Chapitre 1: Le train-train de la rentrée
Ça faisait un bon bout de temps que Ren voyait cette fille dans ses rêves. C'était toujours la même, avec une apparence des plus singulière : une peau de nacre et des yeux qui ressemblaient à des aigues marines avec des iris géométriques. Le plus frappant restait ses cheveux en cristal bleu pâle qui scintillaient au soleil. C'était tout ce qu'il savait sur elle.
À chaque fois qu'il voulait l'approcher pour lui parler et tenter de la connaître, elle s'enfuyait en courant à travers les différents lieux de ses songes et même dans ses souvenirs. Elle se tenait toujours à bonne distance, pourtant elle semblait vouloir lui parler et lui demandait de l'approcher. Mais toujours il la suivait, toujours elle fuyait. Et puis il y avait ce battement de cœur lent et régulier qu'on entendait toujours.
Cette nuit là, c'était différent... D'ordinaire, cette fille semblait toujours faire attention à lui. Elle lui servait toujours son expression enfantine et taquine, comme pour l'inviter à jouer. Mais là, elle l'avait ignoré. Cette fois il avait eu l'impression d'assister à quelque chose d'inédit, comme s'il visionnait un film. Cette nuit il n'avait été que le spectateur de son rêve. Un rêve qui avait tourné au cauchemar. Qui étaient ces personnes terrorisées? Qui fuyaient-elles ? Pourquoi le monde autour de lui avait semblé si mort ? Aussi mort que le regard terrifiant de ce jeune homme aux cheveux d'obsidienne....
Une voix abominable et stridente lui creva les tympans et le sortit brutalement de ses réflexions. Sa petite sœur ouvrit la porte de sa chambre avec toute la grâce d'un pachyderme, lui mettant le cœur en panique. Assis dans sa couette, Ren eut à peine le temps de lever la tête que sa benjamine se jeta sur son lit. Le temps de reconnecter ses neurones, l'adolescent envoya un coup de pieds à sa sœur, en train de lui rouler dessus.
— Hello frangin, tu sais c'est quoi aujourd'hui ??? cria-t-elle en évitant le coup.
— Le jour où tu vas apprendre le français ! râla Ren avec sa voix grincheuse.
Il attrapa l'épaule de sa petite sœur et la balança au pied du lit, avant de se momifier dans ses draps en pestant. Il se frotta les yeux tandis que son réveil se mit en route. Ren arracha la prise pour le faire taire tandis que la tête de sa sœur fit un travelling avant dans sa direction, tout sourire et ses yeux noisette pétillants de canaillerie derrière ses lunettes.
— C'est l'heure de se lever en fait ! signala-t-elle. Allez debout, en plus tu pues de la gueule !
Ren sentit l'odeur immonde de l'haleine matinale de sa sœur en train de lui souffler à la figure. Il se tourna contre le mur en lui priant de dégager de sa chambre. Zoé, sa sœur, était vraiment la personne la plus monstrueusement agaçante et la plus niaise qu'il connaissait. Treize ans en apparence mais six de maturité. Ce qu'elle venait de faire fusionnait trois de ses activités favorites à savoir hurler de bon matin, réveiller tout le monde et agacer son frère.
Ren souffla encore quand la porte de sa chambre s'ouvrit à la volée en claquant contre le mur, dévoilant une jeune fille avec sa tête des grand jours. Vanessa, sa sœur aînée, une pintade de dix sept ans avec un poulpe ondulé sur la tête et l'air furieux. D'accord, Zoé avait dû passer par sa chambre avant de venir secouer Ren.
— Viens ici sale petite peste !!! cria l'ainée en se ruant sur la benjamine. Je vais t'apprendre à me sauter dessus dès six heures du mat' !
— Tu m'attraperas pas !!! railla Zoé.
Elle évita l'oreiller de Vanessa, sauta sur le lit de Ren pour esquiver sa sœur, puis fit un peu de trampoline dessus pour l'agacer, ce qui fonctionna...
— Putain Zoé dégage !!! cria-t-il en se débarrassant de sa couette d'un air menaçant.
