42. les escaliers
Tw : C'est le dernier chapitre
À peine Regulus arrivait-il qu'une porte s'ouvrit à la volé, laissant échapper des remerciements et des adieux. Sirius et Remus en sortirent main dans la main leurs yeux s'accrochant aux seules deux autres présences du couloir.
« Alors ? demandèrent ces deux derniers, en même temps.
- Oh ! On doit attendre encore une trentaine de minutes pour les résultats, s'écria Remus avec peu de naturel. Pourquoi vous rentrez pas à la colloc' en nous attendant ?
James plissa les yeux, sachant que son ami avait toujours été un menteur catastrophique - à la différence de Sirius qui aurait pu faire avaler à un scientifique que la Terre était triangulaire. Regulus lui, mit ça sur le compte du stress mais resta méfiant. Il jeta un coup d'oeil à James, qui échangea avec lui un haussement de sourcils. Échange qu'ils coupèrent net, se souvenant qu'ils étaient censé être en froid.
- On vous envoie un sms dès qu'on sait. » enchaina Sirius, hochant la tête pour confirmer les propos de son copain, cette fois avoir une sincérité à s'y méprendre.
Les deux autres se regardèrent, cette fois avec moi de complicité, confus. Il y avait une manipulation quelque part, il était difficile de savoir de qui elle venait et s'ils devaient la suivre ou l'étouffer sous un refus sec, au risque de faire de la peine à quelqu'un.
Parce qu'il pensa qu'ils avaient peut-être des mauvais résultats et préféraient rester seuls un moment, James trancha pour la crédulité et laissa ses amis tout les deux, quittant l'hôpital avec Regulus sur les talons, dans un silence de mort.
Il n'était pas en colère contre lui, même pas surpris qu'il soit ici, mais des émotions diverses se mélangeaient en arc en ciel dans son cerveau et il ne savait pas comment les exprimer. La gêne prenait le dessus et avec elle le silence pendant qu'ils passaient les portes et gagnaient la rue. Sans un mot, ils suivirent le chemin jusqu'à chez eux sans se parler, par imitation et par repères visuels. Ils reconnaissaient les lieux. Ils étaient passé par là pour rejoindre le bus menant vers l'aéroport il y avait moins d'une semaine, on aurait dit que c'était des années plus tôt.
Ils passèrent en même temps qu'un voisin dans l'entrée de l'immeuble et ne s'essoufflèrent même pas pendant leurs ascension de la cage d'escalier jusqu'à l'entrée de l'appartement, trop concentré sur tout le reste. Mais arrivé là, James fut bien obligé de parler, fouillant dans toutes ses poches et se maudissant à voix haute. N'étant que deux à vivre là de manière officielle, il n'y avait que deux clés. Une pour Sirius, une pour James. On s'assurait le reste du temps qu'il y avait quelqu'un pour accueillir Remus ou Regulus.
« J'ai oublié mes clés. » dit-il démuni.
Il avait honte de faire ça à Regulus, honte de lui qui oubliait toujours quelque chose et il était effrayé à l'idée d'attendre le retour de Sirius et Remus comme ça. Qu'est-ce qu'ils allaient bien pouvoir se dire pendant une heure ?
« Si tu veux on redescend ? reprit-il, on peut aller trainer à la librairie ou juste toi... je t'enverrais un message quand ce sera ré-ouvert-
- Je redescend pas ses escaliers. » Coupa Regulus tout en s'installant par terre, passant ses jambes entre les barres de la rampe, la tête penchée vers le bas pour regarder la spirale que formaient les marches. Elles s'enroulaient au fil des étages comme la coquille d'un escargot.
Il voulait parler à James, c'était ce qu'il avait répondu quand son frère le lui avait demandé par message. Il n'aimait pas la façon dont les choses s'étaient finies, pleines de tristesse et de non-dits. Après y avoir réfléchit il voulait que sa change, que ça se répare ou se brise pour de bon. Quitte à rompre, autant le faire bien.
Il sentit James s'installer à ses cotés, en tailleur, trop grand pour faire balancer ses jambes dans le vide au risque de rester prisonnier entre les barreaux.
« Je suis désolé. finit par dire celui-ci, de nouveau envahi par la honte et la gêne.
Ha, on en parle, alors ?
- Non c'est moi. répondit l'autre garçon sans lâcher les escaliers des yeux. Je pensais que je pourrais gérer Paris mais en fait j'en étais incapable, je me suis sur-évalué. Je croyais que j'étais guérit, que j'allais mieux et... à l'évidence j'avais tort.
