18. On était invincible. [1]

L O G A N

- Comment... comment est-ce que tu peux me faire ça ?

Je vois dans son regard une profonde tristesse. Et je réalise mon erreur.

Pourquoi j'ai ouvert ma bouche ?

Je ne pouvais plus retenir tout ça, je sais pas, depuis le début du week-end je me demande ce qui ne va pas chez moi, et là, je crois que je commence peu à peu à réaliser...

C'est elle qui voulait à tout prix savoir pourquoi je me suis comporté bizarrement ces derniers temps. Et c'est juste maintenant que je viens de comprendre que tout ça me manquait.

- Brooke... je me lève et essaye de m'approcher mais elle m'arrête d'un signe de main.

- Non ! Tu te rends compte de ce que tu me fais. Est-ce que tu réalises ? Tu crois quoi, hein ? Que je vais te dire que ça m'a manqué aussi ? Et que tout redeviendra normal ? -elle ponctue ses paroles par des mouvements de mains rapides, et s'approche finalement de moi- Tu m'as rejetée de la pire des manières et tu m'as laissée me faire insulter par tes amis alors que t'étais tout ce que j'avais !

Elle appuie son index contre mon torse avec rage à plusieurs reprises. La haine lui brûle les yeux, sa respiration est saccadé, je sens qu'elle peut fondre en larmes d'une minute à l'autre. C'est la première fois que l'on reparle de cette histoire. C'est la première fois qu'elle s'exprime sur ce sujet. J'étais tout ce qu'elle avait ?

- Je te déteste. Tout ce que tu m'as fait, la trahison que tu m'as faite je pourrais jamais, jamais, te les pardonner. Sa voix est complètement brisée, ses yeux brillent et je vois bien qu'elle lutte pour qu'aucune larme ne coule.
- Jamais tu m'entends ? répète-t-elle. Et c'est pas parce que tu passes une soirée ici que ça va changer, crache-t-elle avec dégoût .

Je devrais dire quelque chose, n'importe quoi. J'ouvre la bouche, mais aucun mot ne sort. Elle a raison. Je ne mérite pas son pardon.
Elle essaye de me regarder dans les yeux, mais je ne parviens pas à affronter son regard, ses yeux bleus qui semblent presque transparents lorsqu'elle est sur le bord des larmes. Elle attend quelque chose de ma part. Mais je ne dit rien.

Elle monte les escaliers à toute vitesse et je l'entends étouffer un sanglot. Je passe une main sur mon visage et donne un coup de pied dans le vide. Bordel de merde.

B R O O K L Y N

Non, non ce n'est pas entrain d'arriver, non.
Non, je ne peux pas, je ne peux pas encore une fois inonder mon oreiller de larmes à cause de lui.
J'avais dit plus jamais. Comment est-ce que j'ai pu me laisser retomber la dedans ? J'ai été trop souple, pourquoi est-ce qu'il a fallu que j'apprécie ce week-end au point de faire semblant que plus rien n'avait d'importance ? Et comment en une phrase il a réussit à faire ressurgir des souvenirs aussi douloureux ?

Quand il m'a laissée tomber il y a déjà trois ans, il a tout brisé. Il a brisé ma vie, il a brisé chaque parcelle de mon corps il a brisé mon cœur. Il l'a déchiré, réduit en poussière de ses propres mains. Et je l'ai regardé faire. Derrière lui, il m'a laissée, complètement vide, complètement détruite.

Et je l'ai regardé s'éloigner de moi. Je ne pouvais plus rien faire. Je ne voulais plus rien faire. Tout me rappelait lui, tout me ramenait à lui. Parce que plus rien n'avait de sens sans lui. J'avais l'impression que tout avait changé. L'air que je respirais semblait étouffant, les paysages avaient perdu de leurs couleurs. J'avais l'impression que tout était en noir et blanc. Logan m'était indispensable. Il m'était vital. C'était dur. Ça m'abîmait, me déchirait en mille morceaux. Et rien que d'entendre son prénom humidifiait mes yeux.
Le croiser tous les jours au lycée ? C'était comme si on me déchiquetait le cœur à coups de hache. On était censés vivre nos plus belles années. C'était pire qu'un cauchemar. Je ne me réveillais jamais. Il était tout ce que j'avais, et ce jour-là, j'ai tout perdu...