— Maman, Ren veut me frapper !!!
Le jeune homme abandonna directement en entendant cette phrase. Zoé était pire qu'une alarme et quand elle se sentait menacée, elle criait et leur mère ne tardait pas à rappliquer. C'était un des privilèges de la petite dernière, celle qui ne fallait surtout pas frapper ou trop embêter au risque de se prendre la foudre maternelle.
D'ailleurs, des pas retentirent dans le couloir et leur mère, Hélène pointa sa tête ensommeillée dans l'encadrement de la porte. Elle avait sa robe de chambre chinoise et ses cheveux bouclés et châtains tombaient en cascade sur ses épaules. On voyait à son regard qu'elle réclamait le silence et que ses trois enfants arrêtent leurs bêtises et aillent se préparer.
Zoé descendit donc du matelas de Ren avant de tirer la langue à celui-ci, l'air satisfait. Un polochon vola dans la pièce et acheva de convaincre les deux filles de rapidement débarrasser le plancher. Quand elles furent enfin dehors Ren se laissa retomber sur le dos et soupira, un bras sur le front, ses cheveux noirs s'étalant sur son oreiller.
Cinq minutes...
C'est le temps qui lui aura fallu pour être déjà sur les nerfs. Entre sa sœur aînée qui n'arrêtait pas de s'accaparer tous les droits, le monopole de la télé, du canapé et de la salle de bain ; et la benjamine gamine au possible, immature et casse pieds, Ren avait juste l'impression d'être pris en sandwich... Il se donna du courage en se disant que cette après midi, il retrouvera sa chambre d'internat à Occlasia Academy et ses amis.
Il se redressa sur ses coudes en soupirant quand sa mère beugla que le petit déjeuner était servi. En se relevant, des mèches de cheveux irrégulières tombèrent sur son front. Il souffla dessus pour se dégager un peu la vue et se leva de son lit. Il ouvrit son volet à l'aide de la manivelle et découvrit les feuilles orange du platane devant chez lui, un ciel gris et un brouillard traînant au sol. L'automne était là... Tout comme l'humidité qui lui faisait onduler les cheveux, déjà assez en bataille et partant dans tous les sens en temps normal.
Il attrapa sa valise et la poussa dans le couloir, puis la porta dans les escaliers jusqu'au hall d'entrée de la maison où il vivait avec ses parents et ses sœurs. Dans la cuisine, il croisa son père, un homme aux cheveux grisonnants qui dormait debout devant la cafetière, tandis que sa mère s'affairait au grille pain pour en sortir les morceaux de charbon qui continuaient à brûler dedans.
— Bon étant donné que vous avez dix sept, quinze et treize ans, j'imagine que ça ne sert à rien de vérifier si vous avez toutes vos affaires dans les valises ou si les devoirs sont faits ? demanda Hélène.
— On est plus des bébés, soupira Vanessa, en roulant ses yeux ambrés. Quoique...ajouta-t-elle avec un regard en biais pour Zoé, le visage plein de Nutella. Sérieux, t'as quel âge... ?
Finalement, Hélène se rabattit sur des biscottes, étant donné que le pain était irrécupérable. Ren se servit une tasse de café au lait, et rajouta trois cuillères de sucre. Ses pensées dévièrent à nouveau sur son rêve alors qu'il remuait son mélange... Cette fille aux cheveux de cristal lui avait semblé complètement différente... Elle avait l'air d'une autre personne, d'une guerrière prête au combat et à faire face à la mort. Du peu qu'il connaissait d'elle, Ren savait que ça ne lui ressemblait pas. Elle restait très mystérieuse et hantait ses rêves depuis maintenant deux ans. Il soupira et trempa les lèvres dans son café.
Après le petit déjeuner, Ren se rua dans la salle de bain pour avoir la place avant ses sœurs. Vanessa pesta quand il entra et il afficha un sourire satisfait pour l'énerver. Puis, il fourra sa brosse à dent dans sa bouche et en même temps se passa un coup de peigne dans ses cheveux, mais à croire qu'ils ne voulaient pas bouger et rester en bataille.