- Non mais moi aussi, j'aurais du le voir. J'aurais du m'en douter aussi, choisir un autre endroit, t'en parler avant... Peut-être que c'était moi qui voulait partir un peu et que j'ai pensé que ça serait bien pour nous deux alors que... ça a empirer les choses pour toi, hein ? Je me sens égoïste.
- Tu l'es pas. soupira Regulus. Rien de tout ça n'est de ta faute. Je sais que je te l'ai dit - je crois, mais c'est faux. T'es pas mes parents. Ni mes maladies mentales, alors, rien n'est de ta faute. C'était juste... une situation qui a tout re-déclenché, mais tu ne pouvais pas le savoir. Si ça c'est re-déclenché c'est juste que je vais moins bien que je le croyais. Et je me sens très con. J'aurais du faire plus attention.
Il retira son regard du vide et se tourna vers James, changeant de position au passage. Leurs genoux se touchaient presque, maintenant. Regulus se souvenait comme il s'était sentit mal à l'idée qu'il le touche, la dernière fois, comme si le moindre contact l'envahissait, comme si en le touchant il allait pouvoir lire ses pensés, comme ce contact lui avait rappelé les coups de ses parents. Aujourd'hui le toucher le rassurait. Ça lui avait manqué.
- Moi aussi. Et je voulais pas ça, dit James. Je voulais que tu te sentes bien avec moi, j'ai fait le contraire.
- Je me suis toujours senti bien avec toi, corrigea le plus jeune.
- Je croyais que je te comprenais pas ?
- J'ai t'ai dit ça ?
- En quelque sorte.
Regulus secoua la tête, jouant avec ses doigts contre le sol.
- Je pense que j'avais cette idée que quand on aime vraiment une personne on doit la comprendre sans même lui parler. On doit pouvoir savoir quand ça va et quand ça va pas et prédire pourquoi... être attentionné. (James tordit ses lèvres mais Regulus le vit et enchaina :) Mais j'ai compris que ça marchait pas comme ça. Pas pour tout le monde. Pas pour toutes les relations, on a tous des façons d'aimer différentes et de prendre soin des autres différemment. Je ne sais pas trop être attentionné, moi, et je ne sais pas bien lire les expressions sur les visages, je serais incapable de reconnaitre si quelqu'un est triste alors, comment je peux l'attendre de toi ? Et puis tu as aussi tes problèmes. Je croyais que tu pouvais pas me comprendre parce que t'étais pas trans, pas suicidaire, ni... autiste présumé. Mais il y a aussi des choses que tu es et que je ne suis pas, que je ne peux pas comprendre et que tu vis. C'est ma première relation amoureuse, alors, il faut que... je brise toutes les attentes sociales que j'ai autour du couple et que j'accepte que c'est pas aussi parfait que je le croyais.
- Je voulais que ce soit parfait. avoua James cette fois.
- C'est pas possible. rassura Regulus, tentant un sourire.
- Tu aurais préféré que je sois trans ? Ou autiste ? demanda l'autre. Certains ne sortent qu'avec des gens qui leurs ressemble pour ça.
- Tu aurais préféré que je sois pakistanais ? Pan ? Ou TDAH ?
- Je sais pas. Peut-être qu'on se serait mieux compris mais... tu as toujours été tolérant par rapport à tout ça et t'as jamais rien fait de déplacé. Tu m'as même pas engueulé parce que j'avais oublié mes clés, rit-il, imaginant comme Sirius l'aurait maudit à sa place. Et puis je t'aime comme tu es, tes différences c'est des parties de toi et j'ai pas trop envie de t'imaginer autrement.
- Moi non plus. Regulus pris une pause et tourna le dos aux barres cette fois, s'en servant comme dossier, James ne tardant pas à faire de même. Même si tu avais été trans, autiste... même si tu avais eu le même type de personnalité que moi ou un truc comme ça, j'aurais trouvé une faille. Personne peut être comme quelqu'un à cent pour cent. Mais on peut se comprendre. Je sais pas pourquoi je l'ai pas compris c'est peut-être juste Peter ou Remus qui m'ont retourné le cerveau avec leurs-
- Attends quoi ? Peter ? Remus ?
- Peter est venu me mettre en garde contre toi un jour.
- Vraiment ?
- Je l'ai envoyé chier. Comme quoi tu étais "une mauvaise personne" ou une connerie du genre.
- C'est compréhensible, après ce que je lui ai fait...
- Tu vois, ça, c'est la raison pour laquelle tu n'es pas une mauvaise personne, James.
- Et Remus ?
- Remus nous a accusé d'être des pro-mutilations ou un truc du genre en disant que je t'avais attiré là dedans, d'avoir une relation pas assez saine. Enfin, il était en colère mais... quand même.
