie-t-il.
Essayant de me contenir, je prends un verre sur une étagère du placard sans mot dire et y verse de l'eau fraîche.
Comme si ce cauchemar n'était pas assez terrorisant, voilà que cette mésaventure survient...
— Est-ce-que ça va ? s'inquiète-t-il, face à mon absence de réponse.
Il ne manquait plus que ça. Je fais volte-face. Cette soudaine sollicitude me paraît louche. Ethan ne peut pas avoir un physique de rêve et être gentil de surcroît. Il doit bien cacher son jeu et attendre l'occasion parfaite pour me la faire à l'envers. Je le fixe, suspicieuse, et pince les lèvres. Après avoir bu l'eau d'une traite, je pose le verre sur le plan de travail et m'approche de lui.
La fatigue s'abat sur moi telle une chape de plomb. Mes paupières tombent de sommeil. J'ai toutes les peines du monde à garder les yeux ouverts. Et Dieu sait que je ne suis pas fine lorsque je suis épuisée.
— Ne fais pas comme si tu t'en souciais réellement... Au diable les politesses ! Je ne suis pas venue faire causette... Je vais me recoucher et tu devrais en faire autant si tu ne veux pas être crevé pour la longue journée à venir.
Et sur cet échange tendu, je fais demi-tour et regagne ma chambre. La culpabilité me rattrape alors à la vitesse de l'éclair tandis que je referme derrière moi. J'y suis allée un peu fort. L'angoisse de me rendormir a pris le dessus. Et si je m'étais trompée sur toute la ligne ? Et s'il y avait méprise et qu'il s'enquérait sincèrement de mon état ? Et si j'avais juste mal interprété ? Il faut que je m'excuse. Je rouvre la porte et passe la tête par l'entrebâillement.
Ethan se dirige vers les appartements de Noah.
— Ethan, chuchoté-je. Tu m'entends ?
— Oui, je suis là, Sofia.
— Pardon de m'être emportée. On en reparle plus tard si tu veux. Bonne nuit.
— Pas de soucis. À tout à l'heure. Bonne nuit.
Rassurée qu'il ne m'en veuille pas, je retourne alors me mettre au chaud sous mon plaid.
Mots de l'auteure :
Bonjour tout le monde !
Je vous retrouve ici un peu plus tôt que prévu. En raison de gros soucis personnels, je ne vais pas être présente du week-end chez moi, donc je publie ce soir tant que j'ai le temps et le moral à peu près...
J'espère que vous aurez apprécié votre lecture ! Qu'avez-vous pensé de ce chapitre ?
Bisous 💋
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