En levant les yeux vers le miroir au dessus du lavabo, il sursauta en voyant l'espace d'un instant son reflet complètement différent. Un instant il vit son visage barré de cicatrices, ses cheveux beaucoup plus longs et ses yeux avec une teinte rouge sanguine. Le temps de cligner des yeux, ceux-ci avaient repris leur jaune ambré habituel. Décidément il était fatigué en ce moment. Vanessa le ramena à la réalité en lui filant un coup de coude dans les côtes pour le dégager du lavabo. Ren lui cracha du dentifrice sur les mains qu'elle était en train de laver.
— T'es dégoûtant !!! cria-t-elle.
Elle tenta de lui filer une calotte, mais étant plus petite que son frère cadet, elle dut se mettre sur la pointe des pieds pour atteindre sa tête. La voyant venir à des kilomètres, Ren esquiva sans soucis. Pour se venger de cette vaine tentative, Ren leva sa paume de la main vers le ciel, fabriqua une bulle d'eau avec ses pouvoirs élémentaires. Il la balança à la tête de sa sœur, ce qui lui trempa les cheveux et la fit hurler, puis il se rinça la bouche et s'enfuit en courant pour éviter de s'en prendre une.
Il partit rapidement dans sa chambre pour s'habiller, alors que leur mère criait dans l'appartement qu'elle partirait dans cinq minutes, tant pis si personne n'était prêt. Ren sauta donc dans un jean, enfila un sous pull noir et un sweat à capuche sans manche, un truc qu'il avait depuis des années, blanc et bleu. Il sautilla dans ses bottes rangers tout en descendant les escaliers pour rejoindre le hall d'entrée, où sa mère les attendait en se battant avec son trench-coat.
— C'est pas trop tôt ! pesta Hélène. Je vous rappelle que le train ne vous attendra pas !
— Et alors ? demanda Vanessa. Ils sont toujours à la bourre je te signale.
Hélène balaya sa remarque d'un geste de main tandis qu'elle fouillait dans son sac qui devait être sans fond pour trouver ses clés de voiture. Elle appela une énième fois Zoé et ils allèrent au garage de leur maison, en passant par une porte dans le hall. Le temps de dire au revoir à leur père, de charger les valises et d'ouvrir la porte du garage, la voiture démarra et s'élança dans la rue.
Coincé entre la portière et Zoé, Ren regardait les maisons en rangée et qui s'empilaient sur plusieurs étages défiler derrière la vitre. Le temps tourna rapidement à la pluie et les essuies glaces couinèrent contre le pare-brise. La voiture traversa le centre ville, puis un grand boulevard et enfin arriva en vue de la gare. Hélène partit se garer au parking souterrain et jeta les valises hors du coffre.
— Bon, comme toujours travaillez bien, conseilla-t-elle. On se reverra pour Noël avec toute la famille. Surtout soyez prudent pendant le voyage. Vous enverrez un message en arrivant.
Pendant qu'elle donnait des conseils à chacun, la fratrie se dirigea vers la gare en trainant leur valise respective. Hélène embrassa ses enfants en donnant leur billet de train et s'en alla en agitant la main, les yeux humides car elle n'arrivait décidément toujours pas à laisser ses trois enfants, tout seuls à la gare pour les revoir aux vacances de Noël. Une fois qu'Hélène fut partie en grillant au moins trois feu rouge sur la route de la gare, Vanessa distribua rapidement les billets de train à ses deux cadets.
— Bon, le quai trois doit pas être loin du deux et du quatre...
— Belle déduction Sherlock... soupira Ren en s'avançant le long des quais.
Il trainait sa valise derrière lui, et serra les sangles de son sac à dos. La pluie se mit à battre avec force sur le toit en verre de la gare, pendant que les trains s'arrêtaient dans un vacarme assourdissant. Le bruit suraigu du freinage fit grimacer Ren. Il arriva enfin en vue du quai trois, où leur train les attendait patiemment. Le jeune homme avança jusqu'au wagon et grimpa dedans.
