Chapitre 5 - Partie 3
Je marmonne une nouvelle fois. Mon ventre vient crier famine pour la énième fois. Rouge est loin d'être rentrée, mon père finalise encore quelques papiers à son travail et le soir n'a même pas commencer à poindre. Mes talents de cuisine sont aussi poussé que Luffy qui tente de faire des pâtes au micro-onde –je vous laisse donc imaginer le niveau.
Je me tords dans ma couverture, prenant soin d'éviter tout mouvement brusque à ma cheville. J'affiche une moue boudeuse, tout en examinant ma baie vitrée. J'observe mon jardin vu de ma chambre, sans pouvoir bouger. Des gargouillis recommencent leur danse lassante. Eh puis tant pis pour ma ligne –et de toute façon, je n'en ai jamais pris vraiment soin.
Je retire la couverture, m'assois sur le lit, agrippe machinalement les béquilles et me redresse. J'exécute quelques petits sauts pour passer ma porte, puis longer le couloir menant aux escaliers. Dans un effort demandant de la concentration –tellement que le bout de ma langue dépasse mes lèvres, je descends pas à pas ceux-ci. Je dépose tout d'abord mes béquilles, puis pose ensuite mon pied. Je répète ces mouvements jusqu'à apercevoir le salon, d'où j'entends des voix familières.
Je tente d'apercevoir la table ; je vois Luffy, dos à moi, en train de s'exclamer sur des sujets que je ne saurais décrire maintenant. Je descends un peu plus de marches ; je perçois des cheveux verts, trois boucles d'oreille pendantes et une peau relativement bronzée. Je ne peux m'empêcher de sourire bêtement en voyant Zoro. Je sautille fébrilement les dernières marches et franchis le salon pour les rejoindre.
Zoro relève les yeux vers moi ; ses pupilles s'agrandissent, puis reviennent à leur état normal. Je devine à son regard qu'il est surpris. Un léger sourire vient étirer son visage.
- Tu es une blessée de guerre maintenant ? (il arque un sourcil, toujours son sourire joueur ancré sur ses lèvres)
- Si tu savais, rétorqué-je, imitant son sourire.
Un bruit assourdissant vient rompre notre discussion –ou du moins, le commencement. Interloquée, je regarde le provocateur de ce son ; Luffy. Il avait brusquement bondit de sa chaise, laissant celle-ci frotter lourdement contre le plancher.
Luffy s'agite lentement, comme s'il venait d'être prit dans un rayon ralentisseur. Dans un cri où je n'arrive à discerner aucun des mots, il commence une course effrénée dans les escaliers qu'il grimpe à une vitesse surprenante. Je penche doucement la tête sur le côté, incrédule.
Je cherche des réponses en questionnant silencieusement Zoro qui hausse les épaules, tout aussi désemparé que moi.
- Une vraie pile électrique, soupire-t-il passant une main contre son visage.
- Oui, pile électrique, comme tu dis, répété-je après lui. (je marque une légère pose, observant longuement la table) Une pile électrique qui manque de savoir-faire apparemment. Tu veux quelque chose à boire ?
- Je peux me servir seul, sourit-il.
- Non, tu es un invité.
- Je disais surtout ça par rapport à ta cheville (il pointe du doigt celle-ci).
Ma langue claque instinctivement contre mon palet. Sans lui répondre, je me déplace vers la cuisine ouverte sur le salon. J'entends ses pas me suivre. Il parle, mais, sachant ce qu'il allait dire, je fais mine de n'avoir rien entendu. Je dépose délicatement mes béquilles contre la table, commençant à farfouiller dans les placards.
- D'ailleurs, comment tu as réussi à te faire ça ? demande-t-il, se plaçant à côté de moi.
- Tout à l'heure, lorsque notre classe s'entraînait au relais (j'arrive à attraper un verre et le sort). En passant la ligne d'arriver, je suis tombée (un sourire commence à poindre sur son visage). Je t'interdis de rigoler (j'arque un sourcil, amusée).
- Je n'ai encore rien dit, réplique-t-il retenant une envie irrésistible de rire.