- Remus a dit ça ?
Regulus acquiesça, les lèvres pincées.
... Remus Lupin qui se plie en quatre pour les autres y compris son petit ami et qui m'a déjà dit mots pour mots "je ne pourrais pas vivre sans Sirius", trouve que MON couple est toxique ?
Il n'était pas en colère juste surpris, et un peu déçu. Son ami n'avait jamais été du genre à faire des reproches aux autres.
- Ne lui en veux pas, je suis sûr qu'il pensait pas à mal... c'est comme nous, il était inquiet, il savait pas comment réagir.
- Je sais.
- Il y a des trucs qu'on refoule tellement qu'ils passent dans nos émotions et qu'ils nous font faire des choses qu'on comprends pas, jusqu'à devenir une partie de nous.
- Tu veux m'en parler ? De Paris ? Ou de tes parents ? proposa James en croisant les doigts pour que ça ne passe pas pour de la curiosité malsaine ou que ça n'empire les choses.
- Non, je veux pas que tu ai a géré ça aussi. décida Regulus. Peut-être un jour, mais, c'est le genre de truc desquels on parle plutôt à un médecin. C'est pas que je te fais pas confiance-
- Je sais. T'inquiètes, il y a aucun problème.
- Je pense pas du tout que tu sois égoïste, tu sais... j'étais mal à ce moment je sais pas pourquoi j'ai dis ça. Maintenant c'est moi qui me sens égoïste, j'ai l'impression de pas être là pour toi. Je suis pas doué our gérer les problèmes, pour...
Il sentit sa voix se briser et ses pensés s'emballer. James l'attira avec prudence contre lui, soulagé de le sentir se laisser faire et de voir un sourire se dessiner sur ses lèvres.
- Je trouve que tu t'en sort bien. assura-t-il.
- Si je m'en sortais bien, on aurait pas rompu.
- Tu voulais que ça se finisse ?
- Non.
- Alors, on peut tout aussi bien revenir sur cette décision, tu crois pas ? osa James, arrachant un nouveau sourire à Regulus. Si tu es prêt.
- Je suis prêt. »
Ils ne purent en dire plus car ils entendirent la porte d'entrée, tout en bas des escaliers, claquer, et son grincement résonner d'étage en étage, jusqu'à eux. De là haut ils pouvaient voir Sirius et Remus devenir le plus en plus grands, leurs voix de plus en plus distinctes. Quel timing.
« Alors ? s'enquièrent-ils de nouveau une fois qu'ils furent arrivé à leurs hauteur.
- C'est une bronchite ! Pas de sida en vue ! annonça Remus, qui reçu un câlin de James en réponse. Par contre le je suis quand même crevé donc je vais dormir, hein, sans offense. Moi aussi je t'aime Prongs mais lâche moi s'il te plait, tu m'étrangles. »
À ses mots il ouvrit la porte de l'appartement, y entrant, muni de la clé de Sirius, pendant que celui-ci souriait, amusé car jetant une autre clé à James qu'il reconnu aussitôt. Il y avait un porte clé dessus, en forme de ballon de basket. C'était la sienne.
« Tu l'as fait exprès, hein ? accusa le garçon à lunettes en récupérant son dû.
- Ça a marché, non ? répondit l'autre, faussement innocent en avisant le peu d'espace qui séparait son frère et son meilleur ami.
- Tu aurais pu faire ça à un autre moment quand même, par respect pour Remus !
- Oh, ça fait une heure qu'on sait que c'est rien, on est allé manger un truc en attendant.
Sirius leva sa main gauche contenant un plat à emporter, un sourire malin aux lèvres.
... Il en reste d'ailleurs, si vous voulez.
- Je te hais » assura James avec une fausse grimace tout en rentrant dans l'appartement, ses clés dans une main, celle de Regulus dans l'autre. Tous souriaient à s'en faire mal aux joues, le soleil les frappa de plein fouet quand ils débarquèrent dans le salon.
Regulus avait perdu son sourire et James avait senti ses doigts se crisper à la mention de nourriture. Il le serra plus fort pour le rassurer. Il trouva le temps de glisser un : « Je suis avec toi. ».
Et le jeune homme n'eut plus peur, parce qu'il savait qu'il avait eut tort, que James le comprenais, qu'il serait là, et qu'avec lui il y arriverait encore mieux. Plus encore, il voulait continuer à vivre et à se battre pour être avec lui. Pour pouvoir manger sans se poser de question, vivre sans vouloir mourir, aller à Paris sans avoir peur et être assez fort pour prendre lui aussi James par la main un jour et savoir lui dire à son tour : Je suis avec toi.
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