La lueur orange des néons lui agressa les yeux et le son de la ventilation lui parvînt aux oreilles. Zoé lui fit « gentiment » passer sa valise en la lui jetant quasi dessus et Vanessa entra en dernière. Puis Ren entreprit de placer les valises sur les portes bagages prévus à cet effet. Il jura en se recevant celle de Vanessa, avoisinant les trois tonnes, sur les pieds.
— Ouais mais t'es un mec, soupira-t-elle alors qu'il pestait. T'es beaucoup plus grand et plus musclé que moi, t'es le plus fort et donc c'est à toi de porter les trucs lourds.
— Tu peux pas m'aider avec tes pouvoirs ? grogna Ren.
Vanessa secoua la tête, agitant ses cheveux ondulés et brun d'un air prétentieux.
— C'est interdit dans les espaces publics débillos.
Le pouvoir de sa sœur, c'était de réduire la taille et la masse des objets, mais elle était tellement flemmarde qu'il ne fallait jamais trop lui en demander, et dans son cas le « trop » voulait dire « très peu » pour le commun des mortels. Ren força sur ses bras pour monter la dernière valise et poussa un râle une fois qu'elle fut posée.
Il ramassa son sac à dos et suivit ses sœurs dans l'allée centrale. Il s'installa sur son fauteuil côté fenêtre et le train démarra quelques instants plus tard. Ren vissa ses écouteurs dans ses oreilles pour mettre ses frangines en sourdine et se laissa bercer par le mouvement lent du train, tout en admirant les gouttes de pluie sur la vitre. Ça formait un spectacle hypnotisant...
Il grogna quand il se sentit secouer et ouvrit un œil. Zoé lui avait attrapé l'épaule et le réveillait pour dire qu'ils arrivaient bientôt. Ren jeta un regard derrière la vitre et vit que le train avançait désormais le long d'un viaduc, à côté d'une autoroute. En dessous du pont, on voyait un marais s'étendre jusqu'à ce que l'œil ne puisse plus percevoir quoi que ce soit à cause de la pluie. Des arbres et de la végétation aquatique agrémentaient l'eau plutôt claire du marécage.
Un peu plus loin, on voyait déjà une ville se rapprocher. Perchés sur plusieurs collines, les bâtiments y avaient poussé comme des champignons il y a quelques siècles. Surplombant la ville, un château accompagné de bâtiments plus modernes semblait surveiller les alentours. C'était la ville d'Occlasia.
Le TGV s'arrêta dans un crissement de rail tandis que le micro des annonces crachouillait un message incompréhensible, mais il devait sûrement dire que c'était le terminus. Ren se battit avec les valises pour les descendre de leur étagère et rejoignit les portes du wagon, où les passagers, majoritairement des jeunes, descendaient de la rame.
Suivit par ses sœurs, Ren descendit sur les quais, puis rejoignit le hall de la gare, qui grouillait d'étudiants. Tous venaient des différents coins de la région, parfois d'encore plus loin et étaient scolarisés à Occlasia Academy. La diversité des peaux, des accents, des espèces était celle d'une population cosmopolite. L'école était un vrai melting-pot. En revanche, il n'y avait personne sur le palier de la gare, à cause du temps de début novembre et de l'automne déjà bien installé.
— Génial, grommela Ren en voyant le rideau de pluie. Personne n'a de parapluie ?
— Tu crois vraiment qu'on va se trimballer un parapluie dans les valises ? demanda Vanessa comme une évidence.
— Comme c'est bête ! lança Zoé d'un air moqueur. Vous allez devoir vous frapper la montée jusqu'à l'école sous la flotte ! Au revoir !
Tout en disant cela, la benjamine tendit ses mains en avant et un disque brillant et verdâtre apparut devant elle. Elle jeta sa valise dedans, qui disparut comme si elle s'était faite absorbée par ce disque, puis Zoé salua les deux autres avant de sauter et disparaître à l'intérieur de son portail de téléportation.
— Elle vient de nous planter là... dit Vanessa.
— Jure.