Je ne peux m'empêcher de ricaner de ma propre maladresse. Je cherche du regard le robinet ; il se trouve à côté de lui. Je lui tends donc le verre, pour qu'il puisse le remplir. Il l'agrippe, le prend. Nos doigts se frôlent, puis viennent se toucher. Je sens mes poumons se bloquer, empêchant l'air de traverser. Mes yeux sont rivés sur le verre, nos mains, et, mes pupilles sont comme attirées.
Je regarde son bras, puis longe ses épaules jusqu'à remonter son cou et finir sur ses yeux. Ses yeux animés d'une lueur que je n'ai vue sur lui auparavant. Il pose délicatement le verre sur le bar, sans me quitter des yeux.
Je n'arrive toujours pas à respirer. Bizarrement, cette sensation n'est pas désagréable ; je ne suffoque pas. Je ressens comme une douce chaleur m'étreindre. Ses doigts glissent le long de mon épaule, m'arrachant un frisson et viennent se caler sur ma nuque. Il la frôle, la parcourt plusieurs fois. Je n'arrive pas à me défaire de ses yeux. Une emprise silencieuse et puissante qui presse mon corps. Un peu comme celle d'Ace.
Quelques secondes après, son visage se rapproche jusqu'à venir effleurer mes lèvres. Sans comprendre, mes yeux se ferment délicatement. Je ne réfléchis plus, du moins, mes pensées sont brouillées au possible. Nos bouches se referment l'une sur l'autre, dans une attention farouche.
Comme s'il en était le remède, ma respiration reprend dans des souffles rauques qui s'échappent de mon nez. Le baiser change, devient plus violent, plus... Intense. Nos lèvres se découvrent et se remuent. Ses mains se faufilent sur mon corps jusqu'à agripper mes cuisses et me relever en lâchant un soupir rauque et particulièrement sexy.
Il me dépose sans ménagement sur le plan de travail, laissant ses mains maintenir mes jambes. Notre contact se développe une nouvelle fois, ça en devient excitant, et dangereux. Je laisse mes doigts jouer avec ses cheveux, mes mains découvrir ses bras et mes lèvres dévorer les siennes.
Soudain, la porte d'entrée s'ouvre et se referme dans un claquement infernal. Stopper dans notre élan, nos lèvres se séparent. Mes paupières s'ouvrent avec une lenteur abominable. J'aperçois Ace dans l'encadrement de la pièce. J'écarquille les yeux.
Il est là, en face de moi, à nous regarder. Son visage n'exprime rien. Il a l'air lassé, ennuyé et désintéressé. Un léger froncement de sourcil vient ensuite durcir ses traits. Ses pupilles se rétrécissent, me laissant voir ses iris grises. Zoro se retourne et se détache de moi. Il avance vers Ace, totalement décomplexé.
- Ace ! Ca faisait longtemps ! s'enjoue Zoro.
- (un sourire doux apparaît sur son visage) Qu'est-ce que tu deviens, depuis la dernière fois ?
Je clignote frénétiquement des yeux. Je toussote doucement, gênée de cette situation. Les deux garçons semblent avoir oublié ma présence et je suis toujours assise sur le plan de travail. Je les regarde partir en direction des escaliers, les mêmes que Luffy avait auparavant grimpé.
Tremblante comme une feuille, je pose le pied à terre et prend mes béquilles. Je ressens un malaise profond. Comme si ce que je venais de faire était mal. J'avance jusqu'à la table où je peine à m'asseoir. Tout mon être en tremble. De mes ongles, jusqu'à la pointe de mes orteils. Je ne sais pas en penser, tout ce bouscule dans ma tête.
Pourquoi m'être laissée embarquer par mes pulsions hagardes ? Pourquoi avoir laissé Zoro étreindre mes lèvres ? Mes doigts tapotent nerveusement la table. Je déglutis à de nombreuses reprises. L'image d'Ace, son regard me toisant, ses yeux, son regard dont je ne saurais décrire les sentiments, me réapparaît sans cesse.
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