Chapitre 9 : Je veux juste... Qu'est-ce que je veux, au juste ?

Amour aurait dû être la plus heureuse du monde.


Elle avait un amoureux.
Elle avait rencontré des gens.
Elle avait rejoué de la musique.
Elle avait participé à de nombreux petits bonheurs de la vie.
Elle semblait revivre.

Alors pourquoi ?
Pourquoi tout lui semble si fade, si gris, si terne ?

Pourquoi y repense-t-elle, tous les jours de sa vie, à elle.

À Ai.

Ai était vraiment une jolie jeune fille, assez coquette, le genre de fille qui aurait pu faire tourner les têtes de tous les garçons, au lycée.
Elle était aussi très bonne à l'école.
Tout lui promettait une belle vie, une vie heureuse, de succès.
Amour en aurait mis sa main à couper.

Ai et Amour était meilleure amie, au primaire.
En y réfléchissant bien, elle ne savait pas trop pourquoi.

Les parents d'Ai ne pouvaient venir la chercher juste après les cours, alors ils la laissaient au périscolaire, tandis qu'Amour rentrait chez elle.
Amour voulait beaucoup faire le périscolaire avec Ai, mais ses parents n'ont pas voulu.

Si elle l'avait su... Que ces périscolaires... Faisaient la vie dure à Ai...

Les jours passèrent, les mois aussi.

Plus ils passaient, plus Ai devenait faible, réservée, timide, et de moins en moins bonne à l'école.

Personne ne comprenait, Amour la première. Mais tout le monde pensait que c'était passager. Que ce n'était pas bien grave.

Mais un jour... Un sombre jour... Alors qu'Amour sortait de sa maison et allait récupérer Ai... Elle vit la police, les pompiers, les SAMU, les voisins, les parents de Ai, surtout, en pleurs, s'étouffant dans leurs larmes.

Et elle vit Ai.

Inanimée.

Livide.

Les yeux inexpressifs.

Morte.

Morte.

Morte.

MORTE !

Amour ne se rappelle plus très bien, à part qu'elle courait vers Ai en pleurant, qu'elle tombait sans pouvoir se relevait, qu'elle hurlait et qu'elle criait, que les adultes la prenaient dans leurs bras et essayaient de l'éloigner, qu'elle n'essayait même pas de résister, que sa souffrance était là, sa douleur, sa tristesse, que rien au monde ne pourrait plus jamais la rendre heureuse.

Elle avait tout abandonné, son nom, son identité. Elle n'était plus rien, maintenant. Elle était Dépression.

Et apprendre les circonstances de sa mort a été plus qu'un coup de massue.

Suicidée.

Car elle se faisait harceler au périscolaire.

Dépression ne comprenait pas. Pourquoi elle ne l'avait pas dit ? Pourquoi ?

Puis, peu à peu, des mois après sa mort, quand elle fut enfin capable de réfléchir un peu, elle comprit.

C'était peut-être subtil, mais il y avait des signes, beaucoup de signes.

Et c'était très subtil, mais Ai essayait de le dire à Dépression.

Ce fut un nouveau coup de massue. Dépression se sentit comme une moins que rien. Elle avait tant de remords et de regrets de ne pas avoir compris. Ou du moins, à temps.

C'était de sa faute. Elle est coupable de la mort de son amie.

Elle sombra, petit à petit, dans une plus grande dépression. Elle voulait mourir, mais quelque chose l'en empêchait.

Parce qu'elle savait l'immense tristesse qu'elle va apporter aux gens qui l'aiment si elle meurt ?

Parce qu'elle est en vie, et pas Ai ?
Parce qu'elle n'a pas envie de voir Ai au paradis ?
Parce que la mort est une punition trop douce pour Dépression ?

Dépression se replia sur elle-même. Elle ne voulait plus sortir de sa chambre. Elle ne voulait plus vivre.

L'enfer commença. Ai ne voulait plus sortir de sa tête.

Il lui a fallu du temps pour lire la lettre d'Ai.

Cette lettre s'excusait auprès de toutes les personnes qui lui sont chères, disait pourquoi elle s'est suicidée, et disait aussi pourquoi elle s'était jetée en haut d'une maison. Elle disait que c'était parce qu'elle voulait avoir la sensation de voler au moins une fois dans sa vie.

C'est alors qu'une idée germa dans le subconscient de Dépression. Une toute petite idée qui prit de l'ampleur.

Dépression ne savait pas ce qu'elle voulait.
Dépression voulait juste s'envoler, pour Ai. 

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