N'ayant pas vraiment de solution, Vanessa se résigna à enfiler sa parka de pluie, perdant ainsi toute dignité, surtout quand elle serra ses cordons de capuche. Ren ne put s'empêcher de rire devant cela
— Arrête de ricaner bêtement comme ça ! cria l'aînée. Je préfère ça plutôt qu'on me voit traîner avec un bébé de seconde ! T'as pigé ou pas ? En gros je te laisse là. Je te souhaite pas une bonne reprise !
— Et moi donc...
Sur ce, elle empoigna sa valise et partit sous la pluie. Elle n'était pas la seule élève à avoir opté pour la solution veste ou cape de pluie. D'autres tentaient de rester digne, les cheveux collés au visage et dans les yeux, et les vêtements trempés tandis que certains attendaient sûrement que l'averse s'arrête, chose improbable vu la noirceur du ciel. Ren soupira, n'ayant pas envie de se mouiller. À la place il tendit un bras en avant et le leva au dessus de sa tête.
Il s'avança sous la pluie et comme par miracle, les gouttes s'écartèrent autour de sa main, roulant le long d'un parapluie invisible. Avec sa capacité à contrôler l'eau, une petite pluie ne l'embêtait finalement pas. Armé de son parapluie improvisé, il attrapa sa valise et prit le chemin de l'école. Il se stoppa cependant en chemin en sentant une douleur sourde dans sa poitrine. Il se crispa et la douleur s'en alla comme elle était venue. Il soupira et reprit son chemin. Ce n'était pas la première fois que son cœur lui faisait des frayeurs comme ça...
Pour monter au château de l'établissement, il fallait marcher le long de la route au milieu de la pinède. Le portail de l'accueil était grand ouvert, laissant circuler des dizaines de jeunes gens. Ren se faufila entre les adolescents et se rendit directement dans le parc de l'école. Il passa devant le grand château principal, un bâtiments en pierre immense accueillant les salles de classes, la bibliothèque ou encore l'église. Puis il continua sa route en longeant le CDI, attenant au réfectoire, tous deux situés dans des bâtiments modernes. Enfin, tous collés les uns aux autres et rénovés à neuf, il y avait les dortoirs de l'internat.
Ren entra dans le bâtiment des lycéens. Tout de suite, il vit un grand couloir rempli d'armoires à casiers et d'élèves en train de se retrouver après la Toussaint. Ren prit un escalier à sa gauche pour monter au premier étage. Il passa par la première porte à sa droite pour rejoindre sa salle commune, celle des secondes de cette année, mais qui restera attribué aux mêmes élèves tout le long du lycée.
Il manqua de rentrer dans une élève qui sortait en même temps que lui. La fille en revanche n'eut pas le temps de s'arrêter et le bouscula brutalement.
— Regarde où tu vas bordel ! cria Ren.
Il observa plus en détails celle qui venait de lui déboîter l'épaule : cheveux roux, bouclés, coupés au carré, des taches de rousseurs de partout, des yeux de fouine noir comme de l'encre, c'était Cheyenne. Une jeune fille prétentieuse, qui adorait mettre son gros nez partout et qui aimait empoisonner la vie des autres depuis au moins la quatrième, année où Ren était arrivé dans l'établissement
— Déjà en train de râler et d'insulter tout le monde toi, soupira-t-elle en continuant sa route, comme si Ren n'était qu'un vulgaire courant d'air. Comment font tes abrutis d'amis pour te supporter ?
Ren se planta les dents dans la langue pour s'empêcher de lui balancer son sac dans la figure. En plus de le bousculer, elle l'insultait et l'ignorait à moitié. Il se calma comme il put en se disant que ça n'en valait pas la peine. Il poussa sa valise dans la salle commune des secondes. De grandes baies vitrés donnaient sur le marais dans la vallée, au pied de la colline où était l'établissement.
Ren monta ensuite un escalier menant à une coursive à l'étage supérieur. Il emprunta un couloir menant aux dortoirs des garçons. Il poussa une des portes du couloir pour rentrer dans une chambre, comprenant deux lits à double étages, ainsi que des armoires. Ren fit rouler sa valise jusqu'à son lit situé en bas. L'étagère situé à côté était recouvert par ses effets personnel qu'il avait laissé là pendant les vacances. Radio réveil, livres, manga, tous l'attendaient.
