Chapitre 1

TW!: violence

Seungkwan avait son casque sur les oreilles et écoutait attentivement la démo qu'il avait enregistré ce matin, pendant que personne n'était à la maison. Du moins, il essayait.

Même avec son casque et le volume à fond, il entendait encore ce qu'il se passait autour de lui. Il aurait préféré que ce ne soit pas le cas, mais c'était toujours comme ça, le soir venu.

Il ne lui venait jamais à l'esprit de se plaindre ou de leur demander de faire moins de bruit. Ce serait inutile, et il risquait plus de se faire rabaisser qu'autre chose. Personne ici ne le respectait, et lui était bien trop gentil et tendre pour dire quoi que ce soit.

Il avait beau être insulté, rabaissé ou traité comme un esclave, il ne disait jamais rien. Il voulait être le fils parfait, le frère parfait. Il avait toujours tout fait pour. Mais ce n'était jamais assez et il commençait à en avoir marre.

Il avait beau en avoir assez de leur comportement, il ne pouvait pas y faire grand-chose. Protester, ou répliquer? Ça ne ferait qu'empirer les choses. Partir de cette maison dans laquelle personne ne le traitait décemment? Pour aller où?

Il n'avait pas d'autre choix que d'encaisser au moins jusqu'aux résultats du suneung et des admissions à l'université.

Avec un peu de chances, ses résultats seraient suffisamment bons pour intégrer la SNU. Encore mieux, il pourrait peut-être obtenir une bourse d'études.

Vingt pour cents d'entre elles s'obtenaient sur audition, pour que les meilleurs puissent étudier sans avoir à se soucier de l'argent; tous leurs frais étaient pris en charge par l'établissement.

S'il était admis, la question ne se poserait pas. Il quitterait ce foyer de malheur. Et puis ce serait l'occasion de clouer le bec à ses parents? Qui étaient-ils pour juger de ses talents musicaux? Personne, puisqu'ils n'y connaissaient absolument rien.

Seul Seungkwan avait étudié la musique. Le reste de la famille disait toujours que c'était du temps perdu qu'il devrait passer à étudier, mais ils ne se privaient pas de se vanter, lors des nombreux dîners professionnels qu'ils avaient accueilli, d'avoir un fils capable de jouer de quatre instruments de musique.

Cette hypocrisie rendait Seungkwan malade, mais il n'en restait pas moins impuissant face à la situation. Que pouvait-il faire à part obéir quand ses parents lui ordonnaient de jouer pour impressionner leurs invités pour ensuite le rabaisser en leur absence? Rien du tout.

S'il désobéissait, il pouvait être mis à la porte, et là, il devrait se débrouiller seul. Ou alors, il ferait peut-être mieux de ne pas attendre ce moment et de partir, même s'il allait avoir du mal à se débrouiller une fois loin de sa famille.

Tout était mieux que de vivre dans un foyer aussi toxique et étouffant.

Seungkwan retira son casque dans un soupir, se promettant de savoir ce qu'il ferait d'ici quelques jours. Il devait prendre une décision et cesser de tout encaisser en restant inactif.

S'il était admis à la SNU, la question ne se posait pas. Il partirait de suite pour Séoul, se débrouillerait pour vivre en dortoir et trouver un travail pour subvenir à ses propres besoins.

Plutôt mourir que rater une opportunité pareille. Encore moins à cause de ses parents. Si c'était une cause contre laquelle il ne pouvait rien faire, comme sa santé qui ne lui permettrait pas de s'imposer des études aussi fatiguantes, il encaisserait sans rien dire.

En revanche, il ne laisserait plus sa famille lui dicter sa conduite. Enfin, sa famille, s'il pouvait seulement la désigner comme telle. Elle n'avait jamais agi comme une véritable famille devrait agir.

Sur une impulsion, Seungkwan prépara un sac avec quelques affaires. Il le prendrait et partirait de suite s'il était admis dans l'université qu'il visait. Il partirait aussi si la situation devenait trop insupportable.

Il en jugeait par sa capacité à faire face à ses parents sans avoir envie de les frapper ou de leur couper la langue pour qu'ils arrêtent leurs bêtises.

Il ne comptait plus se laisser rabaisser sans cesse, s'il avait la possibilité d'y échapper.

Il cacha soigneusement le sac qu'il venait de préparer dans son armoire, de façon à ce que personne ne sache ce qu'il manigançait. Personne n'avait besoin de le savoir de toute manière. A quoi bon savoir si c'était pour ne pas agir en conséquence?

Une fois cette tâche accomplie, il se blottit sous ses couvertures, essayant tant bien que mal de trouver le sommeil. Il y avait toujours beaucoup de bruit venant du salon, mais aller se plaindre restait inenvisageable, alors il fit de son mieux pour essayer de s'endormir.

Le lendemain, leurs résultats d'examens leur seraient transmis, et Seungkwan aurait besoin d'énergie pour encaisser cette journée. Il devait se préparer aux critiques qu'il recevrait, peu importe à quel point ses résultats étaient bons. Comme toujours. C'était devenu une bien triste routine, à laquelle il ne prêtait même plus d'attention.

Il s'endormit au bout de plusieurs heures, trop épuisé pour rester éveillé, malgré le bruit ambiant qui continuait, et qui s'était même renforcé.

