01

Incheon Airport

21:30

Le rideau de ferraille se ferme bruyamment dans un fracas métallique.

La journée fut éreintante, si bien que la fatigue commence à se faire ressentir dans ses jambes habituellement solides.

Son collègue, et ami, l'attend de l'autre côté de la porte de service.

- Hoseok Hyung ? Tu n'es pas pas encore rentré ?

- Je t'attendais, on habite pas très loin... Autant rentrer ensemble !

Jungkook lui répond par un léger sourire, puis prends soin de fermer la porte à clé.

Ils se mettent en route vers leur bus commun, discutant d'un ton léger de leur vie, de leur passé, du temps, de leur journée.

Le trajet s'écoulant alors plus rapidement, ils se retrouvent bientôt tous deux dans leur quartier.

C'est un de ces quartiers calmes, plutôt aisés, à l'écart de l'agitation brûlante du centre ville.

Fatigués, ils marchent maintenant en silence au travers du calme qui règne sur l'endroit.
Leur route finit par se séparer au détour d'un croisement.

- À demain Hyung !

- À demain Jungkook, bonne nuit !

Une pluie fine et désagréable se met à tomber. Il frissonne et poursuit son chemin à la hâte jusqu'à l'immeuble dans lequel il vit depuis maintenant un an.

Seoul

22:03

Enfin rentré.

Les yeux rougis par la fatigue, et les mains engourdies par le froid, il entre dans l'appartement vide puis jette nonchalamment son manteau sur une chaise libre.

Ses pensées un peu confuses en cette fin de journée, il repense alors à ce qui l'a mené à vivre ainsi.

Il aime son métier, qu'il pratique par choix et non par dépit. Mais il s'avoue parfois qu'avoir une vie en dehors du travail, avec ces horaires et ce rythme soutenu, est plutôt difficile.

Il n'a pas de famille, ou du moins, loin d'ici.
Ses parents, cela fait plus d'un an qu'il ne les as pas vu, ces derniers constamment en voyages d'affaires à l'autre bout du pays.

Ils n'a jamais été particulièrement proche de sa famille. Et le peu d'amis qu'il avait sont restés dans son village natal, bien loin de la capitale.

Ainsi, la vie qu'il mène est calme et sans remous.
La seule originalité, ce qui pourrait le différer d'un autre, c'est son métier. Ou plutôt, cette passion insensée qu'il entretient pour celui-ci. Changeant et captivant.
Les jours ne se ressemblent jamais, les clients non plus. Il a la sensation de voir le monde, sans pour autant devoir se déplacer. Bien sûr, certain pourrait le voir comme une banalité sans nom, mais la perception qu'il en a est tout autre.

Il suffit simplement de voir au-delà.

Ses yeux balaient ce qui lui sert de logis.

Son lieu de vie est excessivement basique. Quelques meubles sans âme, peu d'objets personnels, et un cruel manque de chaleur et de confort.
N'y passant que très peu de temps, il n'a jamais réellement pris la peine de décorer ou de personnaliser l'endroit. D'ailleurs, plusieurs cartons encore non déballés s'alignent le long des murs.

Son ventre criant famine, il se rend dans la petite cuisine puis s'affaire à se préparer un repas chaud.

C'est rassasié qu'il se dirige vers sa chambre, ses yeux commençant dangereusement à se fermer.

Après une douche rapide mais réconfortante, il se faufile sous les draps encore froids.

Demain est un nouveau jour, et il a hâte.

Incheon Airport

4:59

"OUVERT"

Le défilé commence.

Un homme entre dans le café, accompagné d'un petit garçon. Il pleure silencieusement, la tête plongée dans le cou de celui qui semble être son père.

L'homme s'avance, puis passe commande.

Un expresso à emporter. Il est donc pressé.

Jungkook observe le garçon, qui ne doit pas avoir plus de 5 ans.

- C'est un gros chagrin on dirait. Dit-il au jeune père.

- Sa mère vient de décoller pour une mission Humanitaire... Ce n'est pas facile.

L'homme paraît fatigué, et ne semble pas vouloir montrer sa tristesse. Pourtant, elle est si évidente, il la perçoit si clairement dans son regard.
Quant au petit garçon, ce sont des larmes silencieuses qui dévalent ses joues.
C'est sans doutes celles-ci les plus douloureuses.

Il farfouille sous le comptoir à la recherche de quelque chose qui n'est pas vraiment en vente dans le café, mais qui pourtant lui sert souvent.

Il trouve enfin, puis offre un grand sourire au garçon.

- Voilà pour toi, dit-il en lui tendant une énorme confiserie colorée. Je n'en ai pas beaucoup... Elles sont réservées uniquement à ceux qui ont perdu leur sourire.

Le petit garçon aux yeux brillants ouvre les yeux en grand tandis que ses joues mouillées s'étirent en un sourire timide.

L'homme et son fils le remercient, un soupçon de joie sur leurs visages peinés, puis quittent le café.

Un autre client passe la porte, dont le doux son du carillon résonne dans la pièce encore peu remplie.

Tiens ?

Cette silhouette lui est familière.

Oui, c'est le jeune homme d'hier.
Il se souvient, et comment l'oublier.
C'est celui qui n'a pas de sac, et qui boit son café fort, et sans sucre.

Aujourd'hui, pas de chemise mais un pull ample, plus décontracté. Pas de chaussures cirées, mais une paire de basket cependant soignées.

Le téléphone à la main, il fourre ses écouteurs dans une de ses poches puis s'avance vers le comptoir.

- Bonjour, un café noir s'il vous plaît.

Il ne peut s'empêcher de l'observer attentivement. Quelque chose l'intrigue.

Habituellement, il parvient sans peine à cerner les gens, les deviner, à imaginer ce qu'ils sont.

Pourtant, avec lui, ça ne fonctionne pas.

Aujourd'hui, bien qu'arborant son même sourire, il paraît plus soucieux qu'hier. Des cernes soulignent ses yeux, venant s'ajouter au plis soucieux entre ces derniers.

Mais que fait-il ici, deux jours d'affilés, si tôt, et sans bagages ?

Peut-être travaille t-il également dans cet aéroport ? Toutes ses suppositions tombent immédiatement à l'eau quand sa raison le persuade que c'est tout autre chose.

Mais quoi ?

Il s'affaire autour de l'antique machine à café, tandis qu'il sent qu'on l'observe dans son dos.

En effet, lorsqu'il se retourne pour servir le café demandé, l'homme le regarde un sourire en coin.

- Merci, votre café était parfait hier.

Il lui tend la tasse, un peu tremblant. Sa voix a beaucoup de charme, elle en est même un peu intimidante.

- Il n'y a pas de quoi, mais heureux qu'il vous plaise.

Il répond d'un simple sourire puis se détourne et s'installe dans le fond de la pièce.

Et comme la veille, il quitte le café à 6:30 précisément. Pas une minute de plus, pas une seconde de moins.

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