Chapitre 8.

- Mademoiselle Teresa Parker, veuillez vous présenter à la barre.

Le jour du procès était arrivé. L'avocat m'avait forcé à porter un costume affreusement petit car tous ceux que j'avais avaient été pris par les huissiers pour rembourser les dettes. Je tirais sans cesse sur cette cravate, ayant beaucoup trop chaud. Je n'écoutais pas, je n'arrivais même pas à penser de façon cohérente, mon cerveau commençant à être bien trop atteint par la drogue.
Mon avocat avait passé plus de deux jours à ma recherche, ne me trouvant ni chez moi, ni à la fraternité. Il m'a découvert à moitié mort sur les escaliers de Trafalgar Square. Je ne me souviens pas de comment je suis arrivé là. Comme je ne me souviens pas complètement de ce dernier mois.

Le jour où il m'a retrouvé, il m'était impossible de suivre une conversation normale. Mon avocat a donc dû attendre de nombreuses heures que les effets de la drogue se dissipent. Il devait être 2h du matin quand j'ai débarqué complètement désorienté dans sa cuisine. Désorienté mais avec les idées claires.
On avait donc passé le reste de la nuit à parler de ce qu'il y avait eu de nouveau depuis le jour où le face à face aurait dû avoir lieu. Pour résumer : Teresa avait effectué de nombreux tests psychologiques qu'elle avait brillamment passés -le mensonge et la manipulation, ça la connait-, tests auxquels j'aurai dû être confronté mais étant introuvable et ma réputation de jeune addict me précédent, mes résultats avaient été classés d'office. Ils avaient sûrement dû noter un truc du genre "défaillant" pour désigner mon profil. Concernant le test de paternité, son avocat avait annoncé au mien qu'elle le refusait catégoriquement qui je cite : "ne lâcherait pas l'affaire". Il y avait aussi les tests physiques. Je ne sais pas comment elle s'est débrouillée, mais elle a réussit à obtenir la preuve du viol. Son avocat n'avait évidemment rien dit de plus, pour nous mettre devant le fait accompli le jour J.

De ce que j'ai réussi à intercepter du discours de Teresa, je lui aurai tenu les poignets pour la maintenir allongée sur le lit d'une des chambres de la fraternité. Elle m'aurait apparement dit d'arrêter plusieurs fois, mais étant prit d'une folie qui ne me ressemblait pas, j'aurai abusé d'elle. À la fin de son discours merdique, j'ai lâché un rire. Un rire sinistre. Que des conneries.

- Monsieur Johnson, veuillez vous présenter à la barre. Annonça le vieux habillé d'une espèce de longue robe noire.

Je me suis difficilement levé, mon avocat a même dû m'aider à tenir debout, et je suis allé sur le siège face à l'assemblée. En regardant les personnes se trouvant derrière mon avocat, étant donc pour que je gagne, j'ai découvert la mère de Teresa. Uniquement la mère de Teresa. Elle était venue pour moi, et pas pour sa fille. Je savais qu'elle avait été de mon côté depuis qu'elle l'avait apprit, mais je ne pensais pas qu'elle le serait encore le jour du procès.
L'homme à la longue robe s'est raclé la gorge, signe que je devais réfléchir depuis bien trop longtemps, alors j'ai commencé. J'ai raconté ma version de l'histoire. J'ai bien précisé qu'à ce moment là nous étions en couple, malgré qu'elle me trompait déjà avec mon meilleur ami. Son visage était blême à ce moment, et moi, malgré que je savais déjà comment allait se finir cette histoire, je jubilais. La voir perdre toute confiance en elle, voir la honte dans ses yeux m'apportait bien plus de satisfaction que je ne l'aurai jamais imaginé. On m'a demandé de me rasseoir, les avocats se sont verbalement affrontés, et puis on a dû sortir.

Je venais de m'asseoir sur un banc, Maitre Williams -mon avocat- partant fumer après m'avoir donné une tape sur l'épaule. Je regardais le sol quand deux pieds se sont arrêtés devant moi. J'ai lentement remonté les yeux pour découvrir Minho, pointé devant moi.

- Qu'est-ce qu'il t'est arrivé Newt? De quoi est-ce qu'il se mêle, cet abruti? Winston m'a raconté qu'il t'avait retrouvé à moitié mort dans ton salon.
- Qu'est-ce que ça peut te foutre?
- T'es mon meilleur ami. J'ai lâché un rire que je ne pensais pas contenir. Il signifiait toute la haine que j'avais envers lui, et toute l'ironie de sa phrase.
- Mon meilleur ami? Allé, casses-toi.
- Newt...

Il a tenté de poser sa main sur mon épaule, mais je me suis rapidement levé, et le dépassant de près d'une tête, il a perdu tout son avantage.

- Ne me touches pas Minho.
- Je suis désolé, Newt.

Et je lui ai craché dessus. Là, comme ça, devant les avocats, Teresa et sa mère. Je suis sortis prendre l'air, parce qu'avec tous ces regards posés sur moi, j'allais finir par exploser. Je savais que j'allais perdre le procès, je le savais depuis le début. Et pourtant, il y avait toujours cette part d'espoir que tout humain possède, même dans les situations les plus désespérées, le protégeant de la dépression, évitant de le faire sombrer totalement. Après plusieurs minutes à patienter, j'ai vu l'assemblée retourner dans la salle du procès, alors j'ai supposé que la pause était terminée.