[ Trois ans plus tôt. ]

A cette époque j'ai presque 14 ans et je vais enfin rentrer au lycée, [La plupart du temps aux États-Unis l'entrée au lycée correspond à l'entrée en troisième.]

Riverwood High School. Le lycée qui abrite la spécialité Arts et Scènes à laquelle nous allions prétendre dans trois ans. Je voulais me battre comme une lionne pour y accéder, et je voulais me battre avec mon meilleur ami. Logan.

- À quoi tu penses Cook ? me sortit-il de mes pensées.

Je m'était enfin décidé à arrêter de jouer avec le sable chaud afin de lui accorder mon attention, je tournai légèrement la tête pour apercevoir cette jolie tête blonde aux yeux gris me sourire. Il savait très bien à quoi je pensais.

- Ce surnom est vraiment ridicule, ris-je en repensant à quel point mon prénom avait été dérivé. On était passé de Brooklyn à Brooke, de Brooke à Brookie et de Brookie à Cookie et de Cookie à Cook. Et c'était entièrement sa faute.

- Je pense à la rentrée d'après demain. C'est notre dernier vrai jour de vacances, répondis-je à sa question, et j'ai hâte de voir le lycée. On est plus des bébés, soupirai-je un peu nostalgique .

- Moi j'ai jamais été un bébé, ça a toujours été toi, lança-t-il moqueur.

Je lui envoyai un coup de poing mémorable à l'épaule et instantanément il passa sa main dessus pour soulager la douleur.

- Brooke t'es vraiment violente des fois, tu me fais peur, s'est-il plaint avec peu de crédibilité.

Je lui tirai la langue et me replongeai dans mes pensées. Comment est-ce que cette rentrée allait se passer ? J'avais peur. Et si pour je ne sais quelle raison Logan et moi avions à nous éloigner... Et si nous ne tombions pas dans la même classe ? Si j'avais su à l'époque que mon instinct disait vrai...

- Cookie tu recommences, soupira-t-il, apparemment il n'était pas aussi stressé que moi. Dis-moi quel est le problème ? Pourquoi tu stresses, tout va bien se passer.

- J'ai- j'ai peur Logan. J'avalai difficilement ma salive et me laissai retomber sur le sable encore chaud, avant qu'il ne puisse accrocher mon regard. Contemplant le soleil qui vivait ses dernières minutes avant de se coucher .
Il mit sa tête au-dessus de la mienne et de là je pouvais très bien voir ses petites taches de rousseur qu'il détestait, mais que j'adorais tant.

- Brooke, tu réagis comme quand on est passé au collège. On sera dans la même classe. Et si par malheur ce n'est pas le cas, rien ne changera entre nous. Rien.
La seule chose que je voyais dans ses yeux était de la sincérité, de l'honnêteté, de la pureté. Il ne mentait pas. Il ne me mentait jamais.

Mais il venait de le faire.

- R. I. E. N. Rien, répéta-t-il en appuyant sur les lettres tout en me redressant.
- Oui bon ça va, j'ai compris, répliquai-je en écrasant ma main sur son visage, ce qui eut le don de le faire rire. Et il reprit son sérieux en voyant l'air inquiet sur mon visage.

- Tu me le promets Logan ? Lui demandai-je une dernière fois.

Il me regarda dans les yeux et passa affectueusement une mèche de cheveux derrière mon oreille en caressant délicatement ma pommette.

- Je te le promets, répondit-il dans un murmure avant de déposer un baiser sur ma joue.

