Chapitre 4 - Partie 1
Chapitre 4 – My Demons
Je claque fermement la porte de ma chambre, dans un état second. Mes doigts se tendent anormalement et le poids qui compresse lourdement ma poitrine ne cesse d'augmenter. La scène se répète, passe en boucle dans ma tête.
Mon cerveau se souvient de chacune de mes sensations et les réitère sans mon accord. Elles parcourent doucement mes lèvres et retracent ce long frisson le long de mon corps. Elles embrument progressivement mes pensées, se rassasiant ces bribes.
Je passe un bras contre mes lèvres, outrée. Sans réfléchir d'avantage, je me précipite sur mon lit pour m'y jeter. De la musique. Je dois en écouter. Je sors mes écouteurs et les branche. Sans attendre, j'enclenche la première playlist qui s'affiche. Le son arrive à mes oreilles ; je monte le sons. Mes oreilles sifflent, mais cela semble ne pas m'importer. Mes muscles se détendent et l'emprise sur ma cage thoracique se retire tout aussi vite qu'elle est apparue. Mes poumons inspirent, puis expirent dans des spasmes irréguliers. Mes idées se replacent et s'organisent.
Il n'avait pas à faire ça, et je n'avais pas à me mêler de ce qui ne me regardait pas. Ça s'arrête là. A un règlement de compte idiot et immature. Rien de plus, rien de moins. Et pourtant, j'arrive à me dégouter moi-même.
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Je martèle doucement mes doigts contre ma trousse, cherchant nerveusement un objet. Je grogne, rumine et fronce les sourcils en sentant la surface de mon majeur heurter l'extrémité du compas. Je m'empresse de retirer ma main pour venir masser l'endroit endoloris. Une goutte de sang coule et s'écrase sur ma jupe. Puis, une deuxième, suivie d'une troisième.
Semblable à celui d'Ace, hier, qui a lentement parcouru le long de sa mâchoire pour aller s'étaler sur le parquet propre. Ses lèvres devaient souffrir silencieusement, alors qu'auparavant, elles étaient délicatement en train de se remuer contre les miennes dans une danse interdit.
Je frotte mes cheveux et m'intime de ne plus repenser à cette scène. De toute évidence, ce baiser m'obsède. Et cela n'a rien à voir avec le fait qu'on soit lié par un remariage. Je n'arrive toujours pas à oublier cette sensation qui menace de poindre à chaque bribe. Je ne me pensais pas aussi fragile et fébrile dans ma façon de penser. Je pensais être quelqu'un qui est capable de réfléchir et de ne pas prendre des décisions hâtives. Quelqu'un qui ne possède pas de a priori, ni de préjugés. Quelqu'un qui ne se laisse pas berner aussi facilement.
J'ai aimé ce baiser. Mon corps frémit à cette pensée. Oui, j'ai aimé. Même si je me suis montrée sauvage et agressive, ce n'était rien de plus qu'un mouvement de défense.
Je presse mon doigt contre un mouchoir. Je marmonne des choses incompréhensibles, que moi-même je n'arrive pas à déterminer, puis agite mes cheveux dans des gestes tumultueux.
- Ren ? Tu te sens bien ? m'interrompe Vivi.
- Hein ? Oui, désolée. Je suis juste... Préoccupée.
Vivi me toise de haut en bas, et s'arrête en fixant mes yeux. Ses lèvres s'étirent doucement pour laisser un rire chantant les traverser. Son poing vient soutenir sa joue, son air amusé toujours encré sur son visage.
- Tu as besoin de te changer les idées, affirme-t-elle. Ce soir, certains élèves ont organisé une soirée pour fêter la fin de leur premier examen, et tout le monde y est invité. Tu voudrais m'y accompagner ?
Mes yeux clignotent frénétiquement. Je ne pense pas vraiment que mon cerveau était prêt à ce genre de question. Moi ? En soirée ? Un rire nerveux vient passer ma bouche.
- Vivi, tu m'as bien regardée ?
- Oui, me coupe-t-elle.
- (déstabilisée par cette réponse soudaine, je me force à enchaîner) Tu me vois sincèrement en soirée, en train de me déhancher sur une piste de danse ?
- Je vois seulement une fille qui manque de confiance en elle. Tu sais, Ren, une soirée ne rime pas forcément avec danser. Le but est principalement de s'amuser (sa phrase se conclue sur un sourire radieux). Et oui, je te vois parfaitement bien te remuer en soirée.
Je sens mes joues chauffer anormalement. Mes lèvres s'étirent sans que je leur intime de faire quelque chose. Entendre quelqu'un dire ça peut être comme un déclanchement, un déclic.