Pendant qu'il rangeait ses vêtement dans son armoire, Ren regarda un peu les autres lits. Celui au dessus du sien était recouvert de bandes dessinées et des plantes en pots agrémentaient l'étagère. Sur l'autre lit en hauteur, il y avait déjà une invasion de chaussettes et de vêtements, tandis que celui du bas était bien rangé et on pouvait voir une vieille console de jeu trainer sur l'étagère et des chargeurs s'emmêlaient sur la couette.
Ren partit poser sa trousse de toilette à la salle de bain de la chambre, puis il glissa son portable dans la poche de son jean et sortit dans le couloir. Il regarda la feuille scotché sur la porte depuis le début de l'année, avec ces quatre noms : Mattéo Abillac, Pix Beleth, Ren Saurac et Derak Von Klippel. Trois noms qu'il avait hâte de retrouver.
— Alors le rageux, t'as passé de mauvaises vacances ? demanda une voix grave.
— Super et toi le connard ? répliqua Ren en se retournant.
Derrière lui, il reconnut Antoine, un gars plutôt casse pieds de la classe, qui avait une furieuse tendance à donner des surnoms ringard à tout le monde, réduisant chaque individu à son trait le plus caricatural. Lui avait les cheveux couleur sable, rasé sur les côtés et des yeux gris mesquins.
— Ça fait plaisir de se faire appeler comme ça dès la reprise, grogna Antoine. Décidément tu changeras pas.
Il se crispa en sentant une main se poser durement sur son épaule, tandis qu'au contraire Ren, afficha un rictus. Antoine se retourna et croisa un regard bleu glace à pupille fendue. Le jeune homme derrière lui afficha un grand sourire, exhibant d'inquiétantes canines de vampire.
— Toi non plus tu changeras pas avec tes surnoms pourri, ricana-t-il. Mets à jour ton répertoire.
— Derak... soupira Antoine. La chauve souris... Qu'est-ce qui t'as pris de devenir ami avec ce type ?
— Et toi qu'est-ce qui t'as pris de laisser ton cerveau en quatrième ? demanda Derak d'un ton doucereux.
Antoine se débarrassa de la main posée sur son épaule, jeta un regard noir à Ren et repartit dans sa chambre. Mains dans les poches, Derak se rapprocha de Ren et agita sa main, dont le poignet était agrémenté d'une bonne dizaine de bracelet en métal ou en cuir. Avec ses canines pointues et proéminentes, Derak était un vampire. Il avait des cheveux courts coiffés en arrière et bruns, une peau à la limite du blanc, des oreilles pointues pleines de piercing et un penchant pour le sang, surtout le groupe B.
— Yo, la forme ? demanda-t-il.
— Ça peut aller, répondit Ren. Comme à chaque vacances de la Toussaint.
— N'empêche que cette fois-ci tu t'es pas cassé le bras comme un débile en faisant de la trottinette dans les escaliers ! ricana le vampire en croisant ses mains derrière la tête.
Ren lui répondit en grognant ce qui ne fit qu'amuser Derak.
— Ça va je te charrie ! fit-il en lui filant un coup de coude. Les autres sont au café de l'école. Enfin, je dis les autres, mais ils sont pas tous arrivés. J'étais venu chercher un truc, et je tombe sur toi, si c'est pas le destin !
— Mouais... Moi et ce salaud d'Antoine.
— Bah, ce gars là est pire qu'un cafard. Je me demande comment je pouvais être ami avec lui avant, mais étant donné qu'il a laissé son cerveau au collège, il est plus du tout amusant à fréquenter. Hé, tu sais que Matt s'est fait agresser par une pie en arrivant ?
Ren hocha la tête d'un air peu convaincu, mais l'absence de réponse n'embêtait jamais Derak. Ils descendirent à la salle commune, en croisant des têtes plus au moins connues, puis sortirent de la salle, descendirent encore un escalier et s'échappèrent du bâtiment. Dehors, la pluie avait cessé, mais le ciel restait menaçant.
