Chapitre 11

Le réveil est presque trop doux pour être vrai. Aucun bruit violent ne m'arrache à mes rêves, aucun sursaut d'angoisse. Juste le calme. Cela fait si longtemps que je ne me souviens même plus de la dernière fois où j'ai ouvert les yeux sans cette boule dans ma poitrine. La lumière du jour filtre timidement à travers les rideaux, projetant des ombres diffuses sur les murs. Une paix inattendue m'enveloppe, et c'est déroutant. Ça me semble trop beau pour être vrai.

J'ai tellement l'habitude que tout soit un piège que je ne peux pas me résoudre à croire que tout ça est réel. Que lui, Aiden, soit réel. Pourquoi m'a-t-il aidée ? Qu'attend-il en retour ? Peut-être rien... ou peut-être quelque chose que je ne suis pas encore capable de voir.

Je m'assois au bord du lit, mes pieds touchant le sol froid. La pièce est toujours aussi étrangère à mes yeux. Trop propre, trop rangée, trop... accueillante. Je ne peux pas rester ici. Pas plus longtemps. Aiden a déjà fait assez. Il ne me connaît même pas.

Et moi non plus. Je ne le connais pas.

Quand je sors de la chambre, j'entends le bruit familier de quelqu'un qui s'active dans la cuisine. Mon estomac se noue légèrement. Une partie de moi voudrait éviter cette conversation, éviter tout ce qui pourrait ressembler à de la gratitude. Gratitude. Juste le mot me fait grincer des dents. La dernière fois que j'ai remercié quelqu'un, ça m'a coûté bien plus que je n'étais prête à donner.

Mais il était là pour moi hier. Je ne peux pas simplement partir comme une voleuse.

Aiden est là, debout devant la cuisinière, un torchon sur l'épaule, comme hier soir. Il a l'air fatigué. Les cernes sous ses yeux sont plus marquées, son regard un peu perdu malgré son sourire lorsqu'il se tourne vers moi.

– Bien dormi ? demande-t-il, sa voix douce mais teintée de quelque chose que je ne parviens pas à identifier.

– Oui... mieux que je ne l'aurais cru, admis-je en m'asseyant timidement sur une chaise.

Il me tend une tasse de café, et je la prends sans protester. Je ne sais pas quoi dire. Chaque mot me semble de trop, et pourtant, ma tête est pleine de questions. Pourquoi me regarder comme ça, avec cette gentillesse sincère qui ne semble pas feinte ? Où est le piège ?

– Je voulais te parler, commence-t-il après un moment de silence.

Je relève les yeux, surprise. Il pose son propre café sur la table et s'assoit en face de moi, l'air sérieux.

– Écoute, je ne vais pas prétendre savoir ce que tu traverses, mais... je sens que tu n'as pas vraiment d'endroit où aller. Je me trompe ?

Son regard accroche le mien, et je détourne les yeux, mal à l'aise. Il n'a pas tort, mais je n'ai pas envie de l'admettre.

– Ce n'est pas ton problème, répliquai-je doucement.

Il soupire et passe une main dans ses cheveux, un geste presque nerveux.

– Peut-être pas, mais je sais ce que c'est que de se sentir... seul.

Ses mots flottent entre nous, lourds de quelque chose qu'il ne dit pas complètement.

– J'ai perdu quelqu'un récemment. Quelqu'un qui comptait beaucoup pour moi. Depuis, cette maison est... vide. Alors, crois-moi, tu ne me déranges pas. En fait, ça me fait du bien de ne pas être seul.

Je le regarde, incapable de trouver une réponse. Il est sincère. Ça se voit dans ses yeux, dans la façon dont il parle. Mais est-ce suffisant ? La sincérité suffit-elle pour faire confiance ?

– Mais je ne peux pas rester ici comme ça. Je n'ai rien à offrir en échange, murmuré-je.

Et puis j'ai peur. Peur de lui accorder ma confiance et qu'il me trahisse comme tant d'autres l'ont fait.

Il secoue la tête, un léger sourire sur les lèvres.

– Alors, fais comme si tu étais ma colocataire. Tu m'aides à payer les charges, et on est quittes. Pas de dette, pas de pitié. Juste deux personnes qui essaient de faire de leur mieux.

Je reste silencieuse, pesant ses mots. Il ne me force pas. Il ne me regarde pas avec condescendance, comme si j'étais une sorte de fardeau. Il est... différent. Mais je ne peux m'empêcher de penser que même ceux qui semblent différents finissent toujours par attendre quelque chose.

– Je ne sais pas... dis-je enfin, incertaine.

– Réfléchis-y, répond-il simplement. Je ne te demande pas de me répondre tout de suite. Mais juste d'envisager cette solution.

Son ton est calme, patient. Comme s'il savait que je finirais par accepter. Peut-être qu'il a raison. Peut-être qu'ici, je pourrais... respirer. Au moins pour un moment.

Mais cette petite voix dans ma tête refuse de se taire :

Pourquoi fait-il tout ça pour moi ?

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