Quand il se réveilla le lendemain matin, c'était parce que sa mère avait débarqué dans sa chambre pour exiger de voir ses résultats d'examen, et Seungkwan dût passer plusieurs minutes à prouver à sa mère qu'ils n'étaient pas encore disponibles pour qu'elle le laisse se rendormir en paix.

La fatigue le fit tomber comme une masse après que sa mère ait quitté la chambre. Le contrecoup de la période d'examens frappait fort, et Seungkwan passait le plus clair de son temps à dormir ces derniers jours pour essayer de rattraper tout le sommeil dont les examens l'avaient privé.

Il lui fallut de nouveau se lever quelques heures plus tard et se rendre au lycée, où les résultats seraient affichés.

Il n'avait pas vraiment envie de devoir se battre à travers la foule d'élèves pressés de découvrir leurs résultats pour pouvoir avoir accès aux siens, mais l'idée de faire machine arrière lui sortit de la tête quand il vit Baekho, l'élève qui avait été top student tout le long de l'année, arriver avec son petit air supérieur.

S'il y avait une chose que Seungkwan ne supportait pas, c'était d'être pris de haut par quelqu'un qui n'était pas en position de le faire.

Il s'approcha pour voir ses résultats, en profitant pour jeter un oeil à ceux de Baekho. Un sourire satisfait se peignit sur ses lèvres quand il s'aperçut qu'il avait obtenu de meilleurs résultats que lui.

Baekho sembla presque choqué de voir ça, sa fierté mal placée bafouée plus que jamais par un élève qu'il avait toujours, arbitrairement, jugé inférieur.

Seungkwan prit en photo ses résultats et les envoya à ses parents, ne prenant même pas la peine de regarder leur réponse. Il savait que ce ne serait pas assez à leurs yeux mais peu lui importait. Il était satisfait de ses résultats et c'était tout ce qui comptait.

Il s'en fichait du reste. Son travail avait payé, et il était plus proche que jamais d'une admission à la prestigieuse SNU.

Ou pas d'ailleurs, peu lui importait en réalité. Dans tous les cas, la nuit lui avait porté conseil et il avait pris une décision: il partirait dès que possible à Séoul, loin de tous ceux qui lui pourrissaient la vie.

En rentrant chez lui, il s'attendait à tout, sauf à un tel chaos. Aucune discipline ne régnait, les frères et soeurs de Seungkwan avait mis un bazar monstre, et pire encore, le père Boo était alcoolisé. Et pas qu'un peu, si on en jugeait par son air hagard et son visage rougi.

Seungkwan tenta d'esquiver la situation en montant dans sa chambre, mais son père l'interpella avant, lui demandant s'il avait eu de bons résultats à ses examens. Seungkwan les lui donna en détail.

Il s'attendait à ce que ça ne soit pas encore assez à ses yeux, mais pas à ce point.

Quand la première gifle tomba, Seungkwan se figea, sous le choc. Il ne s'attendait pas à ce que la violence qui restait habituellement verbale devienne cette fois physique.

Quand les coups commencèrent à pleuvoir un peu plus, Seungkwan eut comme premier réflexe de se défendre, puis de fuir la situation en montant dans sa chambre et en verrouillant la porte. Il doutait, de toute manière, que son père soit en capacité de monter l'escalier.

Il s'empara du sac qu'il avait préparé. Peu importe s'il était pris ou non à la SNU, il partait d'ici. Et il partait ce soir. L'un des bateaux de nuit ferait la liaison jusqu'au continent, puis il prendrait le bus jusqu'à Séoul.

Ça prendrait longtemps mais peu lui importait désormais. Plutôt se retrouver à la rue à Séoul que de rester ici.

Il prit soin de laisser une lettre, au cas où quelqu'un viendrait à s'inquiéter, bien qu'il pense cela peu probable, de son absence; puis il descendit rapidement l'escalier et quitta la maison, sans même laisser à son père le temps de dire ou de faire quoi que ce soit.

Partir était la meilleure chose à faire désormais. Il n'avait plus rien à faire ici.

Il eut l'impression de marcher des heures jusqu'au port, mais ça lui faisait le plus grand bien. Ce fut avec le coeur apaisé qu'il monta dans le ferry de nuit qui reliait l'île de Jeju et le continent.

Pendant le trajet, il resta plongé dans ses pensées, son casque sur les oreilles. Que ferait-il désormais? Il n'en avait aucune fichtre idée. Était-ce vraiment une bonne idée de partir? Sans doute pas, mais il n'en pouvait plus de rester ici.

Il avait besoin de vivre et non pas survivre. Il ne pouvait plus juste survivre et gaspiller cette vie si précieuse qui courait en lui. Non, plus jamais il ne voulait avoir à se demander s'il ne voulait pas juste en finir.

Quitte à vivre difficilement, il essaierait de vivre pour atteindre son rêve. Et il ferait de son mieux pour le faire bien entouré.

Le trajet vers Séoul dura plus de huit heures, mais Seungkwan n'avait pas vu le temps passer. Huit heures, c'était à la fois une éternité et à peine une goutte dans la machine infinie qu'était le temps.

Il venait d'accomplir le premier pas vers sa nouvelle vie. 

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