J'ai toujours été complexée par ma silhouette. Ma taille ne m'a jamais dérangée, même si à côté de plusieurs je parais minuscule. Des épaules larges, un buste plongeant pour ensuite rebondir sur de légers poignées d'amour. Je possède des formes, et je ne les assume pas. Je n'ai jamais été ce genre de fille fine. Même si je le souhaiterais, je ne pourrais pas, je n'y arriverais pas. Alors je me vois très mal bouger sous les lumières multicolores virevoltantes partout, collée entre des personnes, des inconnus.
C'est vrai que Vivi ne peut pas envisager ce problème ; ses courbes sont parfaites, ses hanches fines et une poitrine légèrement au-dessus de la norme.
- Partante ? (elle place une main devant moi, face vers le plafond, attendant un retour)
- Oui. Mais je ne danserai pas, souris-je avant de frapper sa paume.
Elle ne peut renfrogner sa joie, et pousse de petits cris. Je ne peux m'empêcher de l'imiter. Sa bonne humeur est communicative. Non, je me trompe. Vivi est ce genre de personne qui possède une influence pesante sur les sentiments, et je ne le dis pas négativement. Juste que son aura en impose énormément.
- Je passerai chez toi, avant. Je te ferai toute belle. (elle semble déjà imaginer ce dont elle aura besoin en comptant à l'aide de ses doigts) Ah ! J'ai entendu dire que ton frère sera en charge de l'ambiance, avec son groupe.
Mon sourire s'est noyé progressivement à l'entente de cette dernière phrase. Mon frère ? Charger de l'ambiance ? Dans un groupe ? Les informations viennent successivement combler certaines questions. Ma curiosité s'accroît d'un coup.
- Luffy ? dis-je sans réfléchir.
- Non (elle semble surprise). Ace. Tu ne sais pas qu'il est guitariste dans un groupe ?
Mes paupières réitèrent une nouvelle fois ces saccadements réguliers. Hein ? Pardon ? Un rictus vient chatouiller, puis gratter ma gorge. Ace. Jouer dans un groupe. Le rictus s'échappe doucement. Ce type qui n'a aucun savoir vivre, odieux et forceur. Je reconnais que son charisme est particulièrement attirant, c'est d'ailleurs à cause de ça que je me suis laissée entraînée. Et je mentirais si je disais que son physique est repoussant.
- Si tu réagis comme ça, c'est que tu ne devais pas le savoir.
- (je me racle la gorge) Il est populaire ?
Ses yeux écarquillés se posent sur moi. Ok ok, je n'ai rien dit.
- Tu plaisantes ? Ace est un des garçons qui possède une cote incroyable auprès des filles. Mais il n'est jamais sorti avec l'une d'elles, il préfère s'amuser avec, d'après ce que j'ai entendu. (elle se tourne vers moi avec un air dramatique) Tu sais qu'avant que le lycée soit au courant que tu étais sa sœur, liée par le mariage, certes, des commérages ont fait trois fois le tour de l'établissement ?
- Vivi, ça fait trois jours que je suis au lycée.
- Les rumeurs courent vite, ici, crois-moi. Entendre les mêmes choses, chaque jour, c'est lassant. Il ne faut pas y prêter attention.
Ses bras se croisent derrière sa tête, et ses jambes la maintiennent dans un équilibre parfait sur sa chaise. Je l'aperçois se balancer lentement. Tout à l'heure, lorsqu'elle parlait d'Ace, j'ai décelé une lueur d'arrogance et de mépris, elle s'est sentie obligée de se justifier, en parlant des relations qu'il entretenait avec les filles, avant de changer de sujet.
- Tu es amoureuse de lui ?
- (sa chaise retombe lourdement sur le sol, un air paniqué la submerge d'un coup) Qui, « lui » ? (elle place ses mains devant elle, les trémoussant frénétiquement de droite à gauche, comme pour se protéger d'une force inexistante)
- Ace.
Ses joues rougissent lentement, la question semble la percuter doucement, jusqu'à atteindre son paroxysme. Son visage subit un changement brusque de couleur, passant de beige à rouge. Elle place ses mains devant son visage, cherchant à cacher ses rougeurs soudaines. Une réaction plus spontanée, tu meurs. Mon visage se tord dans un nouveau rictus.
- Ne me dit rien, je pense que j'ai compris, lui dis-je.
Ces questions qu'elle m'avait posées hier semblent se justifier ; Elle pensait que j'étais la petite amie d'Ace. Cette scène réapparue brusquement dans mes pensées. Je n'arrive décidément pas à extraire ces fichues sensations.
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