Ils traversèrent le parc de l'école et rejoignirent le café. Un établissement très populaire, où on se retrouvait pour boire un verre en faisant les devoirs ou pour fêter les retrouvailles après les vacances. Derak poussa la porte en verre, ce qui fit teinter le carillon. Il salua la barmaid et courut jusqu'à la table du fond, avant de se jeter dans le dos de quelqu'un et lui entourer les épaules.
— Je suis de retour !! cria-t-il en serrant sa prise.
Un bruit de claque sonore se fit entendre, et sonné, Derak s'assit docilement sur la banquette en face, avec un sourire fanfaron.
— Une Sarah sauvage apparaît ! rit-il.
Ren se faufila lui aussi sur la banquette, à côté de Derak et en face de la jeune fille qui venait de lui administrer la baffe sonore. La fille en question était un démon, dans tous les sens du terme. Sa peau était rouge, elle possédait des cornes de bélier noire de chaque côté de sa tignasse châtain foncé. Ses longs cheveux tombaient dans son dos et étaient retenus au bout par un élastique. Des mèches plus courtes encadraient son visage ou étaient rangées derrière ses oreilles accessoirisées de plusieurs boucles en métal noires. Ses yeux couleur lave à pupilles fendues et entourés d'épais et longs cils incendiaient Derak.
— La sphère privée de la Sarah sauvage est sacrée ! répliqua-t-elle.
Elle soupira et leva la main pour saluer Ren. Il la salua à son tour et la jeune fille attrapa son chocolat liégeois et en avala plusieurs gorgées. Avec Sarah, c'était assez particulier et pour cause. C'était la meilleure amie de Ren durant la fin du primaire, puis celle-ci avait changé d'établissement pour le collège. Et quand Ren était arrivé à Occlasia Academy en quatrième, il avait eu la surprise de la revoir. Elle aussi n'y croyait presque pas et n'arrêtait pas de répéter que le monde était petit.
— Les vacances étaient bien ? demanda Ren.
— Comme toujours, mes vieux étaient trop occupés, donc je suis restée à l'école, avec Gabi...répondit Sarah en reposant son verre. Et vous ?
— Bah, rien de bien palpitant, dit Derak en soupirant. Juste que Matt s'est fait agressé par une pie !
À côté de Sarah, un garçon leva sa tête de la bande dessiné dans laquelle il était plongé. Il remonta ses lunettes carrés à monture épaisse devant ses immenses yeux vert olive, tout en soupirant. Lui, c'était Mattéo, mais tout le monde l'appelait Matt, un elfe microscopique qui faisait à peine un mètre quarante huit, avec de grandes oreilles pointues et des cheveux blond et mi-long. Malgré sa taille ridicule et son apparence de gamin de neuf ans, il sera un des premiers à fêter son seizième anniversaire après le nouvel an.
— Tu vas répéter ça à tout le monde ? demanda-t-il avec sa voix de pré-ado.
— Oui, parce que c'était trop drôle ! s'esclaffa Derak. Bref, et si on trinquait avant qu'on ait plus rien ?
— Avec plaisir, dit Ren.
— Et après on racontera nos vacances, même si on a pas fait grand-chose, ajouta Matt.
Ren attrapa le chocolat liégeois qu'il avait commandé quelques instants plus tôt et trinqua avec Sarah, Matt et Derak. Les verres s'entrechoquèrent tandis qu'un « santé » retentit.
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Bien le bonjour !!
J'ai bien pris mon temps mais voilà enfin la réécriture de cette histoire. J'espère que vous allez aimer cette nouvelle version.
Désolé pour les descriptions un peu longues, c'est l'étape un peu casse pieds des premiers chapitres.
Je précise que certains personnages ont un peu changé d'apparence, donc pas de panique si Derak se retrouve avec les cheveux bruns au lieu de noir par exemple. X)
Donc pour les anciens lecteurs comme pour les nouveaux je vous souhaite une bonne lecture !
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