J'aurais dû profiter de ce moment au maximum. Car il n'allait jamais se reproduire.

- On est invincible Brookie, arrêtes de penser à des choses négatives maintenant, j'aime pas te voir comme ça, m'ordonna-t-il en me pinçant le nez, ce qui m'arracha une grimace. Profitons de ce dernier jour de vacances.
- D'accord, mais lâche mon nez, répliquai-je avec une voix nasillarde semblable à celle d'un canard enrhumé

Il éclata de rire, lâcha mon nez et me prit dans ses bras, me forçant à m'allonger, la tête sur son torse, mon corps collé au sien. Sur notre sable, sur notre plage. J'entendais les battements réguliers de son cœur, c'était la plus belle mélodie au monde pour moi. La seule que je pouvais écouter tout le temps, de jour comme de nuit. Je ne m'en lassais jamais. Je n'aurais jamais pu m'en lasser.

- Profitons de cette dernière journée de vacances, répéta-t-il doucement avant de déposer un léger baiser dans mes cheveux.
- Oui, murmurai-je en m'accrochant davantage à lui, profitons de cette dernière journée.

Ouais, dernière. C'était le mot.

Et la rentrée arriva et les premiers jours s'étaient passés à merveille. Ou presque.

Nous n'étions pas dans la même classe.

Nous n'étions pas dans la même classe.

Depuis que Logan avait redoublé le CM1, nous avions toujours été dans la même classe. Toujours. Jusqu'à ce jour.
Ça m'avait déprimée. Mais il m'avait encore une fois rassurée. Il savait que j'en avais besoin, malgré le fait que je savais tout ce qu'il me répétait. J'y croyais. Il m'attendait à la sortie des cours, c'était le premier devant ma salle, on venait ensemble au lycée, on s'arrangeait pour pouvoir passer le plus de temps ensemble.

Et ça attirait pas mal de jalousie.

Logan, grand blond aux yeux gris avec un charisme fou. Une attitude à les faire toutes tomber par terre. Ça oui il y en avait des jalouses. Pourtant, il était libre. On n'était pas en couple. Mais il était à moi. Il était bien plus que mon meilleur ami. Il était comparable à une partie de moi.

Je ne pouvais pas poser un mot qui définissait parfaitement ma relation avec Logan. " meilleur ami " était beaucoup trop faible. Mais c'était ce que j'utilisais en attendant de trouver quelque chose de plus fort.

Alors oui, il y avait des jalouses. Mais je n'y faisais pas attention. Mais elles ont tout de même obtenu ce qu'elles voulaient.

Ce jour-là, je n'ai rien compris. Et il m'a juste démolie.
Ce 8 septembre. Quatre jours après la rentrée. Ça s'est terminé.
Brutalement, violemment et de façon tellement incompréhensible...

Dans tous les lycées, il y a une hiérarchie stupide qui sépare les populaires du reste du monde. Le """"Roi"""" du lycée, vous savez, le plus populaire, la toute puissance, choisit traditionnellement son élite, qui pense que pour je ne sais quelle raison, être une unité supérieur aux autres.

L'année de notre arrivée au lycée, celui qui régnait était tout simplement le pire spécimen que j'ai rencontré de toute ma vie. Il n'était même pas en Terminale, seulement en Première mais il avait réussi à mettre tout le lycée à terre. En même temps, absolument tout jouait en sa faveur, son père était tout simplement une légende, en plus d'être un des fondateurs du lycée, c'est également lui qui, plus jeune, a mis en place la S.A.S. Évidemment que les élèves se sont soumis à sa loi lorsqu'il est parvenu à bouleverser l'équilibre du lycée.

Mais je ne pensais pas qu'il bouleverserait ma vie.

Je ne pensais pas qu'il réussirait à le rallier, pas lui. Pas lui.

Et puis en temps normal, les élites n'étaient composés que de Premières et de Terminales...

Et bien apparemment, Logan a eu de la chance.

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