Mon avocat m'a guidé jusqu'à ma place, je ne titubais plus. L'affrontement avec Minho m'avait vidé de toute substance illicite. L'avocat de Teresa a été appelé et s'est tourné vers moi avec un regard mauvais, tandis que Teresa se dirigeait vers le siège des personnes interrogées.

- Des tests médicaux ont été effectués sur ma cliente, afin de prouver un acte de viol. Les résultats sont sans appel, et prouvent que Mademoiselle Parker a subi une agression cette nuit du 8 juillet 2016.

Je dégluti fortement, jetant un coup d'oeil vers mon avocat. Je l'avais rarement vu aussi tendu et ce n'était pas bon signe. L'avocat de Teresa fit parvenir une feuille au juge, avec les soit-disant résultats dessus.

- Comme vous pouvez le voir, les faits évoqués précédemment concernant les actes de violences faits sur ma cliente ont été prouvé médicalement. Ces tests ont été effectués le lendemain de l'agression. Il se tourna vers Teresa. Mademoiselle Parker, pouvez-vous nous expliquer en détails l'acte sexuel que vous avez subi, s'il vous plait?

Il la regarda avec une fausse compassion et j'eue envie de vomir.

- Oui.. Sa voix était légèrement éraillée, mais je savais que là encore elle jouait la comédie. Il tenait les poignets près de mon visage pour que je ne puisse pas me défendre. Je lui disais que je ne voulais pas, que je n'en n'avais pas envie mais il m'a quand même forcée. J'ai résisté les premières secondes mais j'ai fini par ne plus lutter car je n'avais plus de force.

Elle récitait son texte, l'ayant soigneusement apprit par coeur. Elle me regarda une fraction de seconde, et cela suffit largement pour que j'y lise qu'elle savait aussi bien que moi que rien ne s'était passé comme ça. Et pourtant, je savais que le juge l'avait cru. Et que j'étais fini.
Teresa est retournée à sa place après les nombreuses précisions que lui a demandé son avocat, qui a continué de la défendre encore de longues minutes, avant que notre tour arrive de nouveau. Mon avocat m'a demandé ma version de l'acte, totalement différente de la sienne. J'y ai expliqué que je respectais les femmes, que je n'avais eu aucun rapport depuis Teresa, même complètement bourré. Seulement quelques baisers échangés avec des inconnues. Une fois de retour à ma place, mon avocat a fait comme le sien et m'a défendu autant que possible. Puis, on nous demanda de sortir de nouveau afin de délibérer. En temps normal, le procès aurait duré plusieurs jours et on aurait échelonné les entretiens, mais sous demande exceptionnelle de l'avocat de Teresa, le verdict serait donné ce jour. Quand j'avais demandé à Maitre Williams pourquoi, il m'avait dit que c'était probablement pour préserver la grossesse de Teresa.

On s'est donc isolés dans un endroit du vaste couloir du tribunal afin de débriefer sur l'audience. Il me disait que ça pouvait marcher, que nous avions de bons arguments, mais je voyais clairement dans son regard qu'il essayait seulement de me rassurer. On avait fini par s'asseoir sur l'un des bancs en bois longeant le mur, attendant que le jury délibère. 30 minutes ont passées, puis une heure. Après ce qui me parut une éternité, la porte de la salle d'audience s'ouvrit et quelques minutes plus tard, on fut tous de nouveau installés.

On m'a demandé de rester debout à ma place, tout comme Teresa devait le faire. Puis, l'homme à la longue robe a commencé un long discours. Je n'ai entendu que la fin.

- Monsieur Johnson, nous vous déclarons coupable de tentative de viol sous l'effet de l'alcool. Vous devrez dédommager la victime d'un montant de 7 460£ mais aucune peine de prison ne vous est attribuée car les traces retrouvées sur la victime ne prouvent pas que vous en êtes l'auteur, aucun test ADN n'ayant été effectué.

Je me suis écroulé. Mes jambes ont lâchées, mes forces m'ont abandonnées, et mon ouïe a cessée de fonctionner. Comment allais-je pouvoir rembourser une somme pareille? On m'avait déjà tout prit.

J'étais fini.

Détruit.

Ruiné.

Un coup de marteau a résonné dans toute la salle, me faisant reprendre mes esprits peu à peu. Minho serrait Teresa dans ces bras. Je n'arrivais plus à respirer. Il fallait que je sorte. Immédiatement.

Sans m'en rendre compte, j'étais déjà en train de dégobiller tout ce que j'avais ingurgité durant la journée. J'étais d'une blancheur à faire peur, mes mains tremblaient.

J'avais besoin de ma dose, juste une petite, histoire de faire disparaitre cette douleur. Ne fais pas ça Newt. Le squat. Il fallait que je m'y rende immédiatement. Tu peux encore tout arranger. Je n'ai plus d'autres choix, je n'ai plus rien. Tu peux encore te reconstruire si tu arrêtes cette merde. Une ligne. Une inspiration. Arrêtes ça ! Une autre, il m'en faut encore une. Juste une seule. Stop ! Une inspiration, encore une. Newt ! Un join. Une ligne. Une piqure. Le noir complet.